Book Review Volume 62:1

Une autre voie pour la gouvernance d’entreprise?

* Professeur à l’Université Laval, Codirecteur du Centre d’Études en Droit Économique (CÉDÉ).

Table of Contents

Recension critique de Lorraine Talbot, Great Debates in Company Law, Londres, Palgrave, 2014, pp 208. ISBN 9780230304451

     Le droit de la gouvernance d’entreprise est à la croisée des chemins[1]. Déjà sérieusement remis en cause au début des années 2000 suite aux scandales des entreprises américaines telles que WorldCom ou Enron[2], le voilà de nouveau sur le devant de la scène comme il l’a finalement souvent été par le passé[3]. Faut-il s’en étonner?

Over the last 10 years, federal regulators have imposed, shareholders have pursued, and companies have voluntarily adopted an array of measures aimed at improving corporate governance of public companies. Despite these efforts—and the changes they have engendered—there is continued debate about the nature of the challenges confronting, and the efficacy of proposed improvements to, our corporate governance system.[4]

La crise économico-financière commencée en 2007–2008, couplée à l’importance prise par les préoccupations sociétales dans la société ces dernières années, ravive le débat sur le sens et le contenu mêmes des règles définissant la gouvernance[5]. Face à une crise de sens de la gouvernance d’entreprise, le droit se trouve interpellé, comme souvent, à chaque soubresaut économique ou scandale[6]. Les rapports internationaux et nationaux[7] ont tous souligné les défaillances de la gouvernance d’entreprise et la nécessité de resserrer le cadre réglementaire. En raison des lacunes et des insuffisances de ce cadre, les débats foisonnent sur les causes de cette défaillance et les solutions à y apporter. Là où « il existe nombre de débats, y compris des débats sur les débats » [notre traduction][8], Company law apporte une contribution précieuse aux discussions sur la gouvernance d’entreprise, tant par son organisation que par ses objectifs, et sur l’encadrement des pouvoirs de la grande entreprise.

      Company law de Lorraine Talbot est un ouvrage publié chez Palgrave dans la collection consacrée aux grands débats du droit (Palgrave Great Debates in Law)[9]. Cette collection vise à apporter aux étudiants un éclairage sur des concepts juridiques et à approfondir des interrogations contemporaines qui traversent le droit. L’objectif est atteint avec cet ouvrage. L’auteure y aborde plusieurs questions fondamentales et actuelles touchant le droit des sociétés et la gouvernance d’entreprise : qu’est-ce qu’une société par actions[10]? Quel est son objectif? En vue de servir quels intérêts une entreprise doit-elle être gérée? Si ces questionnements sont aussi anciens que le droit des sociétés par actions lui-même[11], renvoyant de profundis aux incertitudes entourant la nature juridique de l’entreprise[12], les enjeux demeurent considérables de nos jours. Les réponses à ces questions ont un impact direct sur la composition des organes décisionnels, sur la place respective de chacun de ces organes dans la prise de décision, sur le processus devant être suivi et sur le contenu des décisions d’affaires.

Au plan formel, l’ouvrage de Lorraine Talbot recèle d’indiscutables qualités. La première d’entre toutes est à notre sens d’avoir réussi, en sept chapitres et 188 pages, le tour de force de synthétiser les grands débats qui agitent le droit actuel des sociétés par actions et la gouvernance des entreprises. Par ailleurs, l’auteure ne surcharge pas ses développements d’un nombre trop important de références, ce qui facilite la lecture de l’ouvrage. Il faut également souligner le soin avec lequel professeure Talbot aménage, pour le lecteur, la possibilité de poursuivre ses réflexions en fournissant en fin de chapitre une dizaine de références complémentaires[13]. Enfin, cet ouvrage est rédigé dans un style clair, concis et compréhensible, qui répond parfaitement à l’un des buts que se donne l’auteure : initier les étudiants à une perspective différente du droit des sociétés par actions, amorçant une réflexion dépassant un point de vue strictement technique sur la matière[14]. Le contenu de l’ouvrage dénote un effort pédagogique non négligeable. Pour s’en tenir à une illustration, le chapitre 1 — « What Is the Company and Is Company Law Important? » —, qui traite de la délicate question de la définition de la « société par actions », distingue les modèles économique, organisationnel (lui-même multiple — modèles d’essence libérale, institutionnels et axés sur les salariés) et juridique, offrant par ce moyen aux lecteurs un tableau synthétique et unique des différentes propositions théoriques, en soulignant parallèlement leurs points de convergence et de divergence[15].

Au plan substantiel, les sept chapitres sont reliés entre eux par une même finalité : démontrer le nécessaire rejet de l’approche néo-libérale et le fait que la société par actions peut être conçue comme une « organisation à gérer en prenant en compte les intérêts des personnes affectées par ses opérations et les intérêts de celles qui y participent » [notre traduction][16]. L’auteure explore à travers chacun de ces chapitres une thématique liée à la gouvernance d’entreprise — thématique qui fait écho à l’actualité la plus récente. La définition de la société par actions, le rôle des actionnaires et du conseil d’administration, la composition de ce dernier, l’interrogation de l’effectivité du droit lorsqu’il s’agit de faire respecter les droits de l’homme par des entreprises multinationales et la place de la morale et de la responsabilité sociétale comme instrument de régulation sont autant de sujets traités dans Company law et ce, en passant par des sujets plus originaux (mais qui y trouvent parfaitement leur place), tels l’histoire allemande relative à la place des juifs dans les conseils d’administration des grandes banques avant la Seconde Guerre mondiale[17] ou l’état du système d’éducation aux États-Unis[18].

Le premier chapitre met en perspective les multiples définitions dont la société par actions est l’objet, suivant qu’il est fait appel à l’économique, au politique, aux sciences de l’organisation, ou encore au droit. En dépit de certaines variations, cette définition oscille entre une organisation hiérarchique dirigée par un conseil d’administration et la simple expression d’un marché d’investisseurs faisant appel au contrat et à la négociation individuelle[19]. Les enseignements d’auteurs aussi connus qu’Alchian, Bainbridge, Berle, Blair, Chandler, Coase, Commons, Demsetz, Easterbrook, Fischel, Jensen, Keay, Lazonick, Marx, Meckling, Stout et Williamson sont présentés de manière synthétique à cette occasion. Le chapitre 1 pose dans sa seconde partie la question de savoir si le droit joue un rôle dans la détermination de la nature de la société par actions. Sans donner (malheureusement) de réponse claire (si ce n’est que de ne pas nier ce rôle), Lorraine Talbot souligne que ce sont les implications politiques qui rendent le débat complexe[20].

Le deuxième chapitre revient sur la qualité de propriétaire de l’entreprise qu’auraient les actionnaires[21]. L’auteure critique vertement cette qualité : ils ne sont pas les propriétaires de leur entreprise[22] et ce, que ce soit en raison des droits que le législateur leur accorde ou de leur contribution au capital-actions. Lorraine Talbot le démontre avec les affaires Percival v. Wright[23] et Dodge v. Ford Motor Co.[24] : « en voulant défendre le modèle de l’actionnaire propriétaire, les cours se fondent sur des prémisses qui ne peuvent que mener au constat contraire » [notre traduction][25]. Talbot s’appuie non seulement sur l’argument de Susan Watson[26] pour observer que la source des pouvoirs du conseil d’administration réside dans la loi et non dans les dispositions statutaires (de la même manière finalement que les autres pays de tradition de common law), excluant conséquemment que ne soit rattaché le qualificatif d’agent au conseil d’administration[27], mais établit de surcroît que les actionnaires ne possèdent que des droits d’investisseurs externes et « non des pouvoirs correspondants à ceux de propriétaires de ces droits » [notre traduction][28]. Enfin, Talbot qualifie l’argument voulant que les actionnaires contribuent au capital-actions en contrepartie de droits de propriété comme étant fallacieux « puisque règle générale, les actionnaires ne contribuent pas au capital de la société » [notre traduction][29], à l’instar de ce que met en lumière l’accroissement impressionnant des politiques de rachats d’actions des entreprises.

Le troisième chapitre poursuit les développements du chapitre 2 en approfondissant la critique de la légitimité des initiatives réglementaires récentes renforçant les prérogatives des actionnaires[30]. Lorraine Talbot n’y voit rien de moins qu’un scénario veblenien de type « something for nothing »[31]. Le renforcement des pouvoirs des actionnaires s’appuie sur une logique contradictoire parfaitement mise en lumière par l’auteure en ces mots :

[e]n remplaçant l’ancien modèle de primauté actionnariale qui a pour objectif l’augmentation constante du nombres d’actionnaire, [les consultations européennes cherchent à] encourager une gouvernance d’entreprise moins centrée sur les actionnaires; ce renversement curieux perçoit plutôt les actionnaires comme se sacrifiant pour l’entreprise [notre traduction].[32]

Dans le même sens, l’auteure fustige la croyance dans le Stewardship Code[33], qui édicte des principes et des guides de bonne pratique à l’attention des investisseurs institutionnels qui détiennent aujourd’hui la majorité des actions des particuliers et des entreprises. En effet, le comportement des investisseurs institutionnels est à l’opposé des recommandations du code britannique (oscillant entre une passivité transparente et une activité trop court-termiste)[34] et la réforme intervenue en 2012 pour l’améliorer ne s’explique que par le décalage entre croyance (activisme positif) et réalité (passivité de complaisance). Lorraine Talbot conteste aussi la pertinence du say on pay[35], avançant que la collusion entre dirigeants et actionnaires rend le contrôle sur ces derniers illusoires[36]. Le rapport final Kay[37] est l’objet de la seconde partie de ce chapitre[38]. Cet influent rapport, dont le gouvernement britannique a adopté les recommandations tout en laissant une large place à l’autorégulation, s’est penché sur la question d’une évolution trop importante du Royaume-Uni en faveur du court-termisme. Alors que Lorraine Talbot approuve l’analyse, faite dans ce rapport, des relations entre marché financier et gouvernance d’entreprise (notamment l’existence d’une trop longue chaîne d’investissements appelant l’intervention de beaucoup d’intermédiaires et donnant une grande importance aux incitatifs), elle considère que c’est une erreur de postuler que les actionnaires sont intéressés par une perspective à long-terme[39].

Le quatrième chapitre se penche sur le conseil d’administration dont l’existence constituerait à elle-seule « une manifestation de la nature limitée de la propriété des actionnaires » [notre traduction][40]. Après s’être appuyée sur les écrits de Stephen Bainbridge[41] pour justifier l’existence du conseil d’administration en tant qu’organe de contrôle et de gestion des conflits potentiels[42], Lorraine Talbot démontre à travers l’histoire allemande de la place des juifs dans les conseils de surveillance[43] et, plus récemment, à travers la féminisation des conseils[44], que la position socio-économique et l’identité des acteurs exercent une forte influence sur les pouvoirs et les décisions exercés par le conseil, de même que sur les réformes à venir portant sur sa composition et pour lesquelles elle se montre pessimiste. Ainsi, contrairement aux États-Unis, l’histoire allemande montre que « [l]es conseils d’administration n’exerçaient pas leurs pouvoirs dans le but de promouvoir l’intérêt des banques. […] La réticence des conseils allemands, qui les distingue de leurs contreparties américaines à cet égard, semble prendre racine dans l’anti-sémitisme qui tenaillait alors l’Allemagne » [notre traduction][45]. L’auteure conclut un peu plus loin en ces termes : « [l]es banquiers juifs ont en ce sens probablement contribué à déconstruire les préjugés anti-sémitiques les représentant comme des usuriers impitoyables et sans âme » [notre traduction][46].

Le cinquième chapitre élargit l’horizon de nouvelles perspectives en commençant par la triste observation que

human rights have not shaped companies to any significant degree. Instead human rights themselves are bent to the shape of financial corporate goals. The demands put upon companies in respect of human rights are little more than paper responses, and in many ways, […] human rights initiatives have further enabled companies to act with impunity, particularly in the developing world.[47]

Malgré l’existence de l’initiative UN Global Compact[48] ou des travaux menés par John Ruggie en 2008[49] et en 2011[50], Talbot souligne — de concert avec une grande partie de la doctrine — que le problème fondamental demeure que les sociétés par actions sont pensées en termes politiques comme étant des institutions « privées », leur taille et leur poids économique considérés comme accessoires[51], d’où découle l’idée que les normes internationales ne devraient passer que par le filtre des États. Les multinationales se retrouvent de fait en situation d’impunité, dispensée qu’elles sont de respecter le droit international et les normes nationales censées régir l’espace où elles se déploient. Le droit est pointé du doigt pour sa non-effectivité. Quand bien même ce problème d’effectivité du droit serait résolu, l’auteure évoque l’insuffisance de la seule approche des droits de l’homme face à ce qui motive le plus les entreprises : l’exploitation des salariés[52].

Intitulé « Can Companies be Moral? And the Role of Corporate Social Responsibility », le chapitre 6 revient sur la financiarisation croissante des entreprises et le phénomène d’extraction de valeurs qui en a résulté, entraînant avec elle la disparition progressive du consensus politique en faveur des salariés[53], et mettant en lumière les limites d’une démarche volontaire de responsabilité sociétale[54]. À cet égard, elle constate qu’« une responsabilité sociétale de nature obligatoire pourrait concourir à offrir le soutient et les conseils nécessaires à cette fin » [notre traduction][55].

Le septième et dernier chapitre aborde la question de savoir ce que devrait être la société par actions. Dans cette partie, Lorraine Talbot fait une double proposition autour d’une idée-force : abandonner la conception d’essence néo-libérale. La double proposition consiste soit à redessiner l’entreprise autour d’une orientation salariale[56], soit à considérer l’entreprise comme une ressource possédée en commun[57], tel que le propose le professeur Simon Deakin[58] sur la base des travaux d’Elinor Ostrom[59].

L’ouvrage de Talbot propose une vision personnelle du droit des sociétés et de la gouvernance d’entreprise. En dépit des qualités formelles et substantielles de son ouvrage, il ne peut être caché qu’elle y défend une vision partisane. Company law exprime un point de vue clairement affiché. Par le passé, l’auteure a déjà exprimé sa rupture avec le dogme dominant des discours sur la gouvernance d’entreprise :

I show the negative impact of shareholder primacy and argue that empowering shareholders—particularly where the only shareholders with significant economic power are institutions—is a retrograde and populist step that will merely amplify the damage caused by shareholder primacy governance.[60]

Il y a deux ans, Lorraine Talbot a d’ailleurs publié chez Routledge un ouvrage dans lequel elle défendait une vision humaniste de la gouvernance d’entreprise en plaçant les salariés au centre du jeu[61]. L’ouvrage propose d’ailleurs une sélection de références choisie en fonction de l’orientation de l’auteure. Si la collection dans lequel s’inscrit l’ouvrage ne se prêtait pas à l’intégration d’un nombre trop abondant de références, certains ouvrages et articles contraires à la thèse de l’auteure font défaut et auraient pu être évoqués. Enfin, Company law fait à notre sens trop peu de cas du droit comparé. Bien que le choix du droit anglais soit légitime et s’explique au regard du public ciblé, il est dommage que l’ouverture à d’autres systèmes juridiques (comme par exemple le système des pays de tradition civiliste) ait été peu pratiquée. Les questionnements sont souvent identiques et les législateurs ont été relativement actifs[62].

      Company law fait partie d’un courant de pensée doctrinal qui parcourt le droit des sociétés depuis nombre d’années, mais qui demeure dans l’ombre d’un autre courant qui s’est imposé dans les sphères universitaires, praticiennes et entrepreneuriales : le courant néolibéral, analysant l’entreprise comme un nœud de contrats et dont la gouvernance s’oriente autour de la satisfaction de l’intérêt des actionnaires, objectif auquel le droit doit contribuer. L’ouvrage de Talbot s’inscrit sans ambages dans la lignée d’écrits d’autres juristes qui proposent une autre voie à la gouvernance, juristes qui intensifient leurs réflexions depuis quelque temps de part et d’autre de l’Atlantique, heurtés sans aucun doute dans leur conviction profonde par le caractère protéiforme d’une crise aux conséquences aussi dévastatrices qu’un tsunami et face à laquelle l’arsenal réglementaire semble incomplet ou inadéquat. Citons à titre d’exemples les auteurs contemporains suivants : Claude Champaud[63], Isabelle Corbisier[64], Didier Danet[65], Simon Deakin[66], Kent Greenfield[67], Andrew Keay[68], Catherine Malecki[69], David Millon[70], Lawrence Mitchell[71], Beate Sjåfjell[72], Lynn Stout[73], ou encore Alain Supiot[74]. Si l’ensemble de ces auteurs ne se revendique pas d’une même école de pensée (quoiqu’un progressisme certain les caractérise), leurs travaux convergent tous à donner un sens différent à la gouvernance d’entreprise[75] : une gouvernance humaine et humaniste, participative et procédurale, où l’entreprise ne se résume pas à un jeu de contrats et se construit autour de valeurs promouvant le long terme. Company law enrichit ce courant de pensée de deux manières. D’une part, l’ouvrage adopte une lecture différente des règles et de la doctrine qui sert traditionnellement de fondement à la pensée néolibérale. D’autre part, cet ouvrage confirme que, dans une matière au corpus théorique d’origine anglo-saxonne[76] dans lequel les règles de gouvernance se retrouvent construites autour des actionnaires[77], il est possible de dessiner une gouvernance d’entreprise différente, faisant de l’entreprise une institution encastrée dans la société.

Comme le souligne Marsden, il convient assurément de travailler afin de

mieux comprendre les forces économiques, sociales et politiques qui œuvrent en arrière-scène des nouveaux lieux de gouvernance, de mieux comprendre comment elles interagissent, et ce, afin d’être plus à même de les harmoniser et de découvrir où le besoin d’une intervention législative se fait le plus pressant [notre traduction].[78]

Company law travaille précisément en ce sens en rappelant le rôle du droit[79]. « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde [des sociétés et de la gouvernance] »[80], c’est ce qu’explique avec panache Lorraine Talbot aux étudiants (et futurs juristes) à l’occasion de son ouvrage Company law.

                       

*     Professeur à l’Université Laval, Codirecteur du Centre d’Études en Droit Économique (CÉDÉ).

Ó Ivan Tchotourian 2016

Citation: (2016) 62:1 McGill LJ 273 — Référence : (2016) 62:1 RD McGill 273

[1]     À propos des liens entre droit et gouvernance d’entreprise, voir E Norman Veasey, « The Emergence of Corporate Governance as a New Legal Discipline » (1993) 48:4 Bus Lawyer 1267.

[2]     Voir par ex Douglas M Branson, « Enron—When All Systems Fail: Creative Destruction or Roadmap to Corporate Governance Reform? » (2003) 48:4 Vill L Rev 989; Jeffrey N Gordon, « Governance Failures of the Enron Board and the New Information Order of Sarbanes-Oxley » (2003) 35:3 Conn L Rev 1125; Douglas G Baird et Robert K Rasmussen, « Four (or Five) Easy Lessons From Enron » (2002) 55:6 Vand L Rev 1787.

[3]     Pour des présentations historiques de l’évolution des règles de gouvernance d’entreprise, voir par ex Brian R Cheffins, « The History of Corporate Governance » dans Mike Wright et al, dir, The Oxford Handbook of Corporate Governance, Oxford University Press, 2013, 46 aux pp 47 et s; Randall K Morck, dir, A History of Corporate Governance around the World, Chicago, University of Chicago Press, 2007 aux pp 37 et s; Paul Frentrop, A History of Corporate Governance, 1602–2002, Amsterdam, Deminor, 2002 aux pp 7 et s.

[4]     Suneela Jain et al, « Principal Issues Affecting the Future of Corporate Governance » (2014) 22:3 Corporate Governance Advisor 9 à la p 9.

[5]     Voir par ex William Sun, Jim Stewart et David Pollard, dir, Corporate Governance and the Global Financial Crisis: International Perspectives, Cambridge (R-U), Cambridge University Press, 2011; PM Vasudev et Susan Watson, dir, Corporate Governance after the Financial Crisis, Cheltenham (R-U), Edward Elgar, 2012; Véronique Magnier, dir, La gouvernance des sociétés cotées face à la crise : pour une meilleure protection de l’intérêt social, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 2010.

[6]     Voir notamment Jennifer G Hill, « Regulatory Responses to Global Corporate Scandals » (2005) 23:3 Wis Intl LJ 367.

[7]     Voir par ex É-U, Financial Crisis Inquiry Commission, The Financial Crisis Inquiry Report: Final Report of the National Commission on the Causes of the Financial and Economic Crisis in the United States, Washington, DC, US Government Printing Office, 2011; Grant Kirkpatrick, The Corporate Governance Lessons from the Financial Crisis, Paris, OCDE, 2009; CE, Groupe de Larosière, The High-Level Group on Financial Supervision in the EU, Bruxelles, CE, 2009; R-U, A Review of Corporate Governance in UK Banks and Other Financial Industry Entities: Final Recommendations, Londres, Walker Review Secretariat, 2009; Association of Chartered Certified Accountants, Climbing Out of the Credit Crunch, Londres, Association of Chartered Certified Accountants, 2008.

[8]     Lorraine Talbot, Great Debates in Company Law, Londres, Palgrave, 2014 à la p ix [Talbot, Company Law].

[9]     Professeure de droit à l’Université de York en Angleterre et Leverhulme Research Fellow. Son projet de recherche subventionné de 2015 à 2017 est intitulé « Making the Company Fit for Social Purpose ».

[10]         Cette question dépasse la sphère juridique. Sous le vocable firm, l’entreprise est en effet devenue un objet propre d’analyse pour les économistes à partir des années 1970. Les travaux de Ronald Coase sont à cet égard fondamentaux (voir notamment RH Coase, « The Nature of the Firm » (1937) 4:4 Economica (New Series) 386). Il est intéressant d’observer que le mot firm a été employé dans le discours économique relatif à la gouvernance d’entreprise comme équivalent à celui de corporation, bien que company ou business corporation aient des significations différentes. Sur ce problème de traduction, voir Ivan Tchotourian, « L’art de la juste équivalence en droit : discussion autour du mot “corporate” de l’expression corporate governance » (2015) 40:2 RRJ  455. Pour la suite de nos propos, nous adopterons les expressions « société par actions » et « entreprise » sans distinction.

[11]         Voir Jean J du Plessis, « Corporate Law and Corporate Governance Lessons from the Past: Ebbs and Flows, but Far from “The End of History…” » (2009) 30 Company Lawyer 43 et 71; Reuven S Avi-Yonah, « The Cyclical Transformations of the Corporate Form: A Historical Perspective on Corporate Social Responsibility » (2005) 30:3 Del J Corp L 767.

[12]         En effet, le statut de la société par action tangue entre les concepts de contrat, chose, personne et gouvernement (voir Jean-Philippe Robé, « The Legal Structure of the Firm » (2011) 1:1 Accounting, Economics & L, art 5 aux pp 10 et s; William W Bratton Jr, « The New Economic Theory of the Firm: Critical Perspectives from History » (1989) 41:6 Stan L Rev 1471).

[13]         Seuls les chapitres 5 et 6 font exception en comportant davantage de références.

[14]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp vii, x.

[15]         Voir ibid aux pp 2–18.

[16]         Ibid à la p 163.

[17]         Voir ibid aux pp 83–95

[18]         Voir ibid à la p 176.

[19]         Voir ibid à la p 1.

[20]         Voir ibid à la p 24 (« it is important to recognise the political imperative of the various positions »).

[21]         Voir généralement Jean-Philippe Robé, « À qui appartiennent les entreprises? » [2009] 3 Le débat 32.

[22]         En accord avec Christophe Clerc, « Questioning the Legitimacy of Shareholder Power » dans Jean-Philippe Touffut, dir, Does Company Ownership Matter?, Cheltenham (RU), Edward Elgar, 2009, 92 aux pp 96 et s.

[23]         [1902] 2 Ch 421, 18 TLR 697.

[24]         170 NW 668, 204 Mich 459 (Sup Ct1919).

[25]         Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 27–38 (citation à la p 38).

[26]         Voir Susan Watson, « Derivation of Powers of Boards of Directors in UK Companies » dans Vasudev et Watson, supra note 5, 47.

[27]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 39–43.

[28]         Ibid à la p 43.

[29]         Ibid à la p 44.

[30]         Voir généralement Georges Ripert, Aspects juridiques du capitalisme moderne, 2e éd, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1951 aux pp 107–09; Jean Peyrelevade, Le gouvernement d’entreprise ou les fondements incertains d’un nouveau pouvoir, Paris, Économica, 1999 aux pp 1–4 (pour une critique de la conception de la primauté des actionnaires dans la gouvernance de la société par action).

[31]         Talbot, Company Law, supra note 8 à la p 50.

[32]         Ibid à la p 54.

[33]         Voir R-U, Financial Reporting Council, The UK Stewardship Code, Londres (R-U), Financial Reporting Council, 2012.

[34]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 54–59.

[35]         Voir ibid à la p 60. Le Royaume-Uni a en effet introduit dans son droit des sociétés le vote des actionnaires sur la rémunération des dirigeants, réforme que Talbot qualifie d’« indésirable » [notre traduction] (ibid).

[36]         Voir ibid aux pp 59–61.

[37]         Voir R-U, Department for Business, Innovation and Skills, The Kay Review of UK Equity Markets and Long-Term Decision Making: Final Report, par John Kay, Londres, 2012.

[38]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 61 et s.

[39]         Voir ibid à la p 75.

[40]         Ibid à la p 77.

[41]         Voir Stephen M Bainbridge, « Why a Board? Group Decisionmaking in Corporate Governance » (2002) 55:1 Vand L Rev 1.

[42]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 79–83.

[43]         Voir ibid aux pp 83–95.

[44]         Voir ibid aux pp 95–107.

[45]         Ibid à la p 95.

[46]         Ibid à la p 107.

[47]         Ibid aux pp 108–09.

[48]         Ce pacte est un engagement facultatif des grandes entreprises (au nombre de 6 258 en janvier 2012) à aligner leurs opérations et leurs stratégies sur dix principes universellement acceptés touchant les droits de l’homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption et à effectuer une communication annuelle sur les progrès accomplis. Pour plus d’informations sur le Pacte mondial, voir United Nations Global Compact, en ligne : <www.unglobalcompact.org>; United Nations Global Compact, Guide to Corporate Sustainability: Shaping a Sustainable Future, New York, NU, 2014). Ce pacte a connu des prolongements juridiques grâce à l’Assemblée générale des Nations Unies qui a officiellement reconnu le pacte mondial (voir notamment Vers des partenariats mondiaux, Rés AG 55/215, Doc off AG NU, 55e sess, Doc NU A/RES/55/215 (2000); Vers des partenariats mondiaux, Rés AG 56/76, Doc off AG NU, 56e sess, Doc NU A/RES/56/76 (2001); Vers des partenariats mondiaux, Rés AG 62/211, Doc off AG NU, 62e sess, Doc NU A/RES/62/211 (2007)).

[49]         Voir Rapport du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, M. John Ruggie, Doc off CDH NU, 8e sess, Doc NU A/HRC/8/5 (2008).

[50]         Voir Rapport du Représentant Spécial du Secrétaire générale chargé de la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, John Ruggie : Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme : mise en œuvre du cadre de référence « protéger, respecter et réparer » des Nations Unies, Doc off CDH NU, 17e sess, Doc NU A/HRC/17/31 (2011).

[51]         Voir Talbot, Company Law, supra note 8 à la p 109.

[52]         Voir ibid aux pp 135–36.

[53]         Voir ibid aux pp 141 et s.

[54]         Voir ibid aux pp 153 et s.

[55]         Ibid à la p 161.

[56]         Voir ibid aux pp 163 et s.

[57]         Voir ibid aux pp 182 et s.

[58]         Voir Simon Deakin, « The Corporation as Commons: Rethinking Property Rights, Governance and Sustainability in the Business Enterprise » (2012) 37:2 Queen’s LJ 339.

[59]         Voir Elinor Ostrom, Governing the Commons: The Evolution of Institutions for Collective Action, Cambridge (R-U), Cambridge University Press, 1990.

[60]         Lorraine E Talbot, « Shareholder Entitlement, Shareholder Primacy, Shareholder Empowerment » (2010) University of Warwick School of Law Document de travail No 2010-10 à la p 3, en ligne : <http://ssrn.com/abstract=1605252>. Elle est également l’auteure de plusieurs autres articles de doctrine invitant à une remise en cause des orientations contemporaines de la gouvernance d’entreprise (voir notamment Lorraine Talbot, « The Hegemony of Shareholder Value in the Anglo-American Corporation », (2009), en ligne : <http://ssrn.com/abstract=1396315>; LE Talbot, Critical Company Law, New York, Routledge-Cavendish, 2008 au ch 3).

[61]         Voir Lorraine Talbot, Progressive Corporate Governance for the 21st Century, Abingdon, Routledge, 2013 aux pp xx–xxi.

[62]         Voir par ex Alain Couret, « La structure juridique des entreprises (corporate governance) » (2002) 16:2 RIDE 339. Le professeur Alain Couret a souligné, au début des années 2000, que le législateur avait opéré en matière de gouvernement d’entreprise « une restauration de la maîtrise du processus de production des normes » (ibid à la p 352). Cette tendance semble se confirmer dans plusieurs juridictions : aux États-Unis, voir le Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act, Pub L No  111-203, 124 Stat 1376 (2010). En France et en Belgique, voir Ivan Tchotourian, « Gouvernance d’entreprise en Belgique : la nouvelle donne » (2011) 63:2 RIDC 403; voir aussi Chris Pierce, Corporate Governance in the European Union, Kent, Global Governance Services, 2010 (mettant en lumière les évolutions à l’œuvre à l’échelon européen et au sein des pays de l’Union européenne).

[63]         Voir par ex Claude Champaud, dir, L’entreprise dans la société du 21e siècle, Bruxelles, Larcier, 2013; Claude Champaud, Manifeste pour la doctrine de l’entreprise : sortir de la crise du financialisme, Bruxelles, Larcier, 2011. Pour une référence plus ancienne, voir Claude Champaud, Le pouvoir de concentration de la société par actions, Paris, Sirey, 1962.

[64]         Voir par ex Isabelle Corbisier, « L’entreprise : quelles sont ses valeurs fondatrices et ses finalités? » dans Nicolas Thirion, dir, Crise et droit économique, Bruxelles, Larcier, 2014, 175. Voir aussi Isabelle Corbisier, La société : contrat ou institution? Droits étasuniens, français, belge, néerlandais, allemand et luxembourgeois, Bruxelles, Larcier, 2011.

[65]         Voir par ex Didier Danet, « Misère de la corporate governance » (2008) 22:4 RIDE 407.

[66]         Voir par ex Simon Deakin, « The Juridical Nature of the Firm » dans Thomas Clarke et Douglas Branson, dir, The SAGE Handbook of Corporate Governance, Londres, SAGE, 2012, 113.

[67]         Voir par ex Kent Greenfield, « Proposition: Saving the World with Corporate Law » (2008) 57:4 Emory LJ 947; Kent Greenfield, « New Principles for Corporate Law » (2005) 1:1 Hastings Business LJ 87.

[68]         Voir par ex Andrew Keay, The Corporate Objective: Corporations, Globalisation and the Law, Cheltenham, Edward Elgar, 2011.

[69]         Voir par ex Catherine Malecki, Responsabilité sociale des entreprises : perspectives de la gouvernance d’entreprise durable, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 2014.

[70]         Voir par ex David Millon, « Why Is Corporate Management Obsessed with Quarterly Earnings and What Should Be Done About It? » (2002) 70:5–6 Geo Wash L Rev 890; David Millon, « New Directions in Corporate Law: Communitarians, Contractarians, and the Crisis in Corporate Law » (1993) 50:4 Wash & Lee L Rev 1373.

[71]         Voir par ex Lawrence E Mitchell, Corporate Irresponsibility: America’s Newest Export, New Haven, Yale University Press, 2001; Lawrence E Mitchell, dir, Progressive Corporate Law, Boulder, Westview Press, 1995.

[72]         Voir Beate Sjåfjell et Benjamin J Richardson, dir, Company Law and Sustainability: Legal Barriers and Opportunities, Cambridge, Cambridge University Press, 2015. Voir aussi Beate Sjåfjell, Towards A Sustainable European Company Law: A Normative Analysis of the Objectives of EU Law, with the Takeover Directive as a Test Case, Austin, Wolters Kluwer, 2009.

[73]         Voir par ex Lynn Stout, The Shareholder Value Myth: How Putting Shareholders First Harms Investors, Corporations, and the Public, San Francisco, Berrett-Koehler, 2012; Lynn A Stout, « Why We Should Stop Teaching Dodge v. Ford » (2008) 3:1 Virginia L & Business Rev 163; Lynn A Stout, « Takeovers in the Ivory Tower: How Academics Are Learning Martin Lipton May be Right » (2005) 60:4 Business Lawyer 1435; Lynn A Stout, « Share Price as a Poor Criterion for Good Corporate Law » (2005) 3:1 Berkeley Business LJ 43; Lynn A Stout, « Bad and Not-So-Bad Arguments for Shareholder Primacy » (2002) 75:5 S Cal L Rev 1189.

[74]         Voir par ex Alain Supiot, La Gouvernance par les nombres, Fayard, 2015; Alain Supiot, dir, L’entreprise dans un monde sans frontières : perspectives économiques et juridiques, Paris, Dalloz, 2015.

[75]         Voir Ivan Tchotourian, « Embrace the Coming Changes in Corporate Governance: Lessons from Developments in Corporate Law—A Comparative View » (2014) 65 Revista da Faculdade de Direito da UFMG 321 aux pp 331 et s.

[76]         Voir Klaus J Hopt, « Comparative Corporate Governance: The State of the Art and International Regulation » (2011) 59:1 Am J Comp L 1 à la p 3.

[77]    La place centrale de l’actionnaire est issue d’une vision ancienne de l’entreprise bien connue des juristes de common law : celle de l’aggregate theory. Cette théorie ne voit dans la société par actions qu’un simple regroupement des actionnaires qui la composent. Jeu contractuel, la société est alors au service de l’intérêt de ses membres. Aux États-Unis, l’opinion rendue par le juge Marshall dans l’affaire Bank of the United States v Deveaux, 9 US (5 Cranch) 61 (1809) illustre ce courant de pensée.

[78]         Chris Marsden, « Economics, the Financial Crisis and Corporate Responsibility » (2010) 10:4 Corporate Governance 360 à la p 363.

[79]         Talbot, Company Law, supra note 8 aux pp 23 et s.

[80]         Nous nous inspirons d’un discours de Gandhi.

Cultural Genocide: Legal Label or Mourning Metaphor? in this issue

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