La ditermination du prix dans la Convention
de Vienne, le U. C. C. et le droitfranfais :
critique de la premiere dicision relative aux
articles 14 et 55 de la Convention de Vienne
Delphine Lecossois”
Dans cette chronique de jurisprudence, l’auteure
analyse une des premieres d6cisions rendues en vertu
de Ia Convention de Vienne sur la vente internatio-
nale de marchandises. En effet, l’arr& Pratt & Whit-
ney c. Malev Hungarian Airlines fut le premier h in-
terpr6ter les articles 14 et 55 de la Convention, les-
quels
contradiction.
L’auteure examine d’abord le probl~me pos6 par cette
affaire, puis Ia solution apportde par la cour hon-
groise. Elle critique ensuite cette d6cision au regard
de l’esprit de la Convention et affirme que le droit
national des
influencer
l’interpr~tation du document.
renferment une apparente
ttats ne devrait pas
Dans une deuxi~me partie, l’auteure envisage
‘hypothse ot) cette affaire aurait 6t6 porte devant
un juge d’un autre pays, soit les Etats-Unis ou la
France. Dans le premier cas, l’auteure s’attarde 4
l’interpr6tation du Uniform Commercial Code et tente
de d6terminer
influenc6
l’application de Ia Convention. Ensuite, l’auteure
envisage l’interprdtation qu’un juge fran~ais aurait
faite de la Convention dans cette affaire. Elle conclut
que l’interpr6tation aurait W compl~tement diffd-
rente de celle du juge am6ricain et d~plore ce manque
d’uniformit6.
comment
il
aurait
En conclusion, ‘auteure soutient que l’avenir de
]a Convention est compromis si les juges ne modi-
fient pas leur approche et continuent d’accorder une
trop grande importance h leur droit national.
In this case comment, the author analyzes one
of the first judgments rendered under the Vienna
Convention on the International Sale of Goods. Pratt
& Whitney v. Malev Hungarian Airlines was, in fact,
the first judgment to interpret the apparent contradic-
tion between articles 14 and 55 of the Convention.
The author first examines the problem posed by this
case and the solution offered by the Hungarian court.
She, then, critically assesses the decision in light of
the spirit of the Convention and affirms that the law
of individual states should not influence the interpre-
tation of the international document.
In order to develop her thesis, the author imag-
ines the case as it would have been decided by both
U.S. and French courts. In the first analysis, the
author considers
interpretations of the Uniform
Commercial Code in an attempt to determine how
they would influence the application of the Conven-
tion. The author, then, attempts to anticipate the in-
terpretation a French court would give to the Con-
vention. She concludes that the two interpretations
would differ significantly and criticizes this potential
lack of uniformity.
In conclusion, the author predicts that the future of
the Convention is compromised if judges do not modify
the approach of according excessive importance to their
own domestic, national law in interpreting an interna-
tional convention.
. Avocat au Barreau de la Cour d’appel de Paris, Delphine Lecossois est 6galement ‘auteure d’une
th~se intitulde
t6 d’ttudes Sup6rieures et de la Recherche N titre d’exigence partielle pour l’obtention du dipl6me de
maitrise de droit (L.L.M.) de l’Universit McGill en 1995.
Revue de droit de McGill
McGill Law Journal 1996
Mode de r6f6rence: (1996) 41 R.D. McGiU 513
To be cited as: (1996) 41 McGill L.J. 513
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
Introduction
Sommaire
I. L’affaire Pratt & Whitney c. Malev Hungarian Airlines : premiere interpr6-
tation des articles 14 et 55 de la Convention
A. Contenu de l’affaire Pratt & Whitney
1.
2.
Les faits
Les d6cisions
a.
b.
Les principaux arguments en presence
Les dicisions
B. Critique de la dicision au regard de la doctrine portant sur la Convention
1.
2.
La doctrine des articles 14 et 55
La n6cessit6 d’une interpr6tation uniforme des articles 14 et 55 par
les juges nationaux
a.
b.
Critique des dicisions hongroises
Une volont6 d’interprdtation uniforme
H. Solution de l’affaire Pratt & Whitney dans un autre 1ttat : critique d’une
jurisprudence nationale
A. L’affaire Pratt & Whitney portie devant un juge amiricain
Le texte
Avolution du droit: nouveau texte, nouveaux principes
Le U.C.C. et son interpr6tation
a.
b.
Applications nationale et intemationale
Mise en jeu interne du U.C.C.
a.
Interpretation de la Convention par un juge americain
b.
B. L’affaire Pratt & Whitney portge devant unjugefrangais
Les textes applicables et la jurisprudence
a.
b.
Les textes : l’eivolution
Evolution de la jurisprudence franfaise
i.
La jurisprudence des <
1971
La jurisprudence de
ii.
Application de la jurisprudence frangaise aux contrats intematio-
naux
a.
b.
Pratt & Whitney et lejugefrangais
Vers une iventuelle dvolution
1.
2.
1.
2.
Conclusion : avenir des articles 14 et 55 de la Convention
19961
Introduction
D. LEcossoIs – LA D&TERMINATION D U PRIX
La common law’ et le droit civil frangais2 ont chacun un droit des contrats au
contenu variable : certaines r~gles se ressemblent tandis que d’autres divergent. A
une pratique commerciale identique, le droit frangais et le droit am6ricain apportent
des r6ponses diff&entes notamment quant au prix. Le Uniform Commercial Code
(U.C.C.) a introduit la pratique des contrats sans prix ou <
l’oppos6, la Cour de cassation rejette cat6goriquement toute modification de sa ju-
risprudence quand h la n6cessit6, presque visc~rale, d’un prix d~termin6 ou tout au
moins d6terminable.
A l’heure de l’internationalisation ou de la mondialisation des dchanges com-
merciaux, ces diff6rences peuvent avoir une influence significative sur le d6velop-
pement des 6changes internationaux ainsi que sur le choix de la loi applicable.
C’est pourquoi un effort d’harmonisation a 6t6 entrepris pour les contrats interna-
tionaux’ et ce d~s 19295, le but 6tant <
La d6finition du prix repr6sentait un point de d6part commun. Le prix constitue
la somme d’argent due par 1’acqu6reur au vendeur’ ou, de fagon plus g6n6rale, la
<
la somme que doit payer l’acheteur est stipul6e au contrat. Le prix est r6put6 d6-
‘ Sous I’appellation juridique de common law il ne sera fait r~fdrence ici qu’au droit am~ricain tel
que d6fini dans le U.C.C. 1-103 (1995) pour la vente et dans les principes de common law pour les
autres contrats non couverts par le U.C.C. Concemant ces demiers, il est A noter que chaque ttat a
son droit des contrats. Sur le prix, les divergences ne sont gu~re significatives (hormis le cas de la
Louisiane qui ne sera pas 6tudi6 ici).
2 En raison de diff&ences pouvant exister entre les syst~mes de droit civil, cette 6tude se limitera
exclusivement au droit franais. La comparaison avec d’autres syst6mes n’est pas sans int6rt et sur
ce point la lecture de l’6tude de D. Tallon, La ditermination du prix dans les contrats –
etude de
droit compari, Paris, P&lone, 1989 est conseill6e.
3 Et par voie de consdquence, on constate l’adoption, dans les contrats internationaux, de clauses de
fixation aussi vari6es, sinon plus, que dans les droits nationaux (voir par exemple la clause de la
meilleure offre ou du client le plus favoris6 qui rappelle 6trangement les formules de l’Accord ggndral
sur les tarifs douaniers et le commerce, 30 octobre 1947, R.T. Can. 1947 n 27, 55 R.T.N.U. 187,
art. 1). Voir aussi Talon, ibid. h la p. 57.
‘ Originellement, cet effort d’harmonisation avait 6galement 6t6 envisag6 au niveau des contrats na-
tionaux. Cet espoir s’est rapidement r6v6l6 illusoire (voir C.M. Bianca et M.-J. Bonell, Commentary
on the International Sales Law: The 1980 Vienna Sales Convention, Milan, Giuffr , 1987).
5 La n6cessit6 d’une unification a 6t6 soulign6e par l’Institut international pour l’unification du droit
priv6 (
6 Bianca et Bonell, supra note 4 ? la p. 9.
Voir G. Comu, dir., Vocabulaire Juridique, Paris, Presses universitaires de France, 1994 1 la p.
634. Uorigine du mot prix provient du latin <
sions comme le <
‘ Voir Tallon, supra note 2 au n 1.0.0.01.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
terminable lorsque les parties ne veulent pas s’engager sur un prix dont le montant
est d’ores et d6jt fix6 lors de la vente. Dans ce dernier cas, la fixation du prix doit
se faire en vertu des clauses du contrat par voie de relation avec des 6I6ments qui ne
ddpendent plus de la volont6 de l’une ou l’autre des parties9 ou s’ils d6pendent de
l’une des parties, sa fixation doit se faire dans le respect de l’obligation d’agir de
bonne foi’. Un autre point commun est la reconnaissance du principe de
l’autonomie de la volont6″.
Par contre, les divergences apparaissent d~s qu’il s’agit de qualifier le prix : est-
ce une clause essentielle du contrat dont l’absence entraine la nullit6 ? S’il s’agit
d’une clause essentielle, s’agit-il de la cause, de l’objet ou de l’obligation de
1’acheteur ? En common law, contrairement au droit frangais, le prix n’est pas un
616ment essentiel du contrat.
L’objectif d’harmonisation de la qualification du prix a conduit notamment ht
l’adoption de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internatio-
nale de marchandises’2. Les articles 14 et 55 de la Convention traitent du prix et re-
fltent en quelque sorte l’opposition existant entre le droit frangais et le U.C.C.
L’article 14 se situe dans la deuxi~me partie relative
]a formation du contrat de
vente, et plus pr6cis6ment t l’offre, tandis que l’article 55 est int6gr6 dans la troi-
si~me partie relative aux effets du contrats et plus pr6cis6ment aux obligations de
l’acheteur. Le premier paragraphe de l’article 14 pr6voit que :
Une proposition de conclure un contrat adress6e A une ou plusieurs personnes
d6termin6es constitue une offre si ele est suffisamment pr6cise et si elle indi-
que la volont6 de son auteur d’8tre i6 en cas d’acceptation. Une proposition est
suffisammentprdcise lorsqu’elle d6signe les marchandises et, express6ment ou
implicitement,fixe ]a quantit6 et le prix ou donne des indications permettant de
les diterminer [nos italiques] 3.
L’article 55 stipule que :
Si la vente est valablement conclue sans que le prix des marchandises vendues
ait dtifix6 dans le contrat, express6ment ou implicitement ou par une disposi-
tion permettant de le d6terminer, les parties sont r6put6es, sauf indications con-
traires, s’6tre tacitement refiries au prix habituellement pratiqud au moment
de la conclusion du contrat, dans la branche commerciale consid6r6e, pour les
9Cette d6finition r6sulte d’un des attendus de ]a chambre commerciale de ]a Cour de cassation (voir
Cass. com., 16 novembre 1993, J.C.P 1994.11.22287). Elle correspond A la vision civiliste tradition-
nelle.
En application des principes 6nonc6s dans le U.C.C. 1-203 (1995).
“II ne s’agit pas ici de discuter de la r6alit6 de ce concept, mais de ne pas oublier que ce principe
existe dans les deux syst~mes de mani~re plus ou moins absolue et que sa persistance a une influence
certaine sur la jurisprudence relative A ]a d6termination du prix comme nous le verrons plus loin.
2 11 avril 1980, R.T. Can. 1992 n 2, 19 I.L.M. 671 [ci-apr;s Convention]. Pour l’historique de la
Convention, voir Bianca et Bonell, supra note 4 la p. 3.
” Convention, ibid, art. 14.
1996]
D. LECossoIs – LA DTERMINATION DU PRIX
m~mes marchandises vendues dans des circonstances comparables [nos itali-
ques”.
La simple lecture de ces deux articles rdvble une contradiction puisque 1’article
14 exige que le prix soit d6termin6 ou d6terminable, alors que l’article 55 envisage
l’hypoth~se d’un contrat sans prix”. Cette contradiction s’explique historiquement
par l’opposition entre, d’une part, les pays en voie de ddveloppement”, les pays so-
cialistes’7, et certains pays occidentaux tels que la France” et, d’autre part, les pays
de common law. Cette opposition existait ddjt en 1930 lors de la prdparation par la
Commission des Nations Unies sur
le Droit du Commerce International
(<
trats de vente internationale des objets mobiliers corporels” et de la Convention
portant loi uniforme sur la vente internationale des objets mobiliers corporels.
Cinquante ans. plus tard, lors de l’adoption du projet de la Convention, les ittats
n’ont pas rdussi h r6soudre la contradiction, ni h trouver un compromis, malgr6 di-
verses rdflexions, de nombreux amendements et des discussions houleuses au sein
de groupes de travail successifs”. En d6sespoir de cause, les deux articles ont
t6
4Ibid., art. 55.
‘5 Voir G. E6rsi,
nationale de marchandises: Colloque de Lausanne des 19 et 20 novembre 1984, Zurich, Schulthess
Polygraphischer Verlag, 1985 aux pp. 46,47 [ci-apr s Colloque de Lausanne].
L’article 55 6tait particuli~rement pr6judiciable pour les pays en voje de d~veloppement et les
pays socialistes qui auraient 6t6 a la merci des pays occidentaux, notamment quant h la r~f~rence au
prix de march6. A ce propos, Bonell note qu’il est n6cessaire de prendre en compte the fact that ex-
port or import transactions are often entered into by parties who do not possess equal bargaining
powerm (Bianca et Bonell, supra note 4 h la p. 3).
17 Voir F. Adami, <(Les contrats Open Price dans la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente intemationale de marchandises (1989) R.D.A.I. 103. " Voir J.O. Honnold, Documentaiy History of the Uniform Law for International Sales: The stud- ies, deliberations and decisions that led to the 1980 United Nations Convention with introductions and explanations, Devender (Pays-Bas), Kluwer, 1989 lap. 412. "9 ljuillet 1964, 834 R.T.N.U. 169, 3 I.L.M. 864 [ci-apres Convention de La Haye]. L'article 4 de ]a Convention de La Haye stipule que: 1. La communication qu'une personne adresse 4 une ou plusieurs personnes d6termi- n6es en vue de la conclusion d'un contrat de vente ne constitue une offre que si elle est suffisamment precise pour permettre la conclusion du contrat par son acceptation, et qu'elle indique la volont6 de son auteur de s'engager. 2. Cette communication s'interpr~te et se complete par les n6gociations pr6liminaires, les habitudes qui se sont 6tablies entre les parties, les usages et toute r~gle applicable en mati~re de contrat de vente. 2 lVjuillet 1964, 834 R.T.N.U. 107, 3 I.L.M. 854, art. 57, 69 [ci-apr&s L.U.V.1.]. L'article 57 pr6- voyait que : Lorsque la vente est conclue sans que le prix ait 6t6 d6termin par le contrat, directe- ment ou par rdfdrence, r'acheteur est tenu de payer le prix habituellement pratiqu6 par le vendeur lors de la conclusion du contrat>.
” Sur cette question voir Bianca et Bonell, supra note 4 aux pp. 132, 401. Un comit6 ad hoc a
la demande de la France, mais ses propositions ne furent pas retenues (voir Hon-
la p. 484).
meme 6t6 institu6
nold, supra note 18
McGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
adopt6s lors de deux votes successifs par quarante et une voix favorables et cinq
abstentions pour I’article 14, et quarante voix favorables contre trois d6favorables
et cinq abstentions pour I’article 55′. En adoptant ces deux articles, les Ittats lais-
saient h la pratique le soin de d6m~ler l’6cheveau de la contradiction.
II y a maintenant quinze ans que la Convention a 6t6 6laborde. Elle n’est cepen-
dant entree en vigueur que le 1 janvier 1988′. II s’agit done d’une convention re-
lativement jeune, n’ayant pas encore fait 1’objet d’une jurisprudence abondante”.
Un seul arr& a 6t6 rendu i propos des articles 14 et 55 : l’affaire Pratt & Whitney c.
Malev Hungarian Airlines.
Apr~s un examen de 1’esp6ce et des decisions rendues, cette premiere jurispru-
dence, presque passde inaperque, sera jugde h l’aune de ]a Convention. Nous d6-
terminerons ensuite si un juge frangais ou am6ricain saisi de cette affaire aurait d6-
cid6 autrement. En conclusion, nous envisagerons l’avenir des articles 14 et 55 de
la Convention.
I. L’affaire Pratt & Whitney c. Malev Hungarian Airlines : premibre interpr6-
tation des articles 14 et 55 de la Convention
A. Contenu de l’affaire Pratt & Whitney
1.
Les faits
En 1990, la soci6t6 d’aviation hongroise Malev Hungarian Airlines (
d6cidait de modemiser sa flotte. A cette fin, elle engagea des n6gociations avec
25Le calcul des voix drmontre que toutes les parties n’6taient pas prsentes lots du vote de chacune
des dispositions (voir Honnold, ibid. aux pp. 457 et s.). Soixante-deux Etats et huit organisations in-
temationales participaient
la conf&ence et la Convention a 6t6 votee article par article (voir Bianca
et Bonell, supra note 4 A lap. 6).
Le nombre minimum de dix ratifications 6tait un pralable n~cessaire A la mise en application de
la Convention. Ce nombre minimum fut atteint le 11 drcembre 1986 A ]a suite de la ratification de la
Convention par la Chine, ‘Italie et les l~tats-Unis et elle est entree en vigueur le l’janvier 1988 entre
les t~tats signataires. En 1993, trente-six pays avaient ratifi6 ]a Convention. La France, les 12tats-Unis
(avec une rserve sur l’article 95) et le Canada (en 1992 avec r6serve et en 1993 sans reserve) font
partie de ces signataires (voir B. Koren, La Convention des Nations-Unies du 11 avril 1980 sur ]a
vente intemationale de marchandises>> (1993) 539 D. & Aff. 218).
2’ On peut noter un arrt trbs rdcent portant sur la rfaction du prix oti
‘acheteur se prvalait d’une
prtendue mauvaise execution du contrat par son cocontractant pour retenir le paiement d’une partie
du prix (voir S.V Braun, Inc. c. ALITALIA-Linee Aeree Italiane, S.p.A. 1994 U.S. Dist. LEXIS 4114
(S.D.N.Y.) Apr. 6, 1994).
” Trad. par L. Szlavnits, reproduit dans Pratt & Whitney c. Malev Hungarian Airlines (1993) 13
J.L. & Com. 31 (C.S. Hongrie) [ci-aprs Pratt & Whitney (C.S.)], infirmant (1993) 13 J.L. & Com 49
(C. mtro.) [ci-aprbs Pratt & Whitney (C.M.)]. Cet arrt a fait l’objet d’un commentaire de P. Amato,
Recent Development: CISG: UN Convention on Contracts for the International Sale of Goods –
The Open Price Term and Uniform Application: An Early Interpretation by Hungarian Courts>
(1993) 13 J. L. & Com. 1.
1996]
D. LEcossoIs – LA DTERMINATION DU PRIX
Boeing et Airbus. I1 6tait convenu que Malev devait choisir et acheter elle-meme
les moteurs des futurs avions.
Dans l’hypoth~se oi Malev avait s61ectionn6 Boeing, elle aurait eu l’obligation
d’ acheter deux Boeing 767-200 ER ndcessitant deux moteurs chacun avec, proba-
blement, un moteur suppl6mentaire. Elle aurait 6galement 6t6 oblig~e de payer la
totalit6 du prix (avions et moteurs) h Boeing, cette derni~re devant payer en retour
la soci6t6 productrice des moteurs. Seul le prix des moteurs suppl6mentaires devait
8tre pay6 directement au fabricant de moteurs par Malev.
II convient de noter que la s6rie de moteurs PW4000 inclue divers modules
dont les PW4056 et PW4060 pouvant &re utilis6s sur les Boeing, ainsi que les
PW4152 et PW4156/A pouvant 8tre utilis6s sur les Airbus. Chaque moteur a un
prix de base diff6rent en fonction du module choisi, de sa puissance, et des options
d6sirdes. Un moteur suppl6mentaire est en principe toujours plus cher que le mo-
teur destin6 h 8tre mont6 sur 1’avion. Les moteurs ordinaires sont a distinguer des
moteurs
turbo, ces derniers ayant des caract6ristiques diff6rentes et incluant
d’ autres 616ments tels que la nacelle et ayant par cons6quent un prix plus 6lev6.
En automne 1990, Malev entrait en pourparlers avec Pratt &Whitney (<
)
pour l’acquisition des moteurs. Les n6gociations portaient sur deux engagements
6ventuels : un contrat de remplacement des moteurs des anciens avions sovi6tiques
TU-154 de Malev, d’une part, et 1’achat de moteurs neufs, d’autre part. Le 9 no-
vembre 1990, P&W faisait une premiere offre.
Le 4 d6cembre 1990, Malev signait une lettre d’intention reprenant les n6go-
ciations relatives au remplacement des moteurs des avions sovi6tiques et mention-
nait son intention (sans engagement quel qu’il soit) de signer un accord final por-
tant sur l’achat de nouveaux moteurs. La lettre d’intention soumettait la signature
de l’accord final a l’acceptation par Malev de l’offre de P&W portant sur les engins
de la s6rie PW4000.
Le 14 d6cembre 1990, Malev n’ayant pas encore choisi entre Boeing et Airbus,
P&W lui soumettait deux nouvelles offres annulant les pr6c6dentes. La premiere of-
fre se fondait sur l’achat ferme de quatre moteurs neufs plus un en option et la se-
conde sur 1’achat ferme d’un moteur suppl6mentaire plus un en option, autrement
dit un total de cinq ou sept moteurs. La premiere offre portait sur le moteur
PW4056 en cas d’achat d’un Boeing 767-200 ER. La deuxi~me offre portait sur un
moteur PW4152 et un moteur turbo PW4156 pouvant 6quiper un Airbus 310-300.
Ces offres incluaient diverses facilit6s de paiement et de supports financiers, des
garanties et un syst~me de service apr~s-vente (r6paration et entretien), ainsi que
divers documents tels une formule de price escalation’>6 et un plan de garantie.
16 La
les conditions incluses dans l’offre du 14 d6cembre 1990. Malev faisait 6galement
part de la coop6ration attendue pour les moteurs de remplacement et demandait que
l’information demeure confidentielle jusqu’h l’annonce publique simultan6e du
choix des avions et des moteurs.
Le 11 f6vrier 1991, apr~s une discussion verbale, P&W adressait une lettre A
Malev l’informant qu’un budget suppl6mentaire de 65 milles $ US serait ajout6 au
prix initial. La lettre pr6voyait 6galement une future rencontre entre les parties, A
Budapest, afin de continuer les discussions sur le remplacement des moteurs des
avions sovi6tiques et de finaliser le contrat PW4000. Toutefois, le 25 mars 1991,
Malev notiflait P&W que, finalement, elle ne choisissait pas les moteurs de ]a s6rie
PW 4000 pour les Boeing 767′.
P&W fit alors savoir A Malev qu’elle consid6rait que cette demi~re s’6tait d6-
finitivement et irr6vocablement engag6e h acheter les Boeing 767 avec des moteurs
de la s6rie PW4000, que Malev devait donc honorer ses engagements, notifier ]a
soci6t6 Boeing de son choix et en faire 1’annonce officielle. Malev refusa de se tenir
pour engag6e. P&W assigna Malev en justice devant la Cour m6tropolitaine de Bu-
dapest afin de faire reconnaitre la validit6 du contrat. Malev se d6fendit notamment
en invoquant l’absence de contrat en raison de l’ind6termination du prix”.
Le tribunal devait donc se prononcer sur la validit6 du contrat eu 6gard aux ar-
ticles 14 et 55 de la Convention. P&W obtint gain de cause en premiere instance.
Appel de la d6cision fut interjet6 devant la Cour supreme de Hongrie, qui cassa ]a
d6cision de premiere instance”.
sance et des options. Par exemple : 1 $ = 50 hp (horsepower) + 50 hp = 2 $ = 100 hp + 50 hp =3 $,
etc.
27 Le texte original parle de <
p. 2).
Malev prdtendait au contraire que l’article 14 de la Convention n’dtait pas res-
pect6 puisqu’aucun prix n’avait 6t6 stipul6 dans les offres successives relativement
aux moteurs choisis :
For the price of the PW4056 series spare engine is not identical with the price
of the PW4056 engine, neither is the price of the PW4056 series engine identi-
cal with the price of the PW4000. The so called pricing formula could only be
applied if the base price of the given engines would have been defined at the
time of maldng the contract. According to the data supplied by Plaintiff the
base price would also have to be calculated, however, the data were not even
sufficient for that, since Plaintiff did not indicate its own price index ‘ .
Par ailleurs, le prix n’dtant pas prdcis6 dans l’offre, le demandeur n’avait pu se
rdfdrer h un prix extdrieur dans la mesure ofi les moteurs d’avions n’ont pas de prix
de marchd. Or, la connaissance du prix 6tait indispensable t l’aboutissement de
cette transaction du fait de la situation de financement triangulaire. L’offre sans prix
n’ tait donc pas une offre. En consdquence, Malev n’dtait pas lie par l’intention
exprimde dans la lettre du 21 ddcembre 1990. Malev soutenait 6galement que si la
proposition de P&W devait etre considdre comme une offre, celle de Malev devait
etr considdrde comme une contre-offre et qu’en cons6quence aucun contrat n’avait
6t6 conclu.
b.
Les d&isions
Le 10 janvier 1992, le juge de la Cour m6tropolitaine d6cida qu’un contrat avait
6t6 conclu au motif que les prix pour chaque type de moteurs avaient 6t6 mention-
32 Nous nous cantonnerons ici aux arguments propres au prix, non
ceux relatifs t l’6nonciation
dans l’offre de la qualit6 et de la quantit6 des moteurs concem6s.
Pratt & Whitney (C.S.), supra note 25 , lap. 38.
Pratt & Whitney (C.S.), ibid
lap. 35.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGLL
[Vol. 41
n6s dans l’offre. Apr~s avoir relev6 l’existence de prix de base pour les moteurs
PW4152 et PW4156/A, le juge d6cida que, d’une part, P&W avait bien eu
l’intention d’etre li6e et, d’autre part, que l’offre 6tait suffisamment d6finie confor-
m6ment
‘article 14 puisqu’elle indiquait la chose (les moteurs PW4056,
PW4060, PW4152 et PW4156/A), la quantit6 (commande ferme de deux avions et
un en option, donc une commande de cinq ou sept moteurs), et le prix (5 847 675 $
US pour un PW4056, et 5 552 675 $ US pour un PW4156/A et un PW4152). Puis-
qu’il s’agissait bien d’une offre, Malev 6tait lie par son acceptation. Le juge
adopta comme argument suppl6mentaire le fait que le choix des moteurs d6pendait
de la d6cision unilat6rale de I’acheteur, ce qui 6tait, avec les multiples facilit6s et
cr6dits accord6s, ind6niablement en sa faveur.
La Cour supreme n’interpr&a pas les faits de la meme mani6re ; elle cassa le
jugement de premiere instance apr~s avoir constat6 que l’offre contenait des inco-
h6rences quant au prix. D’une part, le prix des moteurs supplmentaires PW4152 (h
5 552 675 $ US) et PW4156/A (h 5 84-7 675 $ US) 6tait effectivement mentionn6.
Cependant, l’offre ne pr6cisait pas le prix de ces memes moteurs destin6s 4t etre
mont6s directement sur les avions alors que, comme nous I’avons vu, leurs prix
n’6taient pas identiques h ceux des moteurs suppl6mentaires. D’autre part, l’offre
ne pr6cisait pas si le prix annonc6 pour ces moteurs comprenait ou non le turbo. A
l’inverse, l’offre mentionnait le prix du moteur neuf PW4056 (h 5 847 675 $ US) et
non le prix du moteur suppl6mentaire de la m~me s6rie. Enfin, aucun prix n’6tait
indiqu6 pour les moteurs PW4060.
C’est ainsi que la Cour supreme a jug6 que:
[N]one of Plaintiff’s offers, neither the one for the Boeing aircraft’s engines,
nor the one for the Airbus aircraft’s jet engine systems, complied with the re-
quirements stipulated in Paragraph 1, Section 14 of the Agreement, for it did
not indicate the price of the services or it could not have been determined [nos
italiquesf.
La Cour supreme, qui estimait que le prix 6tait essentiel h l’offre, d6cida qu’il
devait 8tre fix6 dans l’offre pour permettre au contrat d’exister. La Cour d6cida que
les prix n’6taient pas d6termin6s ou d6terminables conform6ment h l’article 14, les
prix de base n’ayant pas 6t6 fix6s pour tous les moteurs. La Cour d6cida 6galement
que, les moteurs n’ayant pas de prix de march6, le prix ne pouvait pas 8tre d6termi-
n6 en vertu de I’article 55 de la Convention. Par consequent, elle conclut t
l’absence de contrat en disqualifiant l’offre.
B. Critique des decisions au regard de la doctrine portant sur la Convention
Comment interpr6ter cette premiere jurisprudence h la lumi~re de la doctrine
relative aux articles 14 et 55 de la Convention ? Nous analyserons d’abord en quoi
35 bid Alap. 43.
1996]
D. LEcossoIs – LA DAIERMINATION DU PRIX
consiste cette doctrine, pour ensuite 6valuer la n6cessit6 d’une interpr6tation uni-
forme des articles 14 et 55 par les juges nationaux.
1.
La doctrine des articles 14 et 55
La Convention a fait couler beaucoup d’encr&’. Les nombreux auteurs qui se
sont pench6s sur la contradiction entre les articles 14 et 55 les ont trouv6s soit in-
conciliables’7, soit compl6mentaires en d6pit de leur contradiction apparent&’. Cette
partie expose les principaux arguments soulev6s.
Un premier courant doctrinal soutient que les articles sont inconciliables et que
l’article 55 n’a d’effet que lorsque l’article 14 n’est pas applicabl&’. Ce dernier ne
sera pas applicable, soit lorsqu’il aura t6 6cart6 par la volont6 expresse des par-
ties’ , ou par les usages ou habitudes 6tablis entre les parties”, soit lorsque l’Etat
concern6 n’aura pas ratifi6 la deuxi~me partie de la Convention”2 . Ainsi, dans tous
les cas o i la Convention est applicable dans son ensemble, l’article 55 n’aura pas
d’effet. Cette th~se consacre la sup6riorit6 de l’article 14 sur l’article 55 et conforte
l’interpr6tation selon laquelle les auteurs de la Convention auraient eu la volont6 de
limiter l’article 55 h l’hypoth~se oa la loi applicable admet la validit6 des contrats
<
L’ensemble de la doctrine portant sur la th6se de la compl6mentarit6 s’ accorde
pour consid6rer que l’offre pr6vue h l’article 14 doit 6tre pr6cise (crit~re objectif) et
Pour une bibliographie complete, voir Bianca et Bonell, supra note 4 A la p. 843.
“Voir V. Heuz6, La vente internationale de marchandises, Paris, G.L.N. Joly, 1992
aussi G. E6rsi, dans Bianca et Bonell, supra note 4 h la p. 144:
la p. 174. Voir
Article 14 provides that an offer should also either include the price or make provision
for determining it. At the same time, article 55 provides for a situation in which a con-
tract has been validly concluded but does not expressly or implicitly fix or make pro-
vision for determining the price. As there is no offer without an indication for the price,
a contract without such an indication seems to be a manifest contradiction.
‘8 Voir Adami, supra note 17.
“Voir J.-P. Plantard, <
41 L’article 6 prdvoit que :
“‘ Uarticle 9, alinda 1, pr6voit que <<[lies parties sont lies par les usages auxquels elles ont consenti
et par les habitudes qui se sont dtablies entre efles>> [nos italiques], et, selon l’alin6a 2 : <
italiques].
“‘ L’article 92 pr6voit que
la Finlande, la Norv~ge et la Su~le.
4″ Voir Honnold, supra note 18 h la p. 341.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
qu’elle doit manifester l’intention de son auteur d’etre
i6 en cas d’acceptation
(crit~re subjectif)”. La discorde 6clate quant a l’importance respective de ces deux
crit~res, h leur application simultan6e, et h la conciliation des articles 14 et 55 ‘ .
Selon un premier courant doctrinal”, l’exigence subjective n’est qu’un corollaire de
l’exigence objective ; la certitude de la volont6 d’etre li6e sera d’autant plus forte
que l’offre sera prdcise : <([I]l faut compl6ter les dispositions de l'article 14 par cel-
les de l'article 55 concemant la d6termination du prix'>47. Cependant,
‘article 55 ne
pourra s’appliquer que si le droit national applicable n’invalide pas le contrat dont
le prix n’est pas fix6 implicitement ou expressdment. Selon un deuxi~me courant
doctrinal, le crit~re central serait l’intention des parties (crit~re subjectif), alors que
la prdcision du prix (crit~re objectif) devrait s’interpr6ter A la lumi~re de
1’article 559.
D’autres ont tent6 d’att6nuer la contradiction en 6tablissant une distinction en-
tre la d6termination du prix dans l’offre, pr6vue h l’article 14, et ]a d6termination du
prix dans le contrat, r6gie par l’article 55. La sanction est alors diffdrente : le con-
trat sans prix d6termin6 est en principe nul alors que l’offre sans prix d6termin6 est
seulement disqualifi6e. Dans cette hypoth~se, il ne s’agit plus d’une offre de con-
tracter, mais d’une offre d’entrer en pourparlers, oit le prix est h n6gocier “. Toute-
fois, la validit6 du contrat est 6troitement li6e h la validit6 de l’offre dans la mesure
oii l’article 55 est soumis h la condition de la validit6 de la conclusion du contrat”.
Cependant, les termes valablement conclu peuvent 6tre interpr6t6s comme in-
cluant le prix ou comme ne faisant r6f6rence qu’h des facteurs autres que le prix 2.
La contradiction peut etre att6nude autrement : l’article 14 serait une clause
d’annulation du contrat et l’article 55 en serait une de sauvetage. L’article 55 repr6-
sente ainsi un moyen subsidiaire de d6terminer le prix applicable, selon certains, de
mani~re constante ou, selon d’autres, seulement lorsque le droit national positif en
reconnait la validit6. Ainsi, il reste h determiner si cette disposition ne fait r6f6rence
44Voir Amato, supra note 25
la p. 5.
(1981) 33 R.I.D.C. 931
lap. 964.
Voir I. Corbisier,
46 Soutenu notamment par P. Kahn,
P. Tercier, droits et obligations de l’acheteur> dans Colloque de Lausanne, supra note 15, 119 1
]a p. 121. Encore convient-il d’admettre que la d6termination du prix soit effectivement d’ordre pu-
blic.
55Voir Kahn, supra note 46 A lap. 962. Larticle 4 de la Convention pr6voit que:
La pr6sente Convention rdgit exclusivement la fonnation du contrat de vente et les
droits et obligations qu’un tel contrat fait naitre entre le vendeur et ‘acheteur. En patti-
culier, sauf disposition contraire expresse de la pr~sente Convention, celle-ci ne con-
cerne pas:
(a) la validitj du contrat ni celle d’aucune de ses clauses non plus que celle des usa-
ges […] [nos italiques].
trouve h s’appliquer.
5,Application devant se faire sous reserve de mauvaise foi ou d’abus auquel cas la loi nationale re-
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
(Vol. 41
forme grace h l’application des principes g6n6raux de ]a Convention7 . Deux options
peuvent alors
tre envisag6es. Premi~rement, le juge national se r6f6rera A son pro-
pre droit pour juger si le prix est d6termin6 ou non ; deuxi~mement, il se r6f6rera
aux principes g6n6raux de la Convention et s’inspirera de lun des courants doctri-
naux examin6s ci-dessus8 .
a.
Critique des decisions hongroises
Dans l’affaire qui nous concerne, le juge de la Cour supreme de Hongrie a ten-
t6, dans une certaine mesure, de concilier les articles 14 et 55 de la Convention.
C’est ainsi qu’il a d’abord appliqu6 l’article 14 en v6rifiant l’existence du crit~re
subjectif (la volont6 de l’auteur de l’offre d’6tre li6) et du crit~re objectif (]a pr6ci-
sion de l’offre). Ne trouvant pas dans l’offre tous les 616ments requis par l’article
14, il a eu recours h Particle 55 afin de d6terminer le prix, d’obi la r6f6rence au prix
de march6 :
pendant pas d6nu6e de toute influence nationale. La vue civiliste du juge se re-
trouve dans l’affirmation que le prix constitue un 616ment essentiel de l’offre, dans
le fait que l’impr6cision du prix est de nature h disqualifier l’offre, et dans
l’interprtation restrictive de Particle 55 infine, oii le juge ne voit qu’une clause de
march6.
Quelle que soit la solution adoptde par ]a cour hongroise, la bri~vet6, si ce n’est
la pauvret6, de l’analyse juridique est h d6plorer car non seulement s’agit-il du
premier arr~t rendu en la matihre mais il est destin6 A faire jurisprudence. De plus,
le juge hongrois n’a pas adress6 de mani~re exhaustive toutes les questions qui se
posaient.
I1 mentionne l’intention d’8tre li6, il ne justifie pas cette analyse. De
mame, les articles 14 et 55 sont appliqu6s simultan6ment sans que de contradiction
ne soit relev6e. Enfin, le juge n’a pas 6tay6 son interpr6tation restrictive de Particle
55 du raisonnementjuridique attendu.
Au niveau des faits, les d6cisions ne permettent pas non plus d’6tablir avec
t6 stipul6 ou non. En pratique, les n6gociations se font au
certitude si le prix avait
” La Convention peut, cependant, faire l’objet d’interpr~tations diverses comme en t~moigne ]a
vaste doctrine sur les articles 14 et 55. E6rsi souligne notamment que :
The main question was whether the article should be included in the Convention. There
were two major arguments against inclusion: (a) since the price belongs to the essen-
tialia negotii of a contract, there can be no contract if the price is not determined or
determinable; and (b) the articles involves the problem of validity which is expressly
outside the scope of the Convention [nos italiques] (E6rsi dans Bianca et Bonell, supra
note4 h lap. 401).
5′ Voir Amato, supra note 25
” Pratt & Whitney (C.S.), supra note 25 A lap. 7.
60 Voir Amato, supra note 25 aux pp. 17, 27.
la p. 4.
19961
D. LECOSSOIS – LA DATERMINATION DU PRIX
jour le jour, de mani~re extramement rapide et sont souvent orales. Il est fort pro-
bable en l’esp~ce que le prix des moteurs ait 6t6 fix6 oralement. Dans ce cas, la
preuve est difficile A apporter. D’une part, il semble douteux que P&W ait pr6cis6
t6 discut6
les modalit6s de paiements et les facilit6s de crddit si le prix n’avait pas
au pr6alable. La <
discussion sur le prix. D’une autre part, les arguments de P&W r6v~lent une cer-
taine n6gligence. En effet, P&W ne peut soutenir qu’il suffisait de multiplier le prix
des moteurs suppl6mentaires par cinq, puisque les prix des moteurs neufs ne sont
pas identiques au prix des moteurs suppl6mentaires”. Ainsi, le prix d’un moteur ne
peut pas 8tre d6termin6 par la formule mentionn6e ci-dessus si le prix de base n’est
pas connu.
b.
Une volonti d’interprtation uniforme
Au regard de ce qui pr6c~de, la cour hongroise a-t-elle failli h sa mission unifi-
catrice ? Certains auteurs avaient confiance en la jurisprudence h venir, soulignant
qu’il ne fallait pas <
semble avoir surv6cu h la contradiction : elle applique simultan6ment les deux arti-
cles, et consacre ainsi la doctrine de la compl6mentarit6. La r6flexion n’aboutit ce-
pendant pas au r6sultat souhait6, A savoir que le contrat aurait df 6tre maintenu en
appliquant le prix dgfini selon 1’article 55, des lors que 4Ia volont6 des parties de
conclure pouvait 8tre prouv6e par d’autres moyens, meme lorsque le prix n’6tait
pas fix6&’6 .
Cette dualit6 demeurera tant que les juridictions nationales interpr6teront la
Convention en vertu de leurs droits nationaux’ et non en vertu d’un droit suprana-
tional’ . La solution doit 8tre recherchge dans la Convention meme”, en se d~tachant
de l’interprdtation strictement littgrale de l’article 14 et en replagant la formation du
contrat dans le contexte global de la Convention. Toutefois, comment interpreter
cette demi~re ? Pour certains, <
63Ibid.
“Voir Fortier, supra note 53
la p. 382 : <[I]nterprgter [les articles 14 et 55] en les d6tachant le plus
possible des syst~mes nationaux disparates pour tendre vers un syst~me de droit rellement uniforme>>
la p. 384: <(L]e caract~re international et conventionnel du texte le dgtache des droits 6ta-
ou, ibid
tiques dans lesquels il plonge quelques racines>>.
Isabelle Corbisier prOne cette interpretation autonome (voir supra note 45). Bianca et Bonell sou-
lignent 6galement cette ngcessit6 :
4 lap. 19).
Voir Bianca et Bonnell, ibid h la p. 18.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDEMCGILL
[Vol. 41
conduirait irrrmrdiablement t ]a nullit6 du contrat, si les parties n’ont pas fix6 de
prix>’. Pour d’ autres, aucun compromis n’existe”.
De plus, l’interpr6tation des articles 14 et 55, meme d6tach6e du contexte na-
tional, n’est pas 6vidente. L’affaire Pratt & Whitney en montre les faiblesses. Con-
cernant l’article 14, A partir de quel moment doit-on estimer qu’une offre est suffi-
samment precise ? Que doit-on entendre par <
L’offre de P&W portait effectivement sur trois types de moteurs d6termin6s. Ce-
pendant, l’acceptation des moteurs de la s6rie PW4000 est-elle suffisante ou est-il
nrcessaire d’individualiser la d6signation, soit de ne choisir qu’un seul type de
moteur ? De m~me, quand la quantit6 est-elle fix6e ? Est-il suffisant de savoir que
la commande porte sur cinq h sept moteurs, ou faut-il une quantit6 fenne et fixe ?
Enfin, l’indication d’un seul prix est-elle suffisante ou faut-il mentionner le prix de
chaque article propos6 ? La m~me incertitude r~gne quant h l’interpr6tation de
1’article 55 infine. Ne peut-on y voir que la r6f6rence au prix de march6, comme le
sugg~re la doctrine civiliste, ou peut-on y voir la possibilit6 qu’un prix raisonnable
soit fix6 par le juge, comme le soutiennent les auteurs de common law ?
Comme nous allons le voir dans la seconde partie, la r6ponse A ces questions
d6pend de lajuridiction saisie. En somme, cette situation est inacceptable et risque
de compromettre l’avenir de la Convention.
H. Solution de l’affaire Pratt & Whitney dans un autre 1ttat : critique d’une
jurisprudence nationale
A supposer qu’un juge am6ricain ou frangais ait 6t6 saisi de l’affaire, quelle en
aurait 6t6 l’issue” ? Une revue des principes et de la jurisprudence nationale de ces
deux juridictions permettra de r6pondre h cette question.
A. L’affaire Pratt & Whitney portie devant unjuge amiricain
Dans l’affaire Pratt & Whitney, la Cour supreme de Hongrie ddcida d’6carter
une clause portant sur les conditions grnrales de vente qui faisait r6f6rence 4 la loi
du Connecticut et au U.C.C.7 . Or, la solution aurait certainement 6t6 diff6rente si le
67Adami, supra note 17 A ]a p. 106.
Voir C. Samson, <
” Une analyse semblable mais plus sommaire a 6t6 faite par Amato, supra note 25.
70 P&W rclamait l’application de la loi de l’ttat du Connecticut en vertu d’une clause contenue
dans les Standard Terms and Conditions of Sale>>. La Cour a refus6 cette application dans ]a mesure
oit la validit6 mame de l’accord 6tait discut~e. La pratique montre 6galement que ces conditions g~n6-
rales sont souvent rejet~es par l’autre partie contractante.
1996]
D. LECOSSOIS – LA DETERMINATION DU PRIX
juge de l’ttat du Connecticut avait 6t6 saisi de l’affaire et avait interpr6t6 la Con-
vention h la lumihre de son droit national.
1.
Le U.C.C. et son interpretation
a.
Le texte
En droit am6ricain, le U.C.C. r6glemente les contrats de vente’ et r6git le prix.
L’ article 2-305 ,2 pr6voit que:
(1) The parties if they so intend can conclude a contract for sale even though
the price is not settled. In such a case the price is a reasonable price at the time
for delivery if
(a) nothing is said as to price; or
(b)
(c)
the price is left to be agreed by the parties and they fail to agree; or
the price is to be fixed in terms of some agreed market or other stan-
dard as set or recorded by a third person or agency and it is not so set
or recorded.
(2) A price to be fixed by the seller or by the buyer means a price for him to fix
in good faith.
(3) When a price left to be fixed otherwise than by agreement of the parties
fails to be fixed through fault of one party the other may at his option treat the
contract as cancelled or himself fix a reasonable price.
(4) Where, however, the parties intend not to be bound unless the price be fixed
or agreed and it is not fixed or agreed there is no contract. In such a case the
buyer must return any goods already received or if unable so to do must pay
their reasonable value at the time of delivery and the seller must return any
portion of the price paid on account.
b.
Evolution du droit : nouveau texte, nouveaux principes
A l’origine, la common law 6tait hostile aux contrats sans prix7. Le contrat ne
devait pas pr6senter d’
ments essentiels d’un contrat n’6tait pas suffisamment explicite, cela pouvait rendre
inopposable ou unenforceable>>’. Or, les 616ments essentiels ou
le contrat
material terms incluaient le prix”. Si les parties ne s’6taient pas mises d’accord
“, Voir U.C.C., 2-012 (1995).
72 Ibid.
7’Voir W.D. Hawkland, Sales Article 2-305: Open-Price Term > dans 2 Uniform Commercial Code
Series, Wilmette, Clark Boardman Callaghan, 1993 1 lap. 301. Voir notamment Louisville Soap Co.
c. Taylor, 279 F. 470 (6th Cir. 1922).
74 Voir J. Paulsson, La d6termination du prix dans les contrats, chronique des jurisprudences natio-
nales relatives aux contrats intemationaux
(1981) Dr. & P.C.I. 131.
7′ Voir W. Henning et G. Wallach, The Law of Sales under the Uniform Commercial Code, Boston,
Warren Gorham Lamont, 1992 aun 0 3.03.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
sur un prix raisonnable ou n’avaient pas prescrit une mdthode raisonnable permet-
tant sa d6termination, la convention 6tait alors incertaine et insuffisamment expli-
cite pour 8tre opposable ‘ .
Le U.C.C. a introduit en droit am6icain une flexibilit6 qui lui 6tait jusqu’alors
6trangbre7, permettant au juge d’adapter le droit des contrats au contexte 6conomi-
que ‘. C’est ainsi que ‘article 2-305 du U.C.C. abolit le concept du
du contrat de vente le statut d’616ment essentiel et remplace les rbgles abstraites par
des critbres dont l’utilisation repose sur une pr6somption r6futable de comporte-
ment raisonnable des parties”.
Le U.C.C. laisse cependant la voie ouverte h l’annulation du contrat si
l’intention de contracter fait d6fau’. L’616ment essentiel n’est pas ici le prix mais
l’intention des parties”, bien que celles-ci puissent faire du prix un 616ment essen-
tiel du contrat. Grace 5 la recherche de l’intention et au principe de bonne foi, le
juge peut se substituer aux parties afin de fixer un prix <
78Voir Corbisier, supra note 45 aux pp. 807-08.
SVoir Corbisier, ibid.
6Voir Quinn, supra note 76 h lap. 2-175.
Voir Quinn, ibid. : <
ques].
2 Voir L. Marasinghe, Contract of Sale in International Trade Law, Singapore, Butterworths Asia,
1992 Map. 191 :
No contract exists where it was the intention of the parties to be bound to the contract
only if the price was fixed or agreed at the time of contracting and where no such price
was fixed or agreed as intended by the parties. This rule is more a principle of contract
law and, therefore, is common to both the Uniform Commercial Code and the English
common law.
Voir Paulsson, supra note 74 i lap. 132.
Ibid.
1996]
D. LEcossois – LA DETERMINATION DU PRIX
2.
Applications nationale et intemationale
a.
Mise enjeu interne du U.C.C.
Le juge proc~de par diff6rentes &apes lorsque (1) le contrat ne fixe pas de prix,
(2) le prix devait 6tre n6goci6 plus tard mais ne Pa pas 6t6, ou (3) le prix devait atre
d6termin6 par rapport au prix d’un march6 donn6 qui se r6v~le impossible h d6ter-
miner ou h appliquer et auquel sera substitu6 un prix raisonnable’.
Qu’un prix soit absent ou contest6, le juge examine en premier lieu l’intention
des parties. Si cette intention n’existe pas, le contrat n’existe pas. Si le prix n’existe
pas mais une volont6 de contracter est d6montrre, le juge pourra alors le fixer lui-
m6me. Ainsi, dans les arr~ts Spartan Grain & Mill Co. c. Ayers’ et Mickelian Sales
Co. c. Nathan Gilbert & Sons, Inc.”, la Cour a fix6 un prix raisonnable. Plus r6-
cemment, la m~me solution a 6t6 adoptde dans l’affaire In Re Pelton”‘:
mhe parties intended to make a contract, even though there was no specific
price term in the agreement. The price was to be calculated upon the current
market value of the feed in the proportion which that expense bore among
other defined expenses to the sale price of the cattle. The contract for the sale
of crops and feed would not fail for indefiniteness. There was an attempt to
contract and a reasonably certain basis for giving an appropriate remedy [nos
italiques]”.
Le juge peut cependant consid6rer que la partie ayant fix6 le prix n’a pas fait la
preuve d’un prix raisonnable et que, par consdquent, il n’y a pas eu de contrat.
Ainsi, dans 1’ affaire Big Farmer, Inc. c. Agridata Resources, Inc.”, concernant une
liste d’envois postaux, les parties ne s’6taient pas entendues sur les termes <
eu d’accord de volont6 et, par voie de consdquence, concluait h 1’absence de
contrat :
Since these terms [the invoice, the rate card and the letter] are in conflict, they
“knocked-out” each other and are treated as if the parties said nothing as to
price. In such a case, UCC par. 2-305 sets a “reasonable” price […] as the
amount to be paid. [The Seller] offered no testimony as to the reasonable value
of the services rendered [nos italiques] 1.
Voir Henning et Wallach, supra note 75 au 11 3.08.
86517 F. 2d 214, 17 U.C.C. Rep. Serv. (Callaghan) 693 (5th Cir. 1975).
26 A.D. 988,4 U.C.C. Rep. Serv. (Callaghan) 352 (1987).
” 25 U.C.C. Rep. Serv.2d (Callaghan) 265, 171 B.R. 641 (W.D. Wis. 1994) [ci-apr s Pelton avec
renvois aux U.C.C. Rep. Serv. 2d].
” Ibid. A la p. 270.
581 N.E.2d 783, 221 Ill. App. 3d 244 (3d Cir. 1991) [ci-apr s Big Farmer avec renvois au
N.E.2d].
9’Ibid. 4 lap. 786.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE McGILL
[Vol. 41
De m~me, le juge peut devoir se prononcer sur la mise en jeu des m6canismes
de fixation de prix pr6vus au contrat. Ainsi, dans l’affaire Wagner Excello Foods,
Inc. c. Fearn International, Inc.’ les parties 6taient li6es par un contrat de fabrica-
tion de concentr6 de jus de fruit qui incluait l’achat d’une certaine quantit6 de con-
centr6 sur un certain nombre d’ann6es. Cet engagement ne fut pas respect6 et
l’acheteur rompit le contrat avant l’6ch6ance. Le contrat ne mentionnait pas de prix
mais comprenait la clause suivante :
[R]eview the price per case of each product every four months. Thirty days be-
fore the end of each four month period, the [buyer] was required to notify the
[seller] of, and substantiate, any proposed price changes for the upcoming pe-
riod. If [he] failed to object to the proposed price change, the new price would
go into effect. If [he] objected, however, the [parties] would seek to ‘mutually
agree’ on the price change. If [they] were unable to agree on a price, the
agreement terminated 30 days after the end of the four month period”.
Le juge a estim6 qu’un contrat existait meme en 1’absence de prix. II adopta la
m~me solution dans 1’affaire Schmieder c. Standard Oil Co. of Indiana”. En
l’esp~ce, h l’issue d’un contrat conclu entre Schmieder et Standard Oil, Schmieder
devait vendre du mat6riel h la soci6t6 p6troli~re. Le contrat donnait une option de
rachat de ce mat6riel h un prix d6terminable. Seul le calcul de sa d6pr6ciation
n’6tait pas dtermin6. Standard Oil ayant exerc6 l’option de rachat, la Cour d6cida
que le contrat avait 6t6 form6, et elle fixa le montant de la d6pr6ciation”.
Le meme raisonnement s’applique en cas de disparition d’un prix. Dans
l’affaire Northwest Central Pipeline Co. c. Jer Partnership”, relative A trois con-
trats 4 long terme de fourniture de gaz pr6voyant un <"take-or-pay" agreement for a
term of twenty years>>9 bas6 sur un prix regulated under the Natural Gas Policy
Act of 1978>”, la Cour d’appel estima que la d6r6glementation de ce prix (ayant eu
lieu en 1985) avait 6t6 pr6vue dans la clause concemant un m6canisme de red6ter-
mination du prix”.
601 N.E. 2d 956, 235 111. App. 3d 224 (1992) [ci-apri-s Wagner avee renvois au N.E.2d].
Wagner, ibid
la p. 958.
“230 N.W.2d 732, 69 Wis. 2d 419 (1975) [ci-apr~s Schmieder avec renvois au N.W.2d].
9 Voir ibid
9″ 943 E2d 1219, 16 U.C.C. Rep. Serv. 2d 1004 (10th Cir. 1991) [ci-apr~s Northwest avec renvois
lap. 735.
‘Ibid. Mtlap. 1221.
9″oir
‘” Selon les termes memes de ]a Cour,
lap. 18.
P. Kahn, aux n7 56, 113.
MCGILL LAW JOURNAL/REvuE DE DROIT DE MCGLL
[Vol. 41
1.
Les textes applicables et lajurisprudence
a.
Les textes : l’6volution
Les articles 1591 et 1592 C. civ. exigent un prix d6termin6 ou tout au moins
d6terminable. L’article 1591 6dicte que
s6s par les tribunaux dans ce domaine. Cependant, la pratique commerciale se di-
versifiant, de nouveaux contrats n’entrant pas dans la cat6gorie des contrats de
vente sont n6s. C’est ainsi que les contrats de distribution (distribution exclusive et
s6lective, franchise, concession, etc.) ont fait leur apparition. Or, le C. civ. ne pr6-
voit aucune disposition particuli~re pour ces contrats. C’est pourquoi la jurispru-
dence, apr~s avoir tent6 de recourir aux articles pr6cit6s, s’est tourn6e vers les
principes g6n6raux du droit des obligations et a trouv6, dans l’article 1129 du C.
civ., le fondement de l’exigence d’un prix ddternin6, ou tout au moins d6termina-
ble, applicable aux contrats autres que les contrats de vente. Cet article, qui se situe
au titre troisi~me intitul6
la section III traitant <
La jurisprudence de la Cour de cassation en la mati~re est constante depuis de
nombreuses ann6es'”. Cette jurisprudence se base sur une interpr6tation particuli~re
et quelquefois d6toum6e de divers articles du C. civ., ce qui explique que cette po-
sition soit critiqude par une partie de la doctrine.
b.
tvolution de la jurisprudence frangaise
Trois principes directeurs ont guid6 la Cour de cassation : premi~rement, le prix
est un 616ment essentiel du contrat et, par cons6quent, il doit &re ddtermin6 ou d6-
terminable ; deuxi~mement, la fixation du prix ne doit pas d6pendre de ]a volont6
de l’une des parties” ; finalement, le juge ne peut jamais se substituer aux parties
pour fixer ou corriger un prix’.
” Art. 1129 C. civ.
’04Voir Tallon, supra note 2 h lap. 55.
Ce principe d6coule de ‘application de l’article 1174 C. civ..en vertu duquel :
21 juin 1976, LC.P. 1978.11.18984 ; Cass. com., 19 novembre 1991, Bull. civ. 1991.IV.356 ; Cass.
corn., 2 novembre 1993, Bull. civ. 1993.IV.371).
“6Voir notamment: Cass. corn., 29 juin 1981, Bull. civ. 1981.IV.298 ; Cass. civ., 25 avril 1972, D.
1973.Jur.661 ; Cass. civ., 18 juillet 1979, Bull. civ. 1979.1.220.
19961
D. LECossoIs – LA DTERMINATION DU PRIX
i.
La jurisprudence des pompistes de marques
de 1971
l’esp~ce,
financiers divers (prt ou
les distributeurs de carburants
L’6volution de la jurisprudence a d6but6 avec l’affaire des pompistes de mar-
s’6taient engag6s h
ques”. En
s’approvisionner exclusivement aupr~s de compagnies p6troli~res d&ermin6es en
fourniture de mat6riel
6change d’avantages
d’exploitation, par exemple). Le prix 6tait d~termin6 par un arr&6 du 28 octobre
1952 qui d6finissait la marge b6n6ficiaire maximum devant revenir au dtaillant et
au grossiste. Le 27 mai 1963, l’administration ne fixa plus que le prix limite de
vente au consommateur et op6ra une fusion des deux marges professionnelles. A
compter du 1″ octobre 1963, le prix des produits du contrat liant les distributeurs
aux compagnies p6troli~res n’6tait donc plus d6terminable. De nouvelles n6gocia-
tions s’ensuivirent, durant lesquelles les pompistes cherch~rent h am6liorer leur
marge de b6n6fice au d6triment des compagnies p6troli~res. Celles-ci s’y oppos6-
rent. Les pompistes pr6tendirent alors que leurs contrats 6taient devenus caducs de-
puis l’arriv6e de la nouvelle r6glementation.
La Cour de cassation leur donna raison en jugeant qu’il n’existait aucun accord
entre les parties, que ces prix ne constituaient pas des prix de march6 et qu’il n’6tait
pas 6tabli que leurs 616ments ne ddpendaient pas de la volont6 de l’une ou l’autre
des parties’s, que, de plus, il n’6tait pas possible, sans trahir la commune intention
des parties, d’estimer que s’imposent encore ii celles-ci les dernieres marges et les
derniers prix en vigueur lors du changement de syst~me>> [nos italiques] 9 , et que
le prix limite avait W, pour les deux parties la cause d6terminante de leur accord
sur ces prix>” ‘. La Cour de cassation conclut donc
la caducit6 du contrat. En as-
similant le contrat d’approvisionnement exclusif h un contrat de vente ou h des
contrats de vente successifs, la Cour de cassation pouvait recourir h l’article 1591
C. civ. afin de contr6ler la d&ermination du prix”‘.
Cette position a fait l’objet de vives critiques car les contrats qui unissaient les
compagnies p~troli~res aux pompistes ne constituaient pas des contrats de vente h
proprement parler, mais des contrats sp6cifiques, ou contrats cadres, ayant pour
pbjet l’organisation de rapports 6conomiques et juridiques suivis entre des partenai-
res 6conomiques”2. Les contrats cadres doivent &re suivis de contrats d’application
” Voir Cass. corn., 27 avril 1971, Socomanut, D.1972.Jur.353 (note I. Gesthin) ; Cass. com., 27
avril 1971, Elf-Distribution, D.1972.Jur.354 (note J. Gesthin) ; Cass. com., 5 novembre 1971,
Strauch, D.1972.Jur.354 (note I. Gesthin).
, 0sVoir Socomanut, ibid. h lap. 353.
“‘Ibid.
no Elf-Distribution, supra note 107
.. Voir M.-F. Coutant, note sous Aix-en-Provence, 11 janvier 1994, J.C.P. 1994.11.22295.
.Voir J. Gesthin, note sous Socomanut et Elf-Distribution, supra note 107 h lap. 355.
la p. 354.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
qui ne prennent pas forcgment la forme d’une vente'”. L’assimilation du contrat
d’approvisionnement exclusif h la vente paraissait done excessive.
Ind6pendamment de cette interpr6tation, ]a Cour de cassation adopte, en ma-
ti~re de fixation du prix, une position diamrtralement oppos6e
celle du U.C.C. en
vertu duquel, en cas de disparition de 1’indice de d6termination du prix, le juge peut
se substituer aux parties et fixer lui-meme un prix raisonnable.
ii.
Lajurisprudence des
Pour r6soudre la difficult6 d6coulant des textes, ]a Cour de cassation eut recours
h 1’article 1129 C. civ. Ce revirement s’est op6r6 dans S.A. Brasserie Guillawne Tell
c. Socijtg Europgenne de brasseries <
Portella..4 portant sur des contrats d’assistance et de foumiture conclus entre bras-
seurs et d6taillants, ou des contrats dits
d6biteurs de boissons s’6taient engagds, en contrepartie d’avantages financiers, h
s’approvisionner exclusivement aupr~s de la socidt6 Eurobra, le prix 6tant celui
<
dence e.n ddcidant, dans la seconde decision, que
. La Cour parvint cependant A maintenir la n~cessit6 d’un prix d6termi-
nable en se fondant cette fois sur l’article 1129 C. civ. : <<[L]e prix des foumitures
n'6tait pas prdcis6 [...], la rifirence aux prix habituellement pratiquds sur la place
n'6tait pas suffisante i sa ditennination [nos italiques]"7. En l'esp6ce, la Cour de
cassation a d6cid6 qu'iI ne s'agissait pas d'un <<616ment de r6fdrence sdrieux, precis
et objectif>” ‘ .
Cette jurisprudence fit 6galement I’objet de critiques diverses’9 , mais la Cour
de cassation maintint sajurisprudence et rdprima la <
..3 Voir M.-A. Frisson-Roche, <4L'inddtermination du prix>> (1992) 91 R.T.D. civ. 275.
“‘ Cass. com., 11 octobre 1978, Soc. Europdenne de Brasserie, D.1979.Jur.135 (note R. Houin),
J.C.P. 1979.11.19034 (note Y. Loussouam) ; Cass. com., 11 octobre 1978, S.A. Brasserie Guillaume
Tell, D.1979.Jur.135 (note R. Houin), J.C.P 1979.11.19034 (note Y. Loussouam) [ci-apr s Guillaume
Tell avec renvois aux D.].
..5 Guillawne Tell, ibid. a lap. 135.
,16 Soc. Europdenne de Brasserie, supra note 114 t lap. 135.
“17 ibid.
“K Ibid.
119 Voir: Frisson-Roche, supra note 113 A lap. 277 ; Corbisier, supra note 45.
’20Voir notamment: Nancy, 13 Juin 1979, J.C.P. 1981.11.19585 ; Cass. com., 14janvier 1980, J.C.P.
1981.11.19585 (note B. Gros) ; Cass. com., 13 d6cembre 1982, Bull. civ. 1982.IV.414.
1996]
D. LEcossoIs – LA D&TERMINATION DU PRIX
Apr~s son extension aux contrats cadres de foumitures de produits p6troliers’21 , le
principe fut g6n6ralis6″ :
Consid6rant que ]a jurisprudence en matire d’ind~ternination du prix ne
s’applique pas seulement en matiare de produits p6troliers et de contrats de
bi’re ; qu’elle s’applique it tousles contrats, laporte des articles 1129 et 1591
du Code Civil itant absolument g~ndrale ; qu’il suffit d’ailleurs sur ce point de
se reporter ‘a l’abondante jurisprudence des contrats [nos italiques)”.
La jurisprudence s’affina 6galement relativement aux clauses de march6. La
Cour de cassation exige ainsi que le march6 soit sp6cifique’, que la libre concur-
rence joue et notamment que la fixation du prix ne ddpende pas de la volont6 d’une
des parties”, et enfin, que la r6f6rence au prix de march6 soit s6rieuse, pr6cise et
objective'”. Si la clause ne remplit pas toutes ces conditions, elle n’est pas valable
et entraine la nullit6 du contrat’.
2.
Application de lajurisprudence frangaise aux contrats intemationaux
a.
Pratt & Whitney et lejugefrangais
Au regard de ce qui pr6c~de, le juge frangais saisi de l’affaire Pratt & Whitney
jugerait certainement que l’offre n’6tait pas suffisamment pr6cise en raison de
1’absence de prix.
Le juge frangais, comme le juge hongrois, congoit la fixation du prix comme un
616ment essentiel de l’offre ou du contrat. Il cherchera donc si, directement ou indi-
rectement (par r6f6rence), le prix est mentionn6 dans l’offre et s’il ne d6pend pas de
la volont6 de l’une des parties. En 1’esp6ce, le juge frangais aurait conclu, comme le
juge hongrois, que le prix n’6tait ni d6termin6 ni determinable dans l’offre du 14
ddcembre 1990. En supposant que le juge frangais ait 6galement fait une applica-
tion simultan6e de 1’article 55 de la Convention, il n’aurait pu voir dans cette clause
qu’une r6fdrence au prix de march6. Or, la premiere condition, ha savoir l’existence
d’un march6 sp6cifique, n’existe pas. En droit frangais, les conditions sont cumula-
tives et, par cons6quent, le juge aurait d6cid6 que le prix n’6tait pas d6terminable.
“‘ Voir Cass. com., 27 avril 1981, Bull. civ. 1981.IV.188 ; Cass. com., 29 juin 1981, J.C.P.
1981.IV.339.
12 Voir 13 novembre 1984, Natalys [non publi6] cit6 dans Frisson-Roche, supra note 113 ‘ la p.
269, note 61.
“2 Ibid. La jurisprudence a 6t6 6tendue successivement aux contrats d’approvisionnement en laine
et articles d’habillement, ‘ la farine, aux contrats d’entretien ou de location de mat6riel t6lphonique,
au contrat de transport, au contrat de franchise…
’24Voir Aix-en-Provence, supra note 111.
,2 3Voir par ex., Paris, 28 juin 1993, J.C.P. 1994.Ed.E.I.310.
26 Voir par ex., Cass. com., 16 f6vrier 1993, J.C.P. 1994.Ed.E.1.310. Voir les commentaires d’arr~ts
dans (1993) 3:5 Cont. Conc. & Consom. 3 au n 84; (1993) 3:7 Cont. Conc. & Consom. 7 au n7 130.
,27 On constate que Ia plupart des d6cisions judiciaires annulent pour ind6ternination du prix les
contrats contenant une de ces clauses (voir Frisson-Roche, supra note 113 h lap. 284).
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 41
Bien qu’il puisse faire abstraction du droit national et fixer lui-mame un prix rai-
sonnable, il est douteux qu’un juge frangais adopte une approche aussi contraire h
sa religion.
b.
Vers une Jventuelle 6volution
Ces derni~res ann6es, la Cour de cassation a abord6 un nouveau toumant juris-
prudentiel. Cette nouvelle jurisprudence pourrait avoir une influence certaine no-
tamment dans le domaine des contrats internationaux.
Ce revirement est intervenu lors de I’affaire Ouest Abri du 22 janvier 1991’v’.
‘esphce, il s’agissait d’un contrat de concession exclusive, intervenu entre un
En
fabricant de roulottes de chantier, la soci6t6 Ouest Abri, et un sp6cialiste de la
commercialisation de ce type de baraquement, la soci6t6 Bos. Cet accord portait sur
la vente de constructions 16g~res h usages divers (bureau, habitation, sanitaire, etc.).
Le concessionnaire s’6tait engag6 A rraliser un chiffre d’affaires minimum et h ob-
server certaines modalitrs de paiement. AlI1guant que la soci6t6 Ouest Abri avait
viol6 la clause d’exclusivit6, la soci6t6 Bos l’assigna en dommages et int6rats. En
defense, la socirt Ouest Abri invoqua la nullit6 du contrat pour ind6termination du
prix’ .
Dans son attendu de principe, la Cour de cassation cassa Iarr& de ]a cour
d’appel au motif suivant:
[E]n se determinant ainsi, apr~s avoir relev6 que le contrat avait pour objet
d’assurer 1’exclusivit6 de ]a distribution des produits de la soci~t6 Ouest Abri
par la socirt6 BOS, c’est-A-dire essentiellement des obligations de faire et alors
que ce contrat ne s’identifiait pas avec les contrats de vente successifs nrcessai-
res
sa mise en oeuvre comportant essentiellement des obligations de donner
pour lesquelles il n’est pas alIgu6 que ]a convention s’opposait
ce que les
prix de vente fussent librenent ddbattus et acceptds par les parties, ]a Cour
d’Appel n’a pas donn6 de base lgale A sa decision [nos italiques]”‘.
Cette jurisprudence introduit une nouvelle distinction suivant le type de contrat
d’approvisionnement. Certains contrats seulement seraient soumis h l’obligation de
d6termination du prix sur le fondement des articles 1129 et 1591 C. civ. Le crit~re
permettant de distinguer ces diff6rents types de contrats reste imprrcis. Des auteurs
ont sugg&r6 que cela 6tait i6 au fait que certains contrats ne s’identifiaient pas a des
ventes successives mais des obligations de faire”‘. D’autres d6terminent ]a validit6
selon que
19961
D. LECOSSOIS – LA DETERMINATION DU PRIX
successives>32 . Les interrogations de la doctrine t6moignent du flou laiss6 par la
jurisprudence de la Cour de cassation’33.
Cette nouvelle jurisprudence reflte cependant la reconnaissance par la Cour de
cassation que, pour certains contrats, le prix n’a besoin d’8tre ni d6termin6, ni dd-
terminable, le prix 6tant subordonn6 h la volont6 des parties. Cependant, il n’est pas
certain que cette interpr6tation soit exacte. De plus, la Cour de cassation ne va pas
jusqu’h fixer le prix h la place des parties, respectant en cela le principe traditionnel
de non-immixtion dans les relations contractuelles. Enfin, la Cour de cassation n’en
continue pas moins a appliquer sa jurisprudence traditionnelle aux contrats de
bi~re’ ainsi qu’aux contrats de vente’35 . Aujourd’hui encore, la jurisprudence fran-
gaise, sous la houlette de la Cour de cassation estime que la d6termination du prix
est un 616ment essentiel k la validit6 des contrats de vente et des contrats impliquant
une obligation de faire et que son ind6termination doit entralner la nullit6 du con-
trat’ 36.
La solution de la jurisprudence frangaise dans 1’affaire Pratt & Whitney aurait
donc 6t6 de disqualifier l’offre pour d6faut de prix. Une solution par ailleurs identi-
que h celle de la Cour supreme de Hongrie dont la jurisprudence sera bien ac-
cueillie en droit frangais.
Conclusion : avenir des articles 14 et 55 de la Convention
Au regard de ce qui pr6c~de, la jurisprudence de la Cour de Hongrie sera pro-
bablement tr~s bien accueillie par les pays civilistes mais risque d’etre ignor6e par
les disciples de la common law. Cette dichotomie d6coule tout naturellement de
l’impossibilit6 pour les juges de se d6tacher de leurs principes nationaux pour in-
terprdter la Convention.
M E Leduc, <(La determination du prix, une exigence exceptionnelle ?> J.C.P. 1992.1.3631.
.. C’est ainsi que la doctrine a tout d’abord cm que la Cour de cassation avait voulu consacrer Ta
distinction entre les contrats cadre de distribution contenant essentiellement des obligations de donner
et les contrats cadre de distribution contenant essentiellement des obligations de faire. Cependant,
d’autres pensent plut6t que la Cour a simplement voulu consacrer une distinction entre les contrats
contenant essentiellement une obligation de donner, comme la vente pour laquelle on exige une d6-
termination du prix, et les contrats contenant essentiellement des obligations de faire, comme les con-
trats cadre de distribution, pour lesquels il n’y aurait pas automatiquement d’exigence de d6ternina-
tion du prix (voir M. Behar-Touchais,
meure, l’un des articles ou les deux articles seront syst6matiquement 6vinc6s par ]a
pratique. La Convention risque donc de rester lettre morte sur ce point.
Lorsque les textes des articles 14 et 55 on
t6 adopt6s, en d6pit de leur contra-
diction, les auteurs 6taient conscients de 1’absence subsgquente de s6curit6 juridique
et du risque que cela pouvait reprrsenter pour les parties. La premiere jurisprudence
a confirm6 ce manque de s~curit6.
Lors de ‘adoption de la Convention, le droit international et la lex mercatoria
n’avaient pas encore une autonomie suffisante pour faire naitre un droit sui generis,
inddpendant des ttats qui le n6gociaient. N6anmoins, la Convention repr6sentait un
pas significatif et nrcessaire vers l’harmonisation’37.
Cette harmonisation se poursuit aujourd’hui sous l’6gide d’Unidroit. L’institut
vient d’adopter des principes g6n6raux de contrats de commerce intemationaux.’. et
essaie d’6viter l’6cueil de la Convention. Unidroit a opt6 pour une solution prag-
matique en droit international : le prix n’est plus d6sormais un 616ment essentiel du
contrat et il peut 6tre fix6 apr~s la conclusion du contrat sur le mod~le am6ricain
des contrats <
reconnaissant la n6cessit6 d’une interpr6tation uniforme et d6tach6e des droits na-
tionaux, les principes d’Unidroit s’adressent plus aux arbitres qu’aux juges natio-
,37Voir Bianca et Bonell, supra note 4 t lap. 14.
,’ Voir Institut international pour l’unification du droit priv6 (Unidroit), Principes relatifs aux con-
trats du commerce international, Rome, Unidroit, 1994.
13
Article 5.7 Unidroit
(1) Lorsque le contrat ne fixe pas de prix ou ne pr6voit pas le moyen de le d6termi-
ner, les parties sont rputfes, sauf indication contraire, s’8tre rdf~r6es au prix habituel-
lement pratiqu6 lors de la conclusion du contrat, dans ]a branche commerciale consid6-
rne, pour les memes prestations effectu~es dans des circonstances comparables ou, h d-
faut d’un tel prix, un prix raisonnable.
(2) Lorsque le prix qui doit &re fix6 par une partie s’av re manifestement draison-
nable, it lui est substitu6 un prix raisonnable, nonobstant toute stipulation contraire.
(3) Lorsqu’un tiers charg6 de la’fixation du prix ne peut ou ne veut le faire, il est fix6
un prix raisonnable.
(4) Lorsque le prix doit 6tre fix6 par r6f~rence un facteur qui n’existe pas, a cess6
d’exister ou d’etre accessible, celui-ci est remplac6 par le facteur qui s’en rapproche le
plus (ibid. h lap. 253).
1996]
D. LEcossoIs – LA DATERMINATION DU PRIX
541
naux. Malgr6 leur caract~re obligatoire, les principes g6n6raux risquent, dans un
avenir proche, de supplanter la Convention.