Article Volume 6:4

Le mariage putatif

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THE McGILL
LAW JOURNAL

VOLUME 6

1960

NUMBER 4

LE MARIAGE PUTATIF

Germain Bri~re*

Lorsqu’un tribunal d6clare un mariage nul, il ne fait que constater que ce
mariage, bien qu’il ait 6t6 c~lbri en fait, n’a jamais exist6 en droit;’ en
d’autres termes, le jugement est en 1occurrence dclaratif, et non pas constitutif
d’une situation nouvelle;2
la nullit6 op~re done r~troactivement. I1 en est
autrement au cas d’un jugement de divorce, lequel, mettant fin un mariage
valable, ne produit d’effets que pour ravenir.

L’an~antissement rtroactif du mariage est lourd de cons6quences. Juridi-
quement, les 6poux n’ont jamais
t6 mar et femme;3 le regime matrimonial,
accessoire au mariage, est r6puti n’avoir jamais exist6; ‘les 6poux ne seront
pas h6ritiers l’un de l’autre; les enfants sont ill6gitimes,4 etc. Aussi, le l6gis-
*Professeur & la Facult6 de droit de l’Universit6 d’Ottawa (section de droit civil).
1V. notamment Dame Bessette v. Meunier [1959] C.S. 283, a la p. 285.
2Mazeaud, Henri, Lon et Jean, Lefons de droit civil, Paris (1955), t. 1, p. 834.
3L’arr~t Malboeuf v. dame Dachet (1939), 66 B.R. 148, est quelque peu troublant a
ce sujet. Tout en dclarant un mariage nul pour bigamie, la Cour d’appel a infirm6
tn dispositif du jugement du tribunal de premiere instance selon lequel le mariage 6tait
nul de nullit6 absolue et les parties n’avaient jamais &6 mar et femme. Les circonstances
6taient, il est vrai, tout & fait exceptionnelles: a la suite dun jugement par d6faut
dclarant son mariage nul, le mar s’6tait remari&, mais post~rieurement le premier
mariage avait 6 dclar valable sur requite en revision. Les juges qui ont rendu
le jugement majoritaire, peut-&tre influences par la th6orie du mariage putatif dont
il n’6tait pourtant pas question en l’instance, n’ont pas tir6 toutes les consequences de
la nullit6 qu’ils acceptaient pourtant de prononcer. L’opinion des juges dissidents,
notamment celle du juge Barclay, nous parat plus logique.

4V. cependant Cox v. Jones [1951] C.S. 32, oi le juge exprime l’opinion que l’enfant
a droit aux effets civils du mariage bien que les parents paraissent tous deux de
mauvaise foi; aussi, F. v. C. [1949] C.S. 193, oi
l’on affirme que le mariage doit
produire des effets civils en faveur d’un enfant, bien qu’en l’instance la mauvaise foi
des 6pou:x semble acquise. Pareille attitude ne nous parait pas admissible dans l’6tat
actuel du droit; dans un arr~t plus rcent, Flam v. Flitman [1958] C.S. 442, le juge
ne semble pas l’admettre, puisque, apris avoir d~clar& que les deux 6poux 6taient de
mauvaise foi, il ajoute qu’il est heureux qu’aucun enfant ne soit n6 du mariage. I1
serait toutefois plus 6quitable que les enfants jouissent des effets civils du mariage en
tout Etat de cause; le droit suisse admet cette rigle bienveillante (v. Mazeaud, op. cit.,
p. 839).

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lateur a-t-il voulu que la rtroactivit6 de la nulfiti cess.t de jouer, quant aux
effets civils du mariage, lorsque les 6poux, oU tout au moins Fun d’entre eux,
est de bonne foi; on dit alors que le mariage est putatif,5 et on determine
les effets civils comme si le jugement de nullit6 ne faisait que dissoudre le
mariage; en d’autres termes, on fait comme si le mariage avait R6 valable
pour le .pass6 mais cessait pour l’avenir.6

Le Code civil de la province de Quebec ‘ne contient que deux textes tr~s
courts, les articles 163 et 164, au sujet du mariage putatif; il en est ainsi
d’ailleurs du Code civil franqais, dont les textes sont J-dessus identiques.7
Devant tant de Jaconisme du lgislateur, nos commentateurs se sont montr~s
plut6t circonspects, voire h sitants s et leur oeuvre est en cons&tuence incom-
plte. Les tribunaux, appel6s A risoudre de nombreux probl~mes en la matire,
n’ont pas toujours donn6 des solutions satisfaisantes; un arrt du -Conseil priv60
sur le sujet est particuli~rement d~routant. Aussi avons-nous cru utile de
publier cette br~ve 6tude, oii nous utilisons
largement la jurisprudence
qu~b~coise.

Nous analyserons d’abord les conditions du mariage putatif, puis nous

tenterons d’en d&erminer les effets.

I – LES CONDITIONS DU MARIAGE PUTATIF

La bonne foi, seule condition que le lgislateur ait pos6e au mariage putatif,
pr6sente certains problbrnes; par ailleurs, on peut se demander s’il n’existe pas
d’autres conditions, de caract6re secondaire.

(a) LA BONNE FOI, CONDITION ESSENTIELLE.

11 faut que 1’un des 6poux, tout an moins, soit de bonne foi pour que le
manage soit consid&6 comme putatif et qu’il produise en consequence des
effets civils. I1 importe cependant d’apporter i ce sujet certaines pr6cisions.

Tout d’abord, cette bonne .foi doit exister au moment mn~me du mariage ;10

c’est alors que l’un des 6poux, sinon les deuc, doivent ignorer la cause de
5 Ce mot vient du verbe latin pidtare: les 6poux croyaient contracter un mariage

valable.

6Mignault, Le Droit civil canadien, t. 1, p. 457; Trudel, G., TraitM de drolt civil

du Quebec, t. 1, p. 462; Mazeaud, op. cit., p. 835.

7Art. 201 et 202 C.N.
BV. cependant l’ouvrage du professeur L. Baudouin, Le Droit civil de la Province
de Quebec, Montr6al (1953), qui contient une 6tude intressante sur le sujet (pages
192-196).

9Berthiaume v. dame Dastous (1930, Conseil priv6), 47 B.R. 533.
1oV. notamment Morin v. la Corporation des Pilotes (1882), 8 Q.L.R. 222, a la p. 224.

No. 4]

MARIAGE PUTATIF

nulliti du marage; il est indiffrent que la cause de nullit6 ait 6t6 d6couverte
peu apr~s le mariage ou longtemps apr~s.”

C’est au tribunal qu’il appartient d’apprtcier s’il y a bonne foi ou non. La
jurisprudence s’est montr~e plut6t bienveillante -1 ce sujet; on relive tout
de m&ne quelques arr~ts concluant

. l’absence de bonne foi.12

On admet maintenant que cette bonne foi peut r6sulter aussi bien d’une
erreur de droit que d’une erreur de fait. Par application de l’erreur de fait, on
a consid~r6 de bonne foi une personne qui se remarie croyant son premier
alors qu’il vit encore a 3 une personne qui ignore l’6tat de
conjoint d&&Id
d~mence de son conjoint ;14 des 6poux qui ne d~couvrent qu’aprts leur mariage
le lien de parent6
. un degr6 prohib6 qui existe entre eux ;15 la femme qui
6pouse un homme marii, croyant 6pouser un c~libataire ;L6 la femme impuissante
qui ignore les effets scientifiques de sa condition.’ 7

On a -par ailleurs consid& de bonne foi en raison de 1’erreur de droit
une personne qui croyait contracter un mariage valide en 6pousant un divorce,
alors que le divorce en question ne pouvait 8tre reconnu par nos tribunaix.’ 8
De m&ne, on a jug6 que la bonne foi subsiste chez tine personne qui connait
1’emp~chement de parent6 qui existe i son mariage, lorsque l’autre par-tie lui
fournit avant le mariage une dispense de l’autorit6 religieuse.19 L’ignorance des
exdgences de la loi quant aux conditions de forme du mariage constitue 6gale-
ment une erreur de droit.2 6

I1 est d’aileurs possible que les deux 6poux soient de bonne foi, l’un en
raison de l’erreur de fait et l’autre A cause d’une erreur de droit. C’est ce

‘1 L’affaire Dame Wilson v. Partridge [1959] C.S. 17, illustre bien cette r~gle. Une
jeune fille domicilie A Vancouver 6pouse en mai 1929, dans l’Etat de New-York, un
certain Partridge, domicili& A Montreal, dont l’6pouse a obtenu un divorce au Nevada.
Elle croit alors contracter un mariage valable, vu 1’6tat de divorc6 de Partridge. Le
pare de la jeune femme, mis au courant du mariage par la suite, a des doutes sur
‘6tat marital de Partridge et consulte un avocat. Le mariage est de nouveau c~lbrE
A Vancouver le 8 aofit 1929 et, pour plus de scurit6, la culbration est r~p~te le
lendemain dans l’Etat de Washington. La femme obtient le bnfice du mariage putatif
en raison de sa bonne foi lors de la premi~re c6l6bration du mariage, m~me si, lors des
deux calbrations subs~quentes, elle se trouvait au courant de 1’existence probable d’un
emp~chement lgal et n’6tait donc plus de bonne foi.

12Barakett v. Eddy (1932), 70 C.S. 125; Flain v. Flitman [1958] C.S. 442.
13 IMorin v. la Corporation des Pilotes (1882), 8 Q.L.R. 222.
14Darche v. Byron [1946] C.S. 123.
15De Grandmont v. la Socifti des Artisans canadiens-franfais de la Citj de Montrdal

(1898), 15 C.S. 147.

‘0 Dwyer v. dame Snyder [1957] C.S. 275.
‘1G. v. B. [1947] C.S. 82.
‘sDame Wilson v. Partridge [1959] C.S. 17; Stephens v. Falchi [1938] S.C.R. 354.
19 Gilbert v. Gilbert 35 R.L. n.s. 289. V. aussi, pour un cas analogue, The Corporation
of the United Townships of Hansfield & Pontefract v. dame Denault (1921), 30 B.R. 204.

20Berthiaume v. dame Dastous (1930, Conseil priv6), 47 B.R. 533.

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qui s’est produit dans l’affaire Montmqny v. Lelibre;2 1 l a femme avait obtenu
un d~cret canonique pronongant la nulliti d’un mariage pr~existant et d&larant
qu’il n’y avait pas d’obstacle en droit canonique L un mariage subsequent; un
ministre du culte lui avait dit, au surplus, qu’elle pouvait se remarier; croyant
qu’elle pouvait d~sormais, au regard de toute loi, contracter un second mariage,
elle le fit sans obtenir de jugement de nullit6 d’un tribunal civil et en se
prisentant comme veuve
. son second mar; d’oii erreur de fait de la part
du marl, alors qu’il s’agissait d’une erreur de droit dans le cas de la femme.
Toujours au sujet de la bonne foi, on s’est demand6 s’il fallait en faire la
preuve en vue d’obtenir le b~nifice du mariage putatif. I1 y a sur ce point
divergence d’opinions; les uns n’exigent pas cette preuve, vu la pr6somption
de bonne foi dont dispose ‘article 2202 C.C.,2
tandis que les autres, estimant
que cette prsomption ne s’applique pas en mati~re de mariage, consid~rent
cette preuve indispensable. Cette derni~re opinion est expos6e par Mignault,23
qui ne fait que citer l’ouvrage de Baudry-Lacantinerie, et reprise par G6rard
Trudel,24 qui cite en ce sens l’arrt Montmigny v. Lelibvre;2 3 toutefois, cet
arrt& ne contient qu’un obiter dictum A ce sujet.2 6 Nous prf6rons l’opinion
contraire, retenue par la jurisprudence fran.zaise0 7 et d’ailleurs accept6e par
quelques arr&s de nos tribunaux ;28 on rel~ve 6galement un arr~t de la Cour
supr&me du Canada, oti cette attitude semble prise pour acquise 2 8a

(b)

ICONDITION SECONDAES.

I y a lieu d’examiner maintenant si la bonne foi est la seule condition du
mariage putatif, ou s’il existe aussi d’autres conditions, que l’on pourrait
qualifier de secondaires. On s’est demand6 en effet si la bonne foi pouvait
exister pour toutes les causes de nullit6 de mariage, puis s’il fallait qu’une
c6l4bration ait eu lieu pour qu’Iin mariage fit considr6 de bonne foi; on a
h~siti 6galement sur la procedure A adopter pour r&lamer les effets du
mariage putatif.

Tout d’abord, y a-t-il lieu de distinguer selon que le mariage a

t6 d6clar6
nul pour une cause de nullit6 absolue, comme l’existence d’un marage ant&ieur,

21(1939), 67 B.P. 197.
22L’art. 2268 du Code civil frangais est identique A notre art. 2202.
230p. cit., p. 464.
2 4 0p. cit., p. 463.
25(1939), 67 B.R. 197.
26Le juge Ltourneau s’exprime ainsi: “La jurisprudence en France est a l’effet
que la bonne foi se presume toujours alors; j’aurais plus ais5ment pench du c6t6 des
auteurs qui ont combattu cette conclusion, mais la divergence n’importe pas puisqu’ici
nous avons une all~gation et une preuve.”

27V. Mazeaud, op. cit., pp. 836-837.
28Dame Rogatko v. Levinsteh

(1933), 71 C.S. 243, A la p. 244; F. v. C., [1949]

C.S. 193. V. aussi Levinstein v. dame Rogatko (1933), 54 B.R. 538, A la p. 541.

2SaStephens v. Falchi [1938] S.C.R. 354, A la p. 361.

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MARIAGE PUTATIF

ou qu’il l’a &6 pour une cause de nullit6 relative, par exemple le d~faut de
consentement des parents dans le cas d’un mineur? Dans 1’affaire Richard v.
Levasseur,29 oi il s’agissait d’absence de consentement en raison de
‘ali~nation
mentale de la fenune, on a jug6 que le mariage n’avait pu
tre contract6 et
qu’en cons6quence les dispositions de l’article 163 C:C. ne pouvaient s’appliquer;
le juge affirme que c’est 1i 1’opinion de Mignault et il cite trois arr~ts antirieurs.
Or, selon Mignault, peu importe que 1’union soit simplement annulable ou
radicalement nulle;3 il est vrai que cet auteur rel~ve, dans une note, une
opinion en sens contraire, mais il indique qu’on a rifut6 cette opinion. Quant
aux trois arrts cit6s dans l’affaire Richard v. Levasseur, ils ne traitent
aucunement du mariage putatif.31 Le juge aurait pu, toutefois, invoquer un
autre motif pour refuser a
‘6pouse le b nufice du nariage putatif; souffrant
d’ali6nation mentale au point d’6tre incapable de donner un consentement valide
son mariage, elle ne pouvait remplir la condition essentielle du mariage
putatif: la bonne foi; certes, elle n’6tait pas de mauvaise foi, mais elle ne
pouvait davantage 8tre de bonne fol. I1 y a lieu de maintenir, croyons-nous,
que les articles 163 et 164 ‘C.,C. s’appliquent aussi bien aux cas de nullit6
absolue qu’I ceux de nullit& relative; c’est d’ailleurs ce qu’a affirm6 le juge
Casault dans l’arrt Morin v. la Corporation des Pilotes,32 oii il s’agissait d’une
nullit6 absolue r6sultant de la bigamie; le b6n~fice du mariage putatif a, au
surplus, 6t6 accord< le mariage 6tait nul de nullit6 absolue,m sans que la difficult6 fit soulev~e. Quant A la jurisprudence franqaise, elle ne distingue pas selon les causes de nulliti.34 dans plusieurs cas oii Autre question: faut-il qu'une cl~bration ait eu lieu pour que le mariage puisse &tre considr6 comme putatif? Certains auteure 5 estiment que la c~lbration r~guli~re n'est pas indispensable, vu que le 'Code civil parle du mariage "contract6" de bonne foi ,6 il suffirait donc que le consentement ffit donn6. D'autres estiment par ailleurs qu'une apparence de c~lbration est n~cessaire;37 pareille exigence semble logique dans l'itat actuel du droit qu~b~cois, qui ne reconnait qu'une forme de c~l6bration du mariage; on peut difficilement ignorer ici qu'on ne peut se marier que dvant un ministre du 29[1957] C.S. 323. 300p. cit., p. 461. 3 lQuincey v. dame Kedroskie [1951] B.R. 593; D. v. R. [1954] R.L. 271; Dame Bernard v. dame Leduc [1955] C.S. 289. 32(1882) 8. Q.L.R. 222, 5 la p. 223. 33V. notamment Dame Wilson v. Partridge [1959] C.S. 17; Dwyer v. dame Snyder [1957] C.S. 275; Montmigny v. Lelivre (1939), 67 B.R. 197; Stephens v. Falchi [1938] S.C.R. 354; Berthiazme v. dame Dastous (1930, Conseil priv6), 47 B.R. 533; Gilbert v. Gilbert 35 R.L. n.s. 289. 341,azeaud, op. cit., p. 837. 3 5Mignault, op. cit., p. 461; Trudel, op. cit., p. 463. 3 GArt. 163 C.C. 37Turgeon, H., 51 R. du N. 80; Dame Tkachena v. Orrell [1940] C.S. 340 A la p. 344. McGILL LAW JOURNAL [Vol. 6 culte. Nos rapports judiciaires nous offrent un cas-limite i ce sujet, celui d'un mariage contracts dans une maison privie par un prtendu rabbin, sans publica- tion de bans ni licence, sans aucune entree aux registres; la femme, qui croyait contracter une union valable, a obtenu les effets civils du mariage.88 Signalons qu'en France, la jurisprudence admet le mariage putatif m.me en l'absence de c 16bration devant l'officier de l'6tat civil,39 mais elle exige tout de mn~me une apparence de c6lbration. 40 Pour terminer l'tude des conditions du mariage putatif, il y a lieu de s'interroger sur la procedure i adopter lorsqu'on veut bnfficier des disposi- tions des articles 163 et 164 C.C. Le demandeur en nullit6 all6guera sa bonne foi et conclura A ce que le jugement lui accorde le b~n6fice recherch6. En raison des r~gles de la procedure, il serait imprudent de ne pas le faire, quoique certains disent qu'en d~clarant la nullit6 du mariage, le tribunal a le droit et le devoir de se prononcer sur la bonne foi des 6poux, meme sans qu'aucune demande ait 6t faite A. ce sujet.41 Cependant, pareille demande pourrait, semble- t-il, &re faite post6rieurement au jugement qui d~clare la nullit6 du mariage, pourvu 6videmment qu'on ne s'y soit aucunement prononc6 sur ]a bonne ou la mauvaise foi, car alors ii y aurait chose jug~e.42 Quant au conjoint poursuivi en nullit6 de mariage, s'il entend allguer sa bonne foi en vile d'obtenir les avantages qui en r6sultent, il peut le faire dans sa d6fense, sans recourir A la demande reconventionnelle ;42a en effet, le d6fendeur peut faire valoir par sa defense les moyens qui ont r6duit le droit r~clam par le demandeur.4 3 La possibilit6 de proc~der par demande reconventionnelle a mfme 6t6 6cart~e dans un arrt.4 4 Toutefois, on estime que pour obtenir une pension alimentaire, ,le d~fendeur de bonne foi ne pent proc&Ier que par demande reconventionnelle. 45 II - LES EFFETS DU MARIAGE PUTATIF Alors que le mariage nul d~pourvu du caract&re putatif ne produit atcun effet, le mariage putatif "produit les effets civils", pour employer les termes 3SCohen v. Kautnwr (1929), 67 C.S. 94. 39Mazeaud, op. cit., p. 837. 40Planiol et Ripert, Traitg de Droit civil (1939), 12e 6d., t. 1, p. 392; Josserand, 4-Un juge se dit pr~t A. admettre cette th~orie dans l'arr6t Montmigny v. Lelitvre Droit civil Positif franfais (1938), 3e E&. t 1, p. 470. (1939), 67 B.R. 197 a la p. 209. l'arr&t Levinstein v. dame Rogatko (1933), 54 B.R. 538, aux pp. 543-544, oai 4V. 'on parait maintenir qu'une nouvelle demande ne peut &re faite mn~ne lorsque le premier jugement ne s'est pas prononc6 sur la question de la bonne foi. 42aC'est ce qui a 6t d6cid6 dans l'affaire Dwyver v. dame Snyder [1957] C.S. 275. On a d'ailleurs proc&t6 ainsi dans d'autres esp~ees, notamment Montinigny v. Lelikvre (1939), 67 B.R. 197, et Stephens v. Falchli [1938] S.C.R. 354. 4Art. 196 C.P.C.; Montigny v. Lelilre (1939), 67 B.R. 197, A la p. 201. 4 4Laverdibre v. Gauvin [1948] R.P. 233. 4 5Montnzigny v. Lelivre (1939), 67 B.R. 197, au: pages 201 et 208. No. 4] MARIAGE PUTATIF m~mes du Code. Que signifie exactement cette formule? Selon la doctrine la plus sfire, les effets produits avant l'annulation ou la dclaration de nullit6 sont maintenus, alors que le marage cesse de produire des effets pour l'avenir.4 6 En d'autres termes, le mariage putatf produit ,les effets d'un mariage dissous, sans r6troactivit6; il ne produit pas d'effets nouveaux, mais ses effets acquis au jour du jugement subsistent.47 Pareille interpr6tation semble tout A fait logique. Toutefois, le Conseil priv6 s'en est 6cart6 dans l'arr~t Berthiaume v. dame Dastous.48 Alors qu'il s'agis- salt de savoir si la femme putative a droit une pension alimentaire pour l'avenir, le vicomte Dunedin s'est exprim6 ainsi: Two arguments were then put forward by the learned counsel for the appellant directed as to the lady's right to alimony. First, he said that the civil rights referred to were only those which existed up to the date when the marriage was declared null. The simple answer is that the word is produces, not has produced, and the absurdity of such a doctrine when applied to the legitimacy of children, who in the article (164) are linked with the wife, is manifest. Secondly, he said that obviously all the civil rights of a wife which flow from marriage could not continue to exist, e.g. the right to cohabit, and therefore the right of alimony could not exist. It is, however, impossible to suggest on this view that any civil rights appendant to real marriage are not produced by a putative marriage. But the criterion is obvious, those only subsist which are consistent with a real marriage not existing. Alimony is such a right . . . 9 Le crit&re utilis par le ,Gonseil priv-, "those only subsist which are consistent with a real marriage not existing" nous parait plut6t obscur; il ne s'agit peut- &tre que de la traduction du crit~re pos6 par Mignault, mais les termes employ~s par ce dernier sont d6jA beaucoup plus clairs: "Quand on veut connaitre les effets qu'a pu produire un mariage putatif dont la nullit6 a &6 prononc~e, il faut l'assimiler . un mariage r~ellernent valable actuellement dissous. f1 y a entre eux identit6 d'effets." Le Conseil priv , selon nous, s'est m6pris sur la .portde du mariage putatif; nous y reviendrons plus loin, lorsque nous analyserons la question plus precise de la pension alimentaire. Nous pr6f6rons le crit~re utilis6 par Marcad6 et repris par nos tribunaux: le mariage putatif "produit les effets d'un mariage valable, dans I'intervalle entre la cdl6bration et la d&laration judiciaire de nullit6; puis une fois cette d6cla- ration intervenue, il ne produit plus aucun effet; mais, bien entendu, les effets produits se maintiennent i perpetuit6." 50 En suivant cette interpretation aussi logique que simple, il devient plus facile de prciser quels sont les effets en question, tant a 1' gard des 6poux qu'& l'6gard des enfants n~s du mariage.al 46V. notanment Mazeaud, op. cit., p. 837; Mignault, op. cit., p. 457; Trudel, op. cit., p. 462, qui toutefois ne fait plus pareille distinction i la p. 464. 47 Planiol, Ripert & Rouast, Traitg pratique de droit civil frangais, (Paris, 1952), t. 2, p. 253. 48(1930), 47 B.R. 533. 4gBertlhiaume v. dame Dastous (1930, C. priv6), 47 B.R. 533, aux pp. 540 et 541. rMorin v. la Corporation des Pilotes (1882), 8 Q.L.R. 222. 510n pourrait aussi considrer les effets du mariage putatif A l'6gard des tiers. Le Code est muet IA-dessus. En France, la jurisprudence decide que le mariage putatif McGILL LAW JOURNAL [Vol. 6 (a) EFFETS A L EGARD DES tPOUX. A 1'6gard des 6poux, les effets du mariage putatif varient selon que les deux sont de bonne foi ou run d'eux seulement.5 2 1. L'hypothse selon laquelle les deux ipoux sont de bonne foi. Le mariage putatif produit alors les effets d'une dissolution du mariage. En consdquence, Ia liquidation des biens des 6poux s'op~re conform~ment atx r~gles du contrat de marage, ou de la communaut6 l6gale a. d~faut de contmt de mariage; les donations que les 6poux se sont faites par contrat de mariage sont ex~cutoires, sous reserve de 'arrive du terme; ]a femme a droit A son douaire; enfin, si l'un des 6poux est d&c d6 avant le jugement d6clarant le mariage nul, 1'autre conserve ses droits dans la succession du pr6d~c&lt. Considrons de fagon plus dtaill&e certaines de ces cons6quences, et d'abord l'application des conventions matrimoniales. Sur cette question, l'opinion du Conseil priv6 dans l'affaire Berthiaume v. dame Dastous ne peut 6tre suivie; le vicomte Dunedin s'est alors exprim6 ainsi :53 The argument of learned Counsel turned so specially on the question of alimony, that scant mention was made as to the communautd de biens. Their Lordships would have felt inclined to hold that inasmuch as nullity of marriage was declared, it was equivalent to saying that no conmunautt de biefs ever really existed; to declare the dissolution of what never existed would be a pleonastic produit ses effets i l'6gard des ayants cause universels des 6poux, c'est-&-dire leurs hritiers, mais que seul l'poux de bonne foi peut se pr6valoir du mariage putatif contre les ayants cause particuliers et les cr~anciers; quant aux tiers, ils peuvent se pr6valoir contre les 6poux du caractZre putatif du mariage, par application de la th~orie de 'apparence (v. Mazeaud, op. cit., p. 838). Les tribunaux du Quebec reconnaissent aussi que 1'poux de bonne foi pent invoquer celle-ci . 1 6gard des tiers (v. Corporation of the United Townships of Hansfield & Pontefract v. dame Denault, 30 B.R. 204, et Morin v. la Carporation des Pilotes, pr&it6). 5211 n'est pas inutile de pr&iser ici que tant que le mariage n'est pas d~clar6 nul, il produit tous les effets d'un mariage valable. Aussi a-t-on jug6 que malgr6 le d&ret ecclisiastique d&larant n mariage invalide pour parent6 au quatri6me degr6 dont il n'y a pas eu dispense, les effets civils du mariage continuent jusqu'au jugement du tribunal civil le d6clarant nul, et qu'en cons6quence, pendant les 6poux continuent i Etre considr~s comme tels pour les effets civils, la communaut6 continue d'exister, le mar demandeur demeure oblig6 de fournir des aliments A la femme d~fenderesse (Levesque v. Ouellet (1902), 22 C.S. 181). V. aussi Fitzallen v. Rieutord (1905, C. de revision), 27 C.S. 296; Cross v. Provost (1898), 15 C.S. 184; De Grand- mont v. la Sociiti des Artisans canadiens-frangais de la Cit de Montreal (1898), 15 C.S. 147; Dame Ross v. dame Ross (1937), 62 B.R. 169. Cependant, on considare que la reconnaissance d'un mariage nul, faite de la part du d~fendeur, dispense le tribunal de d&larer judiciairement le mariage nul avant de lui appliquer les effets du mariage putatif (v. Berthiamne v. dame Dastous (1930, Conseil priv6), 47 B.R. 533; et Morin z. la Corporation des Pilotes (1882), 8 Q.L.R. 222); cette derni6re attitude nous laisse perplexe. l'instance, 53(1930, C. priv6), 47 B.R. 533, A la p. 541. No. 4] MARIAGE PUTATIF proceeding. But the learned Judges of the Court below who decided that the marriage was valid have had no opportunity of saying what are exactly the civil rights of a putative marriage, and since the case was first heard their Lordships have had their attention directed to several cases which seemed to point to a settled practice as to this, which their Lordships in such a matter would not the case should be willingly disturb. They are, remitted to the Superior Court of Quebec to deal with the civil effects of a marriage held null but allowed to be putative. therefore, of opinion that La th6orie contraire, selon laquelle les conventions matrimoniales sont ex- cutoires au cas de mariage putatif, a 6ti clairement admise en doctrine54 et . plusieurs reprises par nos tribunaux. 55 Dans I'affaire Morin v. la appliqu~e Corporation des Pilotes,5 6 notamment, le juge Casault s'exprirne ainsi: La dissolution du mariage putatif met fin au contrat: c'est sa date qui determine les droits des parties. La communaut6 est dissoute de ce moment: la femme la prend dans l'6tat qu'elle est alors . . . Elle conserve les droits de survie, tel que le douaire, que la loi a mis au contrat, i sa date, et les conventions matri- moniales spfciales qu'elle y a elle-mme stipules, mais seulement sur les biens qui y 6taient sujets lorsque la nullit6 a &6, soit prononc6e soit autrement 6tablie d'une mani~re effective. La Cour supr&ne du Canada a elle-m~me rang6 'application des conventions matrimoniales parmi les effets du mariage putatif, dans l'important arr~t Stephens v. Falchi.57 Pour r~pondre A. l'objection tirre du principe quod nullum est, nidlum producit effectum, le juge en chef Duff y cite Pothier, selon qui la bonne foi des parties qui ont contract6 un mariage nul, suppl6e au vice du mariage, donnant A celui-ci les effets civils "A l'effet de confirmer entre elles leurs conventions matrimoniales et de donner A ia femme un douaire". 58 Quant Al a question de savoir si les ipoux de bonne foi sont successibles entre eux, il y a lieu de distinguer selon que le droit de succession s'est ouvert ou non avant la declaration de nullit6. II est certain que si le jugement de nullit6 est post~rieur au d6c~s de 'un des 6poux, le survivant de bonne foi succde au pr~d~c6d6; les auteurs et les tribunaux sont d'accord sur ce point.59 IMais 54Langelier F., Cours de droit civil, t. v, p. BTR; Mignault, op. cit., p. 457; Trudel, op. cit., p. 464; Baudouin, L., op. cit., p. 195. 55Damne Wilson v. Partridge [1959] C.S. 17, oii l'on 6carte express~ment l'opinion pr6cit~e du Conseil priv6; L. v. G. [1948] B.R. 413, aux pp. 421 et 422, arr~t comment6 par Me H. Turgeon A 51 R. du N. 80; Cohen v. Kautner (1929), 67 C.S. 94, , Ia. p. 99; Gregory v. Dyer (1841, Cour d'appel), 15 L.C.J. 223. 51(1882), 8 Q.L.R. 222 i la p. 225. 57[1938] S.C.R. 354. Il s'agissait de savoir si le mar putatif pouvait invoquer une les affaires matrimoniales des futurs disposition du contrat de mariage soumettant 6poux aim lois de l'Italie, oil le mar 6tait alors domicili&. 58Idem, A la p. 362. Pothier repousse d'ailleurs cette autre objection, 6voqu~e par le Conseil priv6 dans l'arr~t Bertiiaume v. dame Dastous et selon laquelle on ne peut appliquer les conventions matrimoniales vu que celles-ci d6pendent de la condition si mptliae sequantur, laquelle n'a pas 6t6 accomplie puisque le mariage est nul; la r~ponse de Pothier est que la bonne foi supple i la nullit6 du mariage et fait regarder la condition comme accomplie. 5PV. notamment Morin v. la Corporation, des Pilotes (1882) 8 Q.L.R. 222; et Stephens v. Falchi [1938] S.C.R. 354. McGILL LAW JOURNAL [Vol. 6 il y a eu quelque h6sitation en presence de l'hypoth~se selon laquelle le jugement de nulit6 est prononc6 du vivant des deux ipoux; Mignault 6carte le droit de succession en l'occurrence, 60 alors que G6rard Trudel ne fait pas la distinction pr~cit~e.61 L'opinion de Mignault doit 6tre maintenue, car, on 'a vu, le mariage ,putatif ne peut produire de nouveaux effets. Dans l'affaire Morin v. la Corporation des Pilotes, le juge Casault a accept6 l'opinion en ce sens de nombreux commentateurs du Code Napoleon, qui soutiennent, A 1'encontre de Laurent, que lorsque le mariage a 6t dclar6 nul avant le d~ces de 'un des conjoints, it n'y a plus d'gpoux et qu'en consequence le titre mme de la vocation successorale manque quand la succession vient A s'ouvrir.02 S'appuyant, avec raison, sur cette doctrine, de juge Casault a refus6 a une femme de bonne foi la possibilit6 de r~clamer des droits ouverts apres Ia reconnaissance juridique de Ia nuliti de son mariage, en l'occurrence une pension de veuve, qu'elle aurait pu r6clamer si le mariage n'avait pas 6t6 reconnu comme nul avant le d6cts du mar. 2. L'hypothse selon laquelle un seul des 6poux est de bonne foi. Lorsqu'un seul des 6poux est de bonne foi, il b6n6ficie des effets civils du mariage, alors que son conjoint s'en voit priv6. 63 L'Ipoux putatif est done le seul AL pouvoir exiger l'ex~cution des donations et autres avantages du contrat 'arriv6e du terme le cas 6ch6ant,0 4 et de mariage, sous l'6vidente reserve de il conserve seul son droit de succession i l'6gard de son conjoint d6c~d6 avant le jugement de nullitk. 65 Si seul l'6poux de bonne foi peut exiger le partage de ]a communaut6, it n'est certes pas oblig6 de le faire. On admet en France qu'il peut demander la liquidation du regime matrimonial sur ]a base d'une soci6t6 de fait, ce qui ne 'autorise cependant pas A demander l'application des dispositions du contrat de mariage qui lui sont favorables, quitte a imposer i son conjoint la liquida- tion sur la base d'une socit6 de fait pour le surplus; il doit accepter toutes les conventions matrimoniales ou les rejeter en bloc.66 ,Cette observation de Ia doctrine franoaise nous parait applicable dans notre droit. 6oop. cit., p. 458. 61Op. cit., p. 465. 02(1882), 8 Q.L.R. 222, A la p. 226. 63V. notamment l'arr&t F. v. G., [1951] C.S. 458. 64V. l'arr~t Grevey v. Dyer (1841, Cour d'appel), 15 L.C.J. 223, oai une femme qui avait 6pous6 de bonne foi un homme dejA mari6, s'est vu accorder ses avantages matrimonlaux, plus prieis~ment sa part de communaut6. 65Cathcert v. The Union Building Society (1864), 15 L.C.R. 467, une femme qui avait 6pous6 de bonne foi un homme deji mari&, a W admise A succder A son mar! concurremment avec la premiere femme. Sur cette question particuli~re des droits du premier conjoint an cas d'un mariage postrieur qui serait putatif, v. Stcphens v. Falchi [1938] S.C.R. 354 aux pp. 361. 365, 367 et 368. 66Planiol, Ripert & Rouast, op. cit., p. 259. No. 4] MARIAGE PUTATIF La principale difficult, qui se pr6sente ici a trait au droit qt'aurait 1'poux putatif de r~clamer des aliments de son conjoint. Le Conseil priv6 a donn A; ce sujet une opinion nettement affirmative dans l'affaire Berthiaume v. dame Dastous,67 opinion qui a 6t6 suivie postrierement dans au moins trois arr&s de la Cour sup6rieure.68 Nous estimons neanmoins que le droit de l'Hpoux d'exiger de son conjoint une pension alimentaire apr~s la declaration de nullit6 du mariage ne peut 8tre l'un des effets du mariage putatif; celui-ci ne pett en effet produire d'effets pour l'avenir. Apr~s avoir h~sit6 sur ce point, la doctrine franqaise en est venue . refuser la pension alimentaire sur la base du mariage putatif;69 elle considre cependant que l'6poux de mauvaise foi est responsable du dommage que l'annulation du mariage entraine soit au point de vue moral soit au point de vue p6cuniaire, et qu'en reparation de ce prejudice il pett re condamn6 A servir une pension alimentaire A son conjoint de bonne foi.70 ,Cette solution a le double m6rite d'Etre iquitable et de sauvegarder la r~gle fondamentale selon laquelle le mariage putatif ne produit que les effets civils d'un mariage dissous, alors que les arr~ts prcit~s sapent cette r gle a sa base. La pension alimentaire en favetr du conjoint de bonne foi n'est pas fond~e sur l'article 164 du ,Code civil, car l'obligation de secours entre 6poux a disparu, mais bien sur la responsabiliti civile d~lictuelle. Nonobstant cette observation, il est fort possible que nos tribunaux continuent A suivre la directive pricit~e du Conseil priv6, m~me si la rbgle du stare decisis n'existe pas dans notre droit. (b) ,EFFETS I L.'GARD DES EXNANTS. Le ,Code civil dispose que les enfants b6n~ficient des effets civils du mariage d~s que lun de leurs parents est de bonne foi.71 L'effet principal, quant A eux, est 6videmment le fait qu'ils sont et demeurent legitimes, nonobstant la nullit6 du mariage de leurs parents; ii en est ainsi, mnme si le mariage putatif n'a fait que les ltgitimer. 2 Selon 1expression de Pothier, reprise par la Cour suprne du Canada, le mariage putatif donne aux enfants qti en sont n6s les droits de famille et tous les autres droits qu'ont les enfants n6s d'un ligitime mariage. En cons&qJmce, ils ont droit A des aliments et succ~dent A leurs p6re et mre, mn~me A celui d'entre eux qui serait de mauvaise foi. Pr&cisons que leur droit de succession survit i la d~claration de nullit6 du mariage, contrairement A ce qu'on a vu au cas du conjoint; c'est que le droit de succession n'est pas, quant 67(1930, C. privE), 47 BR. 533. OSLolli v. Husolo, [1947] C.S. 17; Dame Wilson v. Partridge [1959] C.S. 17; Dame Rogatko v. Levinstein (1933), 71 C.S. 243, et (1933), 54 B. 538 i la p. 540. 69PIaniol, Ripert & Rotiast, op. cit., p. 258. 70PIaniol, Ripert & Rouast, op. cit., p. 261. T1Art 164 C.C. 72Dame Tkachena v. Orrell [1940] C.S. 340 a la p. 344. 73Stephens v. Falchi [1938] S.C.R. 354 A la p. 362. McGILL LAW JOURNAL [Vol. 6 aux enfants, un nouvel effet alors que le conjoint ne poss~de plus dans tous .ia mort du pr6d& d6, la qualit6 A laquelle la 'loi attache le droit de -les cas, succession. 74 Par contre, seul l'poux de bonne foi peut exercer ses droits dans la succession de ses enfants. Une difficult6 se pr~sente quant A ]a puissance paternelle et au droit de garde. On d&ide en France que seul 1'6poux de bonne foi les conserve." ' Mignault est de cet avis en ce qui concerne la puissance patemelle ;70 it devrait en 8tre ainsi de ses attributs, dont le droit de garde. Quant A G6rard Trudel, it estime que .a puissance paternelle n'appartient qu'A I'6poux de bonne foi, mais que le seul avantage de l'enfant est pris en consid6ration quand ii s'agit de d6cider qui en aura la garde;77 cette opinion comporte une certaine contradiction. Le recours A la jurisprudence ne nous est gu~re plus utile. Dans l'affaire Bernstein v. Lawrence 78 oil il s'agissait d'un mariage d6clar6 nul parce que la femme 6tait d6jA marine, on a jug6 que la garde dolt aller A la m~re, nonobs- rant sa mauvaise foi, si elle est en position de prendre soin de 1'enfant et de 1'6duquer, spdcialement si le marl, en raison de son occupation, doit s'absenter du foyer durant la majeure partie de la journ~e. Par contre, dans un arrt plus r~cent, 79 on a estim6 que seul l'6poux de bonne foi conserve da puissance paternelle. Cette derni~re solution est incontestablement dans la ligne du mariage putatif, alors que l'autre s'en 6carte. Toutefois, la tendance d'une certaine jurisprudence A faire pr~valoir l'intr~t de l'enfant sur les r~gles de la puissance paternelle, pourrait bien finir par l'emporter dans le present cas. rop bri~vement exposes, les conditions et les effets du mariage putatif. Une jurisprudence abondante a largement contribu6 A faire de la lumi~re sur cette question, au - sujet de laquelle le l6gislateur s'est montr6 vrainent trop circonspect; toutefois, les arr~ts ne constituent pas tous des guides d'une valeur 6gale; aussi avons- nous voulu mettre en relief ceux qui aident A constituer une v6ritable th6orie du mariage putatif, tout en 6cartant les autres. nous avons pu le constater - Tels nous paraissent 8tre, 74Morin v. la Corporation des Pilotes (1882), 8 Q.L.R. 222 A la p. 226. 75Mazeaud, op. cit., p. 838. 760p. cit., p. 461. 770p. cit., p. 466. 7879 C.S. 380. 79Dame Rishikof v. Neidik [1959] R.L. 321.

in this issue Some Aspects of the Law of Contempt of Court in Canada, England, and the United States

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