Article Volume 13:1

Le Nouveau Code De Procédure Civile

Table of Contents

Le Nouveau Code de Proc~dure Civile

Andr6 Valiquette *

Le nouveau Code de procedure civile est entr6 en vigueur le ler
septembre 1966. I1 r6git, nous dit l’article 1, les affaires commenc6es
depuis le ler septembre 1966 et s’applique aussi aux affaires alors
pendantes, sans avoir cependant pour effet d’abr~ger un d6lai qui
aurait d~jh commence A courir, ni d’invalider ce qui aurait djh
t
valablement fait.

Ce nouveau Code de procedure 6tait devenu ndcessaire par l’aug-
mentation rapide des affaires judiciaires depuis les vingt-cinq der-
nitres ann~es –
augmentation qui avait forc6ment entrain6 l’encom-
brement des r6les et le retard dans la conclusion des litiges -, par
une jurisprudence volumineuse et parfois ind6cise ou contradictoire
sur des points d’une importance capitale pour les praticiens et par
la d~su6tude de certaines dispositions du Code de procedure, telles
que la cession de biens et le capias. Le but du lgislateur en 6dictant
de nouvelles r~gles de proc6dure est clairement exprim6 A
‘article 2:
les r~gles de proc6dure sont destinies A faire apparaitre le droit et en
assurer la sanction. Nous examinerons maintenant les dispositions
qui nous semblent le mieux exprimer cette double intention du l6gis-
lateur.

I – R~gles d’interpr~tation:

Les dispositions s’interpr~tent de mani~re A faciliter la marche
normale des proc~s, plut~t qu’A la retarder ou b, y mettre fin pr~ma-
tur~ment (article 2).

Au cas de divergences entre le texte frangais et le texte anglais,
si la disposition modifie la loi ancienne, le texte qui exprime le mieux
rintention de l’article pr6vaut (article 3). Si le code ne pr6voit pas
un moyen d’exercer un droit, on y suppl6e par une procddure non in-
compatible avec les r~gles qu’il contient ou avec quelque autre dispo-
sitions de la loi (article 20).

II – Pouvoirs des juges, des tribunaux et du protonotaire:

A) Les juges et les tribunacux (article 46):
1. Ils ont tous les pouvoirs ndcessaires A l’exercice de leur ju-
ridiction;

* Avocat au Barreau de Montreal.

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2. Ils peuvent prononcer, mgme d’office, des injonctions ou des
r6primandes;
3. Ils peuvent supprimer des 6crits ou les d6clarer calomnieux;
4. Ils peuvent rendre toutes ordonnances qu’il appartiendra pour
pourvoir aux cas oii la loi n’a pas pr6vu de remade spcifique.

B) Le Protonotaire (articles 41 et 42):

En plus des cas oaf la loi le d6clare express6ment, le Protano-
taire a les pouvoirs du juge en chambre, lorsque le juge est
absent ou incapable d’agir et qu’un retard risquerait d’entrainer
la perte d’un droit ou de causer un dommage s6rieux; dans ce
cas, sa d6cision peut 6tre revis~e par le juge ou le tribunal et si
elle est infirm~e, les choses sont remises dans le mgme 6tat oji
elles 6taient avant qu’elle soit rendue.

III – Fonction des parties et rgunion d’actions:

A) Fonction des parties (article 67)

Plusieurs personnes dont les recours ont le m~me fonde-
ment juridique ou soulvent les m~mes points de droit ou
de fait peuvent se joindre dans une mgme instance et la de-
mande est port6e devant la Cour comp6tente A connaitre de
taus les recours.

B) Rgunion d’actions (article 271)

Plusieurs actions m~me entre des parties diffdrentes peu-
vent 6tre r6unies pour 6tre intruites et jug6es sur la mgme
preuve; ou pour que ]a preuve dans l’une serve dans l’autre;
ou pour que l’une soit instruite et jug6e la premiere, les
autres 6tant suspendues jusque M .

IV- Certaines r~gles de procedure 6crite:

A) Uine requite ne peut 8tre contest~e qu’oralement (article 88)
B) Affidavits:
1. La d6n6gation de la signature ou d’une partie importante
d’un 6crit sous seing priv6, ou celle de l’accomplissement des
formalit~s requises pour ]a validit6 d’un 6crit; la prftention
des h6ritiers ou repr~sentants l6gaux du signataire de l’un
des 6crits pr6cit6s qu’ils ne connaissent pas l’6criture ou la
signature de leur auteur; et la d6n6gation d’un document
vis6 par l’article 1220 C.C. doivent 6tre appuy~es d’un affi-

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davit. A d6faut de quoi, les 6crits sont tenus pour reconnus
ou les formalit6s accomplies (article 89).

2. La d6fense A une action sur compte, lettre de change, cheque,
billet A ordre ou reconnaissance de dette; en r6clamation
de salaire ou de loyer, ou en remboursement d’un pr~t d’ar-
gent; en recouvrement de taxes, contributions et cotisations,
doit 8tre appuy6e d’un affidavit, autrement elle est r6put6e
non avenue (article 176).

3.

Interrogatoire sur les all6gations de l’affidavit:
Le d~clarant peut tre assign6 devant le juge ou le protono-
taire pour 6tre interrog6 sur la v~rit6 des faits attest6s par
l’affidavit. Le d6faut de se soumettre A cet interrogatoire
entrane le rejet de l’affidavit et de l’acte au soutien duquel
il avait 6t donn6 (article 93).
Si cet interrogatoire fait voir que la d6fense est frivole, la
d6fense sera rejet~e (article 177).

C. Simplification de la proc&dure:

Le d6fendeur peut par sa d6fense se porter demandeur re-
conventionnel pour faire valoir contre le demandeur toute
r6clamation lui r6sultant de la m~me source que la demande
principale ou d’une source connexe (article 172).
L’intim6 peut former appel incident par simple d6claration
A cet effet produite en m~me temps que son acte de compa-
rution (article 500).

V –

Moyens prliminaires:

Lorsqu’il est possible de redresser le grief sur lequel une
exception de non-recevabilit6 est fond~e, le demandeur peut
obtenir un d6lai A cette fin (article 166).
Les d6lais de moyens dilatoires sont de rigueur, sauf pour
autoriser la mise en cause d’un tiers ou forcer le demandeur
A opter entre des recours (article 170).

VI-

Actions identiques ou analogues en Cours Provinciale et Su-
p6rieure (article 273):

Lorsque la Cour Sup6rieure et la Cour Provinciale sont sai-
sies d’actions ayant le m~me fondement juridique ou soule-
vant les m~mes points de droit ou de fait, la Cour Provin-
ciale doit, sur demande et pourvu que cela ne cause pas un

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pr6judice s6rieux, suspendre l’instruction et attendre le
jugement de la Cour Sup6rieure pass6 en force de chose
jug~e.

VI-

R61e special (article 275)
C’est le r6le des affaires qui doivent 6tre instruites et jug~es
d’urgence, par opposition au r~le g6n6ral sur lequel sont por-
t6es toutes les autres causes.

Doivent 6tre instruites et jugges d’urgence:

A. Les instances soumises A ]a proc6dure sommaire lors de ]a

mise en vigueur du Code (article 1).

B. Les proc6dures incidentes A l’ex~cution forc~e du jugement

(article 576).

C. La contestation de ]a r6clamation d’un cr6ancier sur une
saisie-arr~t de traitements, salaires ou gages (article 646).
D. La contestation d’une saisie avant jugement (article 740).
E. Toute demande relative A l’obligation alimentaire entre

6poux ,ou entre parents ou alli6s (article 827).

F. Les recours extraordinaires, soit les moyens de se pourvoir
en cas d’usurpation de charges ou franchises, en cas de refus
d’accomplir un devoir qui n’est pas de nature purement
privfe, et contre les procedures ou jugements des tribunaux
soumis au pouvoir de surveillance et de contr6le de ]a Cour
Sup6rieure (article 835).
De plus certaines mati~res ont pr6s6ance. Ainsi l’appel de la
decision du juge sur une opposition A un mariage (article
826) et les demahdes en mati6re d’habeas corpus en Cour
Sup6rieure et en appel (article 861).
En vertu de l’article 12, les mati6res qui ont pr6s~ance et cel-
les qui doivent 6tre instruites et jug6es d’urgence sont ins-
truites entre le 30 juin et le ler septembre, et entre le 23
d~cembre et le 7 janvier.

VII-

Conference Prdprratoire & Y’instruction (article 279):

Elle a pour but de simplier le proc~s et d’abr~ger l’enqu~te. Les
ententes et decisions qui y sont prises r~gissent l’instruction, mais le
juge du proc~s peut commettre d’y d6roger pour pr6venir une injus-
tice.

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VIII-

Proc s par jury:

Le juge peut, m~me de sa propre initiative, rejeter l’action d~s
apr~s la cl6ture de l’enqu~te du demandeur, s’il est d’avis que la preuve
ne justifie pas un verdict pouvant entrainer un jugement de condam-
nation (article 370).

IX –

Administration de la preuve:

A- Interrogatoire pr~alable (articles 397 et 898):

Dans une action en responsabilit6, on peut interroger toute

personne impliqu6e dans la commission du fait dommageable.

B- Examen midicaI:

1 – Il peut Atre tenu devant un ou plusieurs experts. I1 peut y
avoir plus d’un examen, mais aux frais de la partie qui le
demande. Aucun d6lai n’est fix6 pour en faire la demande
(article 399).

2- On peut obtenir par ordonnance, la communication d’un
dossier d’h6pital, et la permission d’en prendre copie (ar-
ticle 400).

C- Production de documents:

M~me un tiers doit donner une communication d’un docu-
ment ou exhiber un objet en sa possession et se rapportant au litige.

X –

Conservation de la preuve:

A. Toute personne peut demander l’Finterrogatoire ad futuram
memoriam de t~moins dont elle craint l’absence ou la d~faillance et
l’examen de toute chose dont l’6tat peut influer sur le sort du litige.
Elle doit satisfaire le tribunal qu’elle pr~voit d’etre partie h un litige
et qu’elle a raison de craindre qu’une preuve n6cessaire ne se perde ou
ne devienne plus difficile A pr6senter (article 438).

B. Celui qui ex6cute sur un immeuble des travaux susceptibles
d’endommager un immeuble voisin peut en demander l’examen (article
440).

XI-

Des jugements:

A. Jugement doclaratoire sur requite:

On le demande dans le but de faire d6terminer son 6tat,
quelque droit, pouvoir ou obligation pouvant r~sulter d’un contrat,

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testament, ou de tout autre 6crit testamentaire, statut, arrgt6 en con-
seil, r~glement ou r6solution d’une corporation municipale (article
453).

B. Partage de la responsabilit6 des co-dfendeurs solidaires

(article 469):
Si la preuve le permet, le jugement pronongant une condam-
nation solidaire contre les auteurs d’un dommage, doit d6terminer
pour valoir entre eux seulement, la part de chacun dans la condam-
nation.

XII –

L’appel et la Cour d’Appel:

A. Appel du jugement interlocutoire:

L’interlocutoire rendu au cours de l’instruction, ne peut 6tre
mis en question que sur appel du jugement final; mais il y a appel
imm6diat:

1 – s’il rejette une objection A la preuve fond6e sur l’article 308

(secret professionnel) ou

2 – s’il maintient une objection A la preuve (article 29).

B. Pouvoirs de la Cour d’Appel:

1 – Proc~s par jury: le jugement suivant le verdict, peut Atre
confirm6 ou r6form6 par ]a Cour d’Appel, qui peut ordonner
un nouveau proc~s, appliquant le remde qui lui paralit le
plus propre A remplir les fins de la justice, mgme s’il n’a
pas 6t6 sp6cialement demand6 (article 381).

2- A 1’occasion d’un incident: la Cour d’Appel peut permettre
]a production de documents, recevoir des affidavits, enten-
dre des t6moins, et m6me renvoyer la cause devant le tribu-
nal de premiere instance pour qu’il y soit fait quelque preuve
s’y rapportant (article 509).

3- La Cour d’Appel peut permettre A une partie d’amender
ses actes de proc6dure, de mettre en cause une personne
dont ]a pr6sence est n6cessaire, et de pr6senter une preuve
nouvelle en des circonstances exceptionnelles.
Elle a tous les pouvoirs n6cessaires A l’exercice de sa juri-
diction, peut rendre toutes les ordonnances propres A sau-
vegarder les droits des parties, et peut accorder une per-

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mission sp6ciale d’appeler apr~s l’expiration du d6lai d’ap-
pel, mais avant l’expiration des six mois suivant le juge-
ment, si une partie d6montre qu’elle a 6t6 en fait dans
l’impossibilit6 d’agir plus t6t (article 523).

XIII –

Exzcution des jugements:

A. La premire saisie-ex6cution doit

tre pr6c6d6e d’une de-
mande de paiement dont mention est faite sur le procs-verbal de l’of-
ficier instrumentant (article 562).

B. L’opposition de celui qui s’est d6jA oppose, n’op~re pas sursis
de l’exdcution, sauf si elle est fond6e sur des faits survenus depuis la
premiere opposition (article 603).

XIV –

Saisie avant jugement:

La saisie avant jugement des biens, meubles et immeubles
d’un d6fendeur, peut se faire avec l’autorisation d’un juge si le de-
mandeur craint que sans cette mesure, le recouvrement de sa cr6ance
soit mis en p$ril (article 733).

XV-

Le bornage:
II doit 6tre pr6c6d6 d’une mise en demeure de quinze jours

de consentir au bornage, et convenir d’un arpenteur (article 762).

Si les parties ne s’entendent pas, celui qui a signifi6 la mise
en demeure porte sa demande en justice par la production de la mise
en demeure, avec avis de dix jours de comparalitre A la partie adverse
(article 764).

Si les parties s’entendent, mais l’une d’elles n’accepte pas
les conclusions du rapport, l’une ou l’autre peut produire au greffe
la mise en demeure, le rapport de l’arpenteur, les pices l’accompa-
gnant, et la preuve recueillie par l’arpenteur, et cette production est
introductive d’instance avec avis A la partie adverse de comparaltre
dans les dix jours (article 765).

Le tribunal peut ordonner la mise en cause des propri6taires
d’h6ritages non contigus h celui du demandeur, si le bornage ne peut
6tre fait sans les affecter (article 769).

XVI –

Jugements non sujets & appel:

A. Celui qui accorde, refuse ou retire l’assistance judiciaire

(article 109).

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B. Celui qui ordonne la r6union d’actions (articles 270 et 271),
et l’ordonnance par le juge du proc~s r~voquant ce jugement (article
272).

C. Celui qui fixe le lieu et ]a date du proc~s par jury (article

334).

D. Celui qui refuse le proc~s par jury ou cong6die les jurs

(article 337).

E. Celui qui d6cide de la composition du jury (article 339).
F. Les decisions et ordonnances se rapportant A la formation

du jury et sa r6cusation (article 359).

G. Les decisions se rapportant A ]a conservation de la preuve

(article 447).

H. La d6cision fixant la r6mun6ration d’un d6biteur (article

649).

II y a 6videmment bien d’autres dispositions du nouveau
Code qui m6riteraient une mention sp~ciale. Par exemple, les recours
ou peines de dommages-int6r~ts, les nombreux cas d’outrage au tri-
bunal, les modifications apport6es dans les ddlais de contestation, les
demandes pouvant dor6navant 6tre pr6sent6es au protonotaire.

Nul doute enfin qu’il s’6difiera une jurisprudence fond6e
sur l’6tude comparative entre l’ancien et le nouveau Code, surtout
lorsqu’on consid~re l’article 3:

“Dans le cas de divergence entre les textes frangais et an-
glais de quelque disposition du present code, le texte qui se rapproche
le plus de la loi ancienne doit pr6valoir, A moins que la disposition ne
modifie la loi ancienne;.. .”