1995]
J.-C. GALLOUX- STATUT DES GAMtTES HUMAINS
Le statut des gametes humains
en droitfranpais contemporain
Jean-Christophe Galloux*
Apr~s avoir fait un historique sur le statutjuridique
des gametes humains en droit frangais, I’auteur se pen-
che, d’abord, sur la nature juridique des gametes hu-
mains et conclut que ceux-ci sont des choses qui, cepen-
dant, cominandent un r~gime juridique propre. I1 ana-
lyse done, d’une part, ces chases en rapport avec les per-
sonnes. 11 note qu’avant 1994, s’il est ardu de qualifier
les gametes de choses ou de personnes, il est plus impor-
tant de connaitre l’utilisation qui en sera permise par la
loi. Suite A l’adoption des lois de 1994, par contre, le
corps humain est ddsormais considdr6 comme une
chose, de sorte que les gametes sont eux aussi des cho-
ses aussi bien dans le corps qu’excrt6s, recueillis ou
prdlev6s hors de lui. D’autre part, l’auteur analyse les
gametes comme des choses particuli~res. I1 note que
dans la hidrarchie de I’activitd biologique corporelle, les
gametes occupent une place proche de celle de
l’embryon.
Ensuite, l’auteur traite du regime juridique des
gametes humains. Ces demiers subissent une double s6-
rie d’opdmtions. Premi~rement, leur recueil exige un
acte de disposition du donneur et il est soumis i des mo-
dalit6s juridiques et pratiques. Deuxi~mement, une fois
les gain~tes recueillis, seule leur utilisation aux fins de
procr6ation est autoris6e par la loi.
En conclusion, l’auteur reconnait que le statut ju-
ridique des gaintes humains en droit frangais s’est
considrablement Wlairci depuis les lois adopt6es en
1994. II soulve finalement que les lois de 1994 ayant
dtd vot6es pour one plriode de cinq ans, un nouvel exa-
men permettra sans doute de rem&lier aux imperfections
toujours pr6sentes.
After detailing the history of the juridical status of
human gametes under French law, the author examines
the juridical nature of human gametes and concludes
that they are objects requiring their own legal regime.
The author then compares these objects to persons. He
notes that, before 1994, it was more important to discern
the legally permisaible uses of human gametes than it
was to determine whether they were objects or persons.
Conversely, after the adoption of the 1994 laws, the hu-
man body was considered an object; gametes were thus
considered objects whether they were within the body or
extracted therefrom. The author analyzes gametes as
particular objects, however, noting that within the hier-
archy of biological activity, gametes occupy a place
close to that of the embryo.
The author then surveys the legal regime regarding
human gametes, which consists of two stages. Frst,
collecting the gametes requires the donor’s act of al-
ienation and is subject to juridical and practical varia-
tions. Second, once the gametes are collected, the law
only authorizes their use for purposes of procreation.
The author concludes with the recognition that
French law governing the juridical status of human
gametes has been clarified since the the adoption of the
1994 laws. On a final note, the author mentions that the
1994 laws remain in force for a period of five years and
that following that period, a new examination of them
will no doubt provide an opportunity to remedy their
imperfections.
Agr6g6 des facult6s de droit, professeur A l’universit6 de Versailles, codirecteur du DESS du droit
des hautes technologies.
Revue de droit de McGill
McGill Law Journal 1995
Mode de r6f6rence: (1995) 40 R.D. McGill 993
To be cited as: (1995) 40 McGill W. 993
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
Introduction
Sommaire
I. La nature juridique des gambtes humains
1.
A. Les gamtes humains :des choses et non pas des personnes
La nature juridique des gametes avant les lois de 1994
a.
b.
c.
La nature juridique des gametes selon les lois de 1994
Les pratiques m6dicales
La jurisprudence
La doctrine
2.
B. Les gametes humains: des chosesparticulires
1.
2.
Les gametes
Les gametes, le corps, les 616ments et les produits du corps
a.
La distinction des gametes et des autres materiels biologi-
ques
L’absence de distinction entre les gamntes
b.
H. Le regimejuridique des gametes humains
1.
A. La disposition initiale des gametes
L’auteur de la disposition
a.
La situation antirieure aux lois de 1994
b.
Les rkgles nouvelles
Les modalit6s de la disposition
a.
b.
Les modalitis juridiques du don de gantes
Les modalitispratiques du don de gamNtes
2.
B. L’utilisation des gamtes
1.
2.
La destination exclusivement procr6ative des gametes
Le contrtle des derives eugdniques
Conclusion
1995]
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMETES HUMAINS
Introduction
La g~n~ration est la continuation de la
Creation’.
Pie XII
Ce ne sont, en r6alit6, ni des paternit6s ni
des maternit~s qui sont donn~es, mais
seulement des gametes.
E Terre
Les gametes humains, sperme et ovules, ne .sont entr6s que rcemment dans le
champ de l’analyse juridique. I a fallu attendre le d6veloppement des techniques de
procr6ation m6dicalement assist6e au cours du demier quart de ce si~cle pour que pa-
raissent des 6tudes doctrinales et des d6cisions jurisprudentielles h leur 6gard, ou que
des textes les visent.
Entre la premire ins6mination r6alise h 1’aide du sperme d’un tiers par le docteur
am6ricain Pancoast en 1884 et l’ouverture du premier Centre d’6tude et de conserva-
tion du sperme (C.E.C.O.S) en France 1’h6pital Bic~tre en 1973, les jurisconsultes ont
eu bien peu l’occasion de se prononcer sur le statutjuridique des gametes humains. A
partir de ce moment, les techniques de la procreation m6dicalement assist6e vont sortir
de la clandestinit6 aur6ol6es d’une caution scientifique et m6dicale en meme temps que
les gametes vont entrer sur le march6 des produits et 616ments d’origine humaine n6-
cessaires h l’&onomie m6dicale.
Le silence du droit civil frangais pendant cette p6riode s’explique par le double
phnom~ne de la condamnation morale de l’ins6mination artificielle et de l’absence de
perception de ces mat6riels biologiques en tant que tels par le syst~me juridique.
L’ins6mination artificielle a sans doute 6t6 pratiqu6e de fa~on marginale pendant
des ann6es dans le secret des cabinets m~dicaux, cette pratique ayant 6t6 limit6e par
l’impossibilit6 de conserver le sperme (du moins, jusqu’aux ann6es quarante)4 . Quant
IPie XII, <'Encyclique "Humani Generis" du 12 aot 1950 sur certaines opinions fausses qui me-
nacent de ruiner les fondements de la doctrine chrtienne>> dans L’Encyclique <
Texte latin et traductionfrangaise, Paris, Casterman, 1951, 91; voir aussi G. Vandebroek et L. Ren-
wart,
semblent avoir exist6 d~s 1780 (N.J. Mazen, <
4 L’activit6 privde d’insmination artificielle a perdurd, de fagon officielle et licite jusqu’A l’entrde
en vigueur des Ddcrets du 8 avril 1988 (Dicret n0 88-327 du 8 avril 1988 relatifaux activitis de pro-
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au don d’ovules, il resta longtemps inenvisageable pour une cause identique et en rai-
son de la n6cessit6 d’une intervention m6dicale devant figurer dans leur recueil. N6an-
moins, d~s 1949, l’Acad6mie des sciences morales et politiques condamnait le don de
sperme qui constituait une atteinte aux assises du mariage, de la famille et de la soci6-
t6.>>5 La meme ann6e, le pape Pie XII interdisait le recours h l’ins6mination artificielle,
meme homologue, se fondant sur la nature personnelle de l’acte conjugal et de ]a pro-
cr6ation humaine. La Commission de r6forme du code civil, au cours des anndes
1950-1951, discuta 6galement de 1’ins6mination artificielle, mais
les d6bats
n’aboutirent pas : la moralit6 et la lic6it6 de l’acte demeuraient en question meme si
l’on pressentait que cette pratique ne remettait pas en cause
‘ordre juridique de la fa-
mille7.
Hormis
‘hypoth~se d’une utilisation des gametes pour une procr6ation non natu-
relle, point n’6tait besoin de s’interroger sur leur statut juridique : ils n’avaient pas
d’existence autonome. Ii n’est jamais venu h l’esprit de quiconque pendant des sicles
de qualifier ‘acte conjugal en un don de mat6riel g6n6tique8. Le mariage n’emporte, en
droit frangais, aucune obligation formelle de procr6er t la charge des conjoints, et done
de livrer leurs gamtes9. I 6tablit plut6t une sorte de cogestion sur ceux-ci qui se ddduit
de la libert6 de procr6er, laquelle demeure la d6cision du couple’0 . Pour les juristes, les
gametes n’existaient done pas encore.
criation nmddicalement.assistie, .O., 9 avril 1988, 4707 ; Dicret W0 88-328 du 8 avril 1988 portant
criation de la Commission nationale de mdecine et de biologie de la reproduction, J.O., 9 avril
1988, 4708 [ci-apr s Dicrets du 8 avril 1988]), parall~lement A l’activitd hospitalire des C.I.C.O.S.
Dans les annes quatre-vingts, cette activit6 priv~e a dt6 tenue pour marginale, en d6pit de l’absence
de donn es chiffr6es (voir F Giraud, <,Droit et procreation artificielle > (1986) 117 Regards sur
l’actualit6 19). On peut done en d&Iuire que l’activit6 priv~e d’ins6mination articielle, en cabinet
medical, existait avant ]a creation des C..C.O.S. de fagon tout aussi marginale. Actuellement elle est
interdite: en ce sens, la circulaire du minist&e de ]a Sant6 du 30 septembre 1993, relative A ]a conser-
vation et au transfert des gametes et des embryons humains dans les centres autoris6s, dans laquelle il
est demand6 aux prdfets de faire connaltre aux personnes qui exercent des activit6s de procr~ation
medicalement assistee sans autorisation, qu’elles engagent leur responsabilit6 civile et p6nale. Nan-
moins, pour un exemple d’insemination avec du sperme frais, voir Cass. civ. 1, 9 mars 1944, Bull.
civ. 1994.J.69, nd 89.
Sur cette question, voir A. Brunois,
catholique 1345 A la p. 1349 ; Pie XII, Actes de S.S. Pie XII: L’apostolat des sages-femmes: Ques-
tions morales de vie conjugale>> (1951) 48 La documentation catholique 1473 a lap. 1489.
7 Voir notamment M.-A. Hermitte,
chives de ]a Philosophie du Droit 323 A la p. 337.
8 Voir J.-P. Baud, L’affaire de la main volie: Une histoire juridique du corps, Paris, Scuil, 1993 a Ia
p.91.
9 Sur rensemble de cette question, voir J.-C. Galloux, Essai de d~finilion d’un statutjuridique pour
le matiriel gdnitique, th~se de doctorat d’habilitation en droit, universite de Bordeaux I, 1988 h Ia p.
262 et s. [non publi6e ; ci-apr s Essai de definition].
10 Voir ci-dessous ]a partie IA. 1.b.
19951
J.-C. GALLOUX- STATUT DES GAMETES HUMAINS
L’excr6tion de gametes dans un but non procr6atif relevait de l’interdit le plus ab-
solu : comme tous les 6coulements corporels, elle s’apparentait h une faute, celle rdsul-
tant de pratiques onaniques” ou de la prostitution 2, ou encore h une impuret6″3. Cons&
quemment, si les gametes acqu6raient une existence distincte du corps par leur 6mis-
sion hors de celui-ci et en dehors de l’utdrus de la femme 4, ils ne pouvaient constituer
un objet apprdhendable par le droit. Ils demeuraient un ph6nom~ne anormal, inquali-
fiable, provoquant un sentiment ambigu de repulsion et de respect quasiment sacr6
qu’enregistre la figure de la pollution canonique.
Du point de vue historique, les statuts juridiques du sang et des gametes (du
sperme dans un premier temps) se trouvent intimement lies, pour des raisons religieu-
ses et ethnologiques 6videntes qui ne sauraient 6tre d6veloppdes ici 5. Le sang fait son
entr6e sur la sc~ne juridique en France dans les anndes cinquante, avec l’organisation
de la transfusion sanguine : le sang ne se contente plus de circuler imm6diatement du
bras du donneur au bras du receveur, il est prdlevd, stock6, fractionnd, distribu6. A
travers tout ce circuit, il p6n~tre dans le domaine du Droit.>>6 La Loi du 21 juillet
195217 encadra les diverses activit6s lies h la transfusion sanguine mais se garda de se
prononcer sur le statutjuridique du sang”. Pour les gam~tes, la ncessit6 d’une analyse
juridique s’imposa avec la creation des C.t.C.O.S. et du march6 du sperme qu’elle en-
gendra.
L’interdit moral frappant les techniques de procreation mddicalement assistde, s’il
n’a pas 6t6 lev6 dans les ann6es soixante-dix 9, s’est trouv6 d6pass6, dans l’esprit d’une
majorit6 du public, par la 16gitimit6 confdrde au don de gam~tes par les milieux mcdi-
cal et scientifique.
20
1 Sur le crime d’Onan (Gen~se 38, 8-9).
12 Parent-Duchatelet, mddecin hygidniste du 19′ sidle, ddfinit la prostitution comme <'un 6gofit dont
la seule particularit6 est son caract~re s~mina1> (cit6 par A. Corbin, Lesfilles de noce: misare sexuelle
etprostitution aux 19′ et 20′ sikcles, Paris, Aubier, 1978 A lap. 16).
13 Pour ]a femme (Ldvitique 15, 19-30).
14 En ce sens, voir Baud, supra note 8 A la p. 113.
15 Le sperme est parfois qualifi6 de
tds, Paris, Fayard, 1988 A lap. 58). Sur ‘ensemble de cette probldmatique, voir Baud, ibid. A lap. 112
et s.
16 R. Savatier,
17 Loi n* 52-854 sur l’utilisation thdrapeutique du sang humnain, de son plasma et de leurs dirivds,
J.O., 22juillet 1952,7357.
is Loi Ye 93-5 du 4 janvier 1993 relative ii la sdcuritd en mnatiare de transfusion sanguine et de mud-
dicamnent, J.O., 5 janvier 1993, 237. Cette loi n’est pas beaucoup plus explicite.
19 La plus grande tolerance affichde par le public et les autoritds civiles
l’gard de ces techniques a
notamment conduit le Magist~re catholique A rappeler les pr6ceptes en la mati~re (voir Congregation
pour ]a Doctrine de la Foi, Le don de la vie: Respect de la vie hurnaine naissante et dignitd de la pro-
crdation, 27 &., Pads, Cerf, 1987).
20 Qu’il nous soit permis ici de mettre ce terme entre guillemets puisque pour certaines techniques
comme l’ins~mination artificielle, il ne pouvait s’agir v6ritablement d’innovations technologiques
tout ceci dtait courant d~puis des ann~es dans l’art vdtdinaire.
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE McGILL
[Vol. 40
sant les gametes d’un tiers. Les techniques de procr6ation m6dicalement assist6e rel-
vent ds lors de la th6rapeutique ; les gametes sortent du domaine du sacr6 pour entrer
dans celui de la pharmacie. Un tiers qui donne ses gametes accomplit une sorte Ad’acte
de sauvetage>>
l’instar du donneur de sang”. I s’agit d’un acte hautement solidaire et
donc socialement acceptable. Pour parachever cette vision ennoblissante de la procr6a-
tion m6dicalement assist6e, il convenait de r6server au profit d’un corps m6dical sp6-
cial l’organisation du nouveau march6 des gametes ainsi ouvert. Ce fat le r6le des
C.E.C.O.S., rassembl6s au sein d’une f6d6ration le 23 mars 1982. Es se dot~rent d~s
leur creation d’un code d’6thique propre qui pr6figura les r~gles juridiques qui furent
par la suite adopt6es.
22
Les techniques de procr6ation m~dicalement assist6e sortaient de la clandestinit6 et
revendiquaient le statut d’une th6rapie soulevant ainsi la question de la nature et du r6-
gimejuridiques des gametes humains : recueillis, stock6s, tri6s, analys6s, conditionn6s
et distribu6s, ils ne pouvaient plus 6chapper hi l’appr6hension du droit.
La question de la lic6it6 des techniques de procr6ation m6dicalement assist6e agita
encore les esprits des juristes traditionnels au cours des ann6es suivantes 3, mais la pra-
tique se d6veloppant pour atteindre une vitesse de croisi6re, si l’on peut dire, d’environ
2,000 naissances par an grace ces techniques, il alla de soi, pour les responsables po-
litiques; qu’elle ne pouvait plus 8tre remise en cause’ . Les autorit6s de l’IEtat ont en
cela suivi le courant doctrinal dominant du positivisme sociologique . Devenu un
notamment le Comit6 national d’6thique dans son rapport du 15 d6cembre 19896. La
24
21Baud, supra note 8 A lap. 191.
22 XL’insimnination artificielle)>, Actes du congrs international de mddecine lgale et de mndecine
sociale, Dijon 11-14 mai 1977, Paris, Masson, 1978.
7-3Voir par ex. P. Kayser,
Cette volont6 d’avaliser les pratiques sociales r6sulte tr s express6ment des travaux parlementai-
res des lois du 29 juillet 1994 (Loi n 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps hiunain
(1), J.O., 30juillet 1994, 11056 ; Loi n 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et a l’utilisation des
dliments et produits du corps humain, i l’assistance m6dicale b la procrdation et au diagnostic prd-
natal, J.0., 30 juillet 1994, 11060 [eci-apr~s Lois de 1994]). Voir par ex. J.-F. Mattei, J.0. D6bats Ass.
nationale, 20 avril 1994, 946 ; S. Veil, J.0. D6bats Sdnat, 19 janvier 1994,235.
25 Pour un bon exemple d’analyse r~ductionniste de ce type, voir Hermitte, supra note 7 h la p. 337,
qui qualifie les considerations religieuses ou transcendantales de ridicules> pour ne s’attacher qu’aux
26 ttat des 6tudes conduites par le Comit6 concemant les dons de gametes et d’embryons (15 dd-
cembre 1989) Paris ; Rapport fait au nont de la Comnission spdciale (1) sur les projets de loi: 1- (n
2599), relatif au corps humnain et modifiant le code civil; 2- (n’ 2600), relatif au don et a l’utilisation
des 96nents et produits du corps humain et t la procriation mnidicalenent assistde, et inodifiant le
code de la santi publique; 3- (nd 2601), relatif au traitement de donnees noninatives ayant pourfin la
recherche en vue de la protection ou l’andlioration de la santd et modifiant la loi n0 78-17 di: 6jan-
vier 1978 relative b l’infonnatique, auxfichiers et aux libertds, t. 2, J.0. Documents Ass. nationale, n
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMETES HUMAINS
levee de l’illic6itd potentielle de ces activit6s s’est done op6rde subrepticement et par
6tapes, comme pour 6viter d’ouvrir un d6bat par trop m6taphysique qui se serait rv616
politiquement peu payant. L’activit6 des C.E.C.O.S., constitu6s pour la plupart en as-
sociations r6gies par la Loi du lerjuillet 1901,7 s’est d’abord inscrite dans le cadre
hospitalier d6fini par les articles 34 et 48 de la Loi du 31 ddcembre 19728. Les paillet-
tes de sperme congel6 ont vu leur prix fix6 par arrt6 minist6driel ds 1980 afin d’etre
prises en charge par la sdcurit6 sociale 29. Par deux simples ddcrets du 8 avril 1988, les
activit6s de procr6ation mdicalement assistde se voyaient express6ment r6glementdes
et, par la meme occasion, juridiquement reconnuese. Le Conseil d’t’tat a estim6 que le
gouvemement pouvait administrer ces activit6s h d6faut de tout texte 16gislatif, mais
<
partie de ces activit6s, l’ins6mination artificielle et le don de sperme, a
td le fait de
‘article 13 d’une loi <
1991, texte qui n’a 6t6 prdc&d6 d’aucun ddbat parlementaire sur ce point32 .
Finalement, les deux lois de 1994, dites <
tion, en introduisant, tant dans le Code civil que dans le Code de la santpublique, une
r6glementation particuli~re h Pensemble des techniques de procr6ation m6dicalement
assistde “3. Ces dispositions 16gislatives doivent atre compl6t6es par l’article 18 de la Loi
du 31 ddcembre 1992 qui r6git l’importation et l’exportation des garntes34. On reste
dans l’attente des dispositions r6glementaires qui viendront pr6ciser l’ensemble de cet
6difice 16gislatif sous peu35.
Ces textes, qui empruntent beaucoup aux solutions pratiques, jurisprudentielles et
doctrinales pr6cddemment ddgagdes, 6tablissent ainsi un statut juridique des activit6s
d’assistance m6dicale h la procr6ation, non un statut juridique des gametes humains.
Dans ce domaine, comme d’une fagon g6n6rale, dans 1’ensemble du domaine m6dical
2871, 30 juin 1992 A la p. 78 (Prdsident : Y. Bioulac ; rapporteur : B. Bioulac) [ci-apris Rapport n
2871].
.
27 D.1901.L6g.105.
28 Loi n 70-1318 du 3.1 dicembre 1970 portant rfonne hospitalire, J.O., 3 janvier 1971, 67.
29 Arrtd du 22 aot 1980 fixant le tarif de responsabilit applicable aux produits d’origine hu-
maine utilisds pour les insiminations artificielles, J.O., 19 septembre 1980 (N.C.), 8362. Cet arret6 a
fixd leur prix it 240 francs.
.V Ddcrets du 8 avril 1988, supra note 4.
31 Cons. d’ltat, 21 juillet 1989, Association des ngdecins pour le respect de la vie, (1990) 106 Rev.
D.P. & S.P. 279 (concl. B. Stim).
32 Loi n’ 91-1406 du 31 ddcembre 1991 portant diverses dispositions d’ordre social, J.O., 4 janvier
1992, 178.
.3 Lois de 1994, supra note 24. Pour le commentaire de ces textes, voir J.-C. Galloux, dir., Biodthi-
que: Les lois du 29juillet 1994 (14 d6cembre 1994) 149 Les Petites Affiches [ci-apr~s Biogthique].
4 Loi d 92-1477 du 31 dicembre 1992 relative aux produits sounis t certaines restrictions de cir-
culation et ez la complimentaritf entre les services de police, de gendarmerie et de douane, J.O., 5
janvier 1993, 198 [ci-apr~s Loi du 31 dicembre 1992].
35Les seules activitds d’assistance m6dicale a la procrdation devraient ndcessiter la publication de
dix d6crets en Conseil d’Ittat.
1000
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
ou biologique, <
qui le prennent pour objet. Si le r6gime juridique des gametes humains apparait d6sor-
mais clairement pos6 au travers de ces activits (II), leur nature juridique suscite encore
des controverses (I).
. La nature juridique des gamtes humains
Quelle est la nature juridique des gametes humains ? Assur6ment, ils concentrent,
comme le sang et m~me davantage que lui, la quintessence de ]a sacralit6 corporelle :
le premier repr6sente la vie circulant dans le corps, les seconds la vie transmise. Cette
sacralit6 est le signe de la personne. La primaut6 de la personne, affirm6e solennelle-
ment par
‘article 16.du Code civil dans sa rddaction issue des lois de 1994, interdit
toute atteinte h la dignit6 de celle-ci. Le droit au respect du corps humain participe du
respect de cette dignit6, tel que nous le rappelle l’article 16-1 du meme code. Les ga-
metes constituent des parties de ce corps et sont h l’origine de ce qui sera le corps de
I’enfant. Elles doivent donc b6n6ficier du meme respect. Voilh comment peut se r6su-
mer bri~vement, au regard des principes g6ndraux pos6s par les lois de 1994, Ia protec-
tion accord6e aux gametes humains comme
tous les 616ments et les produits du corps
humain. Toutefois, il n’est pas r6pondu h notre question initiale. En effet, la reconnais-
sance ou l’affirmation de droits de la personnalit6 comme le droit au respect du corps
humain, de ses 616ments ou de ses produits, ne saurait se substituer 4i une recherche sur
la nature intrins~que des gametes37. Pour y r6pondre, il convient de confronter les ga-
metes humains aux diffdrentes classifications juridiques : en premier lieu, la sunma
divisio entre choses et personnes et en second lieu, les diverses cat6gories de mat6riels
biologiques d’origine humaine crddes par le l6gislateur en 1994. Ces cat6gories com-
mandent un r6gime juridique propre pour les gametes. Ces demiers appartiennent au
monde des choses, mais ils ne sont ni des choses, ni des mat6riels biologiques comme
les autres.
A. Les gametes huinains :des choses et non pas des personnes
La division du monde juridique en deux catdgories distinctes, les choses et les per-
sonnes, relive de 1’exp6rience premiere . Sans elle, le droit ne pourrait se concevoir
puisque l’une des fins essentielles du droit consiste h attribuer aux personnes la part des
choses qu’elles mdritent39. Cette division n’a pas 6t6 remise en cause par les lois de
36 Baud, supra note 8 A lap. 205.
37Pour une opinion singuli~re contraire qui estime que ]a d6finition d’une prerogative pemiet de
s’affranchir d’une rdflexion sur robjet sur lequel elle s’exerce, voir L. Cadiet, ((La notion
d’information g~ndtique en droit frangais>> dans B.-M. Knoppers, L. Cadiet et C.M. Laberge, dir., La
gindnique hunaine: De l’infonnation 6 l’infonnatisation, Montreal, Th76mis/Litec, 1992,41.
8Elle se trouve unanimement reconnue en doctrine. Sur I’ensemble de cette question, voir Essai de
definition, supra note 9 A lap. 3 et s.
39 Voir M. Villey, Philosophie du droit, t. 1, Paris, Dalloz, 1986 aux n0′ 25-36.
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1001
199440, en d6pit de tentatives timides en ce sens41. I1 6tait tentant de rechercher une ca-
t6gorie interm6diaire entre les choses et les personnes pour y ranger le corps humain,
ses 616ments ou ses produits et done les gametes. Cependant, les solutions d6gages
ant6rieurement ne le permettaient pas.
1.
La nature juridique des gametes avant les lois de 1994
A titre pr6alable, il doit 8tre pr6cis6 que l’ensemble des juristes frangais d6finit les
gametes, conformdment h la terminologie m6dicale, comme les seules cellules sexuel-
les, germinales, haplofdes, c’est-t-dire les spermatozo’des et les ovules qui ne se ren-
contrent que dans les gonades42.
L’embarras de la doctrine et de la jurisprudence face h la qualification juridique des
gametes utilis6s dans les processus d’assistance m6dicale h la procr6ation participe de
la difficult6 h d6finir le corps humain selon les cat6gories juridiques reques43. Le pro-
bl~me pouvait passer pour plus simple avec les gametes puisque appr6hend6s par le
droit, ils sont d6tach6s du corps humain.; toutefois, c’6tait sans compter avec leur des-
tination naturelle procreative qui renforge leur charge symbolique.
La position de ]a majorit6 de la communaut6 juridique frangaise se trouve bien r6-
sum6e, avec ses r6ticences, ses contradictions et ses interrogations, par monsieur L.
Cadiet:
A cette question [de la nature des gametes], le droit frangais n’offre aucune
solution assur~e […] . Provisoirement, deux propositions semblent cependant
pouvoir etre avances. D’une part, le sperme, l’ovule et l’embryon ne sont pas
ce titre,
des choses, mais participent de ]a personne humaine et sont donc,
inali6nabIes. D’autre part, le sperme, l’ovule et l’embryon font d’ores et d6jt
juridiques ‘(don,
l’objet d’un certain nombre d’op~rations
C.IAC.O.S.) et m~licales (I.A.C., I.A.D., EIVE.T.E. [ …]) qui traduisent n6ces-
sairement une nouvelle atteinte au principe de l’indisponibilit6 du corps hu-
main. Sauf r~gles particulires, ces operations de procreation assistde ne sont
pas, en principe illicites du point de vue du droit positif”.
En d’autres termes, il est choquant de qualifier les gametes humains de choses en
raison des liens 6vidents et 6troits qu’ils entretiennent avec le corps des personnes45 ; ils
ne sont donc pas des choses. Sont-ils des personnes ? Pas davantage. Ils sont cependant
inali6nables et, non sans contradiction, peuvent etre l’objet d’op6rations juridiques lici-
tes.
40 M. Vauzelle, J.O. DMbats Ass. nationale, 20 novembre 1992, 5826.
41 Rapport if 2871, supra note 26, t. 1 A lap. 107.
42 Voir par ex. A. Giudicelli, Gifnitique hunaine et droit: A la redicouverte de l’honme, these de
doctorat en droit, universit6 de Poitiers, 1993 A la p. 16 [non publine].
43 Pour une 6tude historique de l’ensemble de ces difficult~s, voir Baud, supra note 8.
4Jurs-classeur
civil, art. 1598,
45 On retranchera de cette analyse ce qui a trait A 1’embryon qui ne se confond pas, 6videmment,
avec les gametes, et dont le statut n’entre pas dans le cadre de notre 6tude.
1002
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
En fait, 1’examen des pratiques m6dicales, de la jurisprudence et de ]a doctrine
vient confirmer, par-del les r6ticences et les circonlocutions employdes par la majorit6
des juristes frangais, le caract~re reel des gametes humains.
a.
Les pratiques midicales
Les pratiques mddicales utilisant les gametes se limitent h l’insdmination artifi-
cielle et au don d’ovocytes. Elles ont 6t6 largement pratiques en France depuis le d6-
but des anndes soixante-dix en milieu hospitalier et sous la responsabilit6 des
46
C..C.O.S.
En principe, les gametes males recueillis de donneurs b6n6voles ne sont pas ache-
tds par ces centres. Toutefois, pendant longtemps, certaines unit6s comme le Centre
d’6tude de la fertilit6 et de la reproduction (C..F.E.R.) de Marseille a r6mun6r6 les
donneurs. Par ailleurs, de vritables conventions sont passdes entre des centres du type
des C.E.C.O.S. et les receveurs par lesquelles ces demiers acceptent les conditions de
d6livrance des gametes, comme, par exemple, l’exigence de la pr6sence du marl ou du
concubin lors de l’utilisation des paillettes de sperme congel 7. Les utilisateurs finaux
doivent supporter le coOt des gametes, notamment les paillettes prdcit6es. Un arret6
ministdriel fixe le prix de ce produit qui ne se confond pas avec le coOt du service”.
Les dons d’ovocytes sont couramment pratiqu6s en France depuis le d6but des an-
nes soixante-dix. Ils sont g6n6ralement r6alis6s dans les centres spdcialis6s pour les
fdcondations in vitro (F.IV.) en milieu hospitalier. Bien entendu, si un parall~le peut
8tre 6tabli d’un point de vue juridique entre le don d’ovocytes et le don de sperme, il
n’en n’est pas de m~me au plan m6dical. L’innocuit6 du don n’est pas totale puisque ]a
cmelioscopie 49 impose une anesthdsie gdn6rale. Des incidents et m~me un accident
mortel ont 6t6 rapportds au cours d’un pr6l vement p6rdchographiqueo. En ce sens, ce
type de don se rapproche des pr61Ivements d’organes, sans pourtant que les r~gles r6-
gissant ceux-ci aient pu y 6tre appliques. I1 s’agit en toute hypoth~se d’un acte mddi-
cal qui doit rdpondre aux exigences poses pour sa licdit6, notamment celle de ]a finali-
td thdrapeutique. Y en a-t-il une en 1’espkce ? La question a 6t6 peu d6battue en doc-
trine. Quant aux praticiens, ils l’ont admis defacto.
46Voir M.-O. Alnot et al., Les procreations artificielles: Rapport prdlimninaire au Premier ininistre,
Paris, Documentation frnaise, 1986.
47 Voir Trib. gr. inst. Toulouse, 26 mars 1991, J.C.P. 1992.1.21807 (note P. Pddrot) [ci-apr s Trib. gr.
inst. Toulouse, 26 mars 1991].
48 Arr~tJ du 28 septembre 1984 modiflant l’arrtd du 22 aollt 1980 fixant le tarif de responsabilitd
applicable aux produits d’origine humaine utilisds pour les insiminations artlificielles, J.O., 12 octo-
bre 1984 (N.C.), 9353. Cet arrt6 a fix6 le prix des paillettes A 255 francs.
49 La celioscopie constitue un examen des organes g6nitaux f6minins et du petit bassin.
5o Un pr6l~vement prchographique est effectu6 h ]a suite d’un examen coelioscopique (voir Alnot
et aL, supra note 46 A lap. 88).
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMkiTES HUMAINS
1003
Ainsi, la pratique mdticale apprdhende-t-elle, en principe, les gametes de la meme
mani~re que les autres mat6riels biologiques d’origine humaine et 6tablit-elle par con-
ventions leurs cession, conservation ou d6livrance. D’un point de vue juridique, les
gametes humains sont trait6s comme des objets de droit, des choses.
b.
La jurisprudence
Une certaine jurisprudence relative aux procr6ations m6dicalement assist6es s’est
ddvelopp6 sous l’empire du droit antdrieur aux lois de 1994 ; cependant, peu de ddci-
sions ont statu6 sur la qualification des gametes, la majorit se bomant h 1’examen de
questions de filiation.
Dans l’affaire la plus ancienne, malheureusement non publi6e, la Cour d’appel de
Rennes avait ordonn6 h un C.t.C.O.S. aupr s duquel un mari avait d6pos6 ses gametes
avant son d6c~s,
plicite, de la nature r6elle du sperme.
51
Le 1″ aofit 1984, le Tribunal de grande instance de Crdtei 52 a confirm6 ce point de
vue de fagon encore plus explicite. Un 6poux, se sachant atteint d’un cancer aux testi-
cules, effectua sur les conseils de son m~decin un d6p6t de sperme aupr~s d’un
C.E.C.O.S. avant de suivre un traitement de chimiothdrapie. I d6cda peu aprNs et sa
veuve r6clama au C.E.C.O.S. les paillettes de sperme congel6 afin de se faire ins6mi-
ner. Devant le refus oppos6 par le Centre, la veuve saisit le tribunal afin d’ordonner la
restitution des gametes. Le procureur rappela au tribunal que <<[1]e sperme humain [...]
est porteur de vie. I est i6 h une libert6 fondamentale: celle de donner la vie.>>3 Le tri-
bunal fit droit t la demande pr6sent6e par la veuve. I1 a estim6 que le sperme d6pos6
aupr s du C.t.C.O.S. 6tait une chose mais une chose hors du commerce juridique, de
sorte que les r~gles du contrat de d6p6t, contrat nomm6 selon le Code civil, ne pou-
vaient s’appliquer en l’espce : <41 apparait que la convention [par laquelle le d6funt
constituait un contrat spdcifique comportant
avait remis son sperme au C.E.C.O.S.]
pour le C.E.C.O.S. obligation de conservation et de restitution au donneur, ou de re-
mise h celle h qui le sperme .tait destin.Y5
La qualit6 de chose, au sens de la sununa divisio du droit se trouve ainsi confirmde
pour le sperme. En effet, la chose hors du commerce au sens de l'article 1128 du Code
51D. Huet-Weiller,
m6taphysique et de morale 331 A lap. 340.
12 Trib. gr. inst. Cr&eil, 1′ aoflt 1984, J.C.P. 1984.11.20321 (note S. Corone) [ci-apr s Trib. gr. inst.
Crdteil, 1″ ao~t 1984].
3 Ibid.
Ibid.
1004
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
civil frangais 5 entre incontestablement dans le domaine des choses et meme, paradoxa-
lement, dans le domaine des biens juridiques56. Le tribunal, sans crainte de contredire le
caract~re extracommercial du sperme, fait par ailleurs de celui-ci l’objet d’un contrat
<
l’ordre public si elle avait porte sur une personne.
Pourtant, dans un arr& du 21 septembre 1987, Ia Cour d’appel de Toulouse d6ci-
dait que
personne meme, ou l’activit6 d’I.A.D. est-elle contraire h ‘ordre public en raison des
manipulations des structures de la parent6 qu’elle engendre ? En effet, il ne faut pas
oublier que la qualification r6elle des gamites ne pr6juge en aucun cas du r6gime des
actes dont ils peuvent etre l’objet. Affirmer que les gamites sont des choses ne conduit
pas ndcessairement h conclure i la lic6it6 du don de sperme ou d’ovocytes. Ceci 6tant
prcis6, il nous semble que la Cour d’appel de Toulouse a davantage promu ]a seconde
des deux solutions ci-dessus exposees.
Le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Toulouse le 26 mars
1991″ rompit avec cette jurisprudence comme avec celle de Cr6teil, pour des faits
d’esp~ce similaires (demande de restitution de paillettes de sperme dans le cadre d’une
convention intitulde
C.E.C.O.S.). La convention pass6e avec le C.E.C.O.S. a 6t6 reconnue licite de meme
que la clause selon laquelle le sperme ne <
nal a ainsi accrdditd l’idde que l’objet de la convention 6tait licite et qu’en cons6quence
le sperme pouvait faire 1’objet de conventions, bien que la <
nature extrapatrimoniale et la possibilit6 de conclure un contrat ayant pour objet du
sperme dans l’habile attendu suivant, qui renoue avec l’habituel jeu de masque entre la
qualification de l’activit6 et celle des matdriels biologiques en cause:
[L]’16ment fondamental qui caract6rise cette convention et doit commander sa
qualification juridique n’est pas l’opdration prdliminaire de pr6l~vement du
sperme mais l’ensemble de ]a prestation mdicale destin~e A sauvegarder les
chances de procrdation d’un homme dont I’aboutissement sera l’insdmination
55Voir aussi art. 1373 C.c.Q.
56 En ce sens, sur ]a notion de chose hors du commerce, voir J.-C. Galloux, <
57 Toulouse, 21 septembre 1987, D.1987.Jur.184 A lap. 185 (note D. Huet-Weiller).
58 Ibid
59 Trib. gr. inst. Toulouse, 26 mars 1991, supra note 47.
60Ibid. A lap. 66.
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1005
artificielle. Tel est le veritable objet d’un contrat dont ]a chose d6passe large-
ment ]a seule matie –
prdlev e61 .
le sperme –
Le sperme est une mati~re, il est une chose, meme s’il apparalt de nature
Le Tribunal de grande instance de Rennes, dans une decision du 30 juin 1993 rela-
tive hi une demande de restitution d’embryons congel~s62, a pareillement reconnu
comme licite au regard, notamment, des dispositions de l’article 1128 du Code civil,
une convention r6gissant le prrl~vement des ovocytes et leur f~condation dans la me-
sure oi
employ6e pour combattre la maladie que serait la strilit6 d’un couple. Une personne
serait-elle un remade ?
Les demi~res illustrations jurisprudentielles seront utilis~es comme des arguments
afortiori. Tant les Tribunaux de grande instance de Rennes et de Toulouse, que la Cour
d’appel de Toulouse ont dgni6 h des embryons humains congus in vitro la qualit6 de
personne, malgr6 que leurs m~res, devenues veuves avant leur transfert in utero, r6-
clament cette qualite. Sur ce point, la jurisprudence des tribunaux de l’ordrejudiciaire
s’oppose h celle du Conseil d’ttat, qui, par deux arr~ts du 21 d~cembre 1990, a trait6
l’embryon humain comme une personne ayant droit h la vie au sens de l’article 2 de la
Convention europienne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertisfondanzen-
tales5 et de l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques6. Ce
droit demeure cependant relatif en raison de la drogation que lui apporte la Loi du 17
janvier 197567 sur l’interruption volontaire de grossesse. La non-reconnaissance de la
personnalit6 juridique des embryons humains plaide pour l’attribution de la qualit6
r6elle aux gametes humains dont tous conviennent qu’ils sont quelque chose de moins
que l’embryon aussi bien du point de vue moral que du point de vue biologique.
61 Ibid.
62 Trib. gr. inst. Rennes, 30juin 1993, J.C.P. 1994.11.22250 (note C. Neirinck).
63 Ibid.
64 Ibid. ; voir aussi D. Vigneau,
Affiches 64.
65 4 novembre 1950, J.O., 4 mai 1074, 4750.
19 d6cembre 1966, J.O., 1 fbvfier 1981, 398; Cons. d’ttat, 21 d~cembre 1990, Confddiration
nationale des associationsfamiliales catholiques, Rec. 1990.368 (concl. M. Stim), D.199lJur.283
(note P. Sabourin) ; Cons. d’Atat, 21 d cembre 1990, Association pour l’objection de conscience a
toute participation a l’avortemnent et Association des mnidecins pour le respect de la vie,
D.1991.Inf.247, J.C.P. 1989.IV.310.
67 Loin’ 75-17 du 17janvier 1975 relative i l’interruption volontaire de la grossesse (1), J.O., 18
janvier 1975,739.
1006
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
c.
La doctrine
La doctrine dominante s’est rang6e autour de l’avis de monsieur le doyen Cornu
qui assimile les gametes h des forces g~n6tiques>> :
[C]e ne sont pas des choses. Ce ne sont pas des organes du corps humain, mais
parmi les produits de ce corps, ce sont des 616ments radicalement diff6rents des
autres produits […] Parce qu’en ces forces g6ndtiques r6sident –
latentes et
non encore surgissantes –
les capacit6s de reproduction de l’esptce humaine,
les sources de la vie. Le principe est que ceux qui s’en d6livrent n’ont aucune
disposition de ce d6p6t que l’humanit6 a mis en eux. Don du sperme ou
d’ovule ? C’est un mot commode pour exclure toute rdmun6ration […] Ces for-
ces g6n~tiques sont en qui les a, comme un d6p6t inalienable et sacr6, les po-
tentialitds de l’espkce (ils seraient un peu t ]a personne ce que ]a force atomi-
que est aux choses)6.
Les gam~tes, en raison des forces myst6rieuses qu’ils convoient et qu’ils rec~lent,
rel~veraient plut6t du monde des personnes.
D’autres auteurs ont adopt6 la position contraire, comme monsieur Labb6e, pour
qui la qualit6 r~elle des gametes ne fait aucun doute : <<[C]e qui importe en fait,> 6crit-il
dans son commentaire du jugement rendu par le tribunal de Cr6teil,
nous avons d6fendue 70 . D’autres encore semblent s’y rallier, h6sitant toutefois t pro-
noncer le mot de <
Cependant, ces divergences ne doivent pas masquer un r6el consensus de la doc-
trine qui, d6passant la question de la nature du matdriel biologique en cause, s’accorde
sur les modalit6s de son utilisation. Si les gametes ne rel~vent pas du monde des cho-
ses, ils ne se voient pas pour autant octroy6s la pl6nitude du statut de personne juridi-
que ; si les gametes sont des choses, ils ne sont pas des choses vulgaires. En d’autres
termes, il importe moins de savoir ce qu’ils sont que ce que l’on peut en faire. Le 16gis-
lateur a d’ailleurs suivi ce raisonnement.
G. Cornu, Droit civil: Lafamile, 2′ dd., Paris, Montchr~stien, 1991 au n 306; voir aussi C. La-
brusse-Riou,
colloque Gdndtique, procriation et droit, 1985, Paris, Actes Sul, 1985, 255 ; J. Rubellin-Devicii,
Cong6lation d’embryons, f~condation in vitro, mare de substitution: Point de vue d’un juriste>> dans
Actes du colloque Ginitique, procriation et droit, ibid., 307.
69X. Labb~e,
trouve drsormais drfini n ; il vise les seuls spermatozofdes et ovocytes <
de la parth6nogen se74 n’est donc pas 6voqu~e ; il semble pourtant d6sormais possible
techniquement de rrg6n6rer un etre vivant sup6rieur sans l’aide de cellules sexuelles75.
De telles recherches sur l’&tre humain sont g6nrralement condamnes par les instances
religieuses ou 6thiques. Elles ne le sont pas expressdment dans la loi frangaise.
N6anmoins, la mise en ceuvre de la parth6nogen~se nrcessite une intervention sur le
mat6riel biologique humain qui serait sans aucun doute consid6re comme un
o
de l’article 16-2 nouveau du Code civil, et h ce titre, susceptible d’une interdiction de la
part dujugejudiciaire.
Les lois de 1994 relatives au respect du corps humain et au don et h l’utilisation
des 616ments et produits du corps humain, h 1’assistance mrdicale h la procreation et au
diagnostic pr6natal comprennent un nombre important de dispositions sprcifiques aux
gametes mais dont aucune ne prfcise leur nature juridique. Comme la doctrine domi-
II
nante, le l6gislateur a reculM devant leur qualification par trop brutale de <
convient done de d&luire leur nature des autres dispositions l6gislatives tant g6n6rales
que particuli~res.
L’architecture g6nrrale des lois de 1994 se prrsente sous la forme d’un ensemble
complexe de principes gdnrraux relatifs au respect du corps humain, compldt6s par des
r~gles particuli~res d’utilisation des 616ments et des produits du corps humain. Les
principes gdnrraux prennent place dans la Loi n’ 94-653, ils rassemblent les articles 2,
Loi nf 94-654, supra note 24, art. 10, introduisant
‘art. L-673-1 Code de la santdpublique.
73 Rapport fait au noin de la Conunission spgciale (1), en deuxine lecture, sur les projets de loi : 1-
(ye 957), inodjfid par le sdnat, relatif au don et a l’utilisation des dminents et produits du corps hu-
inain, t l’assistance nddicale a la procriation et au diagnostic prenatal ; 2- (n” 962), modifid par le
sgnat, relatif au traitement de donndes nomninatives ayant pour fin la recherche dans le domnaine de la
santd et mnodifiant la loi t 78-17 du 6janvier 1978 relative a l’infonnatique, auxfichiers et aux liber-
la p. 129 (Prdsidente: E. Hubert; rappor-
tds, J.O. Documents Ass. nationale, n 1057,25 mars 1994
teur J.-E Mattei) [ci-apri-s Rapport n” 1057].
74 La parthrnogen~se est la naissance obtenue sans contact sexuel ; elle peut notamment 8tre obte-
nue par rdg~ndration cellulaire (clonage).
75 Voir Essai de definition, supra note 9 A la p. 60.
76 Le Comit6 consultatif national d’6thique <(consid~re que n'ont aucun fondement scientifique au-
jourd'hui les recherches [...] dont la finalit6 serait l'implantation d'embryons dont le drveloppement
est initi6 sans apport de spernatozofdes>> (Comit6 consultatif national d’6thique, Avis du 15 ddcenbre
1986 relatif aux recherches et utilisation des embryons hwains in vitro a des fins mddicales et
scientifiques (15 d cembre 1986) Paris.
77 Voir par ex. J. Toubon qui pretend que ]a loi <
la p. 14 ; C. De Courson, J.O. Ddbats
nat, 15 janvier 1994, 127 ; Rapport n” 1057, supra note 73
Ass. nationale, 20 avril 1994, 943.
1008
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROIT DE MCGILL
[Vol. 40
3 et 7 de la loi, ce qui correspond aux dix nouveaux articles du Code civil et h un article
modifi6 du Code de la proprijtd intellectuelle (L.611-17). Les r6gles particulibres per-
mettent d’apprdcier la portde des principes g6n6raux ; elles sont rassembldes dans ]a
Loi n’ 94-654 et concement pour l’essentiel des modifications au Code de la santd
publique].
Selon les termes de l’article 16-1 alin6a 3 nouveau du Code civil, <<[I]e corps hu-
main, ses 616ments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial.> Le
principe ainsi pos6 se trouve pr6cis6 par l’article 16-5 du meme code : <(Les conven-
tions ayant pour effet de conf6rer une valeur patrimoniale au corps humain, h ses 616-
ments ou . ses produits sont nulles.>> Ces dispositions s’appliquent aux gambtes79. Pa-
rall~lement en droit p6nal,
‘article 511-9 nouveau du Code pinal prohibe et r6prime
On pourrait en d6duire que les gametes humains ne sont pas des choses ou du
moins, qu’ils ne sont pas des choses dans le commerce juridique, c’est-h-dire des cho-
ses susceptibles de circuler entre les personnes grace ht des actes juridiques les prenant
pour objets. Cependant, l’article L.673-1 nouveau du Code de la santdpublique 6tablit
et d6finit un don de gametes>> comme l’apport par un tiers de spermatozo’des ou
d’ovocytes en vue d’une assistance m6dicale A la procr6ation.>> Les articles suivants,
L.673-2 h L.673-7, r6glementent quant eux les diff6rentes modalit6s pratiques de cc
don. Davantage, 1’article L.673-5 pr6voit la possibilit6 pour des 6tablissements sp6cia-
lement autoris6s par l’autorit6 administrative de c6der les gametes qu’ils auront re-
cueillis. Toujours en mati~re p6nale, l’article 511-4 nouveau du Code pinal et 1’article
L.675-16 du Code de la santj publique prohibent et r6priment <
Ces textes consid~rent les gametes comme des biens pouvant faire l’objet d’actes
juridiques tels le don et la cession, c’est-t-dire d’un commerce juridique, certes contrO-
16 mais effectif. Toutefois, comment les concilier avec les principes g6n6raux affirm6s
plus haut ?
En r6alit6 les propositions 6nonc6es par les lois de 1994 ne sont pas vritablement
contradictores 0 . Les dispositions pr6vues dans la Loi n 94-654, relatives aux modali-
t6s d’utilisation des produits et des 616ments du corps humain, les gametes notamment,
78Les articles du Code de la santipublique cit6s dans ce document ont W introduits par la Loi n
94-654, supra note 24.
7 9 Voir notamment Y. Roudy dans le Rapport d2871, supra note 26, t. 1 A lap. 25.
so Voir J.-C. Galloux,
supra note 33, 18 A lap. 22 [ci-aprs <
1995]
J.-C. GALLOUX- STATUTDES GAMA TES HUMAINS
1009
et inscrites dans le Code de la santi publique, d6rogent aux principes g6n6raux pos6s
dans cette loi et prescrits par le Code civil. Les gametes sont dis lors des choses, et
m~me des choses dans le commerce puisqu’ils se donnent et se vendent, mais dans les
hypothses tr~s prdcises pr6vues par la loi. En effet, selon ‘article 16-9 nouveau du
Code civil, les principes pos6s par les articles 16
16-8 sont d’ordre public. Les d6ro-
gations qui y sont apport6es doivent en consequence s’interprdter restrictivement.
Le l6gislateur a eu le souci de distinguer la nature r6elle des divers 616ments et
produits du corps humain parmi lesquels les gametes se rangent, de la nature person-
nelle ou quasi personnelle, de 1’embryon ou du foetus. L’embryon humain fait l’objet
d’un <
non pas transplant”‘. On ne transfert pas des gametes ni ne les confie ni ne les ac-
cueille: on les donne, on les vend, etc.
Une demi~re incertitude m6rite enfin d’etre lev6e : la nature des gametes humains
se trouve-t-elle modifide selon leur situation ? En d’autres termes, sont-elles d6j des
choses lorsqu’elles ne sont pas encore d6tachdes du corps ?
II est ais6 de rdpondre par 1’affirmative, bien que certains auteurs aient soutenu que
des existants puissent changer de nature juridique selon leur situation dans ou en de-
hors du corpsM4. Une telle proposition heurte la logique de type aristot~licien sur
laquelle s’est d6veloppde la construction des cat6gories juridiques dans les syst~mes de
droit occidentaux : les existants d6finis par les categories fondamentales que sont les
personnes et les choses sont n6cessairement stables et permanents, ces existants ayant
une nature et une essence propres qui les d6finissent. Que les gametes soient 6mis ou
qu’ils reposent dans les gonades, ils sont essentiellement identiques. Au demeurant, le
corps humain, au sens des lois de 1994, est consid6r6 comme une chose, de sorte que
l’incorporation (au sens littdral) des gametes ne changera pas leur nature juridique 6 :
les gametes humains sont des choses aussi bien dans le corps qu’excr6tds, recueillis ou
pr6lev6s hors du corps.
II reste ds lors
examiner h quelles categories de choses 6tablies par la loi ces
mat~riels biologiques humains appartiennent.
81 Art. L.152-1 Code de la santdpublique.
82 Loi if 94-654, supra note 24, art. 9.
83 Art. L.152-5 Code de la santipublique.
84 Pour C. Labrusse, <
se <
qualification de chose. Voir aussi Giudicelli, supra note 42
85 Sur l’ensemble de cette question, voir Essai de definition, supra note 9 A ]a p. 38.
86 Sur 1’ensemble de cette question, voir
lap. 112.
1010
MCGiLL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGiLL
[Vol. 40
B. Les gametes humains : Des choses particulieres
Les gametes sont des choses particuli~res. Dans ses lois de 1994, le Idgislateur a
bien senti la ndcessit6 de ne pas traiter tous les composants du corps humain de ]a
meme fagon” ; les gametes et les embryons ne sont pas des produits comme les au-
tres88 . HI a 6tabli des cat6gories parmi les mat6riels biologiques humains, s’appuyant en
cela sur les pratiques m6dicales ant6rieures et le sens commun. Ces cat6gories r6v~lent
une hi6rarchie qui s’6tend aux deux extremes de l’activit6 biologique corporelle :
1’excr6ment et l’embryon. Les gametes y occupent une position proche de celle des
embryons. A chacune de ces diverses cat6gories correspond un r6gime juridique dis-
tinct7 qui sera 6tudi6 dans la seconde partie de cet expos6.
II reste t titre de pr6alable, h consid6rer si ces gamtes doivent recevoir la meme
qualification juridique lorsqu’ils apparaissent
lorsqu’ils sont dispensds aux couples infertiles sous une forme 61abor6e, quasi mcdi-
camenteuse : tri6s, purifi6s, concentrds. Cette question renvoie ht l’application t leur
6gard de la distinction entre les choses et les biens.
1.
Les gametes <
Les gam~tes 6voqu6s dans les deux textes de loi visent-ils les memes mat6riels
biologiques ? Ne conviendrait-il pas de distinguer entre les gametes en tant que tels >
comme ils se trouvent dans le corps, bruts, ou tout juste pr6lev6s, et les gametes
<
it la procr6ation ? Les premiers conserveraient une nature de chose non patrimoniale en
application de l’article 16-1 alin6a 3 nouveau du Code civil, les seconds consistant en
des sortes de <
publique.
Cette interpr6tation a 6t6 propos~e afin de r6soudre la contradiction existant entre
les diff6rents textes : les principes posant le caract~re extrapatrimonial du corps hu-
main, ses 616ments et ses produits (article 16-1) et les textes d’application autorisant
leur cession sous certaines conditions. Les travaux parlementaires apportent un certain
cr~dit a cette interprtation91 . Une distinction comparable a 6t6 retenue par le projet de
87 Voir Y. Roudy dans Rapport tn 2871, supra note 26, t. I aux pp. 25,43.
98 B. Kouchner, J.0. D6bats Ass. nationale, 21 novenbre 1992, 583 1.
89 <
Ddbats S6nat, 21 janvier 1994,288).
90 P-H. Decourcelle, Statut juridique du corps hunzain au regard des lois (eiboethiques, m~moire
pour le D.E.S.S. de droit de l’entreprise de haute technologie, universit6 do Versailles Saint-Quentin-
en-Yvelines, 1994 [non publif].
91 Le prix pay6 pour des produits ou des 616ments du corps humain est ]a contrepartie do leur
bats Ass. nationale, 24 novenbre 1992, 5930 ; B. Bioulac, J.0. DMbats Ass. nationale, 24 novembre
1992,5958 ; P. Mhaignerie, J.0. D6bats Sdnat, 14janvier 1994,97).
1995]
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1011
Convention du conseil de l’Europe sur la bio6thique . Ainsi, les 616ments ou produits
bruts du corps humain tels qu’en leur 6tat naturel seraient absolument rebelles h toute
forme d’appropriation, h toute conversion en monnaie ou un 6quivalent. Certes, la loi
reconnalt aux individus une maltrise sur ces choses mais une maitrise qui ne serait pas
un droit de propri6t6. Le droit civil frangais, comme le droit civil du Qu6bec, ne con-
naissent que les choses communes comme choses rebelles A toute appropriation93. Or,
nos gametes sont-ils r6ellement <> ? C’est pour le moins contestable.
II semble plus coh6rent d’admettre que le l6gislateur frangais n’a pas op6r6 de dis-
tinction entre les gametes en tant que tels>> et les gametes produits th6rapeutiques>>
pouvant 8tre utilis6s dans le cadre d’une assistance m6dicale h la procr6ation. En effet,
il emploie le m~me terme dans les deux cas. L’expression en tant que tel>> ne figure
qu’t 1’article L.611-17 du Code de la proprigtM intellectuelle, modifi6 h l’occasion de
ces lois, et qui ne conceme pas directement notre sujeL En cons6quence, il y a lieu
d’appliquer la maxime ubi lex non distinguit, nec nos distinguere debemus.
2.
Les gametes, le corps, les 616ments et les produits du corps
Les gametes se distinguent des autres mat6riels biologiques, mais le droit frangais
ne distingue pas entre les diff6rents gametes.
a.
La distinction des gametes et des autres matdriels biologi-
ques
Les lois de 1994 distinguent entre les mat6riels biologiques humains. Cependant,
oii peut-on ranger les gametes ? A c6t6 du corps, on diffdrencie d6sormais les 616ments
et les produits du corps humain. Le l6gislateur a refus6 de donner t ces diff6rents ter-
mes une d6f’mition juridique ferme, il a pr6f&6 que l’on se r~fere aux d6finitions m6di-
cales 4.
Le corps se trouve consid6r6
naturels ou artificiels (comme les prothises) qui se situent au sein de ce p6rim~tre
physique que nos sens d6limitent comme 6tant le soi>. Les gamtes non d6tach6s du
corps hufniain en constituent une partie int6grante et en suivent ainsi le r6gime juridi-
que.
Les produits regroupent en r6alit tous les 616ments biologiques qui n’appellent pas
une protection juridique renforc6e, soit en raison de leur caract6re renouvelable, soit en
92 Conseil de ‘Europe, Comit6 directeur pour ]a biodthique, Projet de convention pour la protection
des droits de I’honmne et de la dignitd de I’dtre humainii I’dgard des applications de la biologie et de
la niddecine : Convention de biodthique (juillet 1994) dans (15 septembre 1994) Dictionnaire Perma-
nent Biothique et Biotechnologies 4028.
93 Art. 714 C.N. ; art. 913 C.c.Q.
Voir par ex. G. Cabanel, J.O. D6bats Snat, 20janvier 1994, 378.
95 Rapport n 2871, supra note 26, t. 1 A lap. 124.
1012
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DRO1TDE MCGILL
[Vol. 40
raison de leur moindre valeur symbolique au regard de la dignit6 des personnes. A cc
96
premier titre, sont consider6s comme des produits le lait, sans doute le sang ,
l’ensemble des excr6tions , mais pas les gametes. Au second titre, on peut citer les ex-
creta et les phan~res (cheveux, poils, ongles et dents)P. On n’y range pas davantage les
gametes.
Les 6l6ments du corps humain sont represent6s par les organes, les tissus, les cellu-
les99 et par la moelle osseuse’00. 1 n’est pas certain que les gametes soient assimil6s t
des cellules et, par voie de consequence, h des 6l6ments du corps humain’ ‘ . Le l6gisla-
teur a en effet entendu le terme <
La loi ne proposant pas d’autres cat6gories que celle des 6lements et celle des produits
du corps humain’0o , et, comme nous l’avons vu, les gametes ne pouvant pas etre des
produits, ils doivent atre consid6r6s comme des el6ments particuliers du corps humain.
Ceci implique que ce sontjuridiquement des 6l6ments du corps humain, mais aussi que
toutes les dispositions relatives hi ces demiers ne sont pas automatiquement applicables
aux gametes. Cette remarque presente un int6rt tout particulier pour determiner le
champ d’application de ‘article 16-9 du Code civil selon lequel <<[alucune information
permettant d'identifier h la fois celui qui a fait don d'un 6l6ment ou d'un produit et cc-
lui qui l'a re~u ne peut etre divulgu6e.>>
Les lois de 1994 ont enfin 6tabli une demi~re categorie participant de celles des
6l6ments et des produits du corps humain : les dechets operatoires. L’article L.672-1 du
Code de la sante publique les definit comme
gametes ne sauraient entrer dans cette categorie.
b.
L’absence de distinction entre les gametes
Volontairement, dans un souci d’6galit6 sexuelle entre les donneurs, les lois n’ont
op6r6 aucune distinction entre les gametes males et les gametes femelles. Les amen-
dements tendant t interdire le don d’ovules ont 6t6 repouss6s’ 4. Cette assimilation ju-
96 Voir B. Kouchner, J.0. D6bats Ass. nationale, 24 novembre 1992, 5923. Cependant, le titre II du
livre VI du Code de la santepublique distingue le sang des autres produits (vises au titre suivant).
97 Le lgislateur a, A cet dgard, commis une confusion entre excretions et secretions (Rapport if
2871, supra note 26, t. 2 A lap. 50).
98″Voir M. Cherioux, J.0. Debats Senat, 19 mai 1994, 1635 ; Rapport n 1057, supra note 73 A ]a p.
171.
99 Voir art. L.672-1 Code de la santipublique.
[to Art. L.671-1 Code de la santipublique.
101 Pour une opinion contre cette assimilation, voir J.-F Mattei, J.O. Ddbats Ass. nationale, 22 no-
vembre 1992, 5843 ; pour une opinion favorisant cette assimilation, voir M. Vauzelle, J.0. Debats
Ass. nationale, 21 novembre 1992, 5839.
12Rapport n 2871, supra note 26, t. 2 A lap. 50 ; Rapport n 1057, supra note 73 At lap. 129.
103 Le titre du nouveau livre VI du Code de la santd publique s’intitule : <
1
04 B. Bioulac, Debats Ass. nationale, 25 novembre 1992,5984.
1995]
J.-C. GALLoux – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1013
ridique du don de sperme au don d’ovules et, par voie de cons6quence, de la nature ju-
ridique du sperme et des ovules, ne m6connait pas pour autant les sp6cificit6s m6dica-
les du don d’ovulesW.
La nature juridique des gametes humains d6termine largement leur r6gime.
H. Le r~gimejuridique des gametes humains
Cet expos6 sera n6cessairement limit6 h ce qui a trait strictement au r6gime juridi-
que des gametes, afin de ne pas traiter de l’encadrement des activit6s d’assistance m6-
dicale a la procr6ation, ce qui n’entre pas, du moins de fagon directe, dans notre propos
initial”06. Comme pour tous les mat6riels biologiques d’origine humaine envisag6s par
les lois de 1994, les gametes subissent une double srie d’op6rations : la premiere con-
siste en leur recueil qui pr6suppose un acte de disposition de la part de leur auteur ; la
seconde recouvre tout un ensemble d’interventions sur le mat6riel hdr6ditaire selon les
utilisations envisag6es.
A. La disposition initiale des gaintes
Dans ses lois de 1994, le 16gislateur a, comme h regret, organis6 la disposition des
gametes humains afin d’alimenter le march6 m6dical de la procr6ation artificielle qu’il
n’a pourtant pas h6sit6 h 16gitimer : il a donc conseill6 d’6viter autant que possible le
recours aux dons de sperme et d’ovules au profit de tiers’7 tout en reconnaissant que
sans eux [l]a procr6ation m6dicalement assist6e n’aurait pas sa pleine signification.>>
Ces regrets et ce conseil p~seront peu en face des <
s’inciner et qui concement quelques milliers d’individus en France chaque annfe.
Qui peut disposer des gametes ? Comment et pour quelles fins en disposer ? Avant
d’y r6pondre, on observera, qu’en toute hypoth~se, le droit frangais n’op~re aucune
distinction entre le don de sperme et le don d’ovocytes, ni entre le recueil h vocation
homologue et le don fait au profit de tiers.
105 Rapport if 2871, supra note 26, t. 2 ]ap 79.
10 Quant aux aspects administratifs de cet encadrement, voir J.-M. Auby, <(Les aspects administra-
tifs de l'assistance m&Iicale A la procr6ation et des pr61 vements sur le mat6riel biologique humain>
dans Biodthique, supra note 33, 14 ; quant aux aspects civils, voir J. Savatier, <
17 Art. L.152-6 Code de la santdpublique: <
10 Rapport d’infonnation d6posi en application de l’article 145 du Rfglement par la Commission
des Affaires culturelles, fainiliales et sociales et la Commission des Lois constitutionnelles, de la L_-
gislation et de l’Adninistration gindrale de la Ripublique sur la biodthique, J.O. Documents Ass.
nationale, n 2565, 18 f6vrier 1992 A lap. 31 (prdsent par B. Bioulac).
1014
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
1.
L’auteur de la disposition
La situation ant&ieure aux lois de 1994 nous livre assez peu d’enseignements. Do
son c6t6, la loi nouvelle se r6v~le souvent lacunaire. Cette situation est accentu6e par
1’absence de dispositions r6glementaires d’application.
a.
La situation antirieure aux lois de 1994
Ant6ieurement aux lois de 1994, aucune disposition 16gale ou r6glementaire ne
prdcisait la situation des donneurs : ni les Dicrets du 8 avril 1988, ni la Loi du 31 dd-
cembre 1992. Cette situation avait d’ailleurs conduit le Comit6 consultatif national
d’6thique h solliciter une intervention 16gislative rapide’ 9. En r6alit6, des r~gles ont 6t6
61abordes dans le cadre de la pratique des C.E.C.O.S., soit par leur ocharte 6thique>>,
soit par les contrats pass6s avec leurs diffdrents partenaires. Mais d’autres pratiques ont
pu se d6velopper en dehors des C.,.C.O.S.
Ces demiers ont d6gag6 dans leur pratique les r~gles principales suivantes:
– la r~gle du b6n6volat doit 6tre observ6e en mati~re de don de gametes;
– le don doit demeurer anonyme ;
– le recours au sperme frais en cas d’utilisation de sperme de donneur est pro-
hib6 ;
– les donneurs males doivent avoir d6j t procr66;
– les donneurs doivent subir des contrOles anti-infectieux et g6n6tiques;
– le don doit demeurer gratuit.”0
Le fonctionnement des C.E.C.O.S. a incontestablement servi do module pour le
16gislateur, de sorte que, pour ‘essentiel, ces r6gles ont 6t6 reprises dans le cadre des
lois nouvelles.
b.
Les rkgles nouvelles
Le don de gametes doit etre le fait d’une personne vivante. Cette premiere r~gle,
implicite, se d~duit des articles L.673-1 et L.673-2 du Code de la sant6 publique. Les
gametes no peuvent etre pr6levds sur une personne d6c6d6e. En revanche, rien ne
semble interdire que les gametes d’un donneur d6c6d6 apr~s son don soient utilis6s “t
de ganztes et ses consiquences (18 juillet 1990) Paris.
109Conit6 consultatif national d’6thique, Avis du 18juillet 1990 sur l’organisation actuelle du don
110 Minist~re des Affaires sociales, de ]a Sant6 et de a Ville, Minist&e de ]a Justice, Ministre de
‘Enseignement sup~rieur et de ]a Recherche, Rapport a monsieur le Premier Ministre stir ‘dthlique
bionmedicale (15 novembre 1993) Paris A lap. 164.
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMTES HUMAINS
1015
des fins de procr6ation, s’il ne s’agit d’une ins6mination homologue.’ ou d’une fdcon-
dation in vitro homologue”‘.
Le don de gametes doit
tre le fait d’un individu vivant en couple, selon 1’article
L.673-2 du Code de la santi publique. Le donneur doit donc etre mari6 ou vivre en
concubinage. Ce couple doit avoir procr 6, pr6alablement h l’accomplissement du don,
ce qui exclut comme donneurs de gametes les homosexuels vivant en couple” 3. Le
donneur vit en couple au moment du don puisque le consentement de l’autre membre
du couple se trouve requis par le mgme article. Cette disposition apparait essentielle,
car le don de gametes est le don non pas d’un individu h un individu mais d’un couple
h un autre coupl1 4. Sous r6serve des d6crets d’application” S, ces dispositions laissent
irr6solues un certain nombre de questions importantes.
A priori, aucune condition d’Age, et donc de majorit (encore que cette hypoth~se
soit marginale en raison de la condition de procr6ation pr6alable), ne se trouve pos6e. Il
n’y a pas davantage de condition relative t la capacit6 juridique. Un incapable’ 6 peut
donc donner ses gametes sous r6serve que son consentement soit valablement re-
. Par ailleurs, la loi reste discrte sur le couple auquel le donneur appartient.
cueiUi’
Quel est cet autre membre du couple dont le consentement est exig6 : <4'ancienne
compagne avec laquelle le donneur, dans le pass6, a eu des enfants ou la nouvelle
compagne qui n'a pas d'enfant commun avec le donneur>>”? I peut s’agir d’un couple
16gitime comme d’un couple de concubins. Nous verrons h la suite que c’est le conjoint
ou le compagnon vivant actuellement avec le donneur qui doit consentir, si l’on consi-
d~re que la loi 6tablit une sorte de copropri&6t sinon de cogestion sur les gametes du
couple. D’un point de vue pratique, il sera impossible pour le praticien qui devra re-
cueillir ce consentement, de v6rifier la r6alit6 de la situation du donneur qui se pr6-
sente: avec quels moyens d6voilera-t-il un <
question retiendra-t-elle son attention ?
I Art. L.152-2 al. 3 Code de la santdpublique :
1Art. L.152-3 Code de la santdpublique.
11I ’11 A moins qu’ils n’aient pr6alablement procr66 en couple h6trosexuel.
114Le 16gislateur observe que
15 Cependant, ]a lecture des textes laisse prdsager qu’aucun des d~crets prdvus ne vise en soi les
conditions relatives aux donneurs (voir ]a liste de ces d~crets dans Decourcelle, supra note 90 A la p.
39).
16 Sur la question g6n6rale du statut des incapables dans les lois du 29 juillet 1994, voir A. Batteur,
De ]a protection du corps A la protection de l’etre humain: Les “anormaux” et les lois du 29 juillet
1994>> dans Biodthique, supra note 33, 29.
117 Larticle L.675-9 du Code de la santipublique renvoie t l’article 511-6 du Codepnal qui sanc-
tionne le fait de recueillir ou de prlever des gametes sur une personne sans son consentement dcrit de
cinq ans d’emprisonnement et de 500,000 francs d’amende.
18C. Neirinck, Le droit de la filiation et ]a procr6ation mlicalement assistSe>> dans Bioithique,
supra note 33, 54.
1016
MCGILL LAW JOURNAL/ REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol.40
2.
Les modalit6s de la disposition
La loi parle du don de gametes mais s’agit-il d’un don au sens juridique du terme ?
Certains ont pu le contester afin de ne pas remettre en cause le principe de non-
patrimonialit6 du corps humain et de ses 616ments, proclam6 A l’article 16-1 nouveau
du Code civil’9 . Cette 6trange habitude de ne pas conf6rer aux termes juridiques leur
sens technique o, qui relve d’une forme de duplicit6 intellectuelle, a dt6 parfaitement
illustr6e par le Comit6 national d’6thique dans son rapport relatif aux recherches sur les
embryons humains, dont le l6gislateur s’est largement inspir6 : le terme don> a 6t6
choisi <
it la notion
juridique de don> ; <
taire des <
les
C.E.C.O.S.1 On ne voit pas pour quelle raison le terme <
employ6 ici dans son acception juridique d~s lors qu’il porte effectivement sur une
chose, qu’il n6cessite le consentement de son auteur et qu’il se r6alise t titre gratuit. I1
faut done s’en tenir A l’acception juridique des termes”‘2 sous peine de tomber dans le
travers d6nonc6 plus haut, de renier le langage juridique, de renoncer h la recherche
d’une coh6rence du syst~me juridique, bref, sous peine d’abdiquer toute rationalit6 ju-
ridique.
les contrats pass6s avec
La loi 6dicte des modalit6s tantjuridiques que pratiques au don de gametes.
a.
Les mnodalitis juridiques du don de gametes
Outre les dispositions sp6ciales relatives au don et ht l’utilisation de gametes conte-
nues dans les articles L.673-1 h L.673-7 du Code de la santi publique, ce don est
soumis aux principes g6n6raux applicables au don et t l’utilisation des 616ments et des
produits du corps humain 4.Une personne identifi6e peut done disposer de ses propres
gametes en y consentant sp6cialement, dans le cadre d’un acte anonyme et gratuit.
Le donneur doit d’abord s’identifier puisqu’il doit prouver qu’il a procr66, qu’il vit
en couple, d6signer son conjoint ou son partenaire, subir une s6rie de tests m6dicaux et
consentir au don. Cette identification initiale ne contredit pas le caract~re anonyme du
119Voir Rapport n 2871, supra note 26, t. 2 A lap. 78.
120 Elle n’est pas nouvelle dans le domaine biomddical (voir notamment Baud, supra note 8 A a p.
18).
1 Voir le rapport accompagnant l’Avis du 18juillet 1990, supra note 109.
1 J.-F. Mattei dans Rapport n’ 2871, supra note 26, t. 1 A lap. 72.
123Voir Rapport df 1057, supra note 73 A ]a p. 129 ; P. Douste-Blazy, J.0. D~bats S6nat, 18 janvier
1994, 181.
124 Rapport ni 2871, supra note 26, t. 1 aux pp. 23, 25, 80.
1995]
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1017
don. En effet, l’anonymat du don a pour effet d’empecher le b6n6ficiaire de connaitre
l’identit6 du donneur. Le m6decin, quant i lui, aura la possibilit6 d’acc6der aux infor-
mations de nature m6dicale, en particulier d’ordre g6n6tique qui concement le donneur
en cas de n6cessit6 th6rapeutique pour l’enfant conqu h l’aide de ses cellules sexuelles.
Ces donn6es demeurent non identificatrices25.
Le donneur doit consentir par 6crit sous peine de sanction p6nale’ 6 . Dans le silence
de la loi et dans l’attente d’6ventuels textes r6glementaires, il est probable que les pra-
tiques ant6rieures, selon lesquelles le consentement est re~u au moment du recueil, se-
ront reconduites. Le don est r6vocable h tout moment en application des dispositions de
l’article L.665-11 du Code de la santi publique. Cette r6vocation est rendue possible
par l’identification pr6alable du donneur. En raison de la fin sp6cifique h laquelle sont
destin6s ces 616ments corporels, la procr6ation d’un etre humain’27, il paralt pour le
moins normal qu’t l’instar du procr6ateur naturel, le donneur puisse renoncer jusqu’h
l’ins6mination ou t la f6condation, it l’utilisation de ses gametes, conservant ainsi un
contr6le sur la destination de ses 616ments corporels.
La d6cision de donner les gamtes n6cessite 6galement le consentement 6crit de
Le 16gislateur reconnait par 1 la r6alit6 de la cod6cision au sein du couple en mati~re
de procr6ation2 9. Puisque, selon le droit frangais, le don de gametes est le don d’un
couple fait 4t un autre couple, la loi institue une sorte de cogestion sur les cellules
sexuelles, dans la tradition du mariage 3. Certains auteurs, s’appuyant sans doute sur la
16gislation relative h l’interruption volontaire de grossesse”‘, avaient pu contester une
telle cogestion
, cette position se trouve d6sormais invalid6e par le 16gislateur.
Le don de gametes est anonyme, comme le don de tout 616ment ou produit du
corps humain. Selon les d6bats parlementaires, le fondement de cette r~gle se trouverait
dans le principe de non-patrimonialit6 du corps’. On a soulign6 avec justesse que ce
principe n’a pas 6td vritablement d6battu par la repr6sentation nationale’TM . Pose par
12 Art. L.673-6 Code de la sante publique.
126 Art. L.675-9 Code de la santdpublique renvoyant A l’art. 511-6 Code pinaL
127 Rappel6 par l’art. L.673-1 Code de la santdpublique.
128 Loi Y 94-654, supra note 24, art. 10 introduisant Part. L.673-1 Code de la santdpublique.
129F. Serusclat a m~me par16 de .(copropri6t&> des gametes (J.O. D6bats Snat, 21 janvier 1994,
296).
10 Sur ]a notion de cogestion des gametes que nous avions d6gag~e, voir Essai de ddfinition, supra
note 9 A lap. 276.
I3, Le conjoint ou le compagnon, pre de 1’enfant h naitre, ne peut en effet s’opposer A la dcision
de la femme de mettre fin A sa grossesse (art. L.162-1 et s. Code de la santipublique non modifi6).
1 Voir Terre, supra note 2 aux pp. 167-68.
33 Rapport fait au nom de la comnission des Lois constitutionnelles, de idgislation, du suffrage
universel, du Rglement et d’adnbistration ginerale (1) sur le projet de loi adoptd par l’Assemblde
Nationale, relatifau corps huiain, J.O. Documents Ass. nationale, n 230, 12 janvier 1994 A ]a p. 29
(Pr6sident: G. Cabanel).
i. Neirinck, supra note 118 A lap. 55.
1018
MCGiLL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
Particle 16-8 nouveau du Code civil, de fagon g6n6rale, il est repris Ai l’article L.665-14
du Code de la santd publique puis amend6 par l’article L.673-6 du meme code qui
institue une d6rogation au profit de l’enfant conqu du mat6riel donn6, comme il a 6t6
vu plus haut. Ce principe est enfin compl6t6 par l’article L.673-7 aux termes duquel
<4]e b6n6fice d'un don de gametes ne peut en aucune manire etre subordonn6 A la
d6signation par le couple receveur d'une personne ayant volontairement accept6 de
proc6der h un tel don en faveur d'un couple tiers anonyme. En effet, le principe de
l'anonymat impose un double secret: donneur et receveur ne peuvent se connaltre l'un
et l'autre d'une part, et d'autre part, les tiers ne peuvent recevoir aucune information de
nature a identifier le donneur. Les articles L.675-11 et L.675-14 du Code de la santd
publique protgent cet anonymat au plan p6nal. Ce dispositif 16gal cherche unique-
ment A gommer ce qui permettrait 6ventuellement de reconstituer la chaine biologique
de l'enfant n6 d'une P.M.A. 35 Ce choix a t contest6 par certains parlementaires"6.
En effet, il semble difficilement conciliable avec l'article 7 de la Convention interna-
tionale des droits de l'enfant adopt6e par I'O.N.U. le 20 novembre 1990, ratifi6e par la
France, qui dispose que 4d'enfant a droit de connaltre ses parents et d'etre 61ev6 par
eux.>13 7 On a pu cependant le pr6senter comme une mesure de protection des donneurs.
Le don de gametes est gratuit. A nouveau, il s’agit de l’un des principes fondamen-
taux des lois de 1994. Il d6coule directement du principe de non-patrimonialit6 du
corps humain, de ses 616ments et de ses produits. Le corps humain, ses 616ments et ses
produits ne peuvent etre un objet de commerce’. L’exigence de gratuit6 se trouve rap-
pel6e avec force et de mani~re redondante, A l’article 16-6 du Code civil: <(Aucune rd-
mun6ration ne peut etre allou6e A celui qui se prete [...] h la collecte de produits [de son
corps]> ; l’article L.665-12 du Code de la santdpublique et assortie des sanctions p6-
nales pr6vues h l’article L.675-10 du m~me code. Le principe de la gratuit6 n’a cours
qu’entre le donneur et l’6tablissement dOment autoris6 h recueillir les gametes. Ledit
6tablissement pouvant quant A lui procdder A la cession des gametes collect6s et pr6pa-
r6s en vue d’une procr6ation m6dicalement assist6e”3 9, dans les limites pr6vues par
1’article L.675-10 du Code de la santdpublique4 .
135Ibid.
136 Voir surtout Rapport nd 2871, supra note 26, t. 1 A la p. 134 et s. ; C. Boutin dans Rapport n*
2871, ibid. A lap. 85.
137 P. Rietjens, La convention des Nations-Unies relative aux droits de l’enfant, Bruxelles, Ministre
des Affaires 6trang~res, du Commerce extdrieur et de ]a Cooeration au D6veloppement, 1992 ; voir
aussi P. Murat, <,Procr6ation m&licalement assist6e et "droits de l'enfant"f> (1991) 27 Rev. trim. dr.
sanitaire et social 387.
138 Rapport n* 2871, supra note 26, L 1 A ]a p. 4.
139 Art. L.673-5 Code de la santdpublique.
140 L’tablissement peut percevoir au titre du prix de cession le paiement des prestations assuries en
vue de la preparation et de ]a conservation de ces gametes. C’est une des application de la rfgle de
non profit promue par les LAois de 1994, supra note 24, lorsque, n~anmoins, il y a commerce des 616-
ments et des produits du corps humain.
19951
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMETES HUMAINS
1019
b.
Les inodalitispratiques du don de gantes
La loi reste 6trangement silencieuse sur les conditions du don d’ovocytes qui exige
pourtant une intervention m~dicale lourde. S’agissant d’un vdritable pr61vement, on
pouvait s’attendre t la reprise de certaines des dispositions relatives au pr6lvement
d’organes comme celles pr6voyant une protection renforc6e pour les incapables et une
information sp6cifique sur les risques encourus 141.
Au titre des principes g6n6raux applicables h tous les dons d’616ments et de pro-
duits du corps humain, et qui gouvement aussi les dons de gam~tes, on peut citer
I’interdiction de la publicit6 et le contr6le sanitaire.
La publicit6 en faveur du don de gametes au profit d’une personne d6termin6e ou
au profit d’un 6tablissement ou organisme d~termin6 est interdite. Cette interdiction ne
fait cependant pas obstacle h ce que, sous la responsabilit6 du ministre charg6 de la
sant6, des actions d’information du public en faveur du don de gametes soient me-
n~es
142
Le recueil des gametes doit s’accompagner de tests de d6pistage des maladies
transmissibles 43 et, d’une fagon g6n6rale, un d6cret en Conseil d’ttat fixe les r~gles de
sdcurit6 sanitaire qui doivent encadrer cette activit6’44. Le fait de ne pas proc6der au
d6pistage exig6 par la loi est puni par un emprisonnement de deux ans et une amende
de 200,000 francs 41 . Les gam~tes eux-memes font l’objet d’une vigilance dont les
conditions sont dgalement fix6es par d6cret en Conseil d’ttat. Le recueil des gam~tes
est pr&6d6 de la fourniture de nombreuses informations de la part du donneur ; ces in-
formations permettent au m6decin de v6rifier d’une part si le donneur remplit les
conditions exigdes par la loi pour rdaliser ce don, et d’autre part des informations
d’ordre m6dical et qui concernent notamment les ant6c6dents du donneur et de sa fa-
mille. L’ensemble de ces informations, rendues non identificatrices, demeure accessi-
ble pour une dur6e ind6termin6e t tout m6decin en cas de n6cessit6 th6rapeutique pour
l’enfant conqu de ces gam~tes 46.
Finalement, qui recueille les gametes ? Les lois de 1994 6tablissent une v6ritable
<
v6es A des 6tablissements de sant61″,
la condition que ces 6tablissements aient requ
. 147
141 Art. L.671-1 et s. Code de la santdpublique.
142 Art. L.665-12 Code de la santipublique.
143 C’est une innovation puisque le Ddcret n* 92-174 du 25fdvrier 1992 relatif a la prevention de la
transmission de certaines maladies infectieuses, J.O., 26 f6vrier 1992, 2929, ne pr6voyait pas de d6-
pistage des maladies gdn6tiques.
144 Art. L.665-15 Code de la santdpublique.
145 Art. L.675-12 Code de la sante’publique.
46 Art. L.673-7 Code de la santdpublique.
147 Voir Auby, supra note 106 A lap. 15.
148 ArtL.184-1 et s. Code de la santipublique.
1020
MCGILL LAw JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
une autorisation administrative 49. Ces demiers sont donc les seules personnes habili-
tdes h recueillir les gametes. Ces dispositions l6gislatives sont assorties de sanctions
pdnales”0 .
B. L’utilisation des gametes
Une fois les gambtes donn6s et recueillis, quelles pourront en etre les utilisations ?
Seule la finalit6 procreative est autorisde par la loi. Encore, celle-ci ne doit-elle donner
lieu h aucune d6rive eugdnique.
1.
La destination exclusivement procr6ative des gambtes
Les gambtes humains sont donnds dans le but exclusif de servir de moyen h une
assistance mddicale i la procreation : le don de gamtes se d6finit par cette finalit6d’
autant que par sa nature. Ceci a pour consdquence que les gambtes ne sont pas utilisa-
bles i des fins de recherche scientifique. Cette consequence devrait conduire ht
1’interdiction des expdrimentations sur les gambtes, accomplies notamment dans le but
de mieux comprendre le fonctionnement de la f6condation ou les d6ficiences qui peu-
vent affecter les gambtes eux-memes. On ne manquera pas de notel, cependant, que le
respect de cette finalitd ne se trouve assorti d’aucune sanction p6nale ; seules des sanc-
tions administratives sont prdvues 52. Mais le juge judiciaire demeure comp6tent pour
faire cesser ce qui pourrait apparatre comme un
produit ou un 61ment du corps humain 53.
Encore que seule autorisde, l’utilisation des gametes t des fins procrdatives se
trouve strictement encadrde. En plus des exigences gdn6rales de s6curit6 sanitaire 6vo-
qudes plus haut, la loi prescrit que <<[t]oute insdmination artificielle par sperme frais
provenant d'un don et tout m6lange de sperme sont interdits.> 154 Cette rbgle a 6t6 6dic-
tde aussi bien pour des raisons sanitaires que des raisons 6thiques’. II est vrai que le
respect de ranonymat se r6vble plus ddlicat avec l’utilisation du sperme frais. Quant au
melange de sperme, il peut renvoyer t une sorte de loterie procr6ative d’assez mauvais
goat.
L’utilisation des gametes donne naissance h un vdritable commerce juridique dans
la mesure oii divers actes juridiques sont passds sur ces objets. En premier lieu, le l6gis-
lateur a reconnu 1’existence de vdritables contrats conclus entre les C.E.C.O.S. et les
149 Art. L.673-5 Code de la santdpublique.
150 Art. L.675-16 Code de la sant6publique.
151Art. L.673-1 Code de la santdpublique.
152 Art. L.184-6 Code de la santjpublique : <
153 ArL 16-2 C.N.
154Art. L.673-3 Code de la santipublique.
155 Rapport d 1057, supra note 73 A lap. 130.
]a procrdation […] entrarne le retrait temporaire
1995]
J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMtTES HUMAINS
1021
receveurs. Ces conventions ne sont certes pas les conventions de procr6ation prohibOes
par l’article 16-7 du Code civil, puisqu’elles ne portent pas <
C.E.C.O.S. est la remise de gam~tes.>>56 On peut 6galement 6voquer les contrats de
d6p6t dans les hypotheses d’auto-insrmination dont la loi n’a pas sp~cialement rrgle-
ment6 1’exercice157. En second lieu, ces activit6s donnent droit ii une rdmun~ration. La
loi pr6voit expressrment la cessiori des gamtes de la part des organismes autoris6s au
profit des receveurs3 8 : <<[le principe de gratuit6] ne doit pas faire obstacle ' ce que
soient rdmun6rdes les prestations effectudes par les 6tablissements autorisds concemant
les paillettes de spermes.>>”’59 Un tarif de responsabilit6, fix6 par voie r6glementaire, a
pour but de permettre la prise en charge des coots lies aux examens pratiquds sur le
sperme du donneur. Un sch6ma juridiquement identique s’applique aux ovocytes.
Toute autre forme de paiement des gametes se trouve en revanche prohibre et punie
prnalement’60 de m~me que le fait de s’entremettre pour favoriser l’obtention de gam6-
tes contre paiement. Ii semble r6sulter de ce texte que tout prix excrdant le paiement
des prestations assurdes par les 6tablissements effectuant la prdparation et la conserva-
tion des gametes est illicite et p6nalement r6prrhensible. Cette demi~re disposition
pourra poser probl~me dans l’hypoth~se d’une importation de gametes d’un pays
6tranger 6
1, en particulier si ce pays ne possmte pas de r~gles juridiques comparables
aux r~gles strictes frangaises.
2.
Le contrrle des ddrives eugdniques
L’article 16-4 nouveau du Code civil 6nonce que
[niul ne peut porter atteinte a l’intdgrit de l’espce humaine […] Toute pratique
eugrnique tendant a l’organisation de la s~lection des personnes est interdite
[…] Sans prdjudice des recherches tendant A la pr6vention et au traitement des
maladies gdndtiques, aucune transformation ne peut etre apportde aux carac-
t&es g~n~tiques dans le but de modifier la descendance d’une personne.
Ces dispositions concement directement l’utilisation des gametes humains de
divers points de vue. D’une part se pose la question de la lic6it6 de certaines pratiques
mises en ceuvre dans le cadre de 1’assistance mrdicale h la procrdation, et d’autre part
se pose la question de l’avenir de la therapie gdnique.
port n0 2871, supra note 26, t. 1 a ]a p.133.
p. Mhaignerie, J.O. Ddbats Ass. nationale, 20 avril 1994, 230 ; voir aussi J.-F. Mattei dans Rap-
157 Les actes de conservation de gametes semblent entrer dans le cadre des activitds biologiques
d’assistance m~dicale A la procr~ation, par opposition aux activitds cliniques qui comprennent le re-
cueil des gametes (P. Douste-Blazy, J.O. Drbats S~nat, 19 janvier 1994, 300 ; art. L.673-5, L.184-1 et
s. Code de la sant publique).
158 Art. L.673-5 Code de la santipublique.
159 S. Veil, J.O. Drbats Sdnat, 19 mai 1994, 1678.
160 Art. L.675-10 Code de la santdpublique.
161Prvue par 1’article 18 de la Loi du 31 ddcembre 1992, supra note 34.
1022
MCGILL LAW JOURNAL/REVUE DE DROITDE MCGILL
[Vol. 40
Qu’est-ce qu’une pratique eug6nique ? Le l6gislateur frangais n’a pas d6sir6 en
donner une d6finition. La philosophic g6n6rale qui a anim6 le l6gislateur a 6t6 bien ex-
pos6e par monsieur Kouchner, ministre de la sant6 : il convient de distinguer entre
1’eug6nisme collectif, sous-tendu par la conception de l’existence d’une race sup6-
rieure, et ‘eug6nisme individuel qui s’appuierait sur
165J.-E Mattei, J.O. D6bats Ass. nationale, 22 novembre 1992, 5841.
66 Art. L.673-4 Code de la santdpublique.
167 Rapport d 1057, supra note 73 A la p. 131.
168Voir ci-dessus la partie I.B. 1.
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J.-C. GALLOUX – STATUT DES GAMETES HUMAINS
1023
cient d’un r6gime sp6cifique qui les distingue des autres produits et 616ments du corps
humain et qui tente de pr6server la part de dignit6 humaine qui s’y rattache. On ne
peut, cependant, s’emp8cher de penser qu’ils se trouvent ravalds, pour reprendre les
mots du s6nateur Seillier, au rang de simple mat6driau biologique pour une conception
raval6e, quant h elle, h un <
94-654, qui, comme on l’a vu, d6ecline dans le Code de la santdpublique les principes
g6n6raux 6nonc6s par la Loi n’ 94-653 dans le Code civil, a 6t6 vot~e pour une p6riode
de cinq ans. k l’issue de cette p6riode, elle fera l’objet, apr~s une 6valuation de son
application par l’Office parlementaire d’6valuation des choix scientifiques et techno-
logiques, d’un nouvel examen par le Parlement170. Ce sera sans doute l’occasion de re-
m6dier aux imperfections que nous avons soulign es. I apparalt en revanche peu pro-
bable que le
lui ]a n6cessit6 d’organiser le march6 des gametes humains, avec toutes les consdquen-
ces juridiques qu’il implique.
69 B. Seillier, J.0. DMbats Sbnat, 14 janvier 1994, 117.
170 Loi d0 94-654, supra note 24, art. 21.