Article Volume 24:2

Les droits et obligations des copropriétaires / Première partie

Table of Contents

Les droits et obligations des copropri6taires

Premiere partie*

Francine ValIde-Ouellet**

I.

INTRODUCTION

A. La copropritd en tant que mode d’appropriation

Une 6tude r~cente, r6alis~e au Conseil de d~veloppement social
du Montreal M6tropolitain, r6v~le que pros de quatre familles sur
cinq occupant un plain-pied h Montr6al sont locataires. 1 Au contraire,
en France, ds 1962, des sondages r6v~laient une plus forte proportion
de propri~taires que de locataires.2 Plusieurs facteurs sont suscepti-
bles d’expliquer ce ph6nom-ne. On pourrait, par exemple, tenter de
faire la preuve que les Montr~alais ont une mentalit6 de locataires,
qu’ils sont r6fractaires aux corv~es inh6rentes h la propri~t6 ou
encore que ce sont des gens nomades pour qui l’achat d’une pro-
pridt6 repr~sente plus d’inconv~nients que d’avantages. I1 semble
cependant que le d6veloppement exceptionnel qu’a connu, en France,
la copropri~t6 indivise par appartements au lendemain de la deuxi –
me guerre mondiale puisse expliquer pourquoi 1’acc~s h la propri6-
t6 est devenu, dans ce pays, contrairement au Qu6bec, un phdno-
m~ne g~n6ral.

Cette forme d’appropriation, appelde aussi ,coproprit6 des im-
meubles 6tablie par ddclaration,, 3 condominium 4 et m~me propri6t6

* La suite de cet article paraltra dans le volume 24:3.

B.C.L. (Oxon), Professeur A la facult6 de droit de McGill University.
La proportion de propri~taires occupants h Montr6al 6tait, selon le re-
censement de 1971, de 19.5% et celle des locataires de 81.5%. Voir h cet effet,
C6td, Comment acheter votre logement, un guide pour l’achat en commun
d’un immeuble de quelques logements, Conseil de d6veloppement social du
Montr6al M6tropolitain, 1976. Les donndes r6v~lent une proportion moins
grande de locataires pour tous genres d’habitation dans l’ensemble du Qud-
bec: voir Habiter au Qudbec, Rapport du groupe de travail sur 1’habitation
Gouvernement du Quebec, Quebec, 1976. En 1971, la proportion des m6nages
qu6b~cois qui 6taient locataires de leur logement dtait de 52.6%.

de la propri~t6 et de ses diffdrentes modifications.

2 Voir Zurfluh, Le statut de la coproprijtd (1968), 24.
3 Voir le Code civil de la Province de Qu6bec, Livre 2e Intitul6: Des Biens,
4 Rosenberg, Condominium in Canada (1972); Rohan et Reskin, Condo-
minium Law and Practice (1975); voir aussi, Rapport sur les biens (1975),
O.R.C.C., Montrdal, XXXVIII, Chapitre IV, Titre quatri~me, Livre qua-
tri~me.

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LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

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indivise 5 vise h rdpartir un immeuble en parties exclusives qui ap-
partiennent de facon exclusive et divise h leurs propridtaires respec-
tifs, et en parties communes qui sont la propridt6 commune et indi-
vise de ces m~mes propridtaires.6 La copropri6t6 s’applique ainsi h.
tous les genres d’immeubles, de la maison individuelle sans attenants
h l’immeuble de plusieurs centaines d’appartements en passant par
l’immeuble comprenant deux ou trois logements. De meme, tout
immeuble, qu’il soit occup6 h des fins r6sidentielles, commerciales,
professionnelles, industrielles ou mixtes, peut ftre d6tenu en copro-
pri6t6.

Dans la province de Qu6bec, la copropri6t6 par ddclaration ou
par appartements est un ph6nombne r6cent. Lorsque le i6gislateur
qu6b~cois a adopt6 la loi sur la copropri6t6 des immeubles en 1969,7
il suivait un courant Idgislatif n6 il y a plusieurs ann6es en Europe8
et qui s’6tait vite propag6 aux Etats-Unis d’Am6riqueg au Canada 0
et dans d’autres r6gions.1 Mais alors que les lois belge (Loi du 8
juillet 1924) et frangaise (Loi du 10 juillet 1965), lesquelles ont gran-
dement inspir6 le 16gislateur qu6bdcois, s’appuyaient sur une tradi-

5 Flattet, La propridtg par 9tages (1956).
0 Voir, e.g., les arts.441b et 441d C.c.
7 Loi concernant la copropridt6 des immeubles, L.Q. 1969, c.76 (Bill 29)
sanctionn6 le 28 nov. 1969. Cette loi ajoutait au Code civil, au titre de la
propri6t6, un chapitre troisi~me intitul6: “De la copropri6t6 des immeubles
6tablie par d6claration” (arts.441b ii 442p C.c.).
8 Voir en Belgique, la Loi dut 8 juillet 1924 revisant et compl6tant les dis-
positions du Code civil relatives A la copropri6t6, et en France, la Loi du
10 juillet 1965, J.O., 11 juillet 1965 compl6t6e par le ddcret no 67-223, du 17
mars 1967, J.O., 22 mars 1967. La premiere loi frangaise sur la copropri6td
a 6td adopt6e le 28 juin 1938.

9 Pour la iste complfte des lois sur la coproprit6 adopt6es par les 6tats

am6ricains, voir Rohan et Reskin, supra, note 4, annexe B-1.

‘o Strata Titles Act, S.B.C. 1974, c.89, en vigueur le 15 aofit 1974 (am. 1975,
c.74); The Condominium Property Act, S.A. 1966, c.19, proclam6e le ler aofit
1966, maintenant R.S.A. 1970, c.62; The Condominium Property Act 1968, S.S.
1968, c.14 proclamde le ler nov. 1968; The Condominium Act, S.M. 1968, c.10
en vigueur le 25 mai 1968, maintenant R.S.M. 1970, c.C170; The Condominium
Act, 1967, S.O. 1967, c.12, proclam6e le ler sept. 1967, maintenant R.S.O. 1970,
c.77; Condominium Act, S.N.S. 1970-71, c.12, proclam6e le 8 juin 1971; The
Condominium Ordinance, O.Y.T. 1968, c.1, en vigueur le 9 d6c. 1968. Depuis
1969, les provinces suivantes ont adopt6 dgalement une loi sur la copropri6t6:
The Condominium Property Act, S.N.B. 1969, c.4, en vigueur le ler d6c. 1969,
maintenant R.S.N.B. 1973, c.C-16; The Condominium Act, 1970, S.Nfld 1970,
no 54, en vigueur le ler janvier 1975, maintenant R.S.Nfld 1970, c.57.

11 Notamment, en Isra8l; voir Weisman, The Condominium Law: A Study
of its Operation (1970) Institute for Legislative Research and Comparative
Law, Jerusalem.

REVUE DE DROIT DE McGILL

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tion pratique et jurisprudentielle bien 6tablie, 2 la loi qudb6coise sur
la copropri6t6 introduisait vdritablement un r6gime nouveau. I1 est
vrai que l’ancien article 521 C.c. visait t r6glementer le mode de r6pa-
ration d’une maison dans le cas otL ses diff6rents 6tages apparte-
naient h des propri6taires diff6rents. Mais cet article’ embryonnaire
et peu appliqu6 ne visait qu’une des obligations incombant aux
copropri6taires, celles des r6parations, et laissait ouverte la question
de la nature du droit du copropri6taire, celle de l’administration de
la copropri6t6, de son financement, de l’enregistrement de la partie
d6tenue en propri6t6 exclusive, de son 6valuation ou de son impo-
sition fonci~re.’3

Depuis cette vague 16gislative, la popularit6 de cette forme d’ap-
propriation n’a cess6 de croitre en Europe et en Amdrique.14 Les
Qubdcois ont cependant accueilli avec une certaine mdfiance la
possibilitd que leur offrait le 16gislateur d’acqudrir une fraction dans
un immeuble ddtenu en copropridtd.’ Mais il appartient aux socio-

12Voir Aeby, La propridtd des appartements (1967), aux pp. 42 et ss. et
Cambron, Trait9 thiorique et pratique de la coproprijtd et de la division des
maisons par 9tages ou par appartements (1925) pour une 6tude de la situa-
tion en Belgique avant la Loi du 8 juillet 1924. En France, la copropridtd a
pris un essor considdrable au lendemain de la premiere guerre mondiale.
13 L’art.521 C.c. a 6t6 abrog6 par la Loi concernant la copropridtd des im-

meubles, supra, note 7.

14 En Belgique, quatre jours apris la promulgation de la Loi du 8 juillet
1924, 6tait posde la premiere pierre du premier immeuble a 8tre rdgi par la
nouvelle loi; cinq mois plus tard, le nombre des ventes d’appartements d6-
passait la centaine. En France, on compte sept ouvrages principaux, plus de
vingt theses et des centaines d’articles de revues sur le sujet. Pour tn bref
apergu de l’6volution de la copropritd en Europe, voir Aeby, supra, note 12,
aux pp.40-55.

En 1972, dans le seul Etat de la Floride, approximativement 85,000 appar-
tements en copropridt6 ont dt6 construits. En 1962, Ernest Henry Breuer du
New York State Library, a compild une bibliographie de 54 articles sur
l’historique et la lagislation en mati~re de copropridt. En janvier 1972, le
U.S. Department of Housing and Urban Development publiait une bibliogra-
phie sur les facteurs dconomiques, financiers et juridiques en mati6re de co-
propri6td et de coopdratives comprenant 249 articles. La premiere loi am6-
ricaine sur la coproprit date de 1958: Horizontal Property Act de Puerto
Rico. Voir aussi Berger, Condominium: Shelter on a Statutory Foundation
(1963) 63 Colum.L.Rev. 987; Rohan et Reskin, supra, note 4, hi la p.ii(a): “The
condominium, perhaps the single most significant development in American
real property practice in the last half-century, has been extremely well re-
ceived in both legal periodical literature and the legislative halls”. Pour un
dtat du ddveloppement tr~s rapide de la copropri6td au Canada, voir Rosen-
berg, supra, note 4, preface au deuxi~me supplament.

1 La part du Quebec dans la coproprt6 canadienne n’est que de 4%;
depuis l’adoption de la loi, il n’y a eu que 57 projets de condominiums: “En

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LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRII TAIRES

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logues et aux historiens et non aux juristes I d’analyser les facteurs
qui sont h la source de cet 6tat d’espritY

Pour nous, ii s’agit d’dtudier la condition juridique du copro-
pri6taire en tant que titulaire d’un droit r6el de copropri~t6 dans
une fraction. Notre 6tude consiste en une analyse des droits et obli-
gations du copropri6taire qui a d6cid6 d’habiter sa fraction et elle
traite 6galement des problmes que peut soulever la pr6sence de
locataires dans un immeuble d6tenu en copropri6t6. Cette 6tude ne
porte que sur les droits et obliga’tions du copropri~taire en tant que
titulaire d’un droit r6el et non en tant que membre de 1’assembl6e
des copropri6taires ou en tant qu’administrateur. Ce dernier aspect
rel6ve davantage de l’administration de l’immeuble. II s’agit plut6t
ici de traiter du statut personnel de celui qui s’est laiss6 convaincre
d’adh6rer au r6gime, et ce statut se d6gage de l’6tude des
droits et obligations du copropri6taire lesquels d6pendent, dans
une large mesure, de la nature juridique du droit de copropri6t6.
C’est pourquoi nous allons aborder imm6diatement cette question.

B. Quelques notions sur la nature juridique du droit de copropri6t6

A premiere vue, le r6gime de copropri6t6 propos6 par le 16gisla-
teur qu6b~cois apparait comme un r6gime mixte de propri6td indi-
viduelle et de copropridt6 collective exercdes respectivement sur les
parties exclusives et communes d’un immeuble. D’ailleurs, c’est
ainsi que les commentateurs de la loi ont analys6 le r6gime 6labor6
aux articles 441b et ss. C.cY

Mais nul ne peut se former une opinion 6clair6e sur cette question
sans la connaissance de notions fondamentales. I1 importe d’abord
de distinguer entre deux notions souvent confondues: copropri6t6
et indivision. L’indivision est la situation juridique d’une ou de plu-
sieurs personnes titulaires en commun d’un droit sur un m~me bien

6pongeant le d6ficit municipal, on d6favorise la copropridt6”, Le Devoir, le 11
mars 1978, h la p. 17.

16 Sauf dans la mesure oti l’6chec est dfi g des lacunes idgislatives tant au

niveau des politiques que de la formulation de la loi.

17 Sur l’interddpendance de la sociologie et du droit, voir Savatier, Les
m~tamorphoses iconomiques et sociales du droit civil d’aujourd’hui (1964).
18 Beaudoin et Morin, La coproprigtg des immeubles au Qudbec (1970) 30
R.du B. 4; Comtois, La coproprigtg des immeubles bdtis, Cours de perfec-
tionnement de la Chambre des notaires (1969) 85; Laquerre, Loi concernant
la copropridtd des immeubles (1970) 11 C.de D. 547; Pineau, Copropridtg par
appartement et copropridtd horizontale (1970) 5 R.J.T. 265. Voir passim Clos,
Source et solutions des conflits en mati~re de copropridt6 immobili~re, These
inddite, Montr6al, 1971.

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ou sur un ensemble de biens, sans qu’il n’y ait division matdrielle
de leurs parts.19 II n’y a donc pas que le droit de propridt6 qui puisse
8tre indivis. Le droit d’usufruit, la nue-proprit6 et tout autre droit
r6el peuvent 6tre divisds entre plusieurs titulaires. 0

La copropri6td, d’autre part, est le droit de propridt6 compdtent
h plusieurs personnes sur une m~me chose qui n’appartient i cha-
cune d’elles que pour une quote-part math6matique. 21 Lorsque l’indi-
vision porte sur la propridt6 d’une chose, ce terme est alors employ6
comme synonyme de copropridt6. Mais, tandis que l’indivision qua-
lifie le bien qui est l’objet du droit de copropri6t6 et indique qu’il
est indivis, la copropridt6 qualifie le droit lui-m~me portant sur le
bien et indique que le droit de propridt6 fait partie d’une division
par parts entre les diffdrents titulaires. Donc, en mati~re de copro-
pri6t6, h une chose indivise correspond un droit de propri6td indivis.2
La copropri6t6 a toujours 6t6 consid6rde comme une forme excep-
tionnelle d’appropriation du point de vue juridique: dans bien des
cas, elle contredit l’article 414 C.c. qui prdvoit que la propri6t6 du
sol emporte celle du dessus 3 et elle se heurte h l’absolutisme du
droit de propri6t6 tel qu’il est pr6vu express6ment par l’article
406 C.c. La propri6t6 6tant le droit le plus absolu et le plus exclusif
sur une chose, on consid~re comme
,dmpossible que plusieurs
personnes puissent jamais 6tre, en m~me temps, chacune Ae leur
c6t6, propri6taire de la totalit6 d’une seule et m~me chose>>’

‘9 Capitant, Vocabulaire juridique (1930-36).
20 Aubry et Rau, Droit civil frangais 7e 6d. par Esmein (1961),

t.2, no 403;

Sizaire, Le statut de la copropridtg des immeubles batis (1969), no 22.

21 Aubry et Rau, supra, note 20, no 329; Cambron, supra, note 12, aux pp.
20-21; Planiol et Ripert, “Les biens”, dans Traitd pratique de droit civil fran-
gais 2e 6d. par Picard (1952), t.III, no 286.

22 Sizaire, supra, note 20, A la p. 19; Vareilles Sommires, De la copropridtd
(1907) Rev.crit.leg. et jur., aux pp.530 et ss.; on a dit que 1’indivision est le
genre et la copropridt6, 1’esp6ce: Supervielle, La notion de copropridtd
(1948) Bull. 16g. comparde 1025; Marty et Raynaud, “Les biens” dans
Droit civil (1965), t.2, vol.2, A la p.73 rdservent le qualificatif d’indivision au
type classique de l’indivision organique et soumise au partage et le terme
de coproprdtd pour les autres cas, dont la copropri6t6 par appartements.

23A cet 6gard, le droit de superficie qui reconnait deux droits de m~me
nature, Fun portant sur le tr6fonds,
‘autre sur les 6difices est aussi une ex-
ception hI ‘artA14 C.c., voir, Cardinal, Le droit de super!icie (1957), aux pp.75
et ss.

24 Cambron, supra, note 12, A la p.20; Marty et Raynaud, supra, note 22, h la
p.74; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, “Des biens” dans Traitd thdorique
et pratique de droit civil 3e 6d. (1905), t.VI, b la p.195, no 267; voir Vareilles
Sommi~res, supra, note 22, b la p.536: “Par essence et d6finition, la propridtd
ne peut appartenir qu’b une seule personne, ou du moins, si je puis dire,
it une seule volont6”; c’est pour cette raison que nul n’est tenu de rester dans
interprdt6 comme ayant une portde gdndrale.
l’indivision:

art.689 C.c.

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LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRI TAIRES

201

Mais comme les juristes ont traditionnellement le gofit des
classifications, il leur fallait tenter d’6tiqueter et de ranger parmi
l’une des catdgories du syst~me juridique le droit des personnes
d6tenant en commun la propridt6 d’un bien. La doctrine classique,
consid6rant la copropri~t6 comme une simple modalit6 de la pro-
prit6 ,’ 5 a regroup6 ses diverses formes sous deux titres: la copro-
pridt6 avec indivision ordinaire et la copropri6t6 avec indivision
force;1 la copropri~t6 des immeubles par appartements est une
modalit6 de cette derni~re en ce qui a trait aux parties communes. 28
La difference fondamentale entre ces deux formes consiste en
ce que les droits des indivisaires sont, sous la deuxi~me forme, plus
6tendus que sous la premiere. Sous la copropridt6 avec indivision
forc~e, qui est de caract~re permanent, chacun peut user de la tota-
lit6 de la chose comme si elle lui appartenait b la double condition
cependant de ne pas s’en servir h des usages autres que ceux aux-
quels elle est destinde et de ne pas porter atteinte au droit 6gal et
r~ciproque des autres indivisaires.2

L’immeuble divis6 par appartements, qui constitue la forme de
copropri6td avec indivision forcde qui nous int~resse ici, prdsente
cependant une caract6ristique trZs sp~ciale: il ne comprend pas que
des parties communes ddtenues en copropridtd, mais comprend
aussi des parties privatives ddtenues en propri6t6 exclusive. C’est
la raison pour laquelle cette forme de copropri~t6 a 6t6 analysde,
tant6t sous son aspect proprit& et tant6t sous son aspect copro-

L’usufruit et les servitudes n’attribuent qu’une partie des prerogatives du
propridtaire et ne font done pas dchec h ce principe.

25 Planiol et Ripert, supra, note 21, no 286; Carbonnier, “Les biens” dans
Droit civil (1973), vol.3, no 29; H1braud, A propos d’une forme particuliare de
coproprigtg: La coproprigtd par appartements (1938) Rev. trim. dr. civ. 23.

26 Cette forme nait par exemple

. I’ouverture d’une succession ou lors de
l’acquisition par deux ou plusieurs personnes d’un bien ou groupe de biens
en commun. Elle est essentiellement une situation inorganisde, individualiste,
et provisoire parce que soumise au partage prdvu h l’art.689 C.c.
27Cette forme d’appropriation a aussi 6t6 appelde indivision perpdtuelle,
copropridt6 avec indivision permanente et copropri6td avec servitude d’indi-
vision pour en marquer le caract6re permanent.
28 Aubry et Rau, supra, note 20, no 336; Ripert et Boulanger, Traitj de droit
civil (1957), t.2,.no 2277; Cambron, supra, note 12, i la p.184; Marty et Raynaud,
supra, note 22, nos 57 et ss., no 234; Planiol et Ripert, supra, note 21, no 293.
2 9 Aubry et Rau, supra, note 20, no 337; Planiol et Ripert, supra, note 21,
3OPour certains, la coproprit6 n’6tait qu’une simple superposition de
propridt6s privdes sans aucune part de copropri6t6, assorties de servitudes
destindes h permettre l’utilisation des choses “d’utilitd commune”: Huc,
Commentaire thgorique et pratique du Code civil (1893), t.IV, no 351 (com-
mentant l’art.664 C.N., correspondant h ‘art.521 C.c.); on a m~me parl6 de
‘servitude d’indivision pour en justifier le caract~re permanent: Pardessus,

no 289; Marty et Raynaud, supra, note 22, no 236.

REVUE DE DROIT DE McGILL

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prit6.’ Elle a enfin 6 vue par les auteurs frangais plus r6cents
comme une juxtaposition de droits de propri6t6 sur les parties pri-
vatives et de droits de copropri6t6 sur les parties communes.32

Bien que cette analyse ait l’avantage de ddcrire dans une grande
mesure la nature et l’6tendue des droits des copropridtaires, elle
n’est pas
l’abri de toute critique. On lui a reproch6 d’avoir accord6
une importance primordiale aux parties privatives aux ddpens des
parties communes et d’avoir reconnu un dualisme de droits diffi-
cilement conciliable avec l’unit6 fonci~re de l’immeuble 3
Ii est,
en effet, inexact de dire que les parties communes ne sont que l’acces-
soire des parties exclusives. II est 6galement inexact de penser que
le droit du copropri6taire est bipartite. M~me ceux qui l’ont
pr6tendu ont dfi concdder que la copropri6t6 est ins6parable de la
propri6t6:

La coexistence de la propri6t6 privde et de la copropri6t6 est tellement
n6cessaire pour r6aliser la proprit6 de l’appartement qu’on peut les dire
indivisibles. Cette indivisibilit6 est telle que l’on ne peut pas vraiment
attribuer h l’une, par rapport h 1autre, une fonction pr6dominante; si
nous avons consid6r6 la copropri6td comme accessoire de la propri6td
privative pour en justifier la per-p6tuitd, la propri6td privde nous appa-
raltra, h d’autres points de vue, comme l’accessoire de la part de co-
propri6td…. A elles deux, la propri6t6 privative et la part de copropri6t6
forment un droit complexe, mais unique.34
Quelle est donc la nature du droit du copropri6taire en vertu de
l’article 441b C.c.? Est-ce un droit de propridt6, un droit de copro-
pri6t6 ou un regime mixte de propridt6 individuelle et de copropridt6
collective? C’est ce que nous allons tenter de ddcouvrir en 6tudiant
successivement les droits du copropri6taire sur la partie exclusive
de la fraction, sur les parties communes d’icelle, sur la fraction elle-
m~me et enfin les obligations du copropri6taire.

Traitd des servitudes 6e dd. (1823), t.I, no 190; l’objection soulevde A Yen-
contre de cette th6orie est i 1effet qu’une personne ne peut 6tre titulaire d’une
servitude sur un immeuble dont elle est propri6taire m~me si ce n’est que
partiellement. L’art.521 C.c. dtait class6 h tort au titre des servitudes.

3 1 Proudhon, Traitd du domaine de propridtd ou de la distinction des biens

(1839), t.II, no 702.

3 2 Voir, H6braud, supra, note 25, a la p.25: “I1 est aujourd’hui classique
d’analyser les droits du propri6taire d’appartement en une propri6t6 privative
et une part de copropridt6″; Planiol et Ripert, supra note 21, nos 319 et ss.;
Kischinewsky-Broquisse, La copropridtd des immeubles bfitis (1973), no 5;
Sizaire, supra, note 20, no 39 et ss. C’est d’ailleurs la conception retenue, en
France, par la Cour de cassation: Civ., 21 nov. 1955, J.C.P. 55.11.9004.

3 3 Voir Givord et Giverdon, La copropridtd; Loi du 10 juillet 1965 et ddcret
du 17 mars 1967 2e dd. (1974), no 148; D.H. 1939.4.73, h la p.78 (note Chevalier).

4 Voir Hdbraud, supra, note 25, h Ia p.26.

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1978J

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRI8TAIRES

203

II. LE DROIT DE JOUISSANCE SUR LA PARTIE EXCLUSIVE

Traditionnellement, les droits du propri~taire sur la partie exclusi-
ve et les parties communes ont 6t6 6tudids divis~ment, tant par les au-
teurs qu6b~cois 3′ que par les au-teurs frangais3 6 Notre optique, sensi-
blement la m~me, se veut toutefois plus globale. Ainsi que l’6crivait
J. Chevalier: 37

Droit sur les choses privatives, droit sur les choses communes ne sont
‘on peut librement
pas deux categories diff~rentes de pr6rogatives que
dissocier, ce sont les deux aspects d’un seul et m8me droit, un ensemble
de facult6s formant un tout indivisible.
L’article 441b C.c. 6dicte que la propri~t6 de l’immeuble est rdpar-
tie entre ses propri~taires par fractions comprenant une partie exclu-
sive et une quote-part des parties communes, de sorte que le copro-
pri6taire a la propri6t6 de sa fraction. Tandis que le droit du copro-
pri6taire sur les parties communes est d6fini, par l’article 441d C.c.,
comme un droit de propri6t6 indivis, le droit du copropri6taire sur
sa partie exclusive n’est d~fini que par rarticle 441b C.c. 8 Ce droit
est n6anmoins pr~cis6 par les articles 441h et 442g C.c. et nous paraft
bien poss~der les caract~ristiques du droit de propriet6. En effet, il
est raisonnable de penser que si la fraction est l’objet d’un droit de
propriet6, les caract~res essentiels du droit de propri6t6 se retrou-
vent dans les 6l6ments constitutifs de la fraction: la partie exclusive
et la quote-part des parties communes. Mais est-ce lh une analyse
valable de la r~alit6 juridique? Etudions d’abord les articles 441h
et 442g C.c.

A. Droit de propridtd exclusif

L’article 441h C.c. 6dicte:
Chaque copropri~taire dispose des parties exclusives comprises dans sa
fraction; ii use et jouit librement des parties exclusives et des parties

35 Beaudoin et Morin, supra, note 18, aux pp.5, 6 et 20; Legault, La copro-
prigtd, (Bill 29), premiere partie: La Diclaration de copropritd, Cours de
perfectionnement de la Chambre des notaires (1970) 7, aux pp.10 et 11; Cardi-
nal, La propridtd par 6tage (1958-59) 61 R.du N. 471, aux p1y.480 et ss. Clos,
supra, note 18, h la p.2 6.

36 Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, nos 89 h 194; Givord et Giverdon,
supra, note 33, nos 118 h 141; Sizaire, supra, note 20, nos 40 et 41; Zurfluh,
supra, note 2, nos 135 a 145.

37 Chevalier, supra, note 33, h la p.79.
38La loi frangaise du 10 juillet 1965 d6termine a l’art.2, al.2 que les parties
privatives sont la propridt6 exclusive de chaque copropridtaire. Il semble que
ce soit 6galement la situation en droit qu6b~cois bien que le 1lgislateur n’ait
pas pris la peine de le dire en termes aussi explicites; voir, h cet effet, Beau-
doin et Morin, supra, note 18, h la p.7.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des
autres copropritaires ni h la destination de limmeuble.
Le copropridtaire a donc, en principe, le droit d’user de la chose
et, par cons6quent, d’accomplir tous les actes d’usage et de jouis-
sance auxquels la chose faisant 1’objet du droit se prate normale-
ment.

Sous rdserve des restrictions contenues ti l’article 441h C.c. et
discutdes ci-apr~s, le propri6taire d’une fraction peut donc se servir
de sa partie exclusive comme il 1entend. L’6numdration suivante des
actes qu’un propri6taire de fraction peut poser indique, h titre illus-
tratif et sans prdtendre 6tre exhaustive, l’6tendue de son droit de
jouissance: le propridtaire peut ddcorer son appartement, bitir des
placards, poser des rev6tements muraux, repeindre, enlever des portes
ou en ajouter, rdnover la cuisine et les salles de bains, installer un
appareil de climatisation, changer la distribution des pices, installer
des tapis, percer des trous dans les murs exclusifs et faire tous les
autres travaux semblables qui lui plairont.39

Le principe selon lequel le copropridtaire est maitre de sa frac-
tion et, plus spdcialement, de sa partie exclusive, est confirmd par
l’article 442g C.c.:

Nonobstant Particle 442f, l’assemblde des copropritaires ne peut im-
un copropridtaire, A l’encontre de la ddclaration de copropridt6,
poser
une modification A la valeur relative de sa fraction, a la destination des
parties exclusives de sa fraction ou h 1’usage qu’il peut en faire.
La loi sur la copropridt6 donne donc la garantie qu’aucune ddci-
sion de l’assemblde gdndrale ne peut apporter de restriction au droit
de jouissance du propri6taire sur sa partie exclusive. II faut que le
propridtaire lui-m~me y consente, son droit 6tant un droit de pro-
pridt6 exclusif. Ces remarques appellent deux prdcisions.

1. La ddclaration peut-elle imposer a un copropridtaire une modifi-

cation & l’usage de sa partie exclusive?

Certains commentateurs prdtendent que l’assemblde des copro-
pridtaires peut restreindre le droit de jouissance du copropridtaire
sur sa partie exclusive.40 Le principe h l’effet que le copropridtaire
est maitre de sa partie exclusive ne serait donc pas absolu. Le raison-
nement suivi par ces commentateurs se fonde sur les mots 4h l’encon-

39 Zurfluh, supra, note 2, no 136; Givord et Giverdon, supra, note 33, nos
120 et 121; Sizaire, supra, note 20, no 55; Kischinewsky-Broquisse, supra, note
32, no 89; Planiol et Ripert, supra, note 21, nos 289, 319 et ss.; Aubry et Rau,
supra, note 20, no 337; Marty et Raynaud, supra, note 22, no 251.

4o Beaudoin et Morin, supra, note 18, a la p.19.

19783

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

205

tre” de la ddclaration de copropridtd> contenus h l’article 442g C.c.:
la ddclaration pourrait ainsi pr6voir que l’assemblde des copropri-
taires aura le pouvoir d’imposer ht un copropri6taire une modification
a l’usage qu’il peut faire de sa partie exclusive; << t ce moment, un copropridtaire ayant donnd son accord h cette proc6dure ne peut s'opposer h. sa mise en application>.’ 1 Ainsi, selon cette interpr6tation,
la ddclaration de copropridtd peut contenir une clause selon laquelle
l’assemblde pourrait imposer ht un copropridtaire une modification
h l’usage qu’il fait de sa partie exclusive. Puisque le copropridtaire
est lid par la ddclaration,4 cette modification ne lui serait pas impo-
sde, mais rdsulterait de l’accord qu’il a donnd h la procddure de modi-
fication. Cependant, il faut convenir, de facon pratique, que les droits
du copropridtaire se trouvent limitds par une telle ddcision de l’as-
semblde: bien qu’il ait pu voter contre cette ddcision, il devra quand
mdme s’y conformer. I1 en rdsulte qu’il n’est possible, selon cette
interprdtation, d’invoquer l’article 442g C.c. comme argument confir-
mant le caract6re absolu et exclusif du droit du copropridtaire dans
sa fraction qu’en se livrant h une vdritable gymnastique intellectuelle.
L’article 442g C.c. se prdte cependant h une deuxime interpr-
tation. Les mots h l’encontre de la ddclaration de copropri6td> peu-
vent 8tre compris comme renvoyant aux dispositions de la ddclara-
tion, lesquelles fixent entre autres choses, la destination et l’usage
des parties exclusives. Ces mots ne renverraient donc plus h une
clause prdvoyant que l’assemblde peut modifier les droits du copro-
pridtaire, mais plut6t ht une clause de la ddclaration qui avait pour
but de fixer les droits du copropridtaire sur sa partie exclusive.
Ainsi, supposons la clause suivante:
Clause 1: La partie exclusive ne doit pas 6tre utilisde h des fins

commerciales ou industrielles.

41 Les auteurs discutaient alors de modifications possibles hi la valeur des
fractions (art.442g C.c. in limine), mais le m~me raisonnement s’applique
hi la destination des parties exclusives ou h leur usage (art.442g C.c. in fine)
h moins de taxer ces auteurs d’illogisme. D’autre part, il est difficile de con-
cilier cette opinion des auteurs avec le passage suivant (Beaudoin et Morin,
. la p.23): “Certaines modifications ne peuvent atre apport~es
supra, note 18,
qtAt’a l’unanimit6 [artsA42g et 442h C.c.]. Ainsi, un copropridtaire ne peut
subir sans son consentement une modification h la valeur relative de sa
fraction”. Mais voir, infra, note 49.

42Art.441n C.c.; la ddclaration a non seulement un caract~re contractuel
mais aussi un caract~re statutaire obligatoire: Comtois, “La loi concernant
(1970),
la copropri~t6 des immeubles” dans Lois nouvelles II, par Crdpeau
aux pp.73 et ss.; Beaudoin et Morin, supra, note 18, aux pp.11 et 12; Laquerre,
supra, note 18,

, la p. 548.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

Clause 2:

II est d6fendu de garder des animaux dangereux, mal-
propres ou bruyants.

Selon la deuxiRme interpr6tation,

‘assemblde des coproprietaires
ne pourrait modifier la destination ou 1’usage de la partie exclusive
sans le consentement du propri6taire concern6. Le but de l’article
442g C.c. serait ainsi d’emp~cher 1’assemblde de modifier les clauses
qui se trouvent dans la ddclaration et qui fixent les droits du copro-
pri6taire sur sa partie exclusive, puisqu’une telle ddcision de l’assem-
ble irait h l’encontre de la d6claration. En d’autres termes, il
faudrait lire ‘article 442g C.c. comme suit: Nonobstant le fait que
la decision h l’effet de modifier la declaration a 6t6 prise h la majo-
rit6 de
‘article 442f, l’assemblde ne peut imposer h un copropri6-
taire une modification qui va A l’encontre de la d6claration de
copropridt6 lorsque cette modification touche la valeur relative de
la fraction d’un copropridtaire, la destination des parties exclusives
de sa fraction ou l’usage qu’il peut en faire.

Une premiere raison A l’appui de cette interprdtation repose
sur un argument de texte valable. Dans un premier temps, l’article
442e C.c. 6num~re les d6cisions de l’assemblde des copropri6taires
qui sont prises A la majorit6 des voix. Cette disposition est suivie
de l’article 442f C.c. qui exige, pour certaines decisions plus impor-
tantes clairement d6limit6es, le vote d’au moins la moiti6 en nom-
bre et des trois quarts en valeur. Comment pr6tendre alors que pour
des ddcisions touchant l’essence m~me de la copropri6t6, soit les
droits
les plus fondamentaux des copropridtaires, le ldgislateur ait
permis au rddacteur de la d6claration de faire fi de l’article 442g
C.c. en insdrant simplement dans la declaration une clause de style
permettant d’imposer au copropri6taire une modification h 1’usage
qu’il peut faire de la fraction alors que les articles 442e et 442f C.c.
sont eux-m~mes imp6ratffs et ne peuvent 6tre 6cart6s par la d6clara-
tion?4 1a

Une deuxi~me raison nous fait rejeter la premiere interpr6tation.
En effet, dans le cas oit la ddclaration contiendrait une clause impo-
sant A un copropri6taire une modification h rusage de sa partie
exclusive selon la majorit6 pr6vue par l’article 442f C.c., les mots
anonobstant l’article 442f> h ‘article 441g C.c. perdraient toute signi-
fication. Or il nous semble que ces mots introductifs de
‘article
442g C.c. doivent avoir pr6s6ance. Ces mots signifient, selon nous,
que, bien qu’une modification ? l’usage des parties exclusives cons-
titue une modification de Ia d6claration et, par cons6quent, une
modification susceptible d’6tre ddcid6e selon la majorit6 de l’article

42aVoir au mme effet, Clos, supra, note 18, 9L la p.52.

1978J

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIP-TAIRES

207

442f C.c., 1’assemblde ne peut imposer une telle modification h un
copropridtaire parce que celle-ci irait h l’encontre de la ddclaration.43
La troisi~me raison du rejet de la premiere interprdtation fait
appel h 1’article 441o C.c., selon lequel les seules atteintes aux droits
des copropridtaires qui sont permises dans la ddclaration sont celles
qui sont justifides par la destination de l’immeuble. Il est difficile
de prdtendre qu’une clause de la d6claration qui permettrait une
modification a l’usage d’une partie exclusive et qui ne comprendrait
pas l’accord du copropridtaire concernd serait justifide par la desti-
nation de l’immeuble. Cette notion de destination de l’immeuble
sera dtudide en ddtail au chapitre des limites du droit du copropri-
taire sur sa fraction. Nous serons alors plus en mesure d’apprdcier
la force de cet argument. I1 suffit de mentionner ici qu’une clause
qui permet en quelque sorte l’expropriation du copropridtaire ne
peut 6tre justifide par la destination de l’immeuble, celle-ci repr6-
sentant, de fagon gdndrale, 1’ensemble des conditions en vue des-
quelles un copropridtaire a achetd sa fraction;4 or toute clause
permettant h une assemblde de modifier la valeur relative de la
fraction, la destination ou l’usage des parties exclusives apparte-
nant b un copropridtaire lui donne des pouvoirs qui sont, h notre
avis, incompatibles avec la notion de propridtd exclusive sur une
partie privative. Elle conduit a la ndgation m~me du droit du pro-
pridtaire sinon h une ingdrence indue des pouvoirs de la majoritd,
laquelle ne nous semble pas avoir dtd recherchde par le ldgislateur.45
Enfin, la derni~re raison qui nous a amend h prdfdrer cette
deuxi~me interprdtation se trouve dans le droit compard dont il ne
faudrait pas minimiser l’importance en mati~re d’interprdtation
d’une disposition de la loi sur la copropridtd. L’article 26 de la loi
frangaise du 10 juillet 1965 alinda 2 pose le principe suivant:

L’assemblde g~n~rale, ne peut, h quelque majoilit6 que ce soit, imposer h
un copropridtaire une modification a la destination de ses parties priva-
tives ou aux modalit6s de leur jouissance, telles qu’elles r6sultent du
r~glement de copropridt6.

4 3 D’apr~s Comtois, supra, note 42, h la p.80, “… l’unanimit6 est requise
quand il s’agit de changer la valeur relative de la fraction appartenant h un
copropri6taire et quand on propose un changement h la destination des par-
ties privatives et h l’usage que le copropri6taire peut en faire”. Voir aussi, le
texte, infra, note 50.

supra, note 2, h la p.414, no 371.

44 Expos6 des motifs, h la p.9, “Travaux pr6paratoires”, cit6 dans Zurfluh,
45 Voir Clos, supra, note 18, h la p.53; Comtois, supra, note 42, h la p.80;
Pineau, La coproprigtg par appartement et coproprigtd horizontale (1970) 5
RJ.T. 265, h la p.279. Ces auteurs pr6tendent que 1’art.442g C.c. requiert runa-
nimit6.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

Cet article, il faut le concdder, exige clairement l’accord du co-
propri6taire46 et ne contient pas l’expression ambigu6 h 1encontre
de la ddclaration>. Au moment de la conception et de la r6daction
des articles 441b et ss. C.c., notre idgislateur s’est largement inspir6
de la loi frangaise. Peut-6tre a-t-il voulu, bien que maladroitement,
avouons-le, introduire dans ‘article 442g C.c. le sens des dispositions
de P’article 26 al. 2 de la loi frangaise? L’expression
h l’encontre
de la ddclaration>, traduirait alors l’expression frangaise <(telles qu'elles (destination et modalit6s de jouissance des parties privati- yes) r6sultent du r6glement de copropri&t,. Mais il ne faut pas quand m~me se mdprendre sur le sens de la disposition frangaise. L'article 26 al. 1 prdcise que la majoritd des membres du syndicat 4 repr6sen- tant au moins les trois quarts des voix peut prendre des ddcisions concernant la modification du r~glement de copropridtd dans la mesure oh il concerne la jouissance, 1'usage et l'administration des parties communes. En France, la modification des modalit6s de jouissance des parties privatives ne peut donc rdsulter que d'une convention (l'adhdsion au r~glement pr6alablement dtabli ou la modification d6cidde h l'unanimitd) par laquelle le propridtaire a lui- m~me consenti i limiter son droit ... . Le copropridtaire est H16 par sa convention, non par la majorit6. Dans les parties privatives, c'est la somme des volontds individuelles, non la volont6 collective, qui fait loi.48 Au Qudbec, l'assemblde gdndrale ne peut imposer au copropridtai- re une modification h 1'usage de sa partie exclusive. Cette interpr6ta- tion de l'article 442g C.c. ne contredit pas, comme en font foi les motifs expos6s prdddcemment, 'article 442g C.c. et respecte, en m~me temps, le principe que les copropri6taires peuvent user et jouir librement de leurs parties exclusives sans que l'assembl6e des copropridtaires ne puisse porter atteinte ii cette jouissance. Mais s'il semble possible d'affirmer, quelle que soit l'opinion adopt6e, que le consentement du copropridtaire intdress6 est necessaire pour modifier l'usage qu'il peut faire de sa partie exclusive", la question de la majorit6 requise pour y procdder demeure, h notre avis, incertaine. 46 C'est dans ce sens qu'il fiat, d'ailleurs, interpr6t6 par la doctrine et ]a jurisprudence frangaises. Voir, Givord et Giverdon, supra, note 33, no 128; Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 89; Civ. 3e, 28 nov. 1973, D.1974, Somm.14; voir aussi, Lyon, ler Ch., 20 f6v. 1974, D.1974, Somm.74. 47En France, la collectivit6 des copropri6taires est constitu6e en un syndi- 4 8 Lombois, Le statut de la copropridtg des immeubles bdtis, D.1966 L.108. 49 Ce consentement r6sulterait, selon la premiere interpr6tation, de 'adh6- sion it Ia ddclaration de copropri&6 et, selon la deuxi~me interpr6tation, du consentement exprZs du copropridtaire concern6. 1 serait prdfdrable ndan- moins, qu'une modification l6gislative clarifie la porte de l'artA42g C.c. cat qui est une personne morale (Loi du 10 juillet 1965, art.14). 1978] LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRI8TAIRES 209 2. La majoritg requise pour l'adoption d'une r~solution modifiant l'usage d'une partie exclusive Dans les cas ofi la destination de l'immeuble est affect6e, l'unani- mit6 de tous les copropri~taires doit, en raison de 1'article 442h C.c., 6tre obtenue lors d'une assembl6e g6n6rale des copropri6taires. Cependant, dans les cas oit la modification n'affecte pas la destina- tion de l'immeuble, mais vise seulement la valeur relative d'une frac- tion, la destination ou l'usage d'une partie exclusive, il nous semble, nonobstant l'opinion contraire exprime par les auteurs qu6b6cois, 0 que l'unanimit6 n'est pas requise. S'il en 6tait aifisi, il serait difficile d'expliquer pourquoi le l6gis- lateur a employ6 deux formules si diffdrentes pour exprimer la m~me idde dans les articles 442g et 442h C.c. De plus, l'unanimit6 n'est pas la r~gle en mati~re de coproprit6 d'une fraction. Ce n'est qu'excep- tionnellement que la loi requiert qu'une decision soit prise h l'unani- mit6. La majorit6 simple, et non l'unanimit6, est la r gle en vertu de 'article 442e C.c. Etant donn6 qu'une modification h l'usage des parties exclusives constitue une modification de la declaration, la majorit6 requise est celle qui se trouve exprim~e hi l'article 442f C.c. paragraphe 2 ht moins qu'une autre disposition ne vienne 6carter cette r6gle. C'est le r6le jou6 par l'a rticle 442g C.c. qui ddicte que, malgr6 l'article 442f C.c., l'assemblde ne peut imposer h un copropri6taire une modification h l'usage qu'il fait de sa partie exclusive. L'interprdtation qui nous parait la plus conforme au texte de la loi est donc celle qui exige la majorit6 de l'article 442f C.c., mais sous rdserve de l'assentiment du copropri6taire concern6. Il demeure n6anmoins possible que l'unanimitd soit requise, si la modification proposde concerne l'ensemble des fractions et, donc, des copropri- taires. Ce sera ainsi le cas lorsqu'une modification h l'usage de parties exclusives entrane un changement direct ou indirect de la destina- tion de l'immeuble: la ddcision doit, dans ce cas, conformdment h l'article 442h C.c., &tre prise h l'unanimitd. De m~me, l'unanimit6 est 6galement requise lorsque l'usage de toutes les parties exclusives est modifi6 par la ddcision de l'assemble.5 ' Bien que cette interprdtation diverge de l'opinion soutenue par bon nombre des commentateurs de la loi qudbdcoise, 2 elle nous parait respecter davantage le texte de la loi. Devant ces difficultds d'interprdtation, nous ne pouvons 50 Comtois, supra, note 42, h la p.80; Pineau, supra, note 45, b la p.279; Beaudoin et Morin, supra, note 18, A la p.23 (dans la mesure oii la d6clara- tion ne contient pas une disposition au contraire?). 1 Ii en est ainsi de la d6cision de l'assemble d'interdire la pr6sence d'ani- maux dans un immeuble de luxe. U2 Voir supra, note 50. REVUE DE DROIT DE McGILL [Vol. 24 que r6itdrer notre recommandation t l'effet que le texte de l'article 442g C.c. soit clarifi6. B. Les restrictions au droit du copropridtaire L'analyse du droit de jouissance du copropri6taire sur sa partie exclusive a d'abord rdv616 un rdgime de propridt6 individuelle quasi absolue. 3 Afin de d6terrniner, de fagon compl~te, la nature et 1'dten- due des droits du copropri6taire, il est toutefois essentiel d'en con- naltre les restrictions. Le droit de propri6t6 6tant le droit le plus absolu, il est possible d'affirner que le propridtaire d'une fraction a le droit de faire h 1'6gard de celle-ci tous les actes qu'il d6sire, h moins qu'une disposi- tion de la loi ne Fen emp~che, de quelque fagon que ce soit. Le droit concurrent des autres copropri6taires (article 441h C.c.), les dispo- sitions de la ddclaration de copropri6t6 (articles 4411 et 441o C.c.) et les ddcisions de l'assembl6e g6n6rale (article 4421 C.c.) constituent de telles limites aux prdrogatives quasi absolues du copropri6taire ddcoulant des dispositions relatives A la copropridt6 des immeubles dtablis par ddclaration. 1. Le droit concurrent des autres coproprigtaires L'article 441h C.c. 6dicte que le copropri6taire use et jouit libre- ment des parties exclusives A la condition de ne pas porter atteinte aux droits des autres copropri6taires. Cette restriction ne surprend pas, puisqu'elle est 6dictde dans l'int6r6t du voisinage imm6diat et qu'elle se trouve en mati~re de la doctrine et la jurisprudence droit de propridt6 traditionnel: reconnaissent en effet une obligation de voisinage en vertu de laquelle un propri6taire doit s'abstenir de nuire h son voisin:6 3 C'est l'expression utilisde par Beaudoin et Morin, supra, note 18, h la p.7. 6 B4 Cr6peau, Recueil de documents et arrts sur la thdorie gdndrale des obli- gations juridiques (1973), t.II, McGill University, (texte polycopi6); Cardinal, L'abus de droit (1967-68) 70 R.du N. 493; Issalys, L'9tat de ta jurisprudence en matiare d'abus des droits de voisinage (1967-68) 4 Justinien 133; Nadeau, Trait pratique de la responsabilitd civile ddlictuelle (1971), aux pp.233 et ss.; Johnson, Legal Hazards of Excavation in Quebec (1953) 31 R.de B.Can. 626; Baudouin, La responsabilitd civile ddlictuelle (1973), aux pp.62 et ss.; Heleine, Des moyens de rejoindre les auteurs d'un trouble de voisinage (1974) 34 R.du B. 71; H6tu, L'application de la thiorie des troubles de voisinage au droit de l'environnement du Qudbec (1977) 23 McGiU L . 281; Citd de Qudbec v. The Queen (1895) 24 R.C.S. 420; Drysdale v. Dugas (1896) 26 R.C.S. 20; The Montreal Street Railway Co. v. Gareau (1901) 10 B.R. 417; Cimon v. Bouchard 1978] LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES 211 Malgr6 1'exclusivisme de principe de son droit, le copropritaire foncier ne peut s'enfermer compltement dans son bien, ce dernier est gdogra- phiquement proche d'immeubles voisins et des rapports r~ciproques se crderont n~cessairement entre les fonds et leurs propriftaires, il en rd- sultera un certain am~nagement de la structure du droit de propri~td lui-m~me chacun des voisins pouvant pr6tendre au respect par 1'autre de son propre droit et devant, en revanche, subir des limitations imposdes par le respect du droit d'autrui. 5 Les droits du propridtaire s'arrtent lh oii commencent les droits identiques des autres propridtaires. Un propridtaire est donc sus- ceptible de g~ner ses voisins m~me dans l'exercice des droits de propridt6 qui lui sont reconnus. Bien que le propridtaire puisse exercer ses droits comme il l'entend, il ne peut porter atteinte aux droits de son voisin. Le droit de propridt6 comporte donc l'obliga- tion de ne pas exercer ce droit de mani~re h causer un inconvdnient h son voisin, ce qui constituerait un abus de droit.56 La notion d'abus de droit de propridt6, fondde sur la faute, et celle de troubles de voisinage, fondde sur le risque attach6 a l'exer- cice tdu droit de proprit6, trouvent en mati~re .de copropridt6 un terrain d'61ection. 7 Deux facteurs y contribuent: le fait que les (1919) 25 R. de J. 308 (C.S.); Canada Paper Co. v. Brown (1922) 63 R.C.S. 243; Cit9 de Qudbec v. Turgeon (1936) 61 B.R. 458; Bishop v. Sauv6 [1951] B.R. 414; St-Louis v. Goulet [1954] B.R. 185; Pelchat v. Carri~re d'Acton Vale Ltie [1970] C.A. 884; Dumas Transport Inc. v. Cliche [1971] C.A. 160; Katz v. Reitz [1973] C.A. 230; Conf. C.S.M., no 719-611, 21 f6v. 1969; Wilfrid L~gar6 Inc. v. Dame Morin-Giroux [1973] C.A. 272; Girard v. Saguenay Terminals Ltd [1973) R.L. 264. '5 Marty et Raynaud, supra, note 22, no 252; voir aussi Duncan v. The Queen [1966] Ex. C.R. 1080, A la p.1106 (J. Jackett): "[O]ne must so use his property as not to injure the property of others." 56 Sic utere tuo ut alienum non laedas. Pour une 6tude plus complete de 'abus de droits en mati~re d'exercice du droit de proprit6, voir Baudouin, supra, note 54, nos 65 et ss.; Tancelin, Thdorie du droit des obligations (1975), nos 299 et ss.; Barcelo, Les abus de droit (1954-55) 5 Th6mis 28; Cardinal, supra, note 54, aux ppA93 et ss.; Mazeaud, La responsabilite dans l'exercice d'un droit (1955-56) 58 R.du N. 369; Rapports de Congras de l'Association Henri Capitant, Montrdal, 1940; Nadeau, supra, note 54, aux pp. 233 et ss.; Mayrand, Abuse of Rights in France and Quebec (1973-74) 34 La L.Rev. 993 et les arr~ts suivants: Drysdale v. Dugas, supra, note 54; Carpentier v. Ville de Maisonneuve (1897) 11 C.S. 242; Gareau v. Montreal Street Railway, (1901) 31 R.S.C. 463; Canada Paper Co. v. Brown, supra, note 54; Cournoyer v. de Tonnancourt (1935) 59 B.R. 420; Brodeur v. Choini~re [1945] C.S. 334; Air- Rimouski v. Gagnon [1952] C.S. 149; Blais v. Giroux [1958] C.S. 569; Laperri~re v. Lemieux [1958] R.L. 228; Pelchat v. Carri~re d'Acton Vale Ltde, supra, note 54; Laforest v. Ciments du St-Laurent [1974] C.S. 289; Fasano v. Ville de Pierre- fonds [1974] C.S. 460; Gas Mdtropolitain Inc. v. Bell Canada [1975] C.P. 1. 57 Pour une critique et une analyse fort int6ressantes de ces notions, voir Frenette, Responsabiliti du propridtaire dans les rapports de voisinage REVUE DE DROIT DE McGILL [Vol. 24 copropri6taires d6tiennent un droit de propri6t6 exclusif sur leurs parties exclusives et, d'autre part, le fait qu'en mati~re de copro- pridt6 les locaux d'habitation soient naturellement tr~s rapprochs les uns des autres. Ddjh, la jurisprudence frangaise fournit de nombreux exemples d'application de ces th6ories. Les tribunaux frangais n'ont pas h6sit6 h engager la responsabilit6 d'un copropridtaire, m~me en l'absence d'une disposition expresse du r~glement de copropri6t6 prohibant une activitd donnde, dans les trois cas suivants: lorsqu'un copro- pridtaire fait un acte dans le seul but de nuire h ses voisins, sans qu'il n'en rdsulte quelque utilit6 pour lui; lorsqu'il fait un usage fautif de son droit, causant ainsi un prdjudice exc6dant les incon- vdnients normaux du voisinage; et enfin, lorsque, sans commettre une faute, il cause un trouble qui ddpasse la mesure normale d'in- conv6nients qu'un copropri6taire voisin est tenu de toldrerr 8 De mame, au Qu6bec, on tient qu'un propri6taire engage sa res- ponsabilit6 s'il porte atteinte aux droits des autres propri6taires. Si le propri6taire exerce son droit sur le bien qui lui appartient dans un esprit de malveillance envers un propri6taire voisin" ou s'il cause un trouble excddant en intensit6 et en frdquence les incon- vWnients normaux du voisinage6 m~me sans faute de sa part,,1 il (1973) 4 R.G.D. 95, et Abus de droit. Troubles de voisinage, ibid., h la p.241; le projet de code civil de 'Office de revision du Code civil consacre cette dis- tinction h l'art.95, Rapport sur es obligations (1975), O.R.C.C., Montreal XXX: "Nul ne doit causer A autrui un pr6judice qui d6passe les inconvdnients normaux du voisinage." 58 Pour une 6tude plus dlaborde voir: Chevalier, supra, note 33; Piddeli~vre, "La copropridtd par appartements" dans L'immeuble urbain a usage d'habi- tation (1963), hi la p.206, no 27; Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, nos 90 et ss.; Givord et Giverdon, supra, note 33, no 124; Zurfluh, supra, note 2, (no 137; Sizaire, supra, note 20, no 55; et en gdn6ral: Capitant, Des obligations de voisinage et spdcialement de l'obligation qui pase sur le propridtaire de ne causer aucun dommage au voisin (1900) 29 Rev.crit. de lg. et de jur. 156; Capitant, Sur rabus des droits (1928) 27 Rev.trim.dr.civ. 365; Planiol et Ripert, supra, note 22, no 454; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, supra, note 24, no 215; Marty et Raynaud, supra, note 22, nos 252 et ss. rigre v. Lemieux [1958] R.L. n.s. 228 (C.S.). 59 Brodeur v. Choiniare [1945] C.S. 334; Blais v. Giroux (1958) C.S. 569; Laper- 60 Girard v. Saguenay Terminals Ltd [1973] R.L.n.s. 264 (C.P.); Drysdale v. Dugas, supra, note 54; The Montreal Street Railway Co. v. Gareau, supra, note 54; Canada Paper v. Brown, supra, note 54; Pelchat v. Carrigre d'Acton Vale Ltde, supra, note 54; Dumas Transport Inc. v. Cliche, supra, note 54; Cournoyer v. de Tonnancourt, supra, note 56; Citd de Quebec v. Boucher (1936) 60 B.R. 153; Cit6 de Qudbec v. Turgeon, supra, note 54. 61 Dugas v. Drysdale (1894) 5 C.S. 418; Gareau v. The Montreal Street Rail- way Co., supra, note 56; Katz v. Reitz, supra, note 54; Doyon v. Les Prd- 1978] LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIMTAIRES 213 doit r6parer le pr6judice caus6. Pour ces motifs, il est pernis d'affir- mer qu'au Qu6bec de m6me qu'en France, le copropri6taire dont la salle de bain inonde l'appartement du dessous, celui qui com- promet la solidit6 de l'6difice, qui empi~te sur les parties commu- nes, 6 qui exerce une activit6 g~nant les voisins en raison de la fum~e, du bruit, des odeurs qu'il cause,65 ou m8me de son manque de bonnes moeurs, 66 engage sa responsabilit6 et donne ouverture au recours visant h faire cesser 1'exercice de telles activit6s.7 Cependant, il est essentiel de se rappeler que le droit du copro- pridtaire 6tant un droit de propri6t6, les tribunaux ne peuvent en aucun cas, au niveau des sanctions, porter atteinte h l'existence du droit en ordonnant 1'expulsion du propri6taire puisque cela aurait pour effet 1'expropriation d'un copropri6taire par un autre. 8 Les notions d'abus de droit et de troubles de voisinage ne sont que des restrictions posdes h l'exercice du droit de propri6t6 dont elles doivent toujours reconnaitre et respecter l'absolutisme de principe. 2. La d~claration de copropridtg La deuxibme limite au droit de jouissance du propri6taire de fraction sur sa partie exclusive se trouve h l'article 4411 C.c. qui pr6voit que la d6claration ,,d6finit la destination de l'immeuble et de ses 'parties exclusives et communes... et pr6cise les condi- tions ... d'utilisation des parties exclusives.)>6 9

Le l6gislateur encourage le r6dacteur de la d6claration b. fixer
les conditions dans lesquelles le propri6taire jouit de sa fraction
exclusive. II est guid6 dans cette tAche, par l’int6r~t g6n6ral de la
copropri6t6 dont le respect, en toutes circonstances, constitue la
seule justification aux restrictions conventionnelles au principe de

voyants du Canada [1974] C.S. 119; Carey Canadian Mines Ltd v. Plante
[1975] C.A. 893; Gaz Mgtropolitain Inc. v. Bell Canada, supra, note 56;
Mayrand, supra, note 56 aux pp.993 et ss.

62 Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 89, n.184.
63 Zurfluh, supra, note 2, no 136; Sizaire, supra, note 20, no 55.
64 Givord et Giverdon, supra, note 33, no 299.
65Riom, 3 mai 1966, AJ.P.I. 1967, 38; Paris, ler mars 1963, D.1964.14, appel
d’un jugement du Trib.inst. Paris, 16e arr. 17 nov. 1961; Paris, 8e Ch., 22 juin
1962, Gaz.Pal. 11.62.318; Civ., ler d6c. 1965, AJ.P.I. 1966.709; Civ. 3e, 20 f6v. 1973,
Gaz.Pal. 1.73.471.
66Trib.gr.inst. Grenoble, 6 avril 1964, D.1964.317 (conclusions Chanaron),

Gaz.Pal. 1964, 1, 399.

67Ibid.
68 Ibid. Givord et Giverdon, supra, note 33, no 124.
69 Ces dispositions de la d6claration lient le coproprid6taire qui doit s’y

conformer: voir 1’art. 441n C.c.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

l’absolutisme et de l’exclusivit6 du droit du propri6taireY D’une
part, le copropri6taire, en tant que titulaire d’un droit de propri6t6
dans une fraction, exerce ses droits individuels dans un cadre
collectif. La declaration assure donc que 1’exercice des pr6rogatives
individuelles respecte les droits de la collectivit6. D’autre part,
afin que les droits collectifs n’entravent pas l’exercice des preroga-
tives individuelles, l’article 441o C.c. prvoit que la d~claration ne
peut imposer aucune restriction aux droits des copropridtaires,
sauf celles qui seraient justifides par la destination de l’immeuble,
par ses caract~res ou par sa situation. Enfin, la loi pr6voit que les
copropri6taires jouissent de leurs parties exclusives (et communes)
& la condition de ne pas porter atteinte a la destination de l’immeu-
ble. I1 est donc essentiel de traiter, en tout premier lieu, de cette
notion essentielle qu’est la destination de l’immeuble. Nous dtudie-
rons ensuite ]a destination et les conditions d’utilisation des parties
exclusives en tant que limites au droit de jouissance du copropri6-
taire sur sa partie exclusive.

a) La destination de I’imnneuble

La destination de l’immeuble paralt h la fois comme une res-
triction aux droits des copropri6taires qui doivent jouir des parties
exclusives, conform6ment A I’article 441h C.c., sans porter atteinte
h la destination de l’immeuble, et comme une garantie des droits
des copropri6taires auxquels la declaration ne peut, conform6ment
& larticle 441o C.c., imposer des restrictions non justifides par la
destination de l’immeuble. II est, par consequent, essentiel de bien
saisir la nature et la portde de cette notion nouvelle, empruntde h
‘article 8 al. 2 de la loi frangaise du 10 juillet 1965,11

Cette notion fut d’abord proposde, en France, par M. Chevalier
‘on trouve

dans son commentaire de la Loi du 28 juin 1938,72 oil
la d6finition usivante:

La situation de l’immeuble dans un quartier plus ou moins 6l6gant ou
populeux, la qualit6 des matdriaux, l’am6nagement et la distribution des
appartements, le nombre des pieces qu’ils comprennent fixent la desti-
nation de rimmeuble et donnent la mesure du confort ou m~me du luxe
que doit comporter son habitation.

WOKischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 90; Givord et Giverdon,
supra, note 33, no 125; Sizaire, supra, note 20, no 119; Bouyeure, La destina-
tion de l’immeuble en copropridtd, AJ.P.I. 1968, 305.

11 Cinq articles de la loi qu6b6coise y r6f~rent: les arts.441h, 4411, 441o, 441p

et 442h C.c.

72 Supra, note 33, h la p.85.

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

215

Les travaux prdparatoires de la Loi du 10 juillet 1965 ont aussi

ddfini la notion de destination:

[L’]ensemble des conditions en vue desquelles un copropri~taire a acquis
son lot, compte tenu de divers 6lments, notamment de 1’ensemble des
clauses des documents contractuels, des caract6ristiques physiques et de
la situation de l’immeuble, ainsi que de la situation sociale de ses occu-
pants.:3
Au Qudbec, il n’existe pas de d6finition prdcise de la notion de
destination de l’immeuble. Les commentateurs de la loi sur la
coproprit674 ont dfi r6f6rer, pour l’expliquer, aux ouvrages frangais,
essayant de puiser dans le droit compar6 un guide susceptible de
nous dclairer. A tout le moins, il semble que la destination soit la
cause pour laquelle un copropri6taire ach~te sa fraction. Ainsi c’est,
d’apr~s M. Lombois, un accord unanime des copropri6taires sur
le genre d’habitation que doit offrir l’immeuble.Y5 Elle se confond,
d’apr~s M. Sizaire, avec l’int6r~t g6ndral de la copropri6t6, telle que
celle-ci est concue par la convention, compte tenu de la situation
et des caract6ristiques de l’immeuble.7 Par cons6quent, ainsi que
l’dcrivait Daniel Sizaire, la destination

constitue un droit fondamental pour les copropridtaires. Elle exprime le
cadre gn6ral dans lequel s’exercent leurs droits, h savoir notamment
les conditions et le mode d’occupation et d’utilisation de l’immeuble tel-
les qu’elles existaient et telles qu’elles ont 6t6 congues h l’origine de la
copropri~t6, qui donne hi celui-ci une marque particuli~re, une odesti-
nation>’7
On trouve donc trois 616ments essentiels dans la notion de desti-
nation: un 616ment objectif (situation, qualit6 des mat6riaux, distri-
bution des appartements, confort, luxe), un 616ment subjectif (l’en-
semble des conditions en vue desquelles un copropri6taire a achet6
sa fraction), et un 616ment collectif ( la destination repr6sente la
sauvegarde de l’intdr6t g6n6ral des copropri6taires). Et ce n’est
qu’en tenant compte de ces diffdrents facteurs que l’on peut connal-
tre la destination d’un immeuble particulier. Ainsi, deux immeubles
possddant les mimes caract6ristiques objectives peuvent avoir deux
destinations diff6rentes selon le niveau social de leurs occupants,

3 Rapports de Zimmerman h 1’Assemblde nationale, expos6 des motifs,
cit6 dans Zurfluh, supra, note 2, no 371; voir aussi la definition de Lombois,
supra, note 48, no 168: “La destination, c’est l’ensemble des 61 ments qui,
permettant d’op6rer le classement de l’immeuble, indique ce qui doit 6tre
fait et ce qu’il ne faut pas faire, pour emp~cher son ddclassement.”

74 Laquerre, supra, note 18, h la p.550; Beaudoin et Morin, supra, note 18, h

la, p.15; Legault, supra, note 35, A la p.8.

7 5 Lombois, supra, note 48, no 170.
71 Sizaire, supra, note 20, no 119.
77Ibid., no 57.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[‘Vol. 24

le quartier de la ville oii ils sont situ6s et plus encore leur localisa-
tion prdcise dans un m~me quartier: vue sur un parc et vue sur un
boulevard achalandd n’ont pas le m~me attrait.

Comme la destination est ddfinie dans la ddclaration de copro-
pri6t6, il faut prendre en considdration l’ensemble de la ddclaration
et non seulement le paragraphe intitul6 , dans l’article 441o
C.c., r6f~re A des restrictions aux droits des copropri6taires tels
que ces droits sont reconnus dans la destination des parties exclu-
sives de l’immeuble ou au contraire tels qu’ils d6coulent de la
destination de l’immeuble seulement.

L’exemple suivant sert hi illustrer ce probl~me d’importance:
posons comme hypothbse que l’immeuble est d6fini comme 6tant
A usage d’habitation aux 6tages et A usage commercial au rez-de-
chaussde: c’est la destination de l’immeuble. Supposons 6galement
qu’une clause de ]a d6claration interdit, dans un local donn6 du
rez-de-chaussde, l’exploitation d’un salon de coiffure. La destination
de ce local est commerciale puisqu’il est situd au rez-de-chauss6e.
II existe cependant une restriction au droit du copropri6taire de ce
local: il ne peut y exploiter un salon de coiffure. Dans cette hypo-
th~se, on ne peut pr6tendre que ]a restriction est justifi6e par la
destination de l’immeuble, ce commerce n’6tant ni dangereux, ni
incommode, ni insalubre. On doit donc tenir qu’une telle clause est
nulle, h moins de pouvoir soutenir que la restriction fait partie de
la destination de ce local donn6. Si tel 6tait le cas, l’immeuble serait
destin6 h un usage commercial au rez-de-chaussde, sauf quant h
l’exploitation d’un salon de coiffure dans un local donnd. Les droits
du copropri6taire de ce local ne comprendraient donc pas le droit
A l’exploitation d’un salon de coiffure et la restriction, faisant

102 La Cour de cassation dans un arr6t du 3 juin 1971 (AJ.P.I. 1972.334) ne
‘a pas permis en raison du fait que 1’activit6 exercde dtait une source im-
portante de troubles provenant des bruits et des odeurs.

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

221

partie de la destination de ce local, dchapperait . la rigle de l’article
441o C.c.’03

La premiere interprdtation, soit celle selon laquelle toute dispo-
sition de la ddclaration y compris celle ddfinissant la destination
de la partie exclusive doit 8tre justifide par la destination de l’im-
meuble, nous semble la plus acceptable pour deux motifs. En
premier lieu, cette interprdtation est celle qui est la plus conforme
h la lettre mime de ‘article 441o C.c.: la ddclaration ne peut imposer
aucune restriction aux droits des copropridtaires. Le copropridtaire
du local qui ne peut s’en servir comme salon de coiffure voit effec-
tivement ses droits de propridtaire limitds par une restriction qui
n’est pas, en l’occurrence, justifide par la destination de l’immeuble.
II en serait autrement si la restriction portait sur l’exercice d’un
commerce bruyant, tel une imprimerie. En second lieu, cette
interpr6tation est celle qu’a retenue la Cour de cassation, en Fran-
ce,0 alors que ce tribunal a ddcidd, relativement aux clauses inter-
disant l’exercice d’un commerce concurrent dans une copropridt6,
que ces clauses dtaient nulles comme imposant aux droits des co-
propridtaires une restriction non justifide par la destination de
l’immeuble.’05

103 Sur les clauses dites de non concurrence, voir en France, Kischinewsky-
Broquisse, supra, note 32, nos 98 et 103; Sizaire, supra, note 20, no 121;
Cabanac et Bouyeure, La clause de non concurrence dans la copropridtd,
A.J.P.I. 1971.750; Trib.gr.inst. Paris, 14 nov. 1975, J.C.P. 77.111.206
(note
Morand).

104 Le texte frangais correspondant aux arts.4411 et 441o C.c. est le suivant:
“Un r~glement conventionnel de copropri6td, incluant ou non ‘dtat descriptif
de division, ddtermine Ia destination des parties tant privatives que commu-
nes, ainsi que les conditions de leur jouissance; il fixe 6galement, sous r6-
serve de dispositions de la prdsente loi, les rzgles relatives h l’administra-
tion des parties communes. Le r~glement de copropridt6 ne peut imposer
aucune restriction aux droits des copropridtaires en dehors de celles qui
seraient justifides par la destination de limmeuble, telle qu’elle est ddfinie
aux actes, par ses caract~res ou sa situation” (art.8).

05 Civ. 11 mars 1971

(2 arrAts), AJ.P.I. 1971.767; Civ. 3e, 27 mai 1971,
D.1972, Somm. 36; Civ. 3e, 16 juin 1971, D.1971, Somm. 171; Lyon, Ire Ch.,
29 mai 1973, D.1973, Somm. 154; Civ. 3e, 22 jan. 1975, J.C.P. 1975.11.17992 (note
Guillot); voir cependant, Bouyeure, La destination de l’immeuble en copro-
prigtd, supra, note 70, h la p.301, qui se rallie h l’opinion d’abord exprimde
par Givord et Giverdon supra, note 33, dans la preminre 6dition de leur ouvra-
ge sur la copropridtd: “Nous estimons, comme les auteurs prdcit6s, que
l’article 8 alin6a ler permet au r~glement de copropridt6 de fixer souverai-
nement la destination des parties privatives et communes, ‘Les restrictions
aux droits des copropridtaires qu’interdit dventuellement le second alinda
sont uniquement celles aux droits qu’ils exercent dans le cadre d’une destina-
tion ddterminde’ …. La destination de l’immeuble ne saurait donc intervenir
dans le contr6le et la definition de ]a destination des parties privatives.”

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

Une disposition de la declaration fixant la destination des parties
exclusives n’est donc valable qu’en autant qu’elle est justifiee par
la destination de l’imreuble. Ainsi, l’affectation des locaux du
rez-de-chaussde A un usage commercial respecte la destination d’un
immeuble rdserv6 h l’habitation, mais dont les copropri6taires d6si-
rent jouir des services courants (i.e., magasin d’alimentation, distri-
buteur de journaux, salon de coiffure, nettoyeur, pharmacie). Un
copropri6taire d’un local situ6 au deuxi~me 6tage pourrait voir
restreint son droit d’y ouvrir un bureau de dentiste; de m~me, la
ddclaration pourrait valablement interdire au propridtaire d’une
fraction situde au rez-de-chaussde d’y exploiter une boite de nuit
dans la mesure oii il s’agit d’une activitd bruyante susceptible de
goner la jouissance paisible des copropri6taires; “6
toutefois, la
ddclaration ne pourrait interdire
ce copropri6taire
‘exploitation
d’un salon de coiffure si la seule raison d’etre de la prohibition est
la protection d’un commerce ddjh existant dans l’immeuble.107

c) Les conditions d’utilisation de la partle exclusive

Enfin, parmi les dispositions limitant le droit de jouissance du
copropri6taire sur sa partie exclusive, on retrouve les dispositions
fixant les conditions d’utilisation des parties exclusives. Sans pr6-
tendre vouloir donner une liste exhaustive des diff6rentes clauses
susceptibles de se retrouver dans une ddclaration de copropri6t6,’08
les exemples qui suivent peuvent servir h illustrer le type de clauses
pouvant rdgir la vie en copropridt6.

Si l’appartement est destind h l’habitation, inddpendamment
de la question des troubles de voisinage, la d6claration peut imposer
des conditions qui ont trait au bon ordre et h la tranquimit6 de
l’immeuble” ou pr6voir que l’exercice de tout commerce et de tou-
te profession, m~me lib6rale, est prohibd dans l’appartement t0

106 Voir, h cet effet, Civ., 20 juin 1973, J.C.P. 73.11.17504 (note Guillot).
107Ces clauses de non concurrence sont valides en mati~re locative: voir
h titre illustratif seulement: Places Versailles Inc. v. Maison de Choix
[1967] B.R. 87.
l08 Voir, t cet effet, Legault, supra, note 35 aux pp. 11 A 14; Rosenberg,

supra, note 4 A la p.43 (1st supplement, Form IA).

209 La clause pourrait se lire ainsi: “Le propridtaire ne doit faire aucun
bruit susceptible de goner ses voisins; le propri6taire ne doit garder aucun
produit inflammable cr6ant des risques particuliers d’incendie; le propri6-
taire ne peut garder d’animaux dangereux ou bruyants; les appartements
doivent 6tre occup6s par des personnes de bonne vie et de bonnes moeurs.”

110En France, une telle disposition a dt6 jugde valide: Trib.gr.inst. Paris,
26 juin 1971, Gaz.Pal. 1971.1.562. Sur la clause d’habitation bourgeoise en

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

223

ou encore pr6voir qu’aucune profession si ce n’est lib6rale ne peut
8tre exerc~e dans la pa-tie exclusive. 1 ‘

Si le local est destin& au commerce, la declaration peut valable-
ment exclure 1’exploitation de certains commerces”12 ou encore per-
mettre 1exploitation de certains commerces au rez-de-chauss6e et
les exclure aux 6tages. Cependant, la restriction n’est valide dans
chaque cas qu’en autant qu’elle est justifi6e par la destination de
1’immeuble, c’est-h-dire, rintr8t gdndral de la copropri6t6 et qu’elle
ne vise pas uniquement h favoriser une seule fraction (article 441o
C.c.). 113

Le copropri6taire a donc la jouissance de sa partie exclusive,
mais il doit respecter les dispositions de la d6claration de copropri6-
t6 qui fixent la destination de sa partie exclusive, ainsi que les con-
ditions d’utilisation de cette derni~re. Afin de s’assurer que ses
droits de propri6taire ne seront pas mis en p6ril, l’article 441o C.c.
impose une restriction cruciale
la discr6tion des r6dacteurs de
d6olarations: toute restriction aux droits des copropridtaires doit
6tre justifi6e par la destination de l’immeuble. On ne saurait donc
6tre trop prudent dans la definition de cette notion fondamentale.

3. L’assemblge des coproprigtaires

La troisibme limite au droit de jouissance sur la partie exclusive
provient de d6cisions adopt6es par l’assemb16e g6n6rale. Ii s’agit
d’abord d’une restriction pr6vue par Particle 4421 C.c. relative aux
travaux ndcessaires h la conservation de l’immeuble. Nous verrons

France voir Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, nos 95 et ss.; Givord et
Giverdon, supra, note 33, nos 127 et 293; Morand, supra, note 99.

M11 Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 96; Sizaire, supra, note 20,

no 121; Givord et Giverdon, supra, note 33, no 127.

112E.g., on peut pr6voir que les commerces dangereux et insalubres,
bruyants ou malodorants sont prohib6s, ou encore qu’aucune gene, notamment
par le bruit, les vibrations, les odeurs, ne doit r6sulter de l’installation de
commerces. De toute mani~re, chaque copropri6taire doit s’abstenir de cau-
ser h ses voisins un trouble d6passant la mesure normale des inconv6nients
du voisinage.

i13Une m6me clause peut donc 6tre valide dans un immeuble de luxe et
invalide dans un immeuble modeste, valide dans un immeuble commer-
cial et invalide dans un immeuble destin6 h rhabitation. Ainsi, il semble
qu’une clause interdisant un commerce donn6 dans le seul but de prot6ger
un commerce existant ne serait pas justifide par la destination dun immeuble
h l’habitation bourgeoise. Mais la solution serait-elle la m~me dans un
centre commercial? Voir en France: Paris, 3e Ch., 15 mai 1971, AJ.P.I. 1971,
p.765 et Civ., 15 oct. 1974, J.C.P. 74.II.17889 (note Guillot); Sizaire, supra,
note 20, no 119; Bouyeure, supra, note 70, h la p. 305.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

ensuite comment certaines d~cisions de l’assemblde d’exdcuter des
travaux ayant une rdpercussion sur les parties communes peuvent
affecter le droit de jouissance des copropridtaires sur leur partie
exclusive.

a) Les travaux ndcessaires h la conservation de 1’inumeuble

La r~gle posde a l’article 4421 C.c. a pour consdquence que le
propri6taire est oblig6 de laisser exdcuter des travaux m~me a Fin-
tdrieur de sa partie exclusive:
le copropridtaire doit donc laisser
pdndtrer chez lui ouvriers, entrepreneurs et sous-traitants qui ont
besoin d’y travailler.114

Cette restriction imposde au copropri6taire constitue une excep-
tion h la rigle de l’article 442g C.c., selon laquelle aucune ddcision de
l’assemblde gdndrale ne peut apporter de restriction au droit de
jouissance du propridtaire sur sa partie exclusive.”; Cette restric-
tion 6tait cependant ndcessaire afin de respecter le principe de
l’article 441h C.c., selon lequel le propridtaire ne peut porter at-
teinte aux droits des autres propri6taires. En s’opposant aux tra-
vaux sous le pr6texte qu’ils affectent sa partie exclusive, le pro-
pridtaire nuirait aux intdr~ts des autres propridtaires et, dans une
certaine mesure, h ses propres intdr~ts puisque sa fraction fait
partie de l’immeuble que les travaux visent h conserver. Or la co-
propri6td ne peut tol6rer l’empi~tement de droits. Sa fonction est
d’assurer un dquilibre entre les droits des copropri6taires pris indi-
viduellement et ces m~mes droits considdr6s collectivement. Ainsi,
l’article 4421 C.c. assure que les droits de la collectivitd h la conser-
vation de l’immeuble ne seront pas mis en pdril par le refus d’un
copropri6taire de permettre l’exdcution de travaux dans sa partie
exclusive.

La rddaction de l’article 4421 C.c. pose cependant un problme
d’interprdtation quand il s’agit de d6terminer quels sont les tra-
vaux n6cessaires h la conservation de l’immeuble.” 0 Le remplace-

“14 Bien que le ldgislateur qudb~cois n’ait pas utilis6 le terme ayant-droit
A l’instar du i6gislateur frangais (voir, infra, note 115), il ne sernble pas dou-
teux que la m~me obligation s’impose dgalement & l’ayant-droit du co-
propridtaire et, 6galement, i son locataire.

115 Voir discussion de l’art.442g C.c. supra, para.I.A.1.
“I La loi frangaise 6tant rddigde en ternes diff6rents il ne sera pas possi-
ble de rdfdrer cetter fois aux d6cisions des tribunaux frangais: art.30 de ]a
Loi du 10 juillet 1965: “L’assembl6e gdn6rale des copropridtaires, statuant
A la double majorit6 prdvue i l’article 26, peut, h condition qu’elle soit con-
forme It la destination de l’irnmeuble, ddcider toute arn6lioration, telle que

1978J

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRItTAIRES

225

ment d’un 61iment d’6quipement commun (ascenseur, syst~me de
chauffage, de conditionnement d’air, ou de distribution d’eau chau-
de), trop vieux pour remplir son usage, constituerait, A notre avis,
des travaux n6cessaires t la conservation de l’immeuble. Cependant,
les travaux n6cessit6s pour le remplacement d’un syst~me par un
autre plus moderne, plus efficace ou plus propre, ne tomberaient
pas n6cessairement sous le coup de l’article 4421 C.c. I1 s’agit plut6t,
dans ce cas, de travaux d’am6lioration ou de transformation. Toute-
fois, si ces travaux avaient 6t6 rendus n6cessaires par une disposi-
tion idgislative ou r6glementaire, ils pourraient &tre considdrds
comme ndcessaires h la conservation de l’immeuble. Quant aux
travaux de rdparation ou de r6fection du gros oeuvre (toiture, plan-
chers, escaliers) de F’immeuble, il semble bien qu’ils tombent sous
la lettre de l’article 4421 C.c.11T

b) Les travaux ayant une repercussion sur les parties communes

Enfin, il existe une derni~re limite au droit de jouissance du
copropiidtaire sur sa partie exclusive qu’on ne saurait passer sous
silence. I1 s’agit de Farticle 441p C.c., qui autorise l’insertion, dans
la ddclaration, d’une clause “subordonnant h l’accord de l’assem-
bl6e gdndrale l’ex6cution de travaux pouvant avoir une r6percussion
sur les parties communes”.” Les travaux qu’un copropridtaire se
propose d’ex6cuter et qui ont une r6percussion sur les parties com-
‘hypoth~se oit la clause en-
munes ne peuvent 8tre ex6cutds, dans
visagde h l’article 441p C.c. est ins6rde dans la ddclaration, que si
l’assemblde -des copropridtaires les autorise. Cette restriction, lors-
qu’elle est justifide par la destination de l’immeuble, est conforme h
l’intr6t g6ndrail de la copropri6td, selon lequel un copropridtaire
ne doit pas porter atteinte aux -droits des autres copropri6taires.
Son effet est cependant d’imposer une restriction aux droits des
copropri6taires qui ne peuvent procdder h des travaux portant sur

]a transformation d’un ou de plusieurs 61ments d’6quipement existants, lad-
jonction d’61dments nouveaux, l’am6nagement de locaux affectds h l’usage
commun ou ha crdation de tels locaux.” Art.31 de la Loi du 10 juillet 1965:
“Aucun des copropridtaires ou de leurs ayants droit ne peut faire obstacle
Sl’exdcution, m~me h l’int6rieur de ses parties privatives, des travaux rdgu-
lirement et express6ment d6cid~s par l’assembl6e g~n6rale en vertu de l’arti-
cle 30 ci-dessus.”

111 I1 y a toujours, en ce domaine, place h l’interpr~tation. Ainsi, les travaux
de reparation d’un toit qui laisse p6ndtrer l’humiditd pourraient atre con-
sid6rds, soit comme ndcessaires h la conservation de l’immeuble, soit comme
ne justifiant pas de troubler la jouissance paisible du copropridtaire.
118 Dans cette mesure, cette restriction aurait pu 6tre classde parmi les

restrictions resultant d’une disposition de la declaration.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

leurs parties exclusives, mais affectant les parties communes, sans
obtenir l’accord prdalable de l’assembl6e.

Le titulaire d’une fraction de copropri6t4 a, sur sa partie
exclusive, un droit de jouissance complet. Ce droit subit, cependant,
certaines restrictions qui sont dues h l’6troit rapprochement des
diff6rents titulaires de fractions dans un immeuble d6tenu en co-
propri6t6. Le titulaire d’une fraction a aussi droit A la jouissance
des parties communes de l’immeuble, mais bien que son droit de
jouissance sur ces parties soit de m~me nature que son droit de
jouissance sur sa partie exclusive, on ne saurait 8tre surpris du
fait que les restrictions sont, dans ce cas, encore plus importantes.
La justification en est 6vidente puisque les parties communes sou-
mettent les copropridtaires h des rapports encore plus 6troits.

III. LE DROIT DE JOUISSANCE SUR LES PARTIES COMMUNES

Par l’enregistrement d’une d6claration de copropri6t6, la copro-
pridt6 d’un immeuble est rdpartie entre ses propridtaires par frac-
tions comprenant chacune une partie exclusive et une quote-part des
parties communes (article 441b C.c.). Nous verrons maintenant, corn-
me nous l’avons fait pour les parties exclusives, la nature et l’6ten-
due du droit du copropridtaire sur ces parties communes.

A. Droit de proprit6 indivis

Le titulaire d’une fraction a un droit de propri6t6 indivis sur les
parties communes. En mati~re de propri6t6 indivise, les parts de
chacun des copropri6taires sur les parties communes peuvent etre
6gales ou indgales. Dans le cas de la copropri6t6 par ddclaration,
l’article 441d C.c. pr6voit que la quote-part de chaque copropri6taire
dans les parties communes s’6tablit par le rapport de la valeur de
la partie exclusive de sa fraction h la valeur globale des parties ex-
clusives. Le droit de copropri6t6 confure h tous les indivisaires la
pr6rogative d’user librement de la chose suivant sa nature ou suivant
1’usage auquel elle est affectde.119 Les actes faits par un copropri6-
taire en vue de l’appropriation personnelle de la partie commune
ou de son usage personnel et exclusif sont done incompatibles avee
la coproprt&6.

119 Planiol et Ripert, supra, note 21, no 296; Aubry et Rau, supra, note 20, no

337.

19781

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

227

B. Les restrictions ‘au droit du copropri~taire

En matigre de propri&t6 indivise, deux restriotions sont appor-
tees au ,droit de jouissance du copropri6taire. Celui-ci ne peut jouir
que sous la double reserve de ne pas faire servir la chose h des
usages autres que ceux auxquels elle est destin~e et de ne pas por-
ter atteinte au droit 6gal et r6ciproque de ses coindivisaires. En ma-
ti~re de copropri6t6 d’un immeuble par d~claration, les restrictions
sont plus nombreuses. Au nombre de celles-ci, on compte le droit
concurrent des autres copropri6taires (article 441h C.c.) les disposi-
tions de la declaration de copropri6t6 (articles 4411 et 441o C.c.), les
decisions de l’assembl~e ainsi que celles des administrateurs (article
441v C.c.).

1. Le droit concurrent des autres coproprigtaires sur les parties

communes
Le droit de jouissance du copropri6taire sur les parties commu-
nes comporte les m6mes restrictions que son droit de jouissance
sur sa partie exclusive. En effet, l’article 441h C.c. 6dicte que le
copropri6taire jouit et use librement des parties exclusives et des
parties communes sous la condition de ne pas porter atteinte aux
droits des autres copropri~taires. Or les droits concurrents des
autres copropri~taires sur les parties communes 6tant des droits
6gaux, r~ciproques et concurrents, les restrictions imposees aux
droits de jouissance du copropri~taire sont, du fait de cette 6galit6
et de cette r6ciprocit6, encore plus 6tendues, bien que le droit de
jouissance sur les parties communes soit ‘de m6me nature que ce-
lui qui porte sur la partie exclusive. I1 en r6sulte que l’exercice
du droit de jouissance du copropri6taire sur les parties communes
est plus restreint que celui qui porte sur sa partie exclusive. La
diff6rence, cependant, n’en est qu’une d’intensit6 et provient du fait
que ce droit est exerc6 concurremment avec les autres copropri6tai-
res.

Pour determiner 1’6tendue du droit de jouissance sur les par-
ties communes, de mgme qu’en matigre de droit de jouissance sur
la partie exclusive, 1i faut faire appel aux r~gles de l’abus de droit
et du droit de voisinage: un copropri6taire ne peut, dans 1’exercice
de son droit de jouissance, causer d’inconvnients aux autres co-
propri6taires qui ont le m~me droit. Le problme qui se pose alors
consiste h d6terminer la limite au-delk de laquelle 1’activit6 du co-
propri~taire porte atteinte aux droits des autres copropri6taires. En
cette mati~re, le droit positif frangais, b cause de l’abondance de
sa jurisprudence, peut servir d’indicateur. En effet, le droit positif

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

frangais contient de nombreux exemples d’actes consid6r6s comme
contraires aux droits concurrents des autres copropri6taires, soit
parce qu’iis reprdsentent un usage anormal d’une chose commune,
soit parce qu’ils constituent un usage exclusif de cette chose. Ainsi,
un copropri6taire ne peut appuyer une terrasse sur un mur corn-
mun,12 diminuer la largeur d’un couloir commun,’2′ utiliser un
mur commun pour fins d’affichage,’122 stationner son v6hicule dans
une cour commune non destin6e h cette fin,1 3 creuser un puits,
construire sur le sol commun,124 pratiquer une ouverture dans un
mur commun, 2 5 ni refuser l’acc~s au grenier et A la toiture en s’ap-
propriant l’escalier1 26 I1 ne peut se servir d’un passage ou d’un
corridor commun comme espace de rangement de bicyclettes, de
pneus, de bAtons de golf ou de voiture de b6b6. Tous ces actes dqui-
valent h un usage anormai du passage ou du corridor qui dolt
rester accessible et libre.1 27 IIIs sont considdrds comme donnant lieu
A une appropriation privative et portent atteinte aux droits 6gaux
et concurrents des autres copropri6taires.

De m6me, le copropri6taire porte atteinte au droit des autres
copropri6taires lorsqu’il se sert d’une cour commune ou destinde
a une fin utilitaire commune pour y 6tendre son linge,’ 28 pour y
6riger un garage, une habitation, une annexe de magasin 29 ou une
niche h chien’30 servant A son usage exclusif. M6me hi ses frais, un
copropridtaire ne peut reddcorer une partie commune en posant, par
exemple, du papier peint sur un mur originellement peintur6.131

12OK.ischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 67, n63.
121 Req., 13 mars 1934, Gaz.Pal. 1934.1.883.
122 Trib.civ. Nantes, 2e Ch., 4 janv. 1938, Gaz.Pal. 1938.1.391.
1 Civ. 3e, 5 avril 1968, Bull.Civ. III, 125; Paris, 2e Ch. 20 oct. 1970, D.1971,328
(note Giverdon); Tr.gr.inst. Paris (16e arr.), 7 mai 1971, A.J.P.I. 1971, 1228 (obs.
Bouyeure); Tr.gr.inst. Paris, 19 avril 1969, Gaz.Pal. 1969.1.325 (note Morand);
Bouyeure, L’utilisation des parties communes pour le stationnement des
vdhicules automobiles, AJ.P.I. 1971, 15.

124 Civ. 3e, 2 oct. 1975, AJ.P.I. 1975.405 (obs. Bouyeure).
125 Civ. 3e, 28 f6v. 1969, Bull.Civ. III, 143; Rouen, Ire Ch., 12 mars 1968,
126 Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 70, n96.
127 Paris, 8e Ch., 9 ddc. 1970, Gaz.Pal. 1971.1.394 (note Amzalac); trib.gr.inst.
12 8Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 64, n44.
129 Ibid., no 64, n45.
130 Civ., 8 juillet 1964, A.J.P.I. 1964.1049.
131 Civ., 23 mars 1968, A.J.P.I. 1969.127 (obs. Bouyeure). I1 s’agissait dans ce
‘as-

cas de carreaux de faience posds par un copropridtaire sans 1’accord de
sembl~e g6n6rale.

Gaz.Pal. 1968.1.370.

Paris, 19 avril 1969, Gaz.Pal. 1969.1325.

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

229

D’autre part, l’acte qui ne constitue pas un usage anormal de la
partie commune est permis. Ainsi, un copropri~taire peut bran-
cher un lavabo stir une oanalisation d’eau 32 oU apposer tne ensei-
gne h un immeuble destin6 partiellement ht un usage commercial.”
Bien que ces derniers exemples aient 6td tir6s ‘de la jurisprudence
frangaise, il semble maintenant que les tribunaux fran;ais ren-
draient une ddcision contraire sur la base de faits identiques. En
effet, la loi frangaise du 10 juillet 1965 pr6voit que le copropri6taire
qui d6sire effeotuer de menus travaux affectant les parties com-
munes ou !’aspect ext6rieur de I’immeuble doit, conformn-ment
l’artiole 25(b), obtenir l’autorisation pralable de l’assembke don-
nde au moyen d’ne ,dcision prise ht la majoritdcles voix. Comme
tous les travaux, y compris l’apposition d’enseignes’ 34 ou l’installa-
tion d’une marquise,”3 5 semblent tomber sous la lettre de cet article,
d6sormais, en France, un copropridtaire ne peut, sans autorisation,
m6me ,du syndic,’ z3 effectuer de menus travaux sur les parties com-
munes. 3 7

.

2. La declaration de copropridtd

La deuxibme limite pos6e au droit de jouissance des copropri&
taires sur les parties communes se trouve dans les dispositions de la
d6claration. Parmi celles-ci, on compte la destination de l’immeuble
et des parties communes, ainsi que les rbgles relatives aux condi-
tions de jouissance et h r’administration -des parties communes.

132 Celle-ci constitue une partie commune: Tr.gr.inst. Grenoble, 17 avril 1970,

D.1970.556.

1,33 Dans ce cas, l’immeuble dtait dgalement situ6 dans un quartier ot les
enseignes 6taient tr6s nombreuses: Tr.gr.inst. Nantes, 3 juin 1970, Gaz.Pal.,
1970.2.323 (note Morand).

’34 Civ. 3e, 22 mai 1973, Gaz.Pal. 1973.1.939.
135 Grenoble, Ire Ch., 13 oct. 1965, D.1966.168 (note Givord).
136 Civ. 3e, 30 mai 1972, D.1972, Somm. 194.
37 Le droit frangais pr6voit cependant trois m~canismes permettant d’as-
souplir la rigidit6 de cette r~gle. Les tribunaux frangais ont admis que
‘autorisation de l’assembl6e pouvait 8tre donn6e post6rieurement h 1’ex6-
cution des travaux qu’elle avait pour effet de valider: Trib.gr.inst. Paris, 17
d6c. 1970, Gaz.Pal. 1971.1.246; Civ. 3e, 30 mai 1972, D.1972 Somm. 194; en
deuxi me lieu,
‘art. 30 al. 4 de la Loi du 10 juiltet 1965 donne au tribunal le
pouvoir d’autoriser les travaux d’am6lioration; enfin, l’assembl6e ne peut,
sans commettre un abus de droit, refuser ht un copropri6taire l’autorisation
demandde lorsque les travaux ne sont pas susceptibles de porter atteinte
b la coproprit6: Trib.gr.inst. Pontoise, 8 juillet 1976, Gaz.Pal. 1977.2.128.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

a) La destination de

‘imnneuble et des parties communes

La destination, tant de l’immeuble que des parties communes,
est d~termin6e dans la ddclaration de copropridt6.’3 8 Etant donne
que le concept de la ,destination de l’immeuble a. 6t6 dtudid dans une
section prdcddente, il est inutile d’y revenir ici. Les copropri6taires
ne peuvent, dans l’usage des parties communes, porter atteinte 4
la destination de l’immeuble1 39

Quant h la d6finition de la destination des parties communes,
elle ne pose aucun probl~me particulier.140 Les restrictions, en ma-
ti~re de droit de jouissance sur les parties communes, sont identi-
ques i celles s’appliquant au droit de jouissance sur la partie ex-
clusive. Si un local est destind h servir comme passage, i1 ne peut
6tre utilis6 comme espace de rangement, ce qui constituerait une
modification de sa destination. De mme, un local destind h atre
utilis6 comme garage ne pourrait 6tre transform6 en local d’habita-
tion, ni un ascenseur transformd en monte-charge.

b) Les conditions de joulssance des parties communes

Les conditions de jouissance des parties communes sont d6-
termindes dans la ddolaration de coproprit4, conformdment A l’arti-
cle 4411 C.c. 41 Ces conditions limitent effectivement le droit de
jouissance du copropridtaire sur les parties communes. Elles ne
doivent cependant pas affecter le statut juridique des parties com-
munes qui font l’objet d’un droit de propridt6 indivis entre les
copropri6taires, avec toutes les prdrogatives que ce droit comporte.
La ddlaration constitue l’expression de la volont6 des copropri&
taires, qui sont r6putds y avoir adhdr6; erie ne fait que prdciser les
conditions de jouissance des parties communes en fonction de leur
usage normal et de leur nature. Il en est ainsi des clauses prdvoyant
que seuls les ascenseurs de service peuvent servir lors de d6m6-
nagement, que les corridors ne peuvent servir pour remiser voitures
d’enfants ou bicyclettes, que les salles de lavage ne peuvent atre
utilis6es avant huit heures le matin ou apr~s neuf heures le soir.

Mais une trop grande latitude laissde aux rddacteurs de la dd-
claration serait susceptible d’entraver le droit des copropri6taires
A la jouissance pleine et enti~re des parties communes. C’est pour-

138 Art.441.1 C.c.
139 Voir les arts.441h et 4411 C.c.
140 Voir 1’6tude de la d6finition de ]a destination des parties exclusives,

supra, para.II.B2.b.

141 En ce qui concerne les parties exclusives, la d6claration de copropri6t6

se limite h ddterminer les conditions d’utilisation: art.4411 C.c.

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRI.TAIRES

231

quoi le 1dgislateur a cru bon de garantir le copropri~taire contre
l’emploi de clauses abusives en ‘le faisant bdndficier de la protec-
tion de 1’article 441o C.c., selon lequel la ddclaration ne peut impo-
ser aux copropridtaires des restrictions non justifides par la desti-
nation de l’immeuble142 En r~gle gdndrale, la ddclaration ne fait que
prdciser des regles d’utilisation qui, de toutes fagons, sont rendues
ndcessaires du fait de l’utilisation en commun de la partie. Ce sont
les ohocs susceptibles d’tre engendrds par la copropridt6 que la
ddclaration doit prdvoir et prdvenir, mais lorsque la d6claration
outrepasse cette fronti~re, les copropridtaires ne sont pas tenus de
respecter la clause restrictive de droits.143

Ainsi, en France, la question de savoir si l’affichage sur un mur
commun constituait une utilisation abusive a longtemps fait l’objet
de controverses. Le fait ,de permettre, dans la ddclaration, l’apposi-
tion sur un mur commun d’une plaque professionnelle ou d’une en-
seigne commerciale et de ddterminer la taille, les matdriaux ou les
couleurs b 6tre utilisds, constitue certes une clause raisonnable.
Sans aucune rdglementation, certains commergants pourraient
tre
tentds d’utiliser des enseignes de proportions disgracieuses, de taille
ddmesurde ou d’une luminosit6 excessive risquant ainsi de troubler
les voisins, sinon .de porter atteinte au caract~re architectural de
l’immeuble. 44 D’autre part, prohiber compl~tement
l’apposition
de plaques professionnelles ou d’enseignes ,commerciales sur un mur
commun alors que la ddclaration reconnait l’exercice ,du commerce
ou de la profession constituerait, dans bien des cas, une clause con-
traire b la destination de l’immeuble.’ 45 La ddolaration de copro-
pri6t6 peut donc, dans une certaine mesure, r~glementer l’apposi-
tion d’enseignes. En France, faute de disposition expresse dans le
r~glement de copropridt6, le copropridtaire doit maintenant de-
mander
‘autorisation de l’assemblde -des copropridtaires ou du tri-
bunal pour le faire. 46

142 De plus, le copropri~taire est assurd que les clauses relatives h la jouis-
sance des parties communes ne peuvent 8tre modifides que par une d6cision
de l’assemblde des copropridtaires adopt~e b la double majorit6 de l’art.442f
C.c., sauf si la modification de la partie commune affecte la destination des
parties exclusives, auquel cas il faut l’assentiment du copropridtaire intd-
ress6 (artA42g C.c.), ou la destination de l’immeuble, auquel cas l’unanimit6
est requise (art. 442h C.c.).
143 Voir Cabanac, La loi du 10 juillet 1965 et les clauses abusives des r~gle-
ments de copropridt6, Gaz.Pal. 1965.2.78; et, en g6n6ral, Clos, supra, note
18, ch.I.

144 Givord et Giverdon, supra, note 33, no 134; Kischinewsky-Broquisse,

supra, note 32, no 111.

145 Kischinewsky-Broquisse, ibid.
146 Voir les arts. 25(b) et 30 al. 4 de la Loi du 10 juillet 1965.

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

Au Qu6bec, la ddclaration peut certes prdvoir les conditions
d’utilisation du mur commun et m~me soumettre h l’autorisation
de l’assemblde le droit d’apposer une enseigne. A ddfaut de stipula-
tion dans la ddclaration concernant cette question, le copropri6-
taire pourrait, h notre avis, utiliser le mur commun, mais h la dou-
ble condition que l’usage du mur rdponde aux besoins de son com-
merce ou de sa profession 47 et ne cause pas aux autres copropri-
taires un inconv6nient ddpassant la mesure normale des obligations
de voisinage. Nous ne croyons pas, ces conditions dtant respectdes,
que le copropri6taire serait tenu, comme en France, de demander
l’autorisation de l’assemblde des copropri6taires afin de faire proc6-
der h 1’apposition d’une enseigne ou d’une plaque professionnelle.148

3. L’assemblde des coproprigtaires

La troisi~me limite aux droits des copropridtaires sur les parties
communes est posde par l’assemblde des copropridtaires. Conform&
ment h la comp6tence gdndrale et de principe qui lui est recon-
nue, 4 9 l’assemlyke peut ddcider, A la majorit6 simple visdc h l’arti-
cle 442e C.c., des conditions de jouissance des parties communes
lorsqu’elles n’entranent pas une modification de la ddclaration.50
Cependant, dans le cas oti la d6claration est modifide, la majoritd
visde b. 1’article 442f C.c. est requise.

L’assembl6e, organe supreme de la copropridt6,151 affecte, de
nombreuses farons, le droit de jouissance du copropri6taire sur les
parties communes. Nous nous limiterons ici h n’6tudier qu’un seul
des pouvoirs de l’assemblde, soit celui d’autoriser certains travaux
affectant les parties communes. En effet, l’article 442f C.c., para-
graphe 3 pr6voit que l’assembl6e des copropri6taires peut ddcider,

147 Sinon, on pourrait all6guer qu’il s’agit d’une utilisation abusive.
148 Cependant, toute publicit6 ne satisfaisant pas ces conditions devrait,
bL la demande de l’assemblde, 6tre retirde: voir Givord et Giverdon, supra,
note 33, no 136.

149 L’dtude de la nature, du r6le et des pouvoirs de

‘assemblde des co-
propri6taires rel~ve de l’administration de la copropridt6. Sur cette question,
voir Manseau, La Copropridtg (Bill 29), troisi6me partie: L’assemblde des
coproprigtaires, Cours de perfectionnement de la Chambre des notaires
(1970), 37; Comtois, supra, note 42, h la p.79; Comtois, supra, note 18, ii la p.
89; Beaudoin et Morin, supra, note 18, aux pp.27 et ss.; Laquerre, supra, note
18, h la p.553.
150 Ainsi, l’assemblde peut d6terniner quelles sont les conditions d’utilisa-
tion du stationnement ext6rieur, ou la p6riode pendant laquelle le syst~me de
climatisation fonctionne chaque annde.

151 Voir Manseau, supra, note 149, h la p.38.

1978]

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRIATAIRES

233

par un vote ,d’au moins la moiti6 des copropridtaires reprdsentant au
moins les trois quarts des voix, d’exdcuter des travaux comportant
transformation, agrandissement ou am6lioration des parties com-
munes. Un copropridtaire ne peut donc, de son seul chef, proolder
1’exdcution des travaux qui tombent sous le coup de cet article.
Cependant, m~me le copropridtaire qui a vot6 contre l’ex6cution
des travaux poncernds doit s’y soumettre si les copropri~taires ont
la majorit6 requise d’y procdder.’5 2 Ces travaux peuvent
ddcid6
consister en la transformation ou en l’adjonction d’un ou plusieurs
6idments d’6quipement (e.g., ascenseur, adoucisseur d’eau, vide-or-
dures, chauffage central), en l’am6nagement, ou m~me l’agrandis-
sement de locaux affect6s A l’usage commun .

53

D’autre part, les travaux qui ne tombent pas sous le coup de
l’article 442f C.c., paragraphe 3 sont d6cid6s h la majorit6 simple
aux termes de l’article 442e C.c.l 4 II s’agit, la plupart du temps, de
travaux ne portant pas atteinte aux droits des copropri6taires et
qui sont conformes aux conditions d’utilisation des parties com-
munes. Ainsi en est-il -des travaux d’entretien.

En France, tous les travaux affectant les parties communes, qu’il
s’agisse de travaux d’amdlioration ou d’amdnagements personnels
que certains copropridtaires d6sirent faire ex6cuter h leurs frais,
doivent 6tre autorisds par 1’assembl6e des copropri6taires. 155 Ces
travaux comprennent, notamment, ‘apposition d’une plaque profes-
sionnelle, d’une enseigne commerciale ou d’un panneau publicitaire

152 Le copropridtaire r6calcitrant est mAme tenu de participer aux d~pen-
ses: Voir l’art. 442f C.c. qui replace la r~gle de l’unanimit6 par une r~gle de
majoritd.
153 Cet amdnagement pourrait avoir comme r6sultat la modification de la
destination de la partie commune. Mais comme cette modification est dgale-
ment votde h la majorit6 prdvue h l’art. 442f C.c. elle ne cause aucune diffi-
cult6, sauf si elle avait pour effet de porter atteinte h la destination de l’im-
meuble. Dans ce dernier cas, l’unanimit6 serait requise: art.442h C.c On peut
donner, comme exemple de cette situation, la d6cision de l’assembl6e h
l’effet de transformer une partie ou la totalit6 d’un jardin en terrain de
stationnement h la suite d’une augmentation du nombre de propri6taires
ayant une voiture h stationner; la destination de l’immeuble sera modifi6e
si les espaces verts entourant l’immeuble dtaient un motif ddterminant du
choix de l’appartement.

1 54A moins qu’il ne s’agisse de travaux de reconstruction ou de reparation

en cas de sinistre: Voir l’art.442f paraA C.c.

155 Art.25 de la Loi du 10 juillet 1965:

“Ne sont adoptdes qu’A la majorit6 des voix de tous les copropridtaires
les ddcisions concerant:
b) L’autorisation donnde ht certains copropridtaires d’effectuer bi leurs
frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect ext~rieur
de l’immeuble, et conformes A la destination de celui-ci.”

REVUE DE DROIT DE McGILL

[Vol. 24

sur un mur commtm150 et l’installation d’une v6randa,’6 d’un in-
terphone 58 ou d’une antenne r6ceptrice de radiodiffusion ou de
t616vision. 1 9 Au Qudbec, en l’absence d’une telle disposition, le co-
propri6taire doit s’assurer que les “travaux” qu’il eritend effectuer
respectent les dispositions des articles 441h et 442f C.c., de m~me
que celles de la ddclaration de copropridt6 d6terminant les condi-
tions d’utilisation des parties communes. Il peut donc subsister,
en l’absence de stipulations expresses de la d6claration h cet effet,
une certaine incertitude quant h la ndcessit6 d’obtenir l’autorisation
de l’assemblde des copropri6taires.

4. Les administrateurs

Cette 6tude du statut juridique des parties communes n’inclut
pas les problkmes relevant de l’administration de l’immeuble. Elle
se doit cependant de mentionner qu’aux termes de l’article 441v C.c.,
les administrateurs ont la charge de la conservation de l’immeuble,
de 1’entretien et de l’administration des parties communes suivant
leur destination. Les administrateurs sont donc appel6s, h ce titre,
A prendre des decisions qui lient les copropri6taires. 00 II en est ainsi
lorsque les administrateurs ddcident des travaux d’entretien n6-
cessaires A la conservation de l’immeuble.16’ De plus, parce que les
pouvoirs des administrateurs sont soumis aux pouvoirs de l’assem-
blde, conform6ment aux termes de l’article 441a C.c., le copro-
pridtaire doit se soumettre tant aux ddcisions des administrateurs
qu’h celles de l’assemblde dans le cas oil l’assemblde aura prdf6r6
r6server certains travaux h sa seute ddcision.

156Trib.gr.inst. Paris Ire Ch., 2 mai 1968, Gaz.Pal. 1968.102

(note Mo-
rand); Givord, Les travaux d’amdlioration et les charges de copropridtd, Gaz.
Pal. 1967.2.94; Morand, Principes et pratique du regime des travaux dans les
immeubles en copropridtd, Gaz.Pal. 1967.2.2; Civ. 3e, 22 mai 1973, Gaz.Pal.
1973.1.939.
‘ 57 Trib.gr.inst. Nice, 20 mai 1966, AJ.P.I. 1967, 122 (note Cabanac); Greno-
ble, Ire Ch., 13 oct. 1965, D.1966J.168 (note Givord) (dans ce cas, il s’agissait
d’une marquise).

‘ 5 8 Voir Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, no 581, n323.
‘r 9 Cabanac, La loi du 2 juillet 1966 sur Finstallation d’antennes rdceptrices
de radiodif-fusion, AJ.P.I. 1966, 688; Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32,
no 599, n463.

6OAu nombre de ces decisions, il faut compter les contrats de fournitures
accordds par les administrateurs, la garde juridique et mat6rielle de l’im-
meuble, et le maintien de l’immeuble en bon 6tat de propret6 (e.g., rempla-
cement d’ampoules, de vitres cass6es, nettoyage).

161 Voir les arts.441v, 442j, 4421 C.c. En France, les travaux d’entretien, de
rdparation, de r6fection ou de remplacement des parties communes sont dd-
cid6s par l’assemblde des copropritaires A la majorit6 simple. Le syndic
n’est qu’un organe d’exdcution.

1978J

LES DROITS ET OBLIGATIONS DES COPROPRITAIRES

235

Quant aux travaux d’entretien ou de conservation des parties
communes r~serv6s h la d6cision des administrateurs, ils compren-
nent, par exemple, les travaux de peinture des corridors ou des esca-
Hers, ceux de r6fection de la toiture, la souscription h un contrat
d’entretien de rascenseur1 62 et le remplacement du syst~me de
chauffe-eau devenu hors d’usage.1 3

Etant donn. ,que l’article 442f C.c., paragraphe 3 soumet h l’as-
semble les d6cisions portant sur des travaux d’am6ioration, de
transformation ou d’agrandissement des parties communes, les tra-
vaux tombant dans cette catigorie ne peuvent pas 6tre d~cid~s par
les administrateurs. En France, oti ce problbme de qualification
s’est pr6sent6 h plusieurs reprises,6 4 on consid~re que ila distinction
entre les travaux d’am6lioration et les travaux d’entretien est une
pure question de fait rdsolue, dans chaque cas, en fonction des
caract6ristiques et de la destination de l’immeuble, ainsi que du
niveau social et 6conomique des occupants. Ainsi, m6me s’ils corn-
portent le remplacement de mat6riaux, certains travaux peuvent
8tre qualifies de travaux d’entretien. 16 5 I1 en va de m~me des travaux
comportant des am61iorations dont le cofit est peu important.’63

Cette 6tude sommaire des pouvoirs rdserv6s aux administra-teurs
en vertu de l’article 441v C.c.’6 7 complete le tableau des restrictions au
droit de jouissance du copropri6taire sur les parties communes.
Celui-ci jouit, dans une large mesure, de la ohose commune de la
m~me mani~re que tout propri6taire indivis jouit d’un bien d4tenu
en commun. Cependant, les droits de jouissance du copropri6taire
d’un immeuble soumis au r6gime de la copropri~t6 par d~claration
est restreint, en outre, par la d6eclaration de copropri6td et les pou-
voirs de l’assembde des copropridtaires ainsi que des administra-
teurs.

16 2 Bouyeure, Le remplacement de l’ascenseur vdtuste dans l’immeuble en

copropridtd, AJ.P.I. 1970, 1078.

163 Civ. 3e, 25 mars 1971, D.1971.Somm.132.
16 4 Voir Kischinewsky-Broquisse, supra, note 32, nos 570 et ss.; Givord et

Giverdon, supra, note 33, nos 449 et ss.

165 Civ., 10 d6ec. 1963, Gaz.Pal. 1964.1.267 oi la Cour de cassation a d6cid
que le remplacement d’une chaudi re utilisant le charbon par une chaudire
utilisant le mazout constituait un simple acte d’administration.
166 I en serait ainsi de la pose de paillassons et de glaces dans les ascen-
seurs et de plinthes dans le hall d’entr6e ou du fait qu’un hall non repeint
depuis quinze ans soit lambriss6 et dot6 de plafonniers: voir Kischinewsky-
Broquisse, supra, note 32, no 570.
167 Pour une 6tude complete de la question, voir Laquerre, supra, note 18,
h la p.552; Comtois, supra, note 42, h la p.77; Rainville, La Copropridtd (Bill
29) Deuxiame partie: La ddclaration de copropritg, Cours de perfectionne-
ment de la Chambre des notaires (1970), aux pp.30 et ss.