Ou va l’arbitrage international ?
Philippe Fouchard*
Quoique sa souplesse complique Ia tfiche, il
est fort intrressant d’tudier les grandes ten-
dances de l’arbitrage du commerce interna-
tional, surtout depuis les r~formes en droit
canadien. D’un ctr, l’arbitrage suit une
grand’route. Le nombre de litiges confirs A
l’arbitrage ne cesse de croitre, engendrant une
concurrence entre les diverses juridictions.
Les conventions internationales et les r&
formes lgislatives se succdent, rendant rar-
bitrage dans le commerce international plus
efficace et accroissant son autonomie par rap-
port au droit interne. De l’autre c6t&, cepen-
dant, l’arbitrage emprunte 6galement des
chemins de traverse. La cohesion des op6-
rateurs, qui avait assur6 son succ~s, cade Ia
place A la confrontation d’int~r~ts difficile-
ment r~conciliables. Ainsi l’arbitrage se re-
trouve dans une impasse juridique, et sombre
dans les chicanes procdduri~res. Certes,
d’autres mrthodes de r~glement des diffe-
rends profiteront de cette incertitude, mais la
flexibilit6 de l’arbitrage devrait lui permettre
de surmonter ces difficult6s.
Although the flexibility of international com-
mercial arbitration complicates the task, it is
nevertheless interesting, particularly in light
of recent reforms to Canadian law on the sub-
ject, to examine the major characteristics of
this regime of dispute resolution. The num-
ber of disputes being referred to arbitration
continues to grow, giving rise to greater com-
petition among various jurisdictions. Inter-
national conventions and legislative reforms
have made arbitration in the international
commercial sphere more efficient and more
independent of national law. On the other
hand, international arbitration is at a cross-
roads: the cohesion of parties, which earlier
ensured the success of arbitration, is now
counterbalanced by the pressures of conflict-
ing interests which are only reconciled with
difficulty. Arbitration therefore finds itself in
a legal impasse, bound up in procedural dis-
putes. Other methods of dispute resolution
will undoubtedly benefit from this uncer-
tainty, but the flexibility of arbitration should
eventually enable it to overcome these
difficulties.
*
*
*
* Professeur A l’Universit6 de droit, d’ conomie et de sciences sociales de Paris, Professeur
invit6 A la Facult6 de droit de l’Universit6 McGill (Montreal). Ce texte est une version remani~e
et complrtle d’une conference donn6e A la Facult6 de droit de l’Universit6 de Montreal le 17
novembre 1988 et A la Facult6 de droit, section de droit civil, de l’Universit6 d’Ottawa, le 24
novembre 1988.
Revue de droit de McGill
McGill Law Journal 1989
McGILL LAW JOURNAL
[Vol. 34
Sommai’e
I.
La grand’route
A. L’largissement de la voie
B. L’aplanissement des obstacles
1.
2.
Les manifestations de faveur
Les r6sultats de l’effervescence
II. Les chemins de traverse
A. L’impasse juridique
B. La diviation processuelle
1. – La question posse a quelque chose d’incongru, et pour tout dire de
vaguement ridicule. L’image utilis~e sugg~re un d6placement, et j’entends
les bons esprits r6pondre : << mais ofA voulez-vous qu'il aille ? >> Nulle part!
L’arbitrage, m~me international, n’est ni un moyen de transport, ni un
voyageur…
En realit6, le titre choisi ‘a t6 pour permettre de d6crire une 6volution,
un mouvement, une sorte de dynamique du ph~nom~ne de l’arbitrage in-
ternational, et de le faire dans une vue prospective.
La m6thode prospective, appliqu~e au droit, ne manque pas d’int~ret,
en effet, lorsque l’on veut r6flchir sur le sens d’une institution, et prendre
quelque recul par rapport A la stricte technique juridique, qui nous rend A
la longue un peu myopes… En un mot, il s’agit, A partir des tendances
rcentes les plus significatives (et il faut 6videmment d~celer celles qui le
sont), de rechercher les germes des 6volutions futures, d’esquisser les mou-
vements de fond qui se dessinent et se poursuivront, et donc, en l’occurrence,
d’engager aussi une r6flexion sur ce que sera ou ce que pourrait 8tre l’avenir
de I’arbitrage international.
2. – La difficult6 d’une telle pr6vision est 6vidente, ne serait-ce que parce
que l’arbitrage est une institution essentiellement mall~able, dont ]a prin-
cipale caract~ristique est la souplesse. II implique donc la diversit6, et ne
se pr~te pas i l’id~e d’un o mod6le >. Grace i ses capacit~s d’adaptation, il
6volue rapidement, selon les besoins propres A telle r6gion du monde ou A
1989]
OUJ VA L’ARBITRAGE INTERNATIONAL?
telle branche d’activite. I1 est a meme de << rebondir> A tout moment, de
surmonter les crises qu’il traverse ou traversera.
3. – Pour r6duire l’incertitude des scenarios, A d6faut d’une limitation
geographique, il est opportun de se cantonner ici au seul arbitrage inter-
national. I1 s’agira, bien sir, non de l’arbitrage du droit international public
(entre sujets du droit des gens), mais de l’arbitrage dans le commerce in-
ternational, domin6 par le droit priv6, meme si les ttats ou leurs 6manations
participent souvent, de nos jours, comme operateurs, aux echanges eo-
nomiques internationaux. Quant A l’internationalit6 de l’arbitrage, sans s’in-
terroger davantage sur les crit&res possibles que l’on peut retenir pour la
definir l, il suffit de dire ici, A la suite de l’article 940.6 du Code de procdure
civile quebecois et de ‘article 1492 du nouveau Code de procedure civile
frangais 2, que l’arbitrage est international (< s'il met en cause des interets du
commerce international >>.
4. – Sera done exclue de notre reflexion, en principe, 1’6volution de l’ar-
bitrage en droit interne. Le destin de celui-ci, en effet, est tres intimement
li6 a. chaque systeme juridique. I1 depend de trop de variables pour autoriser
une quelconque synthese : parmi les facteurs decisifs, on notera entre autres
la faveur ou l’hostilit6 que lui montre chaque syst6me juridique, l’etendue
du contr6le judiciaire auquel il est soumis, ou l’importance de sa pratique
effective A l’interieur du pays en question…
La coupure entre l’arbitrage interne et l’arbitrage international ne peut
etre totale, cependant. Dans une certaine mesure, le sort de l’arbitrage in-
ternational depend du traitement reserve A cette methode de reglement des
differends dans les droits internes.
5. – On l’a bien vu au Canada et au Quebec 3. Dans les provinces de common
law, l’arbitrage a ete soumis A une tutelle judiciaire 6troite, inspiree du droit
‘Voir par exemple la liste des crit res alternatifs retenus par la Loi-type sur l’arbitrage com-
mercial international, 21 juin 1985, dans Rapport de la Commission des Nations Unies pour
le droit commercial international (CNUDCI/UNCITRAL) sur les travaux de sa 18e session,
Doc. off. AG NU, 40e sess., Supp. no 17, Doc. NU A/40/17 A ‘art. ler, parag. 3 [ci-apr~s Loi-
type de la CNUDC1].
Revue de droit McGill
McGill Law Journal 1989
2Dtcret no 81-500 du 12 mai 1981, J.O., 14 mai 1981, 1830, Gaz. Pal. 1981.1re sem.IUg.307.
3Sur le droit canadien de rarbitrage avant 1986, cf. notamment les ouvrages de J.E.C. Brierley,
<( International Trade Arbitration: The Canadian Viewpoint o, dans R.St.J. Macdonald, G.L.
Morris et D.M. Johnson, Ed., Canadian Perspectives on International Law, Toronto, U. of
Toronto Press, 1974 A la p. 826; L. Kos-Rabcewicz-Zubkowski, Commercial and Civil Law
Arbitration in Canada, Ottawa, U. of Ottawa Press, 1978 ; R.H. McLaren et E.E. Palmer, The
Law and Practice of Commercial Arbitration, Toronto, Carswell, 1982 ; P. Ferland, L'arbitrage
conventionnel, MontrEal, Thlme, 1983; J. Beguin, L'arbitrage commercial international,
REVUE DE DROIT DE McGILL
[Vol. 34
anglais, tandis qu'au Quebec, sous l'influence du droit frangais, la clause
compromissoire a te prohibee ou contestejusqu'A rintervention de la Cour
supreme du Canada, le 17 mai 19834. Ces facteurs n'ont pas favoris6 le
d6veloppement de la pratique de l'arbitrage. Meme si les entreprises ca-
nadiennes sont 6videmment amen6es i signer des clauses compromissoires
et A participer A des arbitrages internationaux, on devine que la situation
interne du Canada ne lui a pas permis de devenir une terre d'61ection pour
cette methode de reglement des diffrends.
Et lorsqu'en 1985, le fed6ral et les provinces ont decide de r6former
l'arbitrage 5, si la plupart de celles-ci ont adopte des regles specifiques pour
l'arbitrage international, ce ne fut le cas ni du Canada, ni du Quebec. Le
Code d'arbitrage commercial6 adopt6 par le premier a repris la Loi-type de
la CNUDCI, mais pour I'appliquer i tous les arbitrages relevant de la com-
petence feddrale. Le second, dans sa loi du 11 novembre 1986, s'est inspir6
de cet instrument et de la Convention de New York de 1958, mais sans les
reserver A l'arbitrage international, et a adopte les memes r6gles d'accueil
pour toute sentence rendue hors du Quebec, qu'elle l'ait t A 1'6tranger ou
dans une autre province 7.
Montr0al, Yvon Blais, 1987 etN. Antaki etA. Prujiner, 6d.,Actesdu ler Colloquesur l'arbitrage
commercial international, Montreal, Wilson et Lafleur, 1986 [ci-apr~s Colloque de Quebec
1985].Parmi les articles, voir notamment: L. Kos-Rabcewicz-Zubkowski, < Canada o (1977)
Yb. Comm. Arb. A la p. 16; M. Pomerleau, <(L'arbitrage interprovincial et international au
Canada: Aspects constitutionnel et l~gislatif)) [1985] Rev. arb. 373 ; J.E.C. Brierley, <(Overview
of International Commercial Arbitration in Quebec and in the Canadian Common Law Pro-
vinces >, dans Colloque de Quebec 1985, ibid. A ]a p. 273.
4Zodiak International Productions Inc. c. The Polish People’s Republic, [1983] 1 R.C.S. 529.
5Sur les r6formes canadiennes en g6n6ral, voir notamment: H. Alvarez, La nouvelle 16-
gislation canadienne sur l’arbitrage commercial international>> [1986] Rev. arb. 529 ; J.E.C.
Brierley, <(Canadian Acceptance of International Commercial Arbitration > (1988) 40 Me.
L.Rev. 287; E.C. Chiasson,
67 ; M. Lalonde, <
o Larbitrage commercial – D6veloppements lgislatifs )> (1987) 47 R. du B. 273; G. Cohen,
pson, UNCITRAL Arbitration Model in Canada, Toronto, Carswell, 1987.
6Introduit par la Loi sur l’arbitrage commercial, S.C. 1986, c. 22, sanctionn6e le 17juin 1986.
7Sur la r6forme qu6b6coise, r6alis~e par la Loi modifiant le Code civil et le Code de procedure
civile en matire d’arbitrage, L.Q. 1986, c. 73, sanctionn6e le 11 novembre 1986, voir notam-
ment: J.E.C. Brierley,
R. du B. 259, article paru en anglais sous le titre (Quebec’s New (1986) Arbitration Law >>, A
(1987) 13 Can. Bus. L.J. 58; A. Prujiner, <(Les nouvelles ragles de 'arbitrage au Quabec >
[1987] Rev. arb. 425 ; J.E.C. Brierley,
[1987] C.P. du N. 507 ; R. Tremblay, < Commentaires des articles du Code civil et du Code de
proc6dure civile en mati~re d'arbitrage >> (1988) 90 R. du N. 394, 536.
1989]
100 VA L’ARBITRAGE INTERNATIONAL?
Le 16gislateur qu6b6cois a donc souhait6 d6velopper la pratique de l’ar-
bitrage interne. En revanche, pour ceux des autres provinces, et particuli-
rement la Colombie britannique et l’Ontario qui peuvent avoir quelques
ambitions en ce domaine, il s’agissait exclusivement de se joindre, avec
retard, au grand mouvement contemporain, quasi-universel, de faveur A
l’gard de l’arbitrage international.
6. – C’est 1A une premi6re r6ponse A la question de savoir ofi va l’arbitrage
international. Elle est simple et 6vidente: il est encourag6 dans le monde
entier. Un v6ritable consensus se dessine i son sujet, pour assurer et ren-
forcer son succ~s comme instrument de r~glement des litiges du commerce
international. On peut m~me parler d’une v6ritable euphorie de l’institution
et, pour reprendre l’image sugg6r6e pour cette 6tude, on dira qu’il parcourt
une voie large et bien balis6e, une ( grand-route >>(I).
Mais, peut-atre pr6cis6ment i cause de ce succ6s, apparaissent en meme
temps des germes de crise, ou en tout cas de troubles. Des menaces pointent,
l’horizon se voile. L’arbitrage international emprunte aussi, aujourd’hui, des
<( chemins de traverse >(II).
I. La grand’route
7. – L’6volution de l’arbitrage international, depuis une trentaine d’ann6es,
incite i l’optimisme. II est devenu, de l’avis g6n6ral, la m6thode normale
de r6glement des differends du commerce international. Et il devrait le rester,
pour une raison fort simple: il n’existe pas, dans l’avenir pr6visible, de
v6ritable alternative A l’arbitrage, qui serait universellement praticable. En
l’absence de juridiction internationale de droit priv6, la circulation inter-
nationale des jugements rendus dans chaque Etat reste difficile. La justice
6tatique elle-m~me, lorsqu’elle est accessible, ne semble pas suffisamment
neutre aux yeux de la partie 6trang~re, et elle n’est pas toujours bien adapt6e
aux besoins propres du commerce international.
8. – Le succ~s de l’arbitrage international se manifeste de deux mani~res:
quantitativement, par sa pratique effective, toujours croissante, et qualita-
tivement, par l’am6lioration constante du statut qui lui est reconnu en droit
compar6 et international.
En d’autres termes, pour user de la m~me m6taphore, la voie a 6t6
61argie (A), et les obstacles aplanis (B).
A. L’largissement de la vofe
9. – Le d6veloppement de l’arbitrage international, depuis la fin de la
Seconde Guerre mondiale, est ais6ment quantifiable, et explicable. Un v6-
ritable < march6 >> pour ce << service >> s’est cr66, et il est en pleine croissance.
McGILL LAW JOURNAL
[Vol. 34
Cette croissance a pour premiere raison l’augmentation des 6changes
internationaux, qui ont atteint, A la fin des ann6es 70, la valeur annuelle de
2000 milliards de dollars am~ricains pour les seules exportations de mar-
chandises. Ce chiffre s’est ensuite stabilis6, en raison de la crise 6conomique,
mais, depuis plusieurs ann~es, il connait de nouveau une augmentation de
5 i 10% par an. A quoi s’ajoutent les 6changes < invisibles >> (services, trans-
ferts de technologie, etc.), qui repr6sentent un volume d’affaires de pros de
1000 milliards de dollars am~ricains. Ils traduisent bien, d’ailleurs, la di-
versification croissante des op6rations internationales, et la complexit6 des
relations juridiques engendr6es par la r6alisation des grands projets. II en
r~sulte 6videmment davantage de litiges.
Ceux-ci vont se multiplier 6galement en raison des bouleversements
6conomiques, mon~taires et politiques qui affectent le monde dans son en-
semble depuis une bonne quinzaine d’annfes. L’instabilit6 mon6taire d6-
coulant du flottement des monnaies et de leurs rapides variations, les
fluctuations tout aussi brutales du cours des mati~res premieres et, bien
entendu, les conflits politiques qui prolongent ces crises sont autant d’oc-
casions de nouveaux litiges dans l’ex~cution des contrats internationaux.
10. – Ces litiges vont donc donner lieu i des arbitrages plus nombreux que
par le pass6. En l’absence de statistiques globales, les chiffres donn~s par la
Chambre de commerce internationale, dont la Cour d’arbitrage est depuis
longtemps l’institution permanente la plus souvent sollicit~e en mati~re
internationale, sont tr~s rvlateurs. Alors que, dans les ann~es 50 et 60, on
estimait A environ une cinquantaine le nombre d’affaires nouvelles qui
6taient port~es chaque ann~e devant ce Centre d’arbitrage, c’est environ 300
nouveaux dossiers par an qui lui sont adress~s maintenant, et cela depuis
1984-19858. Grosso modo, le nombre d’arbitrages a donc
6t multipli6
par 6.
A une toute autre 6chelle, on trouve une tendance comparable aupr~s
du CIRDI 9, mis en place par la Convention de Washington de 196510. Pen-
dant plus de 15 ans, il n’a &6 saisi, en tout et pour tout, que de deux ou
sVoir les statistiques donn~es chaque annie par Y. Derains et S. Jarvin dans <( Cour d'arbitrage
de la Chambre de Commerce Internationale - Chronique des sentences arbitrales ), au Journal
du droit international [ci-apr~s Clunet], depuis 1974 (quatrime livraison de chaque annee).
9Centre international pour le r~glement des differends relatifs aux investissements. Sigle
anglais: ICSID.
'0Convention pour le r~glement des differends relatifs aux investissements entre Etats et res-
sortissants d'autresttats, 18 mars 1965, version anglaise A (1965)4 I.L.M. 532 [ci-apr~s Conven-
tion de Washington].
1989]
O VA UARBITRAGE INTERNATIONAL?
trois affaires. Depuis 5 ans, c'est environ deux ou trois nouveaux litiges qui,
chaque annre, lui sont soumist 1.
11. - Cette multiplication des litiges a engendr6 une inflation des <( ser-
vices >> propos6s sur le march6 pour les r6soudre, et specialement l’appa-
rition de tr~s nombreux centres d’arbitrage, destin6s i saisir une << clientele >>
en forte croissance, qui pourrait prrfrrer ceux-ci aux institutions en place.
On en a donc cr66 A Kuala-Lampour et au Caire, i Djibouti et A Chypre,
dans les Iles anglo-normandes et A Strasbourg, A Genrve, A Milan, A Los
Angeles, etc… Un systrme euro-arabe d’arbitrage a 61argi le premier Centre
franco-arabe. Paris, mais aussi Londres, New York et Houston, Gen~ve,
Zurich et Stockholm, pour ne pas parler de Hong-Kong, de Singapour, et
de bien d’autres villes ou pays, rivalisent d’initiatives en tous genres pour
attirer A eux les arbitrages internationaux 12. Dans cette course, le Canada
n’est pas en reste: apr6s le Centre de Vancouver, en Colombie-Britannique,
orient6 vers le Pacifique, il faut citer le Centre d’arbitrage commercial na-
tional et international du Qu6bec (C.A.C.N.I.Q.), cr66 en janvier 1987.
Les entreprises engag6es dans le commerce international –
les
(
d’un choix tr~s 6tendu de centres permanents.
Elles peuvent d’ailleurs pr6ferer l’arbitrage ad hoc, moins connu mais
souvent pratiqu6 entre contractants assez proches, et parfois moins on6reux
et plus rapide. La CNUDCI lui a donn6 les moyens d’un drveloppement
autonome et universel grace au Rtglement d’arbitrage qu’elle a adopt6 en
197613.
12. – De leur crt6, les grands cabinets d’avocats se sont 6quipes et specia-
lists, notamment sur les places ofi une importante activit d’arbitrage in-
ternational est apparue, comme New York, Londres, Paris, Gen~ve, Zurich,
etc. Pour les conseils des parties, les arbitres, le personnel des Centres d’ar-
bitrage, cette activit6 est, A tous 6gards, tr~s valorisante. Elle l’est 6videm-
ment aussi pour bien d’autres professionnels intervenant A des titres divers
A l’occasion des litiges, des procedures et des audiences : experts, traducteurs
et interpr~tes, secr~taires, h6teliers, transporteurs, etc.
“Sur ces chiffres, voir la chronique annuelle de E. Gaillard sur le CIRDI, au Clunet, depuis
1987 (lre livraison de chaque annie).
12Pour une premiere ide de la diversit6 de ces Centres d’arbitrage, voir par exemple la liste
de ceux qui ont adhdr6 A la Fdration internationale des institutions d’arbitrage commercial,
dans L. Kos-Rabcewicz-Zubkowski, Fdration internationale des institutions d’arbitrage
commercial ) [1987] Rev. arb. 408.
3fRglement d’arbitrage de la CNUDCI, 28 avril 1976, dans Rapport de la CNUDCI sur les
travaux desa 9esession, Doc. off. AG NU, 3le sess., Supp. no 17, Doc. NU A/31/17, reproduit
A (1976) 15 IL.M. 701.
REVUE DE DROIT DE McGILL
[Vol. 34
Ces diverses < retomb~es >> 6conomiques rattachees A la localisation de
1’arbitrage international expliquent en partie la concurrence exacerbfe qu’il
a suscit~e, et qui s’est traduite, notamment, par une sorte de surench~re des
r~formes 1gislatives, qui ont cherch6 A faciliter toujours davantage son
d~roulement, en ameliorant en m~me temps son efficacit6.
B. L’aplanissement des obstacles
13. – Sur la route de cette justice priv6e internationale, ceux-ci 6taient
nombreux : des lois nationales hostiles, des juges 6tatiques m~fiants ou in-
terventionnistes et, surtout, les embfiches bien connues du droit internatio-
nal priv6, soit la complexit6 de la solution des conflits de lois et la difficult6
de la circulation internationale des sentences.
Loin d’offrir une m6thode praticable pour le r6glement des litiges in-
ternationaux, l’arbitrage aurait pu 6tre –
le si6ge des pires
incertitudes : que l’on songe seulement A la multiplication des rattachements
1gislatifs et des contr6les judiciaires dont il pouvait etre l’objet…
ou rester –
Or, depuis trente ans, et surtout depuis dix ans –
il y a eu en notre
domaine une acceleration spectaculaire du mouvement –
tous les obstacles
existants ou potentiels ont
t aplanis. Les autorit~s 6tatiques, ensemble ou
s6parement, rivalisent de sollicitude A l’6gard de l’arbitrage international:
les manifestations de cette faveur sont aussi nombreuses (1) que sont spec-
taculaires les r~sultats de cette effervescence (2).
1.
Les manifestations de faveur
14. – Les manifestations de la faveur pour l’arbitrage international appa-
raissent aussi bien dans les conventions internationales que dans les lois et
la jurisprudence des Etats.
15. – Parmi les conventions internationales, il faut d’abord citer, 6videm-
ment, la Convention pour la reconnaissance et l’execution des sentences
arbitrales trangres, sign6e A New York le 10 juin 1958, et aujourd’hui en
vigueur dans 82 pays 14. Pour une convention de droit priv6, c’est un succ~s
tout A fait exceptionnel. II est d’autant plus remarquable que le mouvement
M4Consulterla List of Contracting States au leravril de chaque annie, publie parle Yearbook
of Commercial Arbitration, Deventer (Pays-Bas), tditions Kluwer [ci-apr~s Yb. Comm. Arb.].
1989]
O0 VA L’ARBITRAGE INTERNATIONAL?
d’adhesion n’est pas encore essoufl6: apr6s le Canada, en 198615 et la R-
publique populaire de Chine en 198716, c’est l’Algerie en 198817 qui rejoint
la longue cohorte des pays lies par cette Convention. Son ralliement est
significatif car c’6tait l’un des pays les plus reticents, pour des raisons po-
litiques, A une methode de r~glement des difrerends du commerce inter-
national souvent denoncee comme une exigence des pays industrialises,
incompatible avec les prerogatives inali6nables de la souverainet6 6cono-
mique des jeunes Etats. S’il subsiste un il6t de resistance A la Convention
de New York, il se trouve en Amerique latine18, oii il a 6t6 d’ailleurs en
partie contourn6, dans les relations latino-americaines, par l’adhesion de 10
Etats A la Convention de Panama de 1975, dont les dispositions reprennent
celles de New York19.
I1 serait fastidieux de citer ici toutes les autres conventions, bilaterales
ou regionales, qui ont egalement facilite l’accueil international des sentences
arbitrales, et ont meme 6dicte des regles materielles propres ‘i l’arbitrage
international: celle de Gen~ve, en 1961, qui lie aujourd’hui une vingtaine
d’Etats, la plupart europ6ens2 0, et celle de Moscou, en 1972, propre aux pays
du Conseil d’Aide economique mutuelle2 l, meritent cependant d’etre si-
gnalees. Enfin, dans le domaine specialise des litiges sur les investissements
internationaux, la Convention de Washington de 1965 a connu, elle aussi,
‘5Le Canada a adh&r6 a la Convention de New York par la Loi sur la Convention des Nations
Unies concernant les sentences arbitrales 6trangres, S.C. 1986, c. 21, sanctionn~e le 17 juin
1986. Toutes les provinces et territoires, entre 1985 et 1986, ont introduit simultan~ment dans
leur ordre juridique cette Convention, soit par une loi de mise en oeuvre ]a publiant en annexe,
soit, dans le cas du Qudbec, par une loi qui reprenait ‘essentiel de son contenu dans son Code
de procedure civile, soit enfin, dans le cas de l’Ontario, par la seule mise en application de la
loi-type de Ia CNUDCI, dont les articles 35 et 36 suffisent A r6gir raccueil dans cette province
des sentences arbitrales 6trang~res : International Commercial Arbitration Act, 1988, S.O. 1988,
c. 30, sanctionnfe le 8 juin 1988.
16Adh~sion le 22 janvier 1987. La Convention est entre en vigueur en Chine le 22 avril
1987.
l7Loi no. 88-18 du 12 juillet 1988 portant adhsion d la convention pour la reconnaissance
et l’exicution des sentences arbitrales gtrangres, adopite par la conference des Nations unies
ti New-York le 10 juin 1958, J. 0. Rep. alg&., 13 juillet 1988, 771.
IsSi le Mexique, le Chili, Ia Colombie, etc. sont lits par la Convention de New York, n’y ont
pas encore adhr , en effet, le Brfsil, le Venezuela, etc. Mais l’Argentine vient de le faire (le
14 mars 1989).
[1987] Rev. arb. 203, commentaire Ph. Fouchard, version anglaise A (1975) 14 IL.M. 336.
19Convention interam~ricaine sur l’arbitrage commercial international, 30 janvier 1975,
20Convention europtenne sur l’arbitrage commercial international, 21 avril 1961, 484
R.T.N.U. 349; sur cette Convention, voir notamment Ph. Fouchard, L’arbitrage commercial
international, Paris, Dalloz, 1965.
2 1 Convention sur le r~glement par voie d’arbitrage des litiges de droit civil resultant des rapports
quf naissent au cours de la cooptration 6conomique, scientifique et technique, 29 mai 1972,
[1973] Rev. arb. II1
(commentaire J. Jakubowski A la p. 59), version anglaise a (1974) 13
IL.M. 5, signfe A Moscou par huit tats du CAtM (sigle anglais: COMECON).
McGILL LAW JOURNAL
[Vol. 34
un tr~s grand succ~s, puisqu’elle est pr~sentement en vigueur dans pros de
cent pays2 2.
Bien entendu, une place speciale doit etre faite d~sormais A la Loi-type
de la CNUDCI, adopt~e en 198523, dont on a d6jA signal6 l’influence au
Canada. Elle se pr~sente comme un moyen d’harmonisation souple de Par-
bitrage international, puisque c’est simplement un module propos6 aux 16-
gislateurs nationaux, dont ils font l’usage qu’ils souhaitent, quand ils le
souhaitent 4. On a parlM A son sujet de soft law, puisqu’en elle-m~me la loi-
type n’a pas de force obligatoire, mais son influence directe et indirecte,
depuis trois ans, n’en est pas moins d~ji considerable, et aucune r~forme
de l’arbitrage international n’intervient d~sormais sans que ce mod~le ne
soit plus ou moins compl~tement pris en consideration.
16. – En effet, les r~formes lgislatives se succdent et se multiplient depuis
une dizaine d’ann~es.
Le point de depart peut 8tre fix h l’A rbitration Act anglais de 1979, et
les derni~res 6tapes connues sont les lois de Suisse, en 1987, et de Californie,
en 1988. Mais, pour avoir une vue g~n~rale de ce vaste mouvement, il
faudrait d’abord passer par tous les continents, de Hong Kong et Singapour
A la Floride et ‘Australie, en s’arrtant souvent en Europe 25 et sp~cialement
au Canada, puis ensuite relever la diversit6 des m6thodes utilis6es (de la
refonte complete en France, aux Pays-Bas, A de simples retouches en Italie,
en Autriche, en Allemagne, en Belgique), pour enfin marquer leurs diffteren-
ces quant aux techniques utilis6es et au degr6 de sp6cificit6 que toutes ces
lois reconnaissent ou non i l’arbitrage international 26.
“Supra, note 10; au 31 mars 1989, 97 Etats l’avaient sign~e, et 91 avaient d~pos6 leurs
instruments de ratification. Voir la liste pfriodiquement publi~e par le CIRDI dans News from
ICSID.
23Supra, note 1.
24Parmi les nombreux commentaires de cette Ioi-type, cf. notamment les rapports et com-
munications de G. Herrmann, <(The Uncitral Model Law on International Commercial Ar-
Its Salient Features and Prospects>> A ]a p. 351, J. Thieffry, <( Commentaire >> A la
bitration –
p. 379, L. Slade,
Pomerleau, << Commentaire > A la p. 419, dans Colloque de Qu~bec 1985, supra, note 3; S.
Jarvin, A [1986] Rev. arb. 509; Ph. Fouchard,
et aux travaux prfparatoires.
25Pour un inventaire, en 1985, de ces r~formes, voir G. Bernini, << Recent Legislations and
International Unification of the Law on Arbitration )>, dans Colloque de Qu6bec 1985, supra,
note 3 aux pp. 315 et s.
26Pour une 6tude plus complete de ‘ensemble de ces r~formes, voir Ph. Fouchard, Les
r~formes de l’arbitrage international en droit qu~bcois, canadien et compar, A paraltre en
1990, Universit6 McGill, Institut de droit compare, Centre de recherche en droit priv6 et
compar6 du Quebec.
1989]
O0 VA LARBITRAGE INTERNATIONAL?
445
17. – Et, avant ou A la place du 16gislateur, c’est la jurisprudence, dans
beaucoup d’Etats, qui exprime sa bienveillance A l’6gard de l’arbitrage in-
ternational. Ce fut le cas en France, dans les ann6es 60 et 70, oft la Cour
de cassation fixa, par une s6rie d’importants arrts, un certain nombre de
r6gles mat6rielles propres A l’arbitrage international 7. Ce fut et c’est encore
le cas aux ttats-Unis, ofi restent c616bres les grands arrts rendus par la
Cour supreme en mati6re d’arbitrage international, dans les affaires Prima
Paint Corp. c. Flood and Conklin Mfg. Co. en 196728, Scherk c. Alberto
Culver Co. en 197429, Mitsubishi Motors Corp. c. Soler Chrysler-Plymouth,
Inc. en 198530.
2.
Les r6sultats de ‘effervescence
18. – Les r6sultats de cette effervescence sont tout aussi impressionnants.
Le but poursuivi 6tait en effet bien clair: il fallait aplanir les obstacles qui
se dressaient sur la voie de l’arbitrage international, pour lui permettre d’&re
le moyen commode et universel de r~glement des litiges du commerce in-
ternational. Pour l’atteindre, et en simplifiant quelque peu, deux s6ries de
moyens ont W utilis6es.
19. –
l’instrument.
Il fallait d’abord, et de toutes les mani6res, renforcer l’efficacit6 de
Cela supposait que le domaine de l’arbitrabilit6 soit 61argi, que les
formes de la convention d’arbitrage soient lib6ralis6es, que la clause compro-
missoire soit valid6e, et qu’elle soit A l’abri de l’6ventuelle nullit6 qui frap-
perait le contrat oft elle est ins~ree.
27Arr~ts Gosset, A (1963) 52 Rev. crit. dr. int. pr. 615 (note H. Motulsky), J.C.P. 1963.11.13405
(note B. Goldman), D.1963.545 (note J. Robert); Galakis, A (1967) 56 Rev. crit. dr. int. pr.
553 (note B. Goldman), (1966) 93 Clunet 648 (note P Level), D. 1966.575 (note J. Robert),
J.C.P. 1966.11.14798 (note P. Ligneau), Ch. Carabiber, < Chronique sur un arrt>> [1966] Rev.
arb. 99; Impex, A D. 1972.37 (note D. Alexandre), (1972) 61 Rev. crit. dr. int. pr. 124 (note
E. Mezger), (1972) 99 Clunet 62 (note B. Oppetit), [1972] Rev. arb. 2 (note P. Kahn), et Hecht,
A (1972) 99 Clunet 843 (note B. Oppetit), (1974) 63 Rev. crit. dr. int. pr. 82 (note B. Level),
Ph. Francescakis, ((Le principe jurisprudentiel de l’autonomie de l’accord compromissoire
apr~s l’arr&t HECHT de la Cour de cassation > [1974] Rev. arb. 67. Pour leur consecration lors
de la r~forme frangaise de 1981, voir Ph. Fouchard, ( Sp~cificit6 de l’arbitrage international >>,
[1981] Rev. arb. 449, sp~cialement A Ia p. 461.
28(1967) 388 U.S. 385, (1968) 57 Rev. crit. dr. int. pr. 91, et l’article de E. Mezger, < Vers la
consfcration aux Etats-Unis de l'autonomie de Ia clause compromissoire dans l'arbitrage in-
ternational
(1968) 57 Rev. crit. dr. int. pr. 25.
29(1974) 417 U.S. 506, (1975) 64 Rev. crit. dr. int. pr. 643 (note H. Gaudemet-Tallon et D.
Tallon), [1975] Rev. arb. 213 (note P. Courteault).
30(1985) 473 U.S. 614, [1986] Rev. arb. 273, et l'article de J. Robert, oUne date dans 'ex-
tension de l'arbitrage international o [1986] Rev. arb. 173. Sur cette jurisprudence, voir no-
tamment, Th. E. Carbonneau,
nombreuses r6ferences.
REVUE DE DROIT DE McGILL
[Vol. 34
Cela impliquait aussi que l’arbitre soit comptent pour statuer sur sa
propre competence, et que le juge 6tatique, dans un meme temps, refuse de
connaeitre des litiges A propos desquels une convention d’arbitrage apparem-
ment valable aurait 6t6 conclue, et de se prononcer, avant l’arbitre, sur la
comp6tence de celui-ci. En revanche, le juge 6tatique apporterait son assis-
tance A l’ex6cution en nature de la clause compromissoire, en aidant, no-
tamment, d la constitution du tribunal arbitral.
Avec des particularit6s et des nuances diverses, on constate que les
conventions internationales, ainsi que les lois et la jurisprudence nationales,
consacrent effectivement ces principes, et donnent ainsi A ‘arbitrage inter-
national un caractere << op6rationnel > qui lui est indispensable.
20. –
II fallait ensuite qu’il acqui6re, face aux cadres 6tatiques, une auto-
nomie aussi large que possible, de maniere A 6chapper aux diverses con-
traintes qui r6sulteraient d’une intervention trop pesante des pouvoirs
16gislatif ou judiciaire.
Quant aux lois, il a
te de plus en plus souvent admis que la proc6dure
arbitrale pouvait, en matiere internationale, completement 6chapper aux
regles 6tatiques, pour n’tre soumise qu’d la convention des parties, aux
reglements priv6s d’arbitrage et aux mesures prises par les arbitres, et cela
Ala seule condition que soit toujours respect6 le principe du contradictoire 3t ,
regle universelle de justice naturelle. De meme, les arbitres ont te dispens6s
d’appliquer au fond du litige une loi 6tatique d6termin6e par la mise en
oeuvre d’un systeme de conflit de lois lui aussi d6termin6. La plupart des
r6formes r6centes consacrent d’abord la libert6 des parties de d6terminer
les r6gles de droit applicables au fond du litige, et, A d6faut d’un tel choix,
reconnaissent aux arbitres un tres large pouvoir pour d6terminer celles qu’ils
estimeront appropri6es, une place sp6ciale 6tant r6serv6e aux usages du
commerce.
Quant aux juges, leur intervention en cours d’arbitrage a ete exclue,
hors des cas limit6s ofi ils sont appel6s A preter leur concours A sa mise en
place. Leur contr~le est report6 en fin d’arbitrage, A l’occasion d’une 6ven-
tuelle instance en ex6cution ou en annulation de la sentence. Et dans une
telle hypoth6se, ils ne sont pas habilites pour proc6der A uhe r6vision de ]a
sentence, et donc A dire si les arbitres ont bien ou mal jug6. Seuls un certain
nombre de griefs, correspondant A de tr6s graves irr6gularit6s, sont rece-
vables: le juge 6tatique pourra v6rifier si les arbitres avaient bien comp6-
tence pour trancher ce litige, si la proc6dure arbitrale a respect6 le principe
du contradictoire et si la sentence ne heurte pas l’ordre public (souvent
compris dans l’acception plus 6troite qu’il connait en matiere internatio-
31AppelM 8galement le droit d’Etre entendu ou les droits de ]a defense.
1989]
O0 VA L’ARBITRAGE INTERNATIONAL?
nale). Parfois meme, le juge du lieu de l’arbitrage ne pourra connaitre d’une
demande d’annulation de la sentence, pour quelque motif que ce soit, si
aucune des parties A. l’arbitrage n’est ressortissante ou r~sidente de ce pays 32.
21. –
Telles sont, rapidement esquissdes, les tendances profondes de ce
mouvement tr~s g6n6ral de faveur a 1’6gard de l’arbitrage international. I1
n’est pas douteux qu’elles se maintiendront dans l’avenir. Les perspectives
seraient donc bien d6gag~es, et l’optimisme sur le destin de l’institution
s’imposerait, si, en meme temps, n’apparaissaient des facteurs de crise.
Serait-il victime de son succ~s ? En tous cas, au moment ofi l’arbitrage
international se voit ainsi universellement accept6 et encourage, il est me-
nac6 d’8tre ddtourn=6 de cette voie royale, bien balis6e, et risque de s’6garer
dans des chemins de traverse. Grandeur et dcadence ? A Rome, on disait:
< la Roche tarp~ienne est pros du Capitole... o
II. Les chemins de traverse
22. - Cette grande libert6 ainsi reconnue aux praticiens de l'arbitrage in-
ternational (qu'il s'agisse des entreprises et de leurs conseils, des Centres
permanents d'arbitrage ou des arbitres eux-memes) n'a de sens que si son
exercice est relativement harmonieux, si la disparition ou l'alldgement de
l'encadrement par les lois et les juges nationaux s'accompagne du maintien
ou du renforcement d'une certaine solidarit6 entre les op6rateurs, d'une
d~ontologie assez ferme pour que d'autres incertitudes, d'autres deborde-
ments, ne viennent pas se substituer aux anciennes contraintes 6tatiques.
En d'autres termes, l'autonomie de l'arbitrage international suppose une
certaine coh6sion professionnelle, voire socio-politique. C'est cette solidarit6
du ( milieu qui fut a l'origine du succ~s de l'arbitrage corporatif. Des
associations professionnelles representatives de toute une branche com-
merciale, comme la Grain and Feed Trade Association (GAFTA) ou la Fe-
deration of Oils, Seeds and Fats Association (FOSFA), d Londres, ont pu,
dans le passe, 6tablir les contrats-types des ventes internationales de c~r~ales
ou des produits ol~agineux, fixer ainsi les usages, et mettre en place un
Centre d'arbitrage pour les appliquer et les faire respecter. Dans un tel en-
vironnement, l'arbitrage n'est qu'un incident de parcours ; le litige est vite
tranch6, la sentence spontan~ment ex~cut~e, et les parties reprennent (si
32C'est le cas en Belgique, depuis une loi de 1985, et en Suisse, si du moins les parties ont
renonc6 d ce recours, depuis la Loifjdrale sur le droit international priv, 18 d~cembre 1987,
reproduite A [1988] Rev. arb. 194.
McGILL LAW JOURNAL
[Vol. 34
elles les avaient interrompues) leurs relations commerciales. C'est aussi dans
un tel contexte que la lex mercatoria peut se drvelopper 33.
23. - Or, cette coherence est remise en cause, pour diverses raisons.
D'abord, la crise 6conomique mondiale, apparue dans les annres 70, a
exacerb6 la concurrence et les antagonismes. Les grands contrats interna-
tionaux (notamment les marches publics) sont conclus A des prix extra-
mement tires. Les entreprises, aussit6t aprrs leur signature, sollicitent le
maitre de l'ouvrage pour obtenir des avenants d'augmentation, et A drfaut
ou en m~me temps, elles organisent drjA le contentieux ultrrieur, en prenant
acte de tout manquement du cocontractant, en systrmatisant les rrclama-
tions, etc. Le climat de 'exrcution du contrat s'en trouve vite drt6rior6, et
les abandons de chantier, justifi6s ou non, ne sont pas rares...
Dans les relations Nord-Sud, les 6carts de d6veloppement, les diver-
gences politiques, idrologiques, voire religieuses, sont de nouvelles sources
d'affrontement. L'intervention des autoritrs publiques des jeunes ttats, pour
recouvrer la maitrise de leurs ressources naturelles ou remettre en cause le
statut des investisseurs 6trangers provoque d'autres confrontations.
En outre, ces litiges mettent en jeu des int~rts financiers considrrables,
et des parties entre lesquelles la rupture est consommre, et 1'espoir d'une
reprise de leurs relations A jamais 6teint.
Un exemple presque caricatural, mais qui n'a rien d'exceptionnel, d'af-
frontement de ce type est donn6 par les litiges irano-am6ricains, actuelle-
ment soumis au tribunal arbitral de la Haye, institu6 par les Accords d'Alger
du 19 janvier 198134. Entre les entreprises amrricaines et les entit6s publi-
ques iraniennes, il n'y a pls rien de commun, nile langage (au propre et
au figur6), ni les valeurs : on a dit qu'il s'agissait d'un international cross-
cultural arbitration >>35.
Entendons-nous bien : tout arbitrage suppose ‘existence d’un litige, et
il serait nalf d’esprrer que la defense des intrr&s de chaque partie puisse
toujours se faire dans un climat d’harmonie idyllique… Mais si le differend
devient conflit, si l’incomprrhension est totale, la rupture irrmrdiable, alors
le pire est A craindre. Les pistes se brouillent ; au lieu de poursuivre sur sa
33B. Goldman, <(La lex mercatoria dans les contrats et l'arbitrage intemationaux: r6alit6 et
perspectives > (1979) 106 Clunet 475 ; Jacques B~guin, v Le drveloppement de la lex mercatoria
menace-t-il l’ordre juridique international ? > (1985) 30 R.D. McGill 478.
3En version anglaise a (1981) 20 I.L.M. 223. Voir B. Stem, dir., Le Tribunal des diffTrends
irano-amrricains, Ire Journee d’actualitt internationale, Paris, 19 avril 1984, Cahiers du Centre
du droit international de Nanterre (CEDIN), Nanterre, Universit6 Paris X, 1984.
35La formule est du Professeur amricain L6wenfeld ; elle est rapport6e par B. Stem, ibid.
1989]
O19 VA UARBITRAGE INTERNATIONAL?
grand’route, l’arbitrage est entrain6, soit vers une impasse juridique (A), soit
vers une d6viation processuelle (B).
A. L’impasse juridique
24. – Dans le climat d6grad6 qu’engendrent les nouveaux litiges, les parties
et leurs conseils ne sont plus d’accord pour laisser aux arbitres les tr~s larges
pouvoirs que le droit international et les droits nationaux leur ont reconnus.
La souplesse, d6sormais, fait craindre l’arbitraire.
25. – S’agissant du droit que les arbitres appliqueront au fond du litige,
les parties se m6fient de l’assouplissement de la m6thode conflictualiste, qui
permet de d6terminer librement la loi applicable, sans avoir A se r6ferer A
un droit international priv6 d6termin6. La recherche d’une << r~gle de conflit
appropri6e >>, ou la m6thode << syncr6tique >> consistant A utiliser concurrem-
ment les r~gles de rattachement de plusieurs syst6mes nationaux de conflits
de lois, deviennent suspectes, car ces nouveaux m6canismes laissent aux
arbitres une libert6 qui sera jug6e excessive.
A fortiori, les parties redouteront que ceux-ci puissent appliquer, sans
autre contrainte, les <( r~gles de droit >> qu’ils jugeront << appropri6es >>, car
elles pourraient 8tre puis6es dans n’importe quelle loi, A moins que les
arbitres ne les dcouvrent dans des principes g6n&aux du droit ou dans des
r6gles communes aux differents syst6mes juridiques en pr6sence. Cette sou-
plesse dans la d6termination des regles applicables est d6sormais consid6r6e
avec m6fiance, et meme les usages du commerce international ou les pr6-
c6dents r6sultant d’une << jurisprudence arbitrale >> deviennent des r6ferences
trop vagues. En un mot, toutes les composantes de la lex mercatoria de-
viennent suspectes. Alors qu’elles 6talent jusqu’ici le signe et le r6sultat
d’aspirations communes A une autre justice, fond6e sur des normes adapt6es
A des besoins propres du commerce international, elles apparaissent comme
autant de facteurs d’arbitraire.
26. –
II en va de meme, 6videmment, de l’amiable composition. Ce pouvoir
donn6 aux arbitres de statuer en 6quit6, en 6cartant les rigidit6s excessives
de la r6gle de droit, paraissait pourtant presque inh6rent A la m6thode ar-
bitrale. Si son objectif naturel, l’apaisement, disparait, l’amiable composi-
tion n’a plus de sens. Au contraire, puisqu’elle donne un suppl6ment de
libert6 aux arbitres, elle accentue l’incertitude sur les solutions A attendre
de la sentence, et provoque une intensification du combat.
27. – Enfin, le d6saccord redouble sur l’6ventualit6 d’une adaptation du
contrat A des changements de circonstances. I1 en est ainsi meme en pr6sence
de contrats internationaux complexes, liant les parties pour une longue du-
r6e, sans intention sp6culative, et comportant, express6ment ou implicite-
ment, une obligation de coop6rer de bonne foi. On aurait pu penser que
REVUE DE DROIT DE McGILL
[Vol. 34
l’arbitre, face A de profonds bouleversements de l’6quilibre du contrat, ait
le pouvoir de temp6rer les strictes cons6quences de l’adage pacta sunt
servanda >>, ou d’assouplir la notion et les effets de la force majeure. Un tel
pouvoir est lui aussi contest6 36.
28. – En un mot, le malentendu juridique est complet, et l’impasse fr&
quente. La finalit6 de l’arbitrage international, ses objectifs propres, c’est-
A-dire un r~glement juridique et 6conomique adapt6 aux besoins du com-
merce international, sont perdus de vue. Ou, plus exactement, ils ne ren-
contrent plus l’accord des operateurs, pourtant n~cessaire pour l6gitimer
cette autonomie. Cette impasse juridique est en r~alit6 la consequence pa-
radoxale d’une libert6 qui avait 6t6 largement reconnue aux praticiens, et
dont ceux-ci ne savent plus que faire.
29. – Elle est aussi l’occasion d’un combat acharn6 sur chacune de ces
difficiles questions de droit, dans un climat procedural degrad6.
B. La diviation processuelle
30. – La procedure arbitrale devrait 6tre simple, rapide, peu cofiteuse, et
d6barrass~e des lourdeurs et du formalisme qui caract6risent le dfbat ju-
diciaire. C’est ce que l’on enseigne, du moins, lorsque l’on pr~sente les
avantages de I’arbitrage par rapport au recours au juge 6tatique.
La r~alit6 d’aujourd’hui, pour ce qu’il est convenu d’appeler les
grands >> arbitrages internationaux, est bien differente. Linstance devient
un parcours sinueux, plein de d6tours impr6vus.
31. – Sit6t pr6sent~e la requate, le d6fendeur va contester l’existence ou la
validit6 de la clause compromissoire, aussi bien devant le Centre d’arbitrage
que devant les arbitres ou les juges 6tatiques. Les premieres decisions ren-
dues par les uns ou les autres seront elles-memes attaqu~es. L’exercice de
tels recours peut souvent, en droit ou en fait, paralyser la poursuite de
l’instance arbitrale.
La deuxi~me s6rie d’incidents surgit au moment ou A propos de la
constitution du tribunal arbitral. Le nombre d’arbitres (s’il n’a pas t pr6-
dtermin6 ou si les parties sont plus de deux), leur mode de designation, et
surtout leur 6ventuelle r~cusation seront l’objet de nouveaux affrontements,
devant l’organe institutionnel et devant le juge, simultan6ment ou
successivement.
36Sur le d~bat actuel, voir Ph. Fouchard,
par le CACNIQ.
1989]
O0 VA L2ARBITRAGE INTERNATIONAL?
Ce dernier peut egalement
tre saisi de demandes de mesures provi-
soires ou conservatoires, parfois utiles, parfois destinees a detourner encore
le cheminement normal de la proc6dure arbitrale.
32. – Quant A celle-ci, elle devient d’une lourdeur effrayante: plusieurs
echanges de memoires interminables, accompagnes de kilos de pieces ou de
metres de dossiers, une ou plusieurs expertises, des audiences de plusieurs
semaines, oii sont interroges et contre-interroges non seulement les temoins,
mais les experts et les jurisconsultes. Pour chacune des parties travaillent
et se presentent de nombreux avocats, consultants, traducteurs, experts en
tous genres…
Un tel acharnement procedural ne se serait pas generalis
sans Fin-
fluence, nefaste ci cet egard, des cabinets d’avocats americains, et de leurs
6mules en Europe. Le soin qu’ils apportent A l’6tude et A la preparation
d’une affaire est en lui-meme admirable. Rien n’est laiss6 au hasard; tous
les details sont verifies minutieusement, toutes les pi&ces recherchees et
discutees. Mais ces efforts 6normes, ces moyens considerables ainsi mis en
oeuvre ont pour premier resultat de noyer litteralement, non seulement
l’adversaire, mais surtout les arbitres sous une masse de pieces, d’argu-
mentations et de contestations. Ils perdent alors de vue l’essentiel, c’est-a-
dire l’appreciation du comportement d’ensemble des deux parties et la stricte
s6lection des principes juridiques qui devraient les conduire a degager les
lignes de force de leur decision.
te prepares en realit6 tous les moyens permettant
34. – Ce faisant, ont
d’attaquer ulterieurement la sentence ou de s’opposer A son execution. Les
voies de recours vont se multiplier: l’appel de la sentence, s’il est recevable
(et meme s’il ne l’est pas…), le recours en annulation contre celle-ci et les
recours contre la decision de reconnaissance ou d’execution de la sentence.
Comme celles-ci peuvent etre recherch6es dans plusieurs pays a la fois, il
n’est pas rare que des proc6dures post-arbitrales parall6les se deroulent en
meme temps, et aboutissent a des decisions contradictoires.
Ainsi, dans la fameuse affaire du Plateau des Pyramides, le jour meme
oii, en 1984, la Cour d’appel de Paris annulait la sentence arbitrale rendue
en France en 198337, le President du Tribunal de district d’Amsterdam la
declarait executoire aux Pays-Bas38. Apres d’autres arrets rendus dans la
meme affaire, un nouvel arbitrage est en cours devant le CIRDI, qui a donne
37Paris, 12 juillet 1984, RNpublique arabe d’Egypte c. Southern Pacific Properties Ltd, (1985)
112 Clunet 129 (note B. Goldman), [1986] Rev. arb. 75, et Ph. Leboulanger, <&ttat, politique
et arbitrage - L'affaire du Plateau des Pyramides >> [1986] Rev. arb. 3.
38D~cision du president du tribunal du district d’Amsterdam, 12juillet 1984, Southern Pacific
Properties (Middle East) Ltd. de Hong Kong c. Rpublique arabe d’tgypte, [1986] Rev. arb.
101.
McGILL LAW JOURNAL
[Vol. 34
lieu 5 une premiere sentence sur la comp6tence, en 1988. La procedure est
donc loin d’etre terminee…
Elle ne durera peut-8tre pas autant que celle qui oppose une entreprise
frangaise i la R6publique de Yougoslavie depuis une sentence rendue en
te executee, malgr6 les tres nombreuses d6-
1956, et qui n’a toujours pas
cisions rendues, en Suisse, aux Pays-Bas et surtout en France depuis une
trentaine d’annes39.
Ce ne sont lIA que deux exemples. II y en aurait bien d’autres, tout aussi
revelateurs de l’intensit6 du combat que se livrent encore les parties apres
la sentence.
35. – Uissue de ces procedures est constamment diferee, et leurs cofits de
plus en plus deraisonnables…
36. – Telles sont les autres voies –
m~nent – qu’emprunte aussi l’arbitrage international.
dont on ne sait, A vrai dire, oO elles
Le tableau de ces impasses, de ces deviations, a sans doute ete noirci,
ou plut6t trop systematise. S’il n’est que partiel, il est, dans cette mesure,
exact. Car il est vrai que les utilisateurs de l’arbitrage ont mesuse de ]a
liberte qui leur avait ete reconnue, et il est vrai qu’aujourd’hui, les aspi-
rations des praticiens en matiere de justice arbitrale sont contradictoires.
37. – D’ofi cette double evolution, elle-meme fort contrastee, et la grave
incertitude qui affecte l’avenir de l’arbitrage international.
On aurait attendu que ce mouvement dialectique du succes et de l’6chec
engendre une phase de synthese, qui transcende ces contradictions et d6-
bouche sur une harmonie, au moins provisoire. Or, cette synthese parait
aujourd’hui irrealiste. On ne voit pas se dessiner les bases d’un rapproche-
ment, ou d’une nouvelle etape.
I1 est tres probable que l’arbitrage ne deperira pas, bien au contraire,
38. –
ne serait-ce qu’en raison de l’accroissement des litiges et faute de concur-
rence vraiment serieuse.
On verra cependant se developper ce que les Americains appellent les
o methodes alternatives de reglement des differents >> (Alternative Disputes
Resolution: ADR). La conciliation, la mediation, la procedure du mini-trial
sont appelees A faire de nouveaux adeptes. Uinfluence de ]a mentalit6 des
gens d’affaires d’Extrfme-Orient (Japon, Chine…) se fera sans doute sentir
en faveur de methodes de reglement des litiges plus proches de ]a pacification
39Voir en dernier lieu, Cass. civ. lMre, 18 novembre 1985, [1987] Rev. arb. 159 (note J.-L.
Delvolv), (1987) 114 Clunet 120 (note B. Oppetit).
1989]
9 O VA L’ARBITRAGE INTERNATIONAL?
que de l’affrontement. Ce serait un retour aux sources de l’arbitrage, car
celui-ci a toujours v6hicul6 cet ideal d’apaisement et de transaction.
I1 est 6galement probable que certains op6rateurs du commerce inter-
national regarderont de nouveau vers les palais de justice, du moins dans
des contextes bien d6finis. Lorsqu’une organisation judiciaire nationale a
des traditions de s6rieux et d’impartialit6, lorsque ses juges sont disponibles,
adaptables, lorsque les entreprises en cause sont 6tablies dans des pays cultu-
rellement et juridiquement proches et lorsque les contrats internationaux
les liant sont relativement classiques (vente, agence commerciale, etc.), les
parties consid6reront sans doute qu’en fin de compte ces magistrats pro-
fessionnels leur apportent des garanties d’ordre personnel et institutionnel
bien comparables a celles des arbitres.
Mais ces ph6nomanes de rejet resteront limit6s.
39. – Ce qui est aussi fort probable, c’est que l’arbitrage international perde,
s’il l’ajamais eu, tout caractare monolithique, univoque. Il faut r6p6ter cette
6vidence : par nature, cette m6thode est flexible, malleable. Elle est en me-
sure de s’adapter A. de nouveaux besoins, d’engendrer de nouvelles pratiques,
voire – on peut raver… – une nouvelle dontologie. En tous cas, l’arbitrage
ne peut se couler, surtout en matiare internationale, dans aucun modale.
Au contraire, il est appel6 6 se diversifier de plus en plus. Les arbitrages
corporatifs, les plus nombreux, conserveront leur < clientle > et leur iden-
tit6. L’arbitrage international non specialis6, celui des << grands contrats >>,
6voluera entre deux p6les: l’affrontement et la pacification.
Et si l’on est vraiment tras optimiste, on peut esp6rer que la crise actuelle
sera passagare, que les entreprises se lasseront de gaspiller tant d’argent, de
temps et d’6nergie dans des combats sans fin. Mais, pour les juristes, ceux
d’aujourd’hui et de demain, est-ce vraiment une conclusion optimiste ?