McGILL
LAW JOURNAL
VOLUME 9
MoNTEA&IL, 1963
NUMBER 4
UNE NOUVELLE LUGISLATION:
LE NANTISSEMENT COMMERCIAL
Roger Comtois*
“La Loi relative au nantissement commercial”‘ ajoutant au Code civil les
articles 1979e / 1979k, a 6t6 sanctionne et mise en vigueur le 11 avril 1962.
CHAIRra
IV
Du Nantissement Commercial
1979e. Cclui qui a qualit6 de commer~ant
peut nantir en garantie d’un pr~t qu’il con-
tracte, pour un terme n’exc~dant pas dix ans,
de l’outillage et du mat6riel d 6quipement
professionnel tout en en conservant la garde.
I1 a alors, envers Ic cr6ancier, les obligations
d’un emprunteur des effets nantis, sans avoir
droit a des frais de garde ou de conservation.
1979f. Ce nantissement doit 6tre constat,
par acte sign devant notaire ou devant deux
tmoins.
Les biens nantis doivent 6tre 6num~r~s dans
Ic corps de l’actc et chacun d’eux doit 6tre d~crit
d’une fa~on precise, afin de l’individualiser par
rapport aux autres biens de mme nature.
L’acte indique 6galcment Ic lieu of’ les biens
ont leur attache fixe on, s’ils sont susceptibles
d’6tre d.plac~s, Ic lieu de l’6tablissement dans
la province oti Icurs d~placements sont or-
donnts et constat~s.
1979g. L’acte doit etrc enregistrc par d6-
p6t an bureau d’enregistrement de la division
du lieu dont la mention est prescrite a l’article
pr&c~dent.
Au cas de changement de lieu pour un autre
lieu en dchors de la division d’enregistrement,
Ic renouvellement de l’enregistrement au bu-
reau de la nouvelle division d’enregistrement
doit 8tre fait dans les trois mois.
CHA=rBR IV
Of Commercial Pledge
1979e. A person carrying on a commercial
business may pledge, as security for a loan
which he contracts, for a term not exceeding
ten years, machinery and equipment pertaining
to his business, while retaining possession
thereof. He shall then have, towards the
creditor, the obligations of a borrower of the
effects pledged, but shall not be entitled to the
cost ofpreservation and care.
1979f. Such pledge must be evidenced by
a deed signed before a notary or before two
witnesses.
The things pledged must be enumerated in
the body of the deed and each must be de-
scribed in a precise manner, so as to distinguish
it from other things of the same kind.
The deed shall also indicate the place where
the things are permanently located or, if they
are susceptible of being moved, the location
of the establishment in the Province where
their movements are controlled and recorded.
1979g. The deed must be registered by
deposit in the registry office of the division
of the place the mention of which is required
by the preceding article.
If that place is changed for another outside
the registration
the registration division,
must be renewed within three months at the
office of the new registration division.
*Notairc; Professeur 1 la Facult6 de Droit de l’Universit6 de Montreal.
210-11 Eliz. II, S.Q. 1961-62, c. 57 (sanctionne le 11 avril 1962).
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[Vol. 9
L’cnregistremcnt ne conserve le privilage
du cr~ancier que pour dix ans de sa date ou
de son renouvellement.
1979h.
Le registrateur doit tenir un index sp&ial de
ces enregistrements et de leurs renouvellements.
I& privilege du crfancier nani en
application du present chapitre subsiste si le
bien qui est grevc devient subs~quemment
immenuble par destination.
Ce privilage a Ic rang de celui du crfancier
gagiste. Cependant, il n’cst pas opposable au
locateur A i’gard des sommes dues A ce dernier
avant la notification du nantissement.
1979i. Au dffaut de l’emprunteur de rem-
plir ses obligations, I cr~ancicr pent, sans
prejudice de tout autre recours,
1. contraindre l’emprunter I lui livrer, sur
demande, les biens nantis;
la faSon pr~vuc a l’article 1671a.
2. vendre ces bi~ns i l’enchire, apris avis de
1979j.” Huit jours apras la vente, le crian-
cier esr ten de rendre compte du produit de la
vente A l’emprunteur et de remettre tout surplus
restant entre ses mains apras acquittement de
Ia derte et des frais de vente.
1979k. Larticle 1979d s’applique an nan-
tissement vis8 au prsent chapitre.
3. La pr~sente loi entre en vigueur Ic jour
de sa sanction.
The registration preserves the privilege of
the creditor for only ten years from its date
or that of its renewal.
The registrar shall keep a special index of
such registrations and renewals.
1979h. The privilege of the creditor under
this chapter subsists if the thing pledged
subsequently becomes immoveable by destina-
tion.
Such privilege ranks with that of a pledgee.
It cannot, however, be set up against the
lessor with respect to sums due him before
notification of the pledge.
1979i.
In case of default of the borrower
the creditor may,
to fulfil his obligations,
without prejudice to any other recourse,
1. oblige the borrower to deliver to him,
on demand, the things pledged;
2. sell the same at auction after notice in
the manner provided in article 1671a.
1979j. Eight days after
the
creditor is obliged to account to the borrower
for the proceeds of the sale and to remit any
surplus remaining in his hands after payment
of the debt and of the costs of sale.
the sale,
1979k. Article 1979d applies to the pledge
contemplated by this chapter.
3. This act shall come into force on the
day of its sanction.
Depuis longtemps certains juristes souhaitaient l’adoption d’une telle lkgisla-
tion.2 Cette loi constitue plut6t un essai que certains jugeront timide. Nous
croyons n~anmoins qu’il s’agit d’une loi importante. D6ji, les commergants
veulent recourir a cette mesure et Ies praticiens font leurs premiers essais de
r~daction et de mise en application de- cc mode de flnancemcnt. C’est encore
la p iode de rodage. Comme le nantissement commercial s’annonce d6ja comme
une mesure qui r~pond I des besoins, nous croyons qu’il importe de nous pen-
cher sur cette lgislation pour essayer d’en pr~voir toutes les cons6quences.
La premiere impression qui se d~gage de cette loi est bonne. Le langage de
la loi nous parait correct. Les rdacteurs de ces textes ont pr~f&r s’inspirer de
la lgislation frangaise plut6t que de tenter de traduire, comme la chose s’est
trop souvent r pIte ici, des textes de droit statutaire anglo-saxon. Bien que
les lois frangaises ne couvrent pas toujours les m~mes cas, puisqu’en France il
n’existe pas de gage commercial gnral, mais certaines formes de nantissement
sans d~possession, notamment de l’outillage et de l’6quipement professionnel, 3 et
des fonds de commerce, 4 nous croyons que le 16gislateur qu’becois a eu une
inspiration heureuse en empruntant au droit frangais, lequel est beaucoup plus
prs du n6tre que le droit anglais. Quant au fonds, les ajustements ncessaires
‘e.g. Marc Briare, “La propri&6 mobilire et Ic commerce” (1958) 18 R. du B. 169; Gerald LeDain,
“‘Security upon movable property in the Province of Quebec” (1956) 2 McGill L. J. 77.
3Loi du 18 janvier 1951.
4Loi du 17 mars 1909.
No. 4]
LE NANTISSEMENT COMMERCIAL
n’ont pas toujours & faits, nous pourrons le constater dans les observations
qui suivent.
Jusqu’ici, le credit mobilier du commergant &ait plut6t limit6: A moins
d’incorporer son entreprise, pour pouvoir emprunter suivant la Loi des pouvoirs
sp&iaux de certaines corporations 5 on d’avoir recours A certaines mesures
sp~ciales comme celles que pr&voit la Loi des banques,6 le commergant, ne
pouvant donner en gage son 6quipement et son outillage, sans s’en d~poss&der,
6tait priv6 d’un moyen de financement vraiment efficace. I1 est vrai que le com-
mergant, lorsqu’il &ait propri&aire de ses immeubles, pouvait les hypothequer
‘hypoth~que est une forme de credit a long terme
A la sfret6 d’un pr&t, mais
qui ne convient pas toujours aux gens de commerce et, souvent, les 6I6ments
mat&iels et mobiliers d’un commerce qui ont une grande valeur au point de
vue &onomique, demeuraient des facteurs inertes au point de vue credit. Tout
nous laisse croire que le nantissement commercial aura beaucoup de popularit6
dans les milieux financiers, commerciaux et industriels.
Nous allons d’abord nous demander dans quels cas il peut y avoir lieu a
nantissement commercial. Nous dirons ensuite quels sont les droits et les obli-
gations des deux parties A ce contrat: le d~biteur ou constituant et le prfteur
ou cr~ancier gagiste.
Le premier article du chapitre IV (art. 1979e) pose les conditions d’appli-
cation de la loi: “Celui qui a qualit6 de commergant peut nantir en garantie
d’un pr~t qu’il contracte, pour un terme n’exc~dant pas dix ans, de l’outillage et
du matriel d’Equipement professionnel tout en en conservant la garde.” Comme
cette loi en est une d’exception, du fait qu’elle permet le gage sans depossession,
nous croyons qu’elle doit recevoir une interpr&ation restrictive. Cette norme,
qui nous parait juste en tout ce qui a trait A la d~finition de ce gage, A sa consti-
tution et aux conditions de son existence, nous paralt encore plus certaine
lorsqu’il s’agit d’appr&cier les droits et les obligations de l’emprunteur et
du prateur.
Seul le commer~ant peut avoir recours a ce mode d’emprunt et a cette sfiret&.
C’est la qualit6 du constituant qui compte et non celle du cr~ancier. Ainsi, un
non-commergant peut prater a un commer~ant et obtenir de ce dernier un nan-
tissement de son 6quipement. Cependant, rien n’exige que le commer~ant
emprunte pour les fins de son commerce. Il peut contracter un emprunt pour
une fin personnelle et en garantir le remboursement par le gage des 6lments
matriels de son commerce. C’est dire que le contrat de nantissement commercial
n’est pas n&essairement un contrat commercial ou un contrat mixte. La diff&
rence est importante, surtout en matiare de preuve.
A notre avis, le mot commergant doit 8tre ici pris dans son sens le plus large.
II comprendrait l’industriel et I’artisan, m~me s’ils ne sont pas au sens strict
des commergants. I1 ne semble pas que le lgislateur ait voulu exclure les indus-
6S.R.Q. 1941, c. 280.
CS.R.C. 1952, c. 12, arts. 88 er s.
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[Vol. 9
triels et les artisans. Du reste, Ia version anglaise paralt plus gen~reuse que le
texte fran~ais: “A person carrying on a commercial business. .
.” Cette inter-
pr&ation est aussi renforc& par l’emploi des mots equipement ProfessionneI.
L’artisan et 1industriel n’ont-ils pas pr6cis~ment un 6quipement professionnel
au m~me titre que le commergant? Rappelons ici qu’aucune difficulte ne peut
se soulever au sujet du cultivateur, puisque celui-ci peut, depuis deja au-dela
de vingt ans, utiliser le nantissement agricole, donner en gage ses animaux et
les produits de son exploitation, tout en en conservant la garde. Quant aux
compagnies, personnes morales, nous estimons que, conform~ment au droit
commun, elles peuvent comme les personnes physiques, emprunter suivant ce
mode.
Les mots “…
en garantie d’un proc qu’iI contracte…” excluent, A notre
avis, le cautionnement r&l. Ce gage ne peut donc 6tre constitu6 pour garantir
la dette d’un tiers et un tiers, commergant ou non, ne pourrait pas, au moyen
de cette seret6, garantir la dette d’autrui. Le caractare commercial du gage
qui, en droit frangais, a lieu lorsqu’il est constitue “… soit par un commersant,
soit par un individu non commergant pour un acte de commerce” (art. 91, C.
com.), ne suffit pas a lui scul i autoriser ce gage sans d~possession. Mais, rien
ne s’oppose A ce que ce nantissement ait lieu pour garantir une dette antrieure
du commergant, surtout parce que le dbiteur pourrait de toute fagon reconnaltre
sa dette, la nover et, par la suite, engager son patrimoine mobilier. Comme
nous l’avons signalk plus haut, le commergant peut, par ce truchement, assortir
d’une garantie une dette qui n’a rien A voir avec son commerce. C’est la qualit6
de commergant de l’emprunteur qui, seule, compte. A cet 6gard, la loi frangaise
du 1 janvier 1951 est bien diffrente puisqu’elle permet l’hypoth~que mobilire
pour faciliter I’acquisition d’outillage et d’6quipement professionnels, A l’ex-
clusion de toutes autres fins, en dornant ces effets en gage au vendeur ou au
bailleur de fonds, et parce que ce gage doit 8tre constitu6 lors de l’acquisition
des objets, oi, ensuite, dans un d~lai tras court. La loi pr&ise que cette sAiret6
r&lle peut &tre donn& en garantie d’un pret. C’est du reste la scule justification
de ce nantissement sans d~possession. II ne vaudrait pas pour garantir une
obligation de faire ou de ne pas faire. Ainsi, pour prendre un exemple qui ne
manque pas d’actualit6, un propri~taire d’une station de service, pourra donner
son outillage et son quipement en garantie du remboursement d’un emprunt,
mais non pour sanctionner l’obligation qu’il aurait contracte de ne pas vendre
d’autres produits que ceux de tel ou tel fournisseur.
Les mots “outillage et materiel d’&quipement professionnel” sont calques
de la loi frangaise. Ne sont pas susceptibles de nantissement les marchandises
destin&s A la revente, les cr~ances ou dettes de livres, les biens incorporels, les
immeubles, m~me les immeubles par destination. L’article 1979h pr&ise que
le privikge du cr~ancier nanti subsiste si le bien grev devient subs~quemment
immeuble par destination. Cette reserve permettra de r~gler les conflits 6ventuels
entre le cr~ancier gagiste et le crancier hypoth&caire, quant aux m~mes biens.
La loi frangaise du 18 janvier 1951 est encore plus explicite a ce propos: comme
No. 4]
LE NANTISSEMENT COMMERCIAL
mesure de publicit6, la loi frangaise prvoit qu’une plaque indiquant le nantis-
sement doit atre fixe sur l’objet du gage.
La loi actuelle n’autorise pas le nantissement de biens futurs. Pour le per-
mettre, il aurait fallu une disposition expresse, comme le pr~voient la Loi des
pouvoirs spciaux de certaines corporations7 et les articles du Code civil sur
le nantissement agricole. L’interpr~te doit, en l’absence de dispositions sp&iales,
recourir aux r~gles g~nrales, lesquelles excluent le gage portant sur des biens
futurs. C’est une autre application de la r~gle d’interpr~tation restrictive que
nous avons signale an d6but.
Le gage de la chose d’autrui n’est pas radicalement nul. En effet, l’article
1966a du Code civil, ajout6 au Code de 1888, 6dicte que: “Les articles 1488,
1489 et 2268 s’appliquent au contrat de nantissement.” Nous le r~p~tons ici,
une r~gle concernant le gage en g6n&al doit aussi s’appliquer au nantissement
commercial, A moins d’une drogation expresse. L’article pr~cit6, 6tablissant
une analogie entre le gage de la chose d’autrui et la vente de la chose d’autrui,
reconnait la validit6 du gage de la chose d’autrui dans les cas suivants: a)
quand le constituant qui n’est pas propriftaire de l’objet gag6 an moment du
gage, en devient ensuite le propri&aire, b) en mati res commerciales et c) dans
le cas de la chose perdue on vol&.8
Quelles sont les conditions de validit6 de forme du nantissement com-
mercial? Le l~gislateur devait pr~voir ici un moyen simple d’ex&ution du gage,
un moyen qui fut conforme aux usages du commerce. Par ailleurs, il fallait bien
pr~voir l’ex&ution d’un instrument, d’un &crit, puisqu’il est question d’enre-
gistrement du nantissement commercial. Alors que le gage ordinaire n’est assu-
jetti A aucune condition de forme et que l’&crit n’est pas absolument essentiel,
le nantissement commercial requiert 1’ex&ution d’un &rit. Cet &rit peUt ftre
sign6 devant notaire -soit par acte en minute, soit par acte en brevet- ou
devant deux t~moins. Cet &rit doit comporter une designation pr&ise des
biens nantis et doit indiquer quel est leur lieu d’attache fixe (art. 1979f C.c.).
Pour les biens qui n’ont pas ce point de repare, soit les biens susceptibles d’tre
deplac~s, v.g. des camions on des v6hicules-moteur, il faut que l’acte 6nonce
“le lieu de 1’6tablissement dans la province oA leurs d~placements sont ordonns
et constat~s” (art. 1979f C.c.). Ainsi, A dfaut d’attache physique, il faut
considrer
‘attache intellectuelle, c’est-A-dire le lieu de 1’exploitation de
l’entreprise, le si~ge social d’une compagnie ou la succursale d’oi 6manent les
directives concernant le mouvement de ces biens mobiliers. Ces exigences
expliquent d’une part l’impossibilit6 pour un commergant de donner en gage
les 616ments incorporels de son entreprise et, d’autre part, la n&essit6 pour
celui qui veut se pr~valoir de ces dispositions d’avoir dans la province de
Quebec, une place d’affaires oA seront fix~s les biens donns en gage on d’oa
viendront les ordres de d~placement des biens susceptibles d’&tre d6plac~s.
7Article 22.
8Albcrt Mayrand, “Le nantissement de la chose d’autrui” (1943) 3 R. du B. 313.
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En fait de meubles corporels, la possession fair presumer le juste titre (art.
2268 C.c.), et elle sert de mode de publicite’ . l’6gard des memes biens. Or
comme le nantissement commercial a lieu sans d~possession, il devenait imp&
rieux d’assurer une publicit6 efficace, un moyen de d~noncer aux tiers cette
situation juridique. Dans le gage ordinaire oil il n’y a pas de dfpossession,
aucune publicit6 n’est ncessaire: il n’y a pas IM d’ambiguite sur le titre du
possesseur. L’enregistrement du nantissement commercial est n’cessaire. L’ar-
ticle 1979g pr~voit cet enregistrement qui doit se faire au lieu d’attache des
biens ou A Yendroit d’oi 6manent les ordres de dfplacement de tels biens. On
prfvoit aussi le renouvellement de l’enregistrement pour le cas de changement
de lieu des biens nantis.
II est prescrit que l’acte doit 6tre enregistr& par dep6t (art. 1979g). Il r&
sulte de cette exigence que: a) l’enregistrement par bordereau est exclus, vu le
deuxi~me paragraphe de l’article 2131 du Code civil qui 6nonce que: “Toute
disposition prescrivant que l’enregistrement se fait par d~pbt exclut l’enre-
gistrement par bordereau.” b) Que, pour etre recevable a l’enregistrement,
l’acte doit 8tre pr~sent en deux copies authentiques, s’il s’agit d’un acte notarie
en minute, ou en deux exemplaires s’il s’agit d’un acre notarie en brevet ou
d’un acte sous seing priv6; c) cet acte, s’il n’est pas en forme authentique,
doit 6rre au pr~alable prouv6 comme un bordereau, c’est-A-dire par l’assermen-
tation de l’un des deux tbmoins qui ont assist6 A son execution. A notre avis,
la mention que Ie nantissement peut 8tre constat6 par acte signe devant deux
t~moins, n’exclut pas la preuve par l’affidavit de l’un des deux tmoins.
La Loi du nantissement commercial ne pr6voit pas l’enregistrement de cet
acte en fonction des immeubles. I est dit simplement que le registrateur doit
tenir un index spcial de ces enregistrements et de leur renouvellement (1979g,
par. 4e). Comme l’on exigeait d6ja’ la designation des immeubles dans les baux,
bien que le contrat de louage d’immeuble ne soit pas translatif de proprift6
et dans le nantissement agricole (art. 1979b), nous croyons qu’il est regrettable
qu’une pareille d~signation n’ait pas 6t6 aussi requise dans le cas du nantisse-
ment commercial. L’index pr~vu ici deviendra inefficace avec le temps, A cause
de la multiplicit6 des inscriptions, A moins d’etre complr
au moyen d’un
index sur fiches. Pourrait-on n~anmoins enregistrer le nantissement commercial
contre un immeuble, de fagon a ce qu’il soit report A l’Index aux immeubles?
Rien ne s’y oppose, d’autant plus que l’objet du gage ne peut, A routes fins
pratiques, devenir immeuble par destination a l’6gard d’un cr~ancier hypo-
th~caire, comme nous le dirons plus loin. A cc propos, il importe de signaler
que les cr~anciers hypoth~caires et les acqu~reurs de droits rels immobiliers
ne peuvent plus se fier uniquement ‘ l’Index des immeubles: les immeubles par
destination qui se trouvent achets ott alikn~s peuvent avoir 6t6 dCii. l’objet
d’un nantissement commercial et ainsi atre soustraits A l’hypothque
lans le
cas de pr~rs, ou etre grev~s d’un nantissement qui sera opposable .x
tiers
acqureurs.
No. 4]
LE NANTISSEMENT COMMERCIAL
La loi du 11 avril 1962 ne pr~voit aucun mode de radiation du nantissement
commercial. II y a donc lieu de suivre le droit commun de 1’enregistrement et
de produire, pour obtenir la radiation, un document conforme aux exigences
de l’article 2151 du Code civil. Le consentement A la radiation sera fait par acte
notari6 on par acte sous seing priv6, sign6 devant deux t~moins, dont un
. que les deniers ont ftE pay~s en tout ou en partie,
attestera sous serment “..
et que ce temoin a vu signer la quittance, le ccrtificat de lib&ation on le con-
sentement A la radiation, par la partie qui l’a donn6.” (art. 2151 C.c.). Quant
A la radiation 16gale, qui pourrait s’op&er par le seal ‘coulement du temps et
par la dchfance du droit, il n’en est gu~re plus question. Nous estimons nfan-
moins que l’article 2081a du Code civil devrait s’appliquer ici. Apr~s l’6coule-
ment d’une p~riode de trente ans, sans renouvellement, la cr~ance sera p&ime
et pourra 8tre radi& sur simple demande de l’int&ess6, pourvii que cette de-
mande soit faite par acte authentique, conform~ment 1 Particle 2157 du Code
civil. Comme l’enregistrement n’est cens6 conserver le nantissement commercial
que pour une p&iode de dix an,
il serait souhaitable qu’un mode de radiation
16gale soit pr~vue pour l’annulation de tout nantissement commercial enregistr6
depuis au-del. de dix ans et qui n’a pas 6t6 l’objet d’un renouvellement.
L’enregistrement du nantissement commercial est un enregistrement ordi-
naire qu’il y a lieu de traiter a tous points de vue comme l’enregistrement d’un
droit r&l immobilier et auquel on appliquera les principes g~n&aux formulas
au titre XIII du Code civil consacr6 A P’enregistrement des droits r&ls. Entre
les parties, le gage commercial sera pleinement efficace, m8me sans enregistre-
ment. Les privileges que pent exercer le cr~ancier A l’6gard du d~biteur, soit
pour 6tre prf& sur le prix, soit pour vendre les biens A I’ench&e, ne seront
pas paralys&s par I’absence d’enregistrement, toujours A l’gard des parties
elles-m~mes. Les tribunaux ont deji statu6 que si un cr~ancier hypoth&aire
intente une action hypoth&aire sans allguer ni 6prouver l’enregistrement de
sa cr~ance, le d6biteur sera n6anmoins condamn6 A d~laisser l’immeuble hypo-
thequ. 9 C’est I ‘6gard des tiers que l’enregistrement prend toute sa significa-
tion: le cr&ancier gagiste ne saurait opposer son droit aux autres cr~anciers
privil~gi&s ou hypoth~caires, s’il n’a d’abord fait consigner son privilege au
registre.
Quels sont les effets du nantissement commercial A l’6gard du constituant?
Le d~biteur conserve la garde des choses nanties. C’est l’616ment nouveau de
cette institution et ce qui la distingue du gage de droit commun. C’est d’ailleurs
ce qui peut faire rechercher ce mode de credit, puisque le commer~ant pouvait
difficilement recourir au gage otdinaire oi la d~possession est une condition
essentielle. Le constituant est assimilk A un emprunteur. Ce terme a remplac6
avec avantage l’expression “d~positaire” qui se trouvait dans Pancienne
legislation concernant le nantissement agricole. Comme on l’a soulign6, le
d~positaire, ne pouvant se servir de la chose sans le consentement du propri6-
eChaPut v. Hfbtrt (1932) 53 B.R. 47; Banque Canadinne Nationale v. Lachance (1933) 54 B.R. 344.
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[Vol. 9
taire, eftait par la lettre meme du Code, place dans une situation tout A fait
impraticable. 10 Ce n’est que par analogie que 1’on compare la situation du
debiteur i celle de 1’emprunteur, puisque, de fait, le constituant est demeur6
propriftaire de la chose. Or la situation d’un emprunteur n’est pas identique A
ceIle d’un propriftaire, celui-ci pouvant plus normalement 8tre consider6
comme un pr~teur. Aussi; P’article 1764 du Code civil ne peut valoir en cette
matiere: le debiteur est tenu de toute det6rioration et de toute perte subies par la
chose, que ce soit par sa faute ou par cas fortuit. Quant aux obligations de
1’emprunteur ou du constituant, elles sont dcrites aux articles 1764 et suivants
du Code civil. I1 doit veiller sur la chose en bon pere de famille. I1 peut certes
s’en servir.
Les droits du creancier gagiste sont tras consid~rables. I1 peut revendiquer
la chose, la vendre et exercer A son 6gard les droits propres au creancier privi-
16giC, soit le droit d’8tre prefer6 sur le prix et le droit de suite. Voyons comment
se ralisent concrftement ces differents droits.
Le creancier gagiste peut, suivant 1’article 1979i C.c. contraindre l’emprun-
teur 1 lui livrer, sur demande, les biens nantis. Point n’est ne’cessaire d’avoir
enregistr6 le nantissement pour exercer cette revendication, puisque, comme
nous l’avons soutenu plus haut, l’enregistrement n’est pas une formalite neces-
saire entre les parties elles-memes. Le vendeur d’une chose non pay&e peut
aussi revendiquer l’objet, mais son droit est assujetti a des conditions assez
onereuses, 6numres dans l’article 1999 C.c. Aussi, lorsqu’n vendeur d’outil-
lage ou d’6quipement professionnel n’est pas pay6 par le commer~ant acquereur,
vaudrait-il mieux transformer cette cr~ance en un pr8t et accorder un nantisse-
ment au vendeur qui pourra ainsi revendiquer beaucoup plus facilement, au
cas oil l’acqureur serait en dfaut.
Le creancier peut, d’aprs l’article 1979i, “… vendre ces biens a l’ench&re,
apres avis de la fagon pr~vue A l’article 1671a.” I1 ne serait pas necessaire que
le cre’ancier fasse vendre par les soins d’un encanteur. La loi lui permet de
vendre et il doit rendre compte du produit de la vente A l’emprunteur (art.
1979j). La rf&ence A l’article 1671a oil il est question de la procedure suivie
par les bijoutiers qui font vendre les objets non reclames dans les trois ans de
leur d6p6t, precise les formalits relatives a l’avis que le cr6ancier gagiste doit
donner. Cet avis doit 6tre adress6 sous pli recommand6 au propriftaire et publi6
dans un journal, deux semaines avant le jour de la vente. C’est 1A une vente
extra-judiciaire oil la procedure est beaucoup plus expeditive que dans le gage
ordinaire alors que, a moins de stipulation contraire, le creancier doit d’abord
obtenir un jugement du tribunal competent.
Dans le gage ordinaire, les parties peuvent convenir que le creancier pourra
disposer du gage, s’il n’est pas pay6 de sa crEance. “Une telle convention,” dit
Mignault, “serait licite et au fond ne serait qu’un ifiandat ordinaire. Mais il
faut que la stipulation soit expresse et non equivoque, et on ne saurait l’etendre
‘0Langlois, “Ugishation qu~b~coise”
(1942) 2 R. du B. 80.
No. 4]
LE NANTISSEMENT COMMERCIAL
-.- pr~s avis publi6 dans les journaux.”‘
au-delA de ses termes. Ainsi, si le cr~ancier est autoris6 A vendre le gage sans
suivre les formalit~s prescrites par la loi, il faut d&ider s’il devra faire faire
la vente publiquement, aux ench~r-
Nous ne croyons pas que la vente de gr6 A gr6 sans avis soit permise dans le
nantissement commercial. En droit frangais, la defense est beaucoup plus
cat~gorique, puisque le deuxi~me paragraphe de l’article 2078 du Code Napoleon
6dicte que: “Toute clause qui autoriserait le cr~ancier I s’approprier le gage
ou A en disposer sans les formalites ci-dessus est nuUle.” M~me si le Code civil
de la province de Quebec n’est pas aussi explicite, nous croyons que les articles
concernant le nantissement commercial, &ant de droit exorbitant du droit
commun, doivent s’interprter en faveur du d~biteur. Les r~gles du gage ordi-
naire s’appliqueront il est vrai, mais seulement s’il n’y a pas de conflits et s’il
s’agit d’une mesure qui favorise le d~biteur. Comme Particle 1979i pr&cise que
les biens doivent dtre vendus A l’ench~re et qu’une procedure exp~ditive est
permise, nous ne croyons pas qu’il soit possible de droger de quelque fa~on
que ce soit au mode d: vente pr~vue.
La dation en paiement de l’objet nanti est prohibe. L’article 1979k 6nonce
en effet que l’article 1979d s’applique au nantissement commercial. Or, dans
le nantissement agricole,
‘article 1979d d&r&e clairement qu’il ne peut &tre
convenu qu’A d6faut de paiement le cr~ancier sera propriftaire de l’objet.
Lorsqu’une meme personne est A la Lois titulaire d’une cr~ance hypoth&aire
et d’un nantissement commercial, la clause de dation en paiement valablement
stipulee dans l’hypothque pourra
tre exerc&e par le cr~ancier hypoth&aire
m~me sur les biens qui sont devenus immeubles par destination, car l’article
1979h ne peut &re invoqu6 que si le cr~ancier nanti n’est pas 6galement un
cr~ancier hypoth&caire. La solution est toutefois moins certaine s’il s’agit de
biens qui 6taient dej! immobilis~s lors du nantissement et que le cr6ancier a,
par la designation oii en est faite dans l’acte, considr6 comme nantis plut6t
que comme b.en-s nypothqu~s.
Le crancier gagiste est muni d’un privikge. L’article 1994 contenant la
liste des privileges mobiliers place celui du cr~ancier gagiste au quatri.me rang,
apr~s les frais de justice et les d~penses faites dans l’int&t commun, la dime et
la cr~ance du vendeur. Ce privilege est d’un caract&re assez particulier. Les
privilkges ne r~sultent que de la loi (art. 1983 C.c.). Ici, pourtant, le privilkge
rsulte de la convention. Ce serait en quelque sorte un privilge que la loi
accorde a celui qui, par convention, a obtenu un gage. Comme le droit de
preference presuppose un concoufs entre diffirents cranciers, et que, vis-a-vis
les tiers, le nantissement commercial ne peut valoir que s’il a 6t enregistr6, la
prfrence ne sera vraiment assur& que par l’enregistrement.
Quelle est alors la situation du cr~ancier gagiste A 1’6gard des cr~anciers
chirographaires, des autres cr~anciers privil~gi~s et des cr~anciers hypoth&aires.
11Droit civil canadien, t. 8, p. 414.
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Le creancier gagiste est pr~fr6 au simple cr~ancier chirographaire. Aucun
doute 1 ce propos si le gage a &e d~pos6 au bureau d’enregistrement. Si ce gage
n’a pas 6t constat6 A l’enregistrement, il a quand m~me son effet i 1’6gard des
cr~anciers ordinaires puisque l’article 2094 du Code civil stipule pr&isement
que: “Les cr~ances privil~gies non enregistr&s ont leur effet A l’6gard des
autres cr~ances non enregistres, suivant leur rang ou leur date et sont prifJrles
aux simples creances chirowraphaires.” 12
Pour connaltre exactement le rang qu’occupe le privilege du creancier
nanti, vu la n&essit6 de l’enregistrement, il faut distinguer suivant que le
nantissement a & enregistr ou non. II faut aussi rappeler ici que Penregistre-
ment des droits r&ls mobiliers n’a pas lieu, en principe. Ainsi, aucun des pri-
vilages mentionn~s dans 1’article 1994 n’est assujetti a l’enregistrement. C’est
seulement pour le nantissement commercial que cette formalit’ est prescritce.
Si la cr~ance du gagiste a 6t d~pos&e A l’enregistrement, elle viendra au qua-
tri~me rang. A dfaut d’enregistrement, la cr~ance, quoique pr~fir&e aux creances
chirographaires, ne sera colloque qu’apras tous les privileges enum’r&s dans
l’article 1994.
Le paragraphe 2 de 1’article 1979h pr&ise que ce privilage “… n’est pas
opposable au locateur a l’6gard des sommes dues A cc dernier avant la notifica-
tion du nantissement.” Cette notification au locateur paralt donc essentielle.
L’enregistrement ne constitue pas une dnonciation suffisante au propriftaire ct
Particle 1620 du Code civil qui d~finit l’objet sur lequel porte le privilage du
locateur subsistera. La cr~ance du vendeur a, en principe, priorit6 sur celle du
gagiste. Toutefois, cette cr&ance du vendeur est assujettie A des conditions
tr~s strictes. Le vendeur non paye doit exercer la revendication dans les huit
jours de la livraison (art. 1999 C.e.), et si la chose est vendue pendant l’instance
en revendication, et si le vendeur a donn6 un terme ou s’il n’est plus dans les
d~lais, alors la cr~ance du vendeur subsiste, mais elle prend rang apras celle
du locateur et du gagiste (art. 2000 C.c.). Un conflit peut aussi avoir lieu entre
deux cranciers gagistes des m~mes objets. Nous estimons alors que le premier
qui aura enregistr6 sa cr~ance aura priorit6 sur l’autre. Si, par hypothase, les
deux nantissements ont & d~pos~s A l’enregistrement au meme instant, il
nous semble juste de colloquer ces deux cr~anciers ensemble, par concurrence.
C’est cc qui se produit dans le cas d’hypoth~ques, suivant l’article 2130 C.c.,
et nous croyons que la m me solution doit valoir ici.
Il n’y a pas de conflit possible entre les droits d’un creancier hypothcaire
et ceux d’un crancier gagiste, puisque ces deux cr~ances ont un objet totalement
different: pour le cr~ancier hypoth&aire, l’immeuble, et pour le cr~ancier
gagiste, les biens mobiliers. Les seuls biens a la fois susceptibles d’hypothaque
et de gage commercial sont les meubles qui deviennent immeubles par destina-
tion. Dans ce cas, comme il a 6t signalM plus haut, “c’est le crancier gagiste
qui a priorit&: l’article 1979h stipule bien clairement que le privilege subsiste
2
Lcs iraliques sont de I’auteur.
No. 4]
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meme si le bien qui est grev6 devient subsequemment immeuble par destination.
Pour faire valoir son privilkge, le crancier nanti devra avoir prealablement
enregistr6 sa crEance, car le droit de preference ne peut 6tre maintenu sans
enregistrement, a 1’encontre des hypoth~ques et privilges, enregistr~s on non.
Pour ces motifs, il est bien Evident que les cr6anciers titulaires d’un droit r&l
soit sur l’immeuble, soit sur l’outillage, doivent examiner la situation hypo-
thcaire des biens sur lesquels ils veulent obtenir une set
r&lle. Ainsi celui
qui se propose de faire un nantissement commercial doit s’assurer que les im-
meubles par destination ne sont pas dej! hypoth~qu~s en faveur d’un cr~ancier
hypothcaire. Quant au cr~ancier hypothcaire, il lui importe aussi de s’assurer
que les meubles qu’il espIre voir transformer en immeubles par destination
pour ftre l’objet de sa garantie, n’ont pas 6t6 l’objet d’un nantissement commer-
cial diment enregistrE. Les biens mobiliers acquis apr~s
‘hypothque, suscep-
tibles de devenir thoriquement immeubles par destination, demeurent meubles,
s’ils ont 6t6 l’objet d’un nantissement.
Le privilege comporte, comme deuxi~me attribut essentiel, le droit de suite.
Le cr~ancier peut ainsi exercer une saisie revendication entre les mains d’un
tiers d~tenteur. Encore ici, l’enregistrement joue un r6le de premiere impor-
tance. Le premier paragraphe de l’article 2268 6non~ant que la possession d’un
bien matriel fait prEsumer le juste titre se trouve neutralis6 par les effets de
1’enregistrement. L’acqu~reur d’un bien corporel, qui a pu 6tre l’objet d’un
nantissement commercial, doit consulter le registre sans quoi il s’expose A
l’6viction.. Ajoutons que les articles 2127 et suivants trouvent ici leur applica-
tion. Le transport d’une cr~ance ainsi garantie et la subrogation aux droits
d’un crancier nanti doivent 6tre l’objet d’un enregistrement et d’une significa-
tion, pour etre pleinement opposables aux tiers.
Pour terminer, nous croyons qu’il est intressant de faire une Etude compa-
rative entre les droits du cr~ancier hypoth&aire et ceux du titulaire d’une
cr~ance assortie d’un nantissement commercial. L’immeuble, objet de 1’hypo-
thque, ne peut etre d~plac6, en principe du moins. Aucun renouvellement de
la cr~ance hypothcaire n’est requis avant l’arrive du terme de la prescription.
Par contre, le privilkge du cr~ancier nanti peut facilement s’6vanouir, an cas
de d~placement des biens dans une nouvelle division d’enregistrement s’il n’y
a pas renouvellement de l’enregistrement. Pensons par exemple, au nantissement
d’un fonds de commerce emm~nag6 dans un nouveau local, dans une autre
division d’enregistrement. Ce danger peut 8tre diminuE au moyen d’une clause
prohibant le d~placement des biens, sans l’assentiment du cr~ancier, sous peine
de rendre la crkance imm~diatenment exigible. Dans la legislation fran~aise, au
cas de d~placement des objets du gage, un avis doit etre donn6 par le d~biteur
lui-m~me.
Lorsque le commerant, constituant du gage, est seulement locataire des
licux oil il exploite son entreprise, certains 6v~nements peuvent tre d~sastreux
pour le cr6ancier. Supposons par exemple la rEsolution du bail pour quelque
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cause que ce soit. Au strict point de vue Economique, les biens nantis devien-
dront improductifs et le cr~ancier pourra avoir beaucoup de peine a recouvrer
sa cr~ance. Si d’autre part le commerrant est propriftaire de l’immeuble oiN il
exploite son commerce et qu’il y a a la fois un nantissement et une hypoth’que,
il importe de bien distinguer les deux droits quant a leur assiette respective;
encore davantage si le crancier est dans les deux cas la m~me personne. Si
rhypoth~que est realis&e” et l’immeuble adjug6 a un tiers, A moins qu’il y ait
eu opposition A fin de charge, le local pourra parfois
tre relou6 A un autre
commergant. Supposons, par exemple, le cas d’un local oil se trouve un h6tel
ou une auberge. Le nantissement n’inclut pas le droit au bail et le creancier
ne pourra pas exiger le maintien du bail des lieux. Une stipulation de dch~ance
du terme peut aussi avoir son utilit6 pour pr~venir le cas de saisie des biens
non gages, puisqu’alors une d~pr~ciation du commerce pourra r~sulter de cette
execution, au prejudice tant du d6biteur que du cr~ancier gagiste.
Malgr6 les imperfections que nous avons cru devoir signaler dans cette
lgislation et les faiblesses que la pratique ne manquera sfirement pas de r~vler,
nous croyons que cette loi marquera une 6tape importante dans l’histoire du
crfdit mobilier. Le nantissement commercial n’exclut pas la formule jusqu’ici
employ&e: I’ali~nation fiduciaire. Rien n’empeche un cr~ancier de se porter
acqu&eur des biens sur lesquels il veut exercer sa garantie et de laisser la pos-
session de ces m~mes biens A l’emprunteur qui est ainsi en mesure de continuer
son exploitation. Mais ce systame n’est pas sans danger. Les tiers qui transigent
avec celui qui est en possession des biens obtiennent un bon titre. Ce danger se
trouve 6cartE par le nantissement commercial et c’est pour cette raison que
nous estimons- que cette formule pr6sente beaucoup plus de sfret que l’ing6-
nieuse alienation fiduciaire. Le. nantissement commercial repr~sente d’ailleurs
des avanrages qui pourraient 8tre accord~s m~me A des non-commergants,
notamment pour l’achat et le financement des voitures automobiles. Cette
premiere exprience invitera sans doute le l~gislateur a de nouvelles tentatives,
quand la premiere aura fair ses preuves.